Syrie : L’attaque du convoi d’aide humanitaire annonce une nouvelle escalade

Moon of Alabama

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Le 21 septembre – Source Moon of Alabama

Le bras de fer sur la destruction du convoi d’aide humanitaire à l’ouest d’Alep tourne au ridicule.

Le convoi de l’ONU/CRS venait de la partie ouest d’Alep tenue par le gouvernement. Il était arrivé à Umm al Kubra, un centre du Croissant rouge syrien situé dans la zone, plus à l’ouest, tenue par les rebelles, où le déchargement a commencé. Il s’est passé quelque chose et beaucoup de camions ont brûlé ou ont été endommagés. Une vingtaine de personnes auraient été tuées. L’incident est survenu peu après l’expiration officielle du cessez-le-feu. Les équipes de propagande des Casques blancs parrainées par les États-Unis étaient là ou sont arrivées peu de temps après le début de l’incident.

Voici les différentes affirmations entendues sur l’incident (je n’ai pas beaucoup de temps et je ne donnerai pas les liens de chacune d’elles) :

Les États-Unis et leurs alliés affirment que le convoi a été bombardé par une attaque aérienne. Les Russes nient qu’eux-mêmes ou les Syriens aient opéré une telle frappe.

Les rebelles ont donné différentes versions. Des avions de combat et des hélicoptères syriens ont opéré les frappes ; des bombes baril ont été larguées ; l’attaque a duré plusieurs heures…

Le Secrétaire d’État des États-Unis a d’abord prétendu que la Syrie avait opéré les frappes, puis que c’était les Russes ; que des hélicoptères avaient attaqué. Puis le Pentagone a prétendu que deux avions russe SU-24 à voilure fixe étaient les coupables. Mais les États-Unis ont ensuite affirmé que l’attaque avait duré plus de deux heures, ce qui est trop long pour deux SU-24.

Les Russes ont dit que ni eux, ni les Syriens, n’avaient attaqué. Selon eux, des rebelles auraient attaqué le convoi ; il n’y aurait pas eu de bombes, et les dommages auraient été causés par le feu.

Les photos des camions montrent que les dégâts ont été causés surtout par le feu ; il semble également y avoir eu des explosions et des impacts d’obus mais pas de grosses frappes directes. Pour moi, cela laisse le choix entre deux possibilités – une attaque aérienne ou d’artillerie, ou une simple opération de sabotage local.

Je ne sais pas ce qui est réellement arrivé.

Mais indépendamment des faits, il faut s’interroger sur le mobile.

Pourquoi les forces aériennes syriennes attaqueraient-elles le Croissant rouge syrien avec lequel elles entretiennent de bonnes relations et qui travaille dans toutes les zones tenues par le gouvernement? Pourquoi les forces syriennes ou russes attaqueraient-elles un convoi qui venait de traverser les zones et les points de contrôle tenus par le gouvernement et ne transportait donc pas de contrebande ? Je ne trouve vraiment aucune raison à une telle action. Et personne d’autre n’en a trouvé non plus.

Il y a quelques jours, les rebelles ont accusé l’ONU, à qui appartenait une partie des marchandises du convoi, de prendre parti dans le conflit et l’ont menacé de boycott. Les rebelles de l’est d’Alep ont manifesté contre l’aide fournie par l’ONU et ont dit qu’ils n’en voulaient pas. Il y a eu un rejet général du cessez-le-feu par les rebelles et ils ont fait pression pour que la guerre contre la Syrie et ses alliés s’intensifie. Al-Qaïda en Syrie a même fait une vidéo contre le cessez-le-feu. Dans l’accord de cessez-le-feu, toutes les parties s’engagent à coopérer dans la lutte contre al-Qaïda. Les rebelles veulent naturellement que l’accord capote. L’attaque contre le convoi d’aide humanitaire arrive à point nommé pour eux.

Si on considère le mobile, une attaque des rebelles est plausible tandis qu’une attaque par la Syrie et ses alliés ne l’est pas.

Dans son discours à l’ONU, aujourd’hui, Kerry a effectué quelques grotesques acrobaties verbales pour rejeter sottement le blâme sur la Russie.

Il a dit que Jabhat al-Nusra et Jund al-Aqsa sont al-Qaïda et les ennemis des Américains et doivent être combattus. Il n’a pas expliqué pourquoi, depuis cinq ans, les États-Unis fournissent al-Qaïda en armes et en munitions (par l’intermédiaire de leurs rebelles). Il n’a pas expliqué pourquoi les États-Unis n’ont, à ce jour, encore rien fait contre al-Qaïda en Syrie. Il n’a pas expliqué pourquoi les États-Unis n’ont pas forcé leurs rebelles par procuration à se distancer d’al-Qaïda comme ils l’avaient promis au début de la trêve. Tout cela n’a vraiment aucun sens. C’est grotesque.

Kerry a ensuite demandé une zone d’exclusion aérienne au nord-ouest de la Syrie pour empêcher les attaques contre les convois d’aide humanitaire. Toute l’assemblée des Nations unies a éclaté de rire (sous cape). Cela lui ferait, évidemment, grand plaisir. Ses rebelles pourraient alors se réarmer, se regrouper et se préparer ouvertement à de nouvelles attaques comme ils l’ont fait pendant le premier cessez-le-feu en février. Non, la Russie et la Syrie ne donneront plus leur accord à ce genre de chose, ni d’ailleurs le Conseil de sécurité des Nations unies. La requête est tout simplement ridicule.

Mais les politesses sont terminées. Le camp syrien/russe est convaincu que les États-Unis ont délibérément attaqué les forces syriennes à Deir Ezzor pour qu’ISIS puisse prendre la ville. Le camp des rebelles/États-Unis (et leurs amis) va se convaincre (en dépit du manque de preuves) que le camp syrien/russe attaque volontairement les hôpitaux et les convois humanitaires. Les paroles prononcées à l’ONU deviennent nettement plus incisives.

Je crains que nous n’assistions bientôt à un nouvelle escalade sérieuse du conflit. Un incident entre des avions américains et russes ou quelque chose comme ça. Cela s’appelle jouer avec le feu dans un entrepôt de dynamite.

L’affaire ne concerne plus la Syrie. Le conflit fait maintenant partie de la campagne électorale américaine. C’est aussi le besoin idiot d’une nation adolescente de montrer à la terre entière qui a les plus grosses couilles. C’est une attitude insensée et criminelle qui causera la mort de beaucoup d’innocents et ne résoudra rien.

Traduction : Marie Staels

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