La fin de la paix et de la sécurité en Europe


Par Martin Sieff – Le 30 octobre 2018 – Source Russia Insider

s258J’ai couvert la signature du Traité sur les forces nucléaires intermédiaires (INF) en décembre 1987 lors du sommet de Washington DC, entre le président américain Ronald Reagan et le dernier président soviétique Mikhail Gorbatchev. C’était un bon moment à vivre de couvrir la diplomatie entre les superpuissances nucléaires. Il y avait un sentiment palpable d’optimisme sur le fait que les deux parties étaient résolues à détruire des milliers d’armes thermonucléaires – ce qu’elles ont fait – et à réduire les tensions en Europe.

The Death of Peace and Security in Europe

En quelques années, Gorbatchev devait également accepter la dissolution du pacte de Varsovie. L’Union soviétique a été démantelée de manière pacifique par ses pays membres, dirigés par la Russie peu de temps après.

La négociation et la signature du traité INF était un préalable indispensable à la fin de la guerre froide. Cela a inauguré deux générations de paix et de stabilité en Europe. Suite aux déclarations du président Donald Trump le 20 octobre 2018, le traité est maintenant mort debout. Le président semble déterminé à s’en retirer. Il semble être totalement sous l’influence de son troisième conseiller à la sécurité nationale, John Bolton, dont la haine pour l’INF comme pour tous les accords de contrôle des armements, à l’instar de ses collègues néo-conservateurs, a toujours été plus qu’incompréhensible.

Les Démocrates au Sénat ne feront pas non plus la moindre tentative de défense, de préservation ou de restauration de l’INF. John Kerry, dernier sénateur à prendre au sérieux les accords importants sur le contrôle des armements, a présidé sans aucune objection publique à l’encontre les États-Unis et de l’Union européenne, au renversement, par une révolution violente, d’un gouvernement élu démocratiquement et pacifiquement en Ukraine en février 2014.

La subordonnée de Kerry, Victoria Nuland, alors secrétaire d’État adjointe aux Affaires européennes et eurasiennes et épouse du chef du clan néo-conservateur Robert Kagan, a littéralement distribué des biscuits dans les rues de Kiev pour assurer, aux révolutionnaires violents qui subvertissaient le processus démocratique, que l’administration Obama était avec eux.  Ni Kerry ni son propre président, Barack Obama, n’ont levé le petit doigt pour contrecarrer le comportement d’une haute responsable qui, dans n’importe quelle autre administration de l’histoire américaine, aurait été virée sommairement et bannie de toute discussion sérieuse et de la conduite des affaires publiques à vie.

Aujourd’hui, tous les sénateurs démocrates de Capitol Hill cherchent passionnément à diaboliser la Russie pour des crimes imaginaires et paranoïaques qui auraient fait rougir Joe McCarthy.

La moisson actuelle de sénateurs démocrates au Congrès, dirigée par des personnalités telles que Ben Cardin du Maryland, semble au contraire déterminée à provoquer une guerre thermonucléaire à grande échelle avec la Russie. Ils ont non seulement soutenu, mais insisté, pour une nouvelle série de sanctions financières féroces à l’encontre de la Russie, qui ont clairement pour objectif de ruiner l’économie du pays et la mettre en condition pour le type de changement de régime révolutionnaire que les administrations successives ont pris pour acquis de droit divin depuis que Ronald Reagan est entré à la Maison Blanche.

Les jours actuels sont bien différents de ceux qui ont vu Washington célébrer la signature du traité INF en 1987. À cette époque lointaine, les décideurs américains faisaient au moins semblant de consulter leurs « alliés » européens et les membres de l’OTAN qu’ils prétendaient protéger.

Jusqu’à présent, dans les déclarations de Trump sur la suppression du traité INF, rien n’indique que les Européens aient eu voix au chapitre dans cette décision de Washington qui met en jeu leur survie même. Bonjour pour l’idée que l’OTAN est un « partenariat » !

Le respect mutuel prudent que Washington entretenait encore pour Moscou dans les années 1980 – ou du moins le prétendait occasionnellement – est maintenant révolu. L’idée que supprimer les armes nucléaires et renforcer la confiance et le dialogue entre les puissances nucléaires soit une bonne chose est maintenant considérée comme risible, tant par les néo-libéraux que par les néo-cons. Toutes les voix contraires sont ridiculisées et font ricaner les couards se présentant comme des patriotes intrépides. Ils n’ont aucune considération pour ceux qu’ils ciblent avec leur tactique d’intimidation. Ils seront les premiers à hurler de terreur lorsque leurs propres fantasmes seront réalisés et que les missiles nucléaires décolleront. Mais alors, il sera trop tard.

Martin Sieff

Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone

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