Par ShanghaiPanda − Le 15 septembre 2020 − Source twitter
Sur Twitter, en tant que Chinois, la question que l’on me pose le plus souvent est : « Pourquoi ne vous opposez-vous pas au Parti Communiste Chinois (PCC)? » Pourquoi les Chinois ne soutiennent-ils pas une démocratie à l’occidentale? Pourquoi le peuple chinois soutient-il le président Xi sans l’avoir élu? Je vais vous répondre.
Contrairement aux dits « pays démocratiques », le peuple chinois fait confiance à l’expérience plus qu’aux élections ou à d’autres capacités de ses dirigeants. Depuis la Dynastie Sui (il y a 1 400 ans), les dirigeants ont été sélectionnés et promus par des épreuves, et non par le sang ou la naissance.
Dans la Chine contemporaine, si vous voulez entrer en politique, vous allez devoir vous engager sur une voie difficile et jalonnée de compétition. Que vous proveniez d’une famille populaire, ou d’une famille rompue à la politique, vous ne pourrez pas sauter d’étape. C’est la seule méthode qui pourra vous amener au plus haut échelon du pouvoir, comme le président Xi.
Pour commencer, vous devez décrocher un diplôme universitaire, du moins pour la plupart des dirigeants gouvernementaux chinois. Vous devez postuler à l’examen du service civil national, et être admis. En 2019, 920 000 personnes se sont présentées à cet examen, et 14 537 ont été admises, pour un taux d’admission de 1,58%.
Le parti qui est au pouvoir en Chine est le PCC. On compte outre celui-ci 8 autres partis politiques. Vous devez être membre de l’un d’entre eux. Si votre idéal est de devenir le dirigeant suprême de la Chine, je vous suggère de rallier le PCC. Vous serez l’un des 90 millions de membres du PCC. Chacun d’eux est un rival.
Voilà, vous êtes à présent un fonctionnaire de base. Votre niveau administratif est « employé » ; le niveau administratif du président Xi est « premier niveau national ». On compte 10 niveaux entre vous et le président Xi. Monter d’un niveau vous demandera plusieurs années d’efforts, et plusieurs examens.
En Chine, des « Départements d’organisation » sont responsables, pour chaque niveau, de l’encadrement des employés civils. Chacun de ces employés doit participer à l’évaluation annuelle des échelons.
Cette évaluation est le plus souvent menée par vos collègues, vos subordonnés, et vos supérieurs, par un vote. Votre avenir dépend des résultats de l’évaluation.
Si vous travaillez dur, et que vous avez de la chance, vous deviendrez dirigeant d’un district ou d’un comté. C’est ce qui s’est produit pour le président Xi en 1983 : il est devenu le plus haut dirigeant du comté de Zhengding. Pour prétendre s’occuper du sort de centaines de milliers, ou même de millions de personnes, il convient d’acquérir une certaine expérience.
La prochaine étape sur votre parcours est de devenir l’un des dirigeants d’une ville, délégué à l’industrie, à l’agriculture, à l’éducation ou au commerce. Vous pourrez alors devenir maire. Cela va vous demander quelques années supplémentaires.
En 1990, le président Xi est devenu le principal dirigeant de la ville de Fuzhou, dans la province de Fujian.
Vous pouvez à présent vous battre pour devenir gouverneur!
Il faut réitérer les efforts que vous avez déjà fournis. Ce qui change, c’est que vous avez de plus grandes responsabilités, et un travail plus ingrat.
En 2000, le président Xi est devenu gouverneur de la province de Fujian. Une nouvelle étoile politique.
Après être devenu gouverneur d’une province pas trop grande [La ville de Fuzhou susnommée compte tout de même la bagatelle de 7 millions d’habitants, et la province de Fujian 37 millions, NdT], il vous faut devenir gouverneur d’une province plus importante.
Ou bien viser une région frontalière, comme le Xinjiang ou le Tibet.
Le président Hu Jintao, ancien dirigeant suprême de la Chine, fut jadis gouverneur du Tibet.
Le bureau politique est l’un des corps dirigeants centraux du PCC. Vous devez en être membre. Les membres du bureau politique sont élus par la session plénière du comité central.
C’est votre prochain objectif.
Les représentants de l’Assemblée nationale populaire (ANP) sont les membres du plus haut organe de pouvoir de l’État chinois, et sont élus conformément à la loi.
Vous devez devenir l’un d’entre eux.
Si vous pouvez devenir membre du comité permanent du bureau politique du comité central du PCC, qui comporte en général entre sept et neuf membres, vous aurez pénétré au cœur de la puissance de l’État chinois.
En 2007, le président Xi y a été élu.
De même, divers comités permanents sont en charge de gérer diverses régions du pays. À l’issue d’une compétition acharnée, vous devenez enfin le dirigeant suprême de la Chine.
En 2012, le président Xi y est parvenu.
Bien que l’on puisse le qualifier de « génie politique » (quel dirigeant d’un pays ne l’est pas ?), il lui a fallu 40 années pour y parvenir.
Voilà la voie difficile à suivre pour devenir dirigeant suprême de la Chine. Je l’appelle démocratie à la Chinoise. Ce système est fondé sur une sélection rigoureuse, et l’élection de représentants à l’assemblée populaire, à tous les niveaux.
En Chine, ce système fonctionne.
Chaque pays devrait choisir un système politique convenant à ses conditions nationales. Il n’y en a pas de « bon » ou de « mauvais ».
Je suis dégoûté lorsque je constate que certains Occidentaux semblent toujours penser que leur système est « bon ». Je ne suis pas d’accord. Je ne crois qu’aux faits. [On juge un arbre à ses fruits, NdT]
Utilisez des faits pour me convaincre. Merci.
Note du Saker Francophone Comme le révèlent les études en la matière, 73% des Chinois considèrent la Chine comme démocratique. 49% des Étasuniens considère les États-Unis comme démocratiques. Maj d'un lecteur : La dernière enquête annuelle Democracy Perception Index – 2020, effectuée auprès de 124 000 personnes dans 53 pays par Dalia Research, en collaboration avec La Fondation Alliance des démocraties, vise à mesurer un " déficit démocratique perçu " qu'on définit comme étant « La disparité entre ceux qui croient en la démocratie et ceux qui pensent vivre dans une démocratie. Plus cet écart est grand, plus les citoyens ont le sentiment que leur pays ne respecte pas leurs idéaux démocratiques. »
Traduit par José Martí, relu par Wayan pour le Saker Francophone