Par Alex Gorka – Le 6 mai 2017 – Source Strategic Culture
Le 4 mai, la Chambre des représentants a largement voté pour imposer de nouvelles sanctions à la Corée du Nord ciblant entre autres l’industrie maritime et le travail esclavagiste, alors que les tensions continuaient à monter au sujet des programmes nucléaires et balistiques de la RPDCs. La proposition de loi Interdiction and Modernization of Sanctions Act (H.R. 1644) vise à détruire encore plus l’économie nord-coréenne en s’attaquant au réseau des banques et des industries qui l’aident à contourner les sanctions occidentales. Elle s’attaque en particulier au transport maritime et à l’utilisation par la Corée du Nord de ports internationaux.
Le projet de loi interdit aux navires appartenant à la Corée du Nord ou aux pays refusant de se conformer à la résolutions de l’ONU d’opérer dans les eaux américaines ou d’accoster dans les ports américains. La loi vise également ceux qui emploient le travail des esclaves nord-coréens. Quiconque utilise le travail de Coréens du Nord expédié dans d’autres pays serait soumis à des sanctions en vertu de la Loi International Emergency Economic Powers.
Ce projet de loi exige également que l’administration Trump décide, dans les 90 prochains jours, si la Corée du Nord est un État qui subventionne le terrorisme ou pas. Une telle étiquette entrainerait plus de sanctions, y compris une limitation de l’aide étasunienne aux pays étrangers.
Le projet de loi comprend l’« autorité de pouvoir inspecter » des ports chinois, iraniens, syriens et russes. Ces ports russes sont ceux de Nakhodka, Vanino et Vladivostok.
Aucune résolution du Conseil de sécurité de l’ONU n’a délégué le pouvoir d’inspecter des ports maritimes étrangers aux États-Unis. L’inclusion de telles mesures sera considérée comme un acte hostile. Cette loi est conçue en violation flagrante du droit international.
Les législateurs américains n’ont peut-être pas été informés que les inspections des navires en Asie-Pacifique sont réglementées par le « Mémorandum d’accord sur le contrôle des ports étatiques dans la région Asie-Pacifique », connu sous le nom de protocole d’entente de Tokyo, en vigueur depuis avril 1994. Sa section 3, intitulée Procédures d’inspection, de rectification et de détention, décrit en détail les procédures d’inspection des navires. En vertu du document, les États-Unis n’ont aucun droit spécial d’inspecter les navires étrangers.
Supposons que la Russie ou la Chine cherche à faire passer une loi spéciale prévoyant l’« autorité de pouvoir inspecter » les navires marchands américains et certains ports maritimes américains : le Congrès l’accepterait-il ? L’administration américaine et les législateurs s’y plieraient-ils ? Les députés ne se rendent-ils pas compte que ce projet de loi viole le concept de sécurité internationale et que les réactions des pays touchés risquent d’être peu amènes ?
Le texte du projet de loi appelle au respect des résolutions de l’ONU, mais aucune résolution du Conseil de sécurité n’a jamais évoqué les ports maritimes russes. Les législateurs ne comprennent-ils pas que l’idée d’inspecter les ports maritimes et les navires russes est aussi réaliste qu’une loi interdisant aux chiens d’aboyer ? Il est surprenant que le projet de loi en question ait été approuvé à une écrasante majorité sans beaucoup de débat sur les conséquences d’une telle loi.
Le Congrès précédent a fait tout ce qu’il pouvait pour gâcher les relations bilatérales avec la Russie. Le Congrès actuel fait la même chose. Dès que des perspectives d’amélioration des relations entre la Russie et les États-Unis apparaissent, le Congrès intervient pour créer des obstacles artificiels et empêcher une telle amélioration. Toujours la même chanson.
Voici un autre exemple. Le 3 mai, la Chambre des représentants a adopté la Loi Intelligence Authorization Act (IAA) pour l’année financière 2017. Le projet de loi prévoit la création d’un nouveau comité puissant couvrant l’ensemble des organismes de sécurité pour contourner « l’ingérence politique russe secrète dans le monde ». Le nouvel organe rassemblerait des représentants du FBI, du Département d’État, du Pentagone, du Bureau du directeur du Service national du renseignement, des Départements de la Justice et du Trésor, des 16 agences de renseignement et de toute autre agence que le président juge nécessaire.
Ses activités peuvent être élargies pour inclure « toutes autres tâches que le président pourrait décider », ce qui constitue un mandat potentiellement expansif. Le projet de loi oblige le comité à présenter un rapport annuel aux principaux groupes du Congrès travaillant sur les efforts anti-russes. Ainsi, un nouveau comité sera créé pour dupliquer le travail d’autres organismes. C’est un bon exemple de ce que signifie une hyper bureaucratie.
Ce projet de loi empêcherait également les diplomates russes de voyager à plus de 50 miles (80 km) des ambassades officielles et des consulats sans l’autorisation effective du directeur du FBI.
Les présidents russe et américain se sont parlé au téléphone le 2 mai, discutant des perspectives de coopération sur des problèmes aussi brûlants que la Corée du Nord et la Syrie. On ne peut pas résoudre les choses sans coordination des activités entre les deux grandes puissances. Les enjeux sont chauds dans le monde et l’intérêt est commun. Si le projet de loi susmentionné devient loi, la confrontation sera inévitable. Personne ne gagnera, tout le monde y perdra. J’espère que le Sénat et le Président Trump seront assez raisonnables pour éviter que cela ne se produise.
Traduit par Wayan, relu par M pour le Saker Francophone