Après l’attaque des Etats Unis contre des forces irakiennes, ses troupes devront (encore) partir


2015-05-21_11h17_05Par Moon of Alabama − Le 30 décembre 2019

Within Syria @WithinSyriaBlog - 17:43 UTC - 29 Déc 2019

Trump vient de faire l'erreur de sa présidence.

Ce sera peut-être vrai ou peut-être pas. Voici ce qui s’est passé.

Vendredi, quelque 30 roquettes Katyusha de 107 mm ont frappé la base K1 qui abrite des troupes irakiennes et états-uniennes près de Kirkuk, en Irak. Un mercenaire/sous-traitant américain est mort, deux soldats irakiens et quatre soldats américains ont été blessés. Au lieu de chercher les vrais coupables – des anciens d’État islamique(EI), des locaux mécontents, des Kurdes qui veulent reprendre le contrôle de Kirkuk – les États-Unis ont désigné le groupe Kata’ib Hizbullah comme étant coupable de l’attaque.

Le Kata’ib Hizbullah (KH) est un groupe majoritairement chiite entretenant quelques relations avec l’Iran. Il fait partie des Unités de mobilisation populaire (UMP) qui ont été fondées et formées par l’Iran pour bloquer et vaincre État islamique (EI), lorsque ce groupe occupait près d’un tiers de l’Irak et de la Syrie. KH est, comme toutes les unités UMP, maintenant sous le commandement et le contrôle du Ministère de la Défense irakien.

Pour se venger de la mort d’un de ses mercenaires, l’armée de l’air américaine a attaqué cinq camps où le Hezbollah Kata’ib et d’autres forces irakiennes étaient stationnés :

En réponse aux attaques répétées du Kata'ib Hizbollah (KH) contre les bases irakiennes qui accueillent des forces de la coalition de l'Opération Inherent Resolve (OIR), les forces américaines ont mené des frappes défensives de précision contre cinq installations du KH en Irak et en Syrie, dégradant ainsi la capacité du KH à mener de futures attaques contre les forces de la coalition de l'OIR.

Trois sites de KH en Irak et deux en Syrie ont été ciblés. Ces sites comprenaient des installations de stockage d'armes et des sites de commandement et de contrôle que KH utilise pour planifier et exécuter des attaques contre les forces de la coalition de l'OIR.

Toutes les positions de KH qui ont été touchées se trouvaient dans le désert de l’Anbar occidental, de part et d’autre de la frontière iraquo-syrienne, où KH est engagé dans la lutte contre EI, qui y est toujours en activité. Le résultat de ces frappes aériennes est dévastateur :

Elijah J. Magnier @ejmalrai - 6:20 UTC - 30 déc. 2019

32 tués et 45 blessés. Tel est le décompte de la violente agression des États-Unis contre les brigades 45 et 46 des forces de sécurité irakiennes, hier soir. Cette position militaire était établie pour contre-attaquer ce qu’il reste d’EI à Al-Qaem, à la frontière entre l'Irak et la Syrie.

La station frontalière d’Al-Qaem est la seule ouverte entre l’Irak et la Syrie qui ne soit pas sous contrôle américain. Les États-Unis étaient furieux lorsque le premier ministre irakien Adil Abdul Mahdi a permis sa création. Elle avait déjà été attaquée par Israël qui avait lancé son assaut à partir d’une base de l’armée de l’air américaine située dans l’est de la Syrie.

TØM CΛT @TomtheBasedCat - 6:11 UTC - 29 déc. 2019

Ce ne sont pas seulement des membres des bataillons du Hezbollah qui ont été touchés, il y a aussi des blessés dans les rangs des Forces de missiles / Bataillon de fusées qui est considérée comme une unité distincte des autres brigades.

Parmi les morts, on compte Abu Ali Madiniyah, le commandant du 1er bataillon de la 45ème Brigade.

Ces frappes ont été menées au mépris total de la souveraineté irakienne et contre des forces placées sous le commandement direct de l’État irakien :

Dans une déclaration, Abdul-Mahdi a dit que le secrétaire à la Défense Mark Esper l'avait appelé environ une demi-heure avant les frappes américaines pour lui faire part des intentions américaines de frapper les bases de la milice soupçonnée d'être derrière l'attaque à la roquette de vendredi. Abdul-Mahdi a déclaré dans le communiqué qu'il avait demandé à Esper d'annuler les plans de représailles américains.

La déclaration indique que le président irakien Barham Salih avait également reçu une notification préalable d'un diplomate américain, et a également demandé, sans succès, que les Américains annulent ce plan.

Les frappes ont été conçues pour tuer ceux qui s’attaquent aux combattants d’EI encore virulents qui se cachent dans la région :

Rania Khalek @RaniaKhalek - 18:44 UTC - Déc 29, 2019

Le groupe UMP qui a été touché par les Américains lutte contre EI depuis des années. Ils étaient en première ligne pour protéger l'Irak contre «EI en Syrie» et participe aux combats en cours contre EI dans les déserts syrien et irakien. Ils étaient LA ligne de défense.

L'attaque américaine contre ce groupe UMP n'est pas seulement un acte de vengeance disproportionné, c'est aussi une menace pour la sécurité régionale. Et il est pathétique pour une soi-disant superpuissance de se lancer dans un combat contre une si petite milice.

Voici une vidéo des conséquences sanglantes.

Il y a quelque 5 000 soldats américains en Irak logés dans des bases qui abritent également des dizaines de milliers de soldats irakiens et des troupes UMP. Les vengeances sont maintenant inévitables :

Au lendemain des frappes américaines, le Premier ministre irakien Adil Abdul-Mahdi a déclaré : "Nous avons déjà confirmé notre rejet de toute action unilatérale des forces de la coalition ou de toute autre force à l'intérieur de l'Irak. Nous considérons qu'il s'agit d'une violation de la souveraineté de l'Irak et d'une escalade dangereuse qui menace la sécurité de l'Irak et de la région", selon un communiqué diffusé à la télévision d'Etat irakienne.

Abdul-Mahdi se trouve maintenant confronté à la possibilité cauchemardesque que des paramilitaires liés à l'Iran, dont les ailes politiques exercent une énorme influence sur son gouvernement, entrent en guerre contre les forces américaines sur le territoire irakien, ce qui aggraverait le désastre qui dure depuis quelques mois pendant lesquels des centaines de manifestants ont été tués, ce qui l’a forcé à remettre sa démission au Parlement.

Les jours et les semaines à venir permettront de répondre à un certain nombre de questions sur la façon dont cette situation périlleuse va se dérouler, notamment jusqu'à quel point les paramilitaires sont-ils prêts à donner suite à leur rhétorique qui ne cesse d'affirmer que la présence américaine en Irak est une continuation de l'occupation, en plus de leur volonté de mener une action militaire afin de chasser les Américains, "encore une fois".

Les États-Unis et Israël ont déjà tué des centaines de soldats des forces irakiennes qui sont alignées avec l’Iran. Mais ces récentes frappes sont les plus graves. Il n’y a aucun doute. Les forces américaines devront (encore) quitter l’Irak :

Brasco_Aad @Brasco_Aad - 19:55 UTC – 29 Déc 2019

Déclaration du groupe UMP irakien, Asai'b Ahl al-Haq, sur l'attaque américaine contre l'Irak ce soir :

"La présence militaire américaine est devenue un fardeau pour l’État et une source d'agression contre nos forces et il est donc devenu obligatoire pour nous tous de les expulser d'Irak."

Le président américain Donald Trump a déclaré qu’il voulait que les troupes américaines quittent le Moyen-Orient. Mais l’“État profond”, le Pentagone et la bureaucratie du Département d’État résistent à une telle décision :

Après l'opération, Pompeo, Esper et le général Mark Milley, président de l'état-major interarmées, se sont rendus à Palm Beach, en Floride, pour en informer le président Donald Trump.

M. Esper a déclaré qu'ils avaient discuté avec M. Trump "d'autres options qui sont disponibles" pour répondre à l'Iran. ...
Trump était à Mar-a-Lago mais ne s'est pas montré avec ses hauts responsables de la sécurité nationale. Après que Pompeo et Esper se sont entretenus avec lui, le président s'est rendu à son club de golf privé à West Palm Beach. La Maison Blanche n'a pas immédiatement dit pourquoi Trump était retourné au club après y avoir déjà passé près de six heures ce dimanche.

Les attaques d’hier garantissent que toutes les troupes américaines devront quitter l’Irak et qu’elles perdront ainsi leurs lignes d’approvisionnement vers la Syrie.

On peut se demander si telle était l’intention réelle de ces attaques.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Jj pour le Saker Francophone

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