Hyperinflation : On y va tout droit


Par Dmitry Orlov – Le 15 mars 2021 – Source Club Orlov

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L’impression monétaire prodigue de la Réserve fédérale américaine et des autres banques centrales occidentales s’est élevée à environ 10 000 milliards de dollars sur la seule dernière année. La quantité de monnaie en circulation est passée à 2 000 milliards de dollars, battant un record établi en 1945 et affichant une augmentation de près de 12% par rapport à 2019. Le déficit budgétaire fédéral américain s’élève à un peu près à 3 500 milliards de dollars, ce qui représente plus de 16 % du PIB – le plus haut niveau depuis la Seconde Guerre mondiale. Pendant ce temps, la dette fédérale américaine vient de dépasser les 28 000 milliards de dollars. Au cours de l’année écoulée, les États-Unis ont dépassé leurs revenus d’un pourcentage stupéfiant de 194%.

Les prix augmentent partout, même si l’économie sous-jacente reste dans un marasme inspiré du coronavirus, notamment parce que la consommation a été réprimée, avec le coronavirus comme excuse, pour retarder l’apparition de l’hyperinflation. Et puis le président de la Réserve fédérale est intervenu pour calmer les eaux troubles en affirmant publiquement qu’« il n’y a aucune raison d’avoir peur de l’hyperinflation »Cela ressemble beaucoup au déni, qui est la première des cinq étapes du deuil, après lesquelles viennent la colère, le marchandage, la dépression et l’acceptation. Powell a dit « hyperinflation » ; par conséquent, il y aura de l’hyperinflation

Ce qui arrive à la valeur de l’argent lorsqu’un gouvernement en imprime beaucoup, – pour le dépenser ou simplement le distribuer aux gens – c’est que l’argent perd de sa valeur parce qu’il y a plus d’argent par unité de choses à acheter avec. L’espoir que cette tendance se poursuive déclenche alors un processus continu d’augmentation des prix, appelé inflation, tandis que la perspective que le taux d’inflation continue d’augmenter déclenche l’hyperinflation.

Je pense que l’hyperinflation n’est pas du tout un problème et que, bien au contraire, c’est une solution à de nombreux problèmes urgents. Nous verrons ici l’hyperinflation comme la manière douce qu’a la nature de résoudre les problèmes d’une société qui a oublié comment vivre selon ses moyens. Mais la nature a besoin d’aide. Tout comme un programme radical de perte de poids peut être amélioré par l’intervention d’un nutritionniste expert, l’hyperinflation a aussi ses meilleures pratiques, que je suis impatient de vous transmettre.

Il existe de nombreux exemples historiques d’hyperinflation. Le plus ancien s’est produit dans la péninsule arabique après que l’empereur Mansa Musa Ier de l’empire malien a effectué son pèlerinage à la Mecque en 1324, au cours duquel il a distribué 71 000 livres d’or malien fraîchement extrait. La valeur de l’or étant basée sur sa rareté, cette orgie d’or a pratiquement détruit sa valeur. Mais il s’agit là d’un cas unique ; tous les exemples récents d’hyperinflation se caractérisent par des piles de papier-monnaie soudainement sans valeur, dans des dénominations de plus en plus extravagantes.

Cette situation est très gênante à bien des égards. La simple mécanique de l’hyperinflation, – imprimer et émettre toujours plus de billets, échanger de façon répétée les anciens billets, de plus en plus sans valeur, contre de nouveaux, effectuer des paiements en utilisant des charrettes et des wagons entiers d’argent liquide, – devient de plus en plus pesant. Lorsqu’il faut une valise entière d’argent liquide pour payer un paquet de cigarettes ou un pain de savon, le savon et les cigarettes deviennent eux-mêmes une forme de monnaie de fortune.

L’hyperinflation est particulièrement impopulaire auprès des personnes qui tiennent à conserver leurs économies sous forme d’espèces. En réaction, ils se tournent vers l’achat et la thésaurisation d’autres biens, ce qui entraîne des pénuries et une nouvelle hausse des prix. Mais tous ces problèmes peuvent désormais être résolus car nous disposons de la technologie nécessaire pour rendre l’hyperinflation sûre, confortable, pratique et amusante pour toute la famille !

Toutefois, cela nécessite un changement d’état d’esprit et une approche différente de l’argent. Pour commencer, nous devons reconnaître que l’argent n’est pas une quantité physique. Il est sans dimension car il ne peut être mesuré que par rapport à d’autres monnaies. Contrairement à toute quantité physique, elle est mesurée avec une précision infinie ; toute mesure physique, qu’elle soit exprimée en kilogrammes, en mètres cubes ou en kilowattheures, doit comporter des barres d’erreur pour être significative, alors que les quantités monétaires, quelle que soit leur taille, sont précises jusqu’au dernier centime. La définition de la monnaie est circulaire : la monnaie tire sa valeur des choses qui peuvent être achetées avec elle, et ces choses à leur tour tirent leur prix de la valeur de la monnaie.

Bien que l’argent puisse avoir une représentation physique sous la forme de pièces ou de papier monnaie, sa nature essentielle est éphémère, non physique et intangible. Par essence, l’argent n’existe que sous forme de pensée pure dans l’esprit des personnes qui participent à son échange. Ses incarnations physiques ne sont que des accessoires de théâtre. Sa réalité est conceptuelle, similaire à celle du nombre irrationnel π, qui peut également être représenté physiquement, – comme, par exemple, un cercle d’un mètre de diamètre sculpté dans la pierre et dont la circonférence est de π mètres, – mais cela serait inutile. Tout comme π est omniprésent en mathématiques, la monnaie est omniprésente en économie.

Dès que l’on abandonne l’idée même de donner à l’argent une quelconque représentation physique, les choses deviennent beaucoup plus simples. Traiter l’argent comme une simple information à représenter sous forme de chiffres dans des systèmes informatiques ouvre toutes sortes de possibilités merveilleuses. Pour éliminer la représentation physique de la monnaie tout en conservant son concept de moyen d’échange universel, il est nécessaire de passer à une monnaie entièrement numérique.

Dans une large mesure, c’est déjà le cas. La plupart des gens possèdent un smartphone, et beaucoup relient leurs comptes bancaires à des systèmes de paiement qui leur permettent d’agiter leur téléphone devant les terminaux de paiement sans même avoir à les toucher. Cette méthode de paiement sans contact devient de plus en plus populaire et courante à notre époque, obsédée par la contagion, car les gens réalisent que l’argent liquide est une source majeure de germes, puisqu’il passe par de nombreuses mains non lavées.

L’argent liquide physique est déjà devenu une technologie ancienne. Il peut être éliminé en négligeant simplement de le remplacer par des billets de plus grande valeur alors que l’hyperinflation fait rage. Lorsqu’il faudra un portefeuille rempli de billets de 100 dollars pour accéder à des toilettes publiques, la plupart des gens comprendront et passeront volontairement à l’utilisation de leur smartphone pour payer leurs achats. L’ennuyeuse valise pleine d’argent liquide qui est le pivot de nombreux films pourris appartiendra heureusement au passé. Les riches vulgaires qui, auparavant, allumaient leurs cigares avec des billets de 100 dollars, utiliseront peut-être quelque chose de vraiment rare, comme du papier toilette.

Une fois l’argent physique disparu, il reste le problème de l’hyperinflation qui crée des nombres toujours plus grands : millions, milliards, trillions, quadrillions, quintillions, sextillions, septillions, octillions et ainsi de suite. Ici, l’expression des quantités monétaires en notation scientifique, avec une mantisse et un exposant, rend l’hyperinflation beaucoup plus facile à traiter sur le plan informatique. La dette fédérale américaine, qui vient de dépasser les 28 000 milliards de dollars, peut être exprimée de manière plus compacte et plus souple sous la forme 28E+12, le 12 indiquant que 12 zéros doivent être ajoutés après le nombre. Si elle est multipliée par 1000 pour atteindre 28 quadrillions de dollars, elle s’élèvera à 28E+15 $. Quintillion ? Pas de problème, 28E+18 $.

On estime qu’il y a entre 1E+78 et 1E+82 atomes dans l’univers connu et observable, mais comme l’argent n’est pas physique, ce n’est pas une contrainte. La seule contrainte est la capacité des systèmes informatiques à représenter de très grands exposants. La solution consiste à faire tourner l’exposant. Lorsque la pièce virtuelle de plus faible valeur atteint, par exemple, 1E+100, l’exposant passe la limite haute et la valeur redénominée devient 1E+1. À chaque fois que cela se produit, un petit symbole de coche verte s’affiche pendant un certain temps sur l’écran du smartphone de chacun, avec l’indication suivante : « Votre monnaie numérique préférée a été redénominée pour votre confort et votre commodité. »

Bien plus fréquents que les ajustements périodiques de la monnaie hyperinflationniste elle-même seront les ajustements nécessaires des prix pratiqués pour chaque produit imaginable. En fonction du taux d’hyperinflation, tous les prix devront être ajustés à la hausse sur une base régulière – peut-être une fois par semaine, une fois par jour, une heure ou même une fois par seconde. Pour profiter au maximum de la hausse quotidienne des prix, il faudrait écrire un logiciel permettant de placer automatiquement toute une série d’ordres préalablement établis dès qu’une somme d’argent arrive sur un compte, afin de verrouiller les prix les plus bas possibles.

Le logiciel devrait permettre de classer les achats par ordre de priorité, en plaçant les produits d’hygiène féminine et les couches, les médicaments sur ordonnance, le papier hygiénique et autres produits de première nécessité en haut de la liste et les produits de luxe (boissons gazeuses et alcoolisées, chips et biscuits, vêtements et chaussures) en bas de la liste, à n’acheter que si les fonds déposés s’avèrent suffisants. À son tour, le gouvernement serait en mesure de récolter les données relatives à l’historique des commandes pour les utiliser afin de fixer des seuils entre les produits de première nécessité et les produits de luxe et pour déterminer la quantité d’argent à émettre chaque mois, chaque semaine ou chaque jour, afin de fournir tous les produits de première nécessité et quelques produits de luxe dans le but de maîtriser l’hyperinflation et de maintenir la population en vie. Les organisations caritatives pourraient utiliser la liste des produits de première nécessité pour déterminer ce qu’il convient de distribuer en tant qu’aide humanitaire, étant donné que de nombreuses personnes – surtout ceux qui sont nuls en calcul, – pourraient être incapables de comprendre et de naviguer dans le nouveau monde merveilleux de l’hyperinflation.

Un tel système devrait pouvoir répondre à l’objectif de maintenir des niveaux d’hyperinflation très élevés pendant une période de temps considérable. Nous devrions nous attendre à ce que des conférences économiques soient convoquées pour déterminer la meilleure façon de réguler l’hyperinflation. Des théories mathématiques seront élaborées pour calculer le taux optimal d’hyperinflation, comme cela a été fait pour l’inflation. Il ne fait aucun doute que de grands efforts seront également déployés pour trouver le moyen approprié et fondé sur des principes de sous-estimer systématiquement l’hyperinflation, comme on le fait aujourd’hui avec l’inflation, à l’aide d’ajustements hédoniques et d’autres astuces similaires, afin de s’assurer que la valeur des paiements indexés sur l’hyperinflation (par exemple, les pensions de l’État et les contrats à long terme tels que les contrats de location et de bail) diminue avec le temps.

On pourrait peut-être y parvenir en introduisant des ajustements volontaires de simplicité : si presque plus personne ne chauffe ou ne climatise sa maison ou n’a l’eau courante chaude et froide, alors le coût exorbitant de ces luxes serait exclu du panier de biens et services utilisé pour mesurer le taux d’hyperinflation. Un raisonnement similaire pourrait être mis en œuvre pour exclure le coût des voitures, des bicyclettes, des planches à roulettes et des chaussures. Un ajustement hédonique pourrait également être appliqué partout, en se basant sur le fait que les gens éprouveraient un plus grand sentiment de supériorité morale du fait qu’ils n’ont plus d’enfants et émettent généralement moins de dioxyde de carbone, contribuant ainsi à sauver la planète d’un changement climatique catastrophique (bien que ce ne soit pas du tout certain).

Les gens ont tendance à considérer l’inflation comme un élément négatif et l’hyperinflation comme une calamité de premier ordre. Ce préjugé doit être surmonté à l’aide d’un message approprié soutenu par des campagnes publicitaires et des efforts de rééducation de masse. Les gens doivent prendre conscience du fait que rien n’est permanent dans ce monde et que tout ce que nous possédons vieillit et s’estompe avec le temps, du yaourt dans votre réfrigérateur à l’argent dans votre portefeuille. De même que le pain fraîchement cuit est meilleur que le pain de la veille, l’argent fraîchement émis est meilleur que l’argent de la veille. C’est naturel et en harmonie avec le reste de l’univers, qui se dirige à toute allure vers une entropie croissante. Des refontes visuelles régulières, présentant chaque nouvelle émission majeure d’argent comme un nouveau monde virtuel passionnant, non seulement occuperaient les concepteurs, mais contribueraient à rendre l’argent vieux d’un mois aussi démodé et peu attrayant qu’une pizza à moitié mangée d’un mois.

L’hyperinflation permet aux valeurs perçues et aux prix de toujours augmenter, même au milieu du malaise économique, de la décadence et de l’effondrement. Ils peuvent ne pas suivre le rythme de l’hyperinflation, perdre de la valeur en termes réels, et cela peut être un problème dans certains cas, mais le danger majeur dans une économie en perpétuelle décroissance et dépression est la déflation, en particulier la déflation des actifs. Les États-Unis en font déjà l’expérience de manière significative avec la chute libre des prix de l’immobilier commercial vacant. Lorsque l’industrie touristique cesse ses activités, de nombreux actifs, des bateaux de croisière aux avions de ligne en passant par les hôtels et les centres de villégiature, se transforment en actifs immobilisés qui s’épuisent rapidement en raison du manque d’entretien et perdent toute valeur, sauf celle de la ferraille. Mais l’hyperinflation permet aux actifs les plus délaissés de conserver leur valeur, du moins en apparence. Une hyperinflation croissante donne l’impression de renflouer tous les bateaux, même ceux qui ont coulés.

De nombreuses personnes jugent de la santé de l’économie en fonction de l’évolution des cours de la bourse. À l’heure actuelle, les cours boursiers effectuent un admirable numéro de lévitation en dépit d’une économie réelle qui se contracte rapidement. Par exemple, la production industrielle en Allemagne, la locomotive industrielle de l’UE, est en déclin continu depuis 27 mois, avec une baisse de plus de 8%. Par ailleurs, selon l’EIA, la production mondiale de pétrole a chuté de 8% au cours de l’année écoulée, un record absolu. Il est admirable que l’Allemagne maintienne sa production industrielle synchronisée avec la diminution de la disponibilité de l’énergie mondiale, mais ce n’est pas une raison pour que les prix des actions restent aussi élevés qu’ils le sont, et encore moins pour qu’ils continuent à monter.

Actuellement, les banques centrales aux États-Unis et en Europe injectent continuellement des liquidités dans les différents marchés boursiers pour qu’ils restent roses et dodus, mais une intervention aussi flagrante tend à faire ressembler le marché boursier à un système pyramidal, ce qui sape la confiance. L’hyperinflation peut aider : une fois qu’elle sera là, les prix des actions continueront à être roses et dodus, quoi qu’il arrive. Bien sûr, ils ne pourront pas suivre le rythme de l’hyperinflation, mais au moins, ils continueront à monter, et non à descendre, inspirant confiance dans l’économie, rendant les actionnaires plus heureux qu’ils ne le seraient autrement, créant un effet de richesse qui contribuera à ralentir l’effondrement économique.

Avec le choix d’un message approprié et une rééducation de masse, il devrait être possible d’habituer les gens à l’idée que l’argent n’est pas plus durable que les choses qu’ils achètent avec, dont la plupart ne sont pas durables du tout et sont souvent de mauvaise qualité ou carrément jetables. Une fois qu’ils se seront habitués à cette nouvelle réalité, ils n’y verront pas d’inconvénient, à condition que les interfaces utilisateur des applications de banque en ligne et de paiement électronique soient suffisamment sophistiquées pour rendre la gestion de la hausse des prix quotidienne facile, pratique et amusante.

Bien gérée, l’hyperinflation peut offrir de nombreux autres avantages. Les termes négatifs tels que déficit budgétaire et dette fédérale disparaîtront. Normalisé sur les 12 derniers mois, le gouvernement fédéral américain a encaissé 283,8 milliards de dollars de recettes et dépensé 552 milliards de dollars. En d’autres termes, il a dépassé ses recettes de 194 %. En arrondissant un peu, on peut dire que les États-Unis dépensent deux fois leurs recettes, empruntant autant qu’ils gagnent. Le résultat cumulé de ces emprunts s’élève actuellement à près de 28 000 milliards de dollars et, – c’est là que le bât blesse – le montant de cette dette qui doit être roulé au cours des 12 prochains mois s’élève à 7 400 milliards de dollars et a augmenté de 2 700 milliards de dollars (c’est-à-dire de plus d’un tiers) au cours de l’année écoulée. Une dette qui ne peut jamais être remboursée n’est pas vraiment une dette et continuer à l’appeler ainsi est psychologiquement dommageable. L’hyperinflation la fera disparaître, ce qui soulagera tout le monde.

Il y a des gens qui vous diront que cela peut durer éternellement parce que les taux d’intérêt sont proches de 0% et qu’il est donc possible de produire plus de dettes à partir de rien et de reconduire les dettes existantes à l’infini sans aucun effet négatif. Il y a aussi des gens qui vous diront que, compte tenu de l’ampleur stupéfiante des gonflements fiscaux et monétaires, une partie de ces gonflements finira par se répandre sur les marchés de l’immobilier (c’est déjà le cas !), sur les marchés des matières premières et, de là, sur le secteur des biens de consommation, puis ce sera la débandade ! Un simple soupçon d’hyperinflation suffira à faire paniquer les investisseurs en obligations, rendant impossible pour le gouvernement de continuer à rouler sa dette en empruntant toujours plus. Dépenser deux fois plus que ses recettes n’est pas une finalité : la finalité réelle est un déficit de 100%.

Il est temps d’abandonner le modèle dépassé de financement des opérations du gouvernement américain par l’impôt, qui, en pleine hyperinflation, deviendra inefficace, puisque le temps que l’argent soit collecté, alloué et dépensé, il n’achètera presque plus rien. Une bien meilleure approche consiste à abroger tous les impôts et à supprimer le concept même de dette publique. Le Trésor américain (et non la Réserve fédérale, qui deviendrait superflue) émettrait alors directement de la monnaie numérique dans les quantités requises – qu’il s’agisse de trillions, de quadrillions, de quintillions, de sextillions, de septillions ou d’octillions de dollars par mois, par semaine, par jour, par heure ou par seconde.

Puis viendra un meilleur des mondes dans lequel le gouvernement émet de l’argent, le distribue, le fait circuler un peu avant qu’il perde de sa valeur, puis le gouvernement émet encore de l’argent. De toute évidence, le gouvernement, qui ne sert plus à grand-chose, ferait bien de laisser les géants de la technologie, – Apple, Google, Microsoft, Facebook et, enfin et surtout, Twitter, – prendre en charge la fonction d’émission de monnaie. Les nouveaux systèmes bancaires et de paiement basés sur les smartphones permettront non seulement de faire face à ces changements, mais aussi de rendre l’hyperinflation amusante pour tous.

Dans ce meilleur des mondes, le terrible problème de l’usure n’existera plus, puisque personne ne sera disposé à prêter de l’argent, à quelque taux d’intérêt que ce soit, le risque de perte totale étant trop grand. Finis les problèmes vexatoires liés aux tentatives de restriction budgétaire et à la nécessité de justifier auprès des contribuables le détournement et la mauvaise gestion de l’argent de leurs impôts. Les avantages de l’hyperinflation sont trop nombreux pour être mentionnés ici, mais le plus important sera peut-être de permettre aux gens, riches et pauvres, d’effectuer une transition progressive vers une vie sans argent du tout. Pour paraphraser Klaus Schwab, vous serez fauché et vous serez malheureux, mais au moins on va beaucoup s’amuser pour en arriver là … à jouer avec votre smartphone en attendant les livraisons… jusqu’à ce qu’internet tombe en panne… ou que les lumières s’éteignent et que la batterie se vide.

Dmitry Orlov

Le livre de Dmitry Orlov est l’un des ouvrages fondateurs de cette nouvelle « discipline » que l’on nomme aujourd’hui : « collapsologie » c’est à-dire l’étude de l’effondrement des sociétés ou des civilisations.

Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone

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