Trump vs. Warren ou la fausse bataille contre les élites


Par Brandon Smith − Le 20 novembre 2019 − Source Alt-Market.com


Cela semble être un modèle simple et facile à identifier, mais pour une raison ou une autre, le public continue de tomber dans le même piège globaliste. Une tactique bien usée des élites financières, pour attirer l’attention des Américains sur certains candidats politiques fantoche, consiste à encourager ces candidats à utiliser une rhétorique anti-élite, pour ensuite inonder leurs cabinets de ces mêmes élites une fois qu’ils seront au pouvoir. La règle de la politique semble être : “Dites ce que vous voulez pour avoir les gens de votre côté, mais une fois que vous êtes au pouvoir, vous faites ce que nous vous disons…”


Ces candidats attaqueront agressivement les banques, les entreprises et Wall Street, déplorant le déclin rapide de la classe moyenne ou de la “classe ouvrière”. Ils souligneront qu’une simple poignée d’ultra-riches, les 1% les plus riches, contrôlent plus de richesse que près de la moitié de la population combinée. Ils s’empareront des discours plaisant aux “pauvres” et plaideront en faveur d’un “changement” pour rétablir l’équilibre dans le système. Ils feront semblant de dénoncer les crimes de la cabale bancaire et des échelons supérieurs de Wall Street. Ils donneront un grand spectacle, puis ils obéiront aux ordres de leurs maîtres et joueront le rôle pour lequel ils ont été préparés…

Les Américains sont nuls pour détecter les faux “candidats du peuple” et ils l’ont toujours été.

Mais je devrais peut-être m’étendre sur ce point avec des exemples concrets. Je vais commencer par Jimmy Carter, qui a débuté sa campagne présidentielle avec un taux de 4 % dans les sondages du parti Démocrate. Carter a explosé en popularité après avoir attaqué ce qu’il appelait les “initiés de Washington”, les élites qui dirigeaient le spectacle de l’autre côté du rideau. Un livre de poche largement distribué qui a fait la promotion de Carter au cours de sa campagne intitulée “I’ll Never Lie To You : Jimmy Carter In His Own Words / Je ne vous mentirais jamais : Jimmy Carter avec ses propre mots” a cité le candidat en ces termes lors d’un rassemblement à Boston :

Les gens de ce pays savent par amère expérience que nous n’obtiendrons pas de changements simplement en changeant les pions dans le même groupe d’initiés.

Son propre meilleur assistant, Hamilton Jordan, a promis :

Si, après l’inauguration, vous trouvez un Cy Vance comme secrétaire d’État et Zbigniew Brzezinski comme chef de la sécurité nationale, alors je dirais que nous avons échoué. Et je démissionnerais.

Carter a été dépeint comme un homme d’État libre de tout lien avec les globalistes ; un homme religieux et un véritable chevalier blanc pur dans ses associations. Cette image était considérée à l’époque comme une image importante à maintenir. Après l’assassinat de John F. Kennedy, la candidature à la présidence du véritable anti-globaliste Barry Goldwater et le rôle très discutable d’Henry Kissinger dans l’administration de Richard Nixon, le public était de plus en plus méfiant quant à la nature du gouvernement et au véritable responsable. Carter a d’abord été perçu comme un remède à la méfiance du public.

Bien sûr, dès son entrée en fonction, Carter n’a pas engagé moins de dix membres de la Commission trilatérale globaliste et de nombreuses autres élites à des postes clés de son administration, dont Cy Vance et Zbigniew Brzezinski. Et bien sûr, son meilleur assistant n’a jamais démissionné. Les élites savaient exactement ce que le public voulait à ce moment-là de l’histoire, alors elles le leur ont donné sous la forme de Jimmy Carter. L’administration de Carter allait servir de nombreux intérêts globalistes, mais cela attira la colère du public américain, qui s’est senti trahi.

Que diriez-vous d’un autre exemple de faux antiglobalistes et d’anti-élites ?

Entre en scène Ronald Reagan, l’anti-Carter. Le conservateur (et ancien Démocrate) qui n’avait pas peur de signaler que Carter était entouré de goules de la Commission trilatérale et de mettre en doute son honnêteté. Reagan attaqua Carter tout en gardant une certaine distance par rapport à un langage “conspirationniste”. Reagan a déclaré en 1980 au cours de sa campagne :

Je ne crois pas que la Commission trilatérale soit un groupe de conspirateurs, mais je pense que ses intérêts sont consacrés aux banques internationales, aux sociétés multinationales, etc. Je ne pense pas qu’aucune administration du gouvernement des États-Unis ne devrait voir les dix-neuf postes les plus importants occupés par des personnes d’un groupe ou d’une organisation représentant un seul point de vue. Non, j’irai dans une autre direction…

Reagan, comme Carter, a été vanté comme n’ayant aucune affiliation avec les élites. Il était pur et non souillé par les globalistes. Hélas, Reagan a aussi rapidement choisi au moins dix membres de la Commission trilatérale pour son équipe de transition une fois élu, et il a servi les intérêts des élites tout au long de ses deux mandats à la Maison-Blanche (pour la plupart) sous l’œil attentif de George H.W. Bush.

Si cela commence à vous sembler familier, vous êtes probablement plus éveillé et conscient que la plupart des gens. Les élites utilisent les mêmes stratégies encore et encore et encore, généralement avec des variations mineures pour garder les choses fraîches. Comme beaucoup de mes lecteurs le savent bien, je n’ai cessé de souligner l’image anti-globaliste frauduleuse de Donald Trump ces dernières années, et son administration a suivi un chemin très similaire à ceux décrits ci-dessus, avec quelques différences importantes.

Trump a mené sa campagne en tant que populiste et adversaire des élites. Son image est celle d’une personne qui n’a pas été touchée par l’influence de l’establishment. En fait, l’argument principal parmi ses partisans était que Trump était “si riche” qu’il “ne pouvait être acheté”. Il a critiqué Hillary Clinton et ses liens étroits avec des banques comme Goldman Sachs et a annoncé qu’une fois au pouvoir, il “drainerait le marais” des intérêts spéciaux à Washington.

Il a également lancé des accusations audacieuses contre la Réserve fédérale, soulignant que la soi-disant “reprise économique” et le réveil des marchés boursiers étaient une fraude ; une bulle créée par des stimuli et des taux d’intérêt presque nuls dont il ne voulait pas hériter. Trump était encore un autre chevalier blanc pur prêt à dénoncer et à combattre le dragon globaliste.

Comme beaucoup de militants de la liberté le savent maintenant, Trump est la chose la plus éloignée possible d’un anti-globaliste. Comme Carter et Reagan, Trump a rapidement chargé son cabinet d’élites du Council on Foreign Relations, Goldman Sachs, JP Morgan, etc. Son passé n’était pas non plus si pur ; Trump avait en fait été acheté, une vingtaine d’années à l’avance, par la famille Rothschild. Wilber Ross, agent Rothschild, est l’homme qui a négocié l’accord pour sortir Trump de ses dettes massives dans ses multiples propriétés à Atlantic City, sauvant ainsi la fortune de Trump et son image. Aujourd’hui, Wilber Ross est le secrétaire au commerce de Trump.

Trump a également complètement changé sa position sur l’économie, s’attribuant tout le mérite de la bulle boursière ainsi que des faux chiffres du PIB et des faux chiffres du chômage qu’il avait attaqués pendant sa campagne. M. Trump a maintenant complètement lié son administration à la “bulle de Tout” – une bulle qui a éclaté et qui se dégonfle maintenant en une dure récession.

Le personnage théâtral de Trump est différent de celui de Carter et Reagan à plusieurs égards. Tout d’abord, à l’époque Carter, le public avait une plus grande confiance dans les médias grand public, et ainsi, Carter a été présenté comme le chouchou des médias. Aujourd’hui, la majorité du public a un profond dégoût pour les médias, et ainsi, Trump a été présenté comme leur ennemi ; une épine dans leur pied. Les attaques médiatiques contre Trump ne lui ont valu qu’une plus grande attention et faveur de la part des conservateurs et des indépendants.

Deuxièmement, le rôle de Trump en tant qu’anti-globaliste dans le scénario du nouvel ordre global est beaucoup plus important pour les élites que Carter ou Reagan. Trump est destiné à devenir un symbole de tous les anti-globalistes, un point de jonction et un représentant de l’activisme pour la souveraineté. Il est destiné à coopter l’ensemble du mouvement pour la liberté, puis à le faire sombrer dans l’oubli. En d’autres termes, alors que l’économie s’effondre autour de Trump, les conservateurs et les partisans de la liberté sont rendus coupables par association.

Trump sert les élites en se faisant passer pour un anti-establishment pur et dur tout en s’attribuant le mérite de leur action économique, sans parler du blâme pour l’effondrement de la bulle créée par ce même establishment.

Mais que se passera-t-il après Trump ? Qui est le prochain à jouer le rôle principal dans le théâtre globaliste pour les masses américaines ? Encore une fois, il est important de se rappeler que les élites ne sont pas très imaginatives, mais qu’elles ont beaucoup de pratique avec des tactiques éprouvées et véritables. Elles nous présenteront un candidat résolument anti-Trump, mais qui poursuit également certains projets que Trump a initiés.

Laissons maintenant entrer en scène Élizabeth Warren …

Warren est encore un autre candidat qui est vendue comme “non affilié” avec les élites. Son image de “fille d’un concierge” du Midwest américain, qui a réussi en tant que femme dans un “monde d’hommes”, est fortement véhiculée dans les médias. Mais voici pourquoi je pense que Warren est l’anti-thèse politique la plus probable à Trump et le candidat Démocrate le plus probable ; le scénario s’écrit tout seul …

Considérez ceci – Warren grandit dans une famille de la classe moyenne inférieure de l’Oklahoma, la fille d’un modeste travailleur dans les services. Trump a grandi riche, le fils d’un magnat de l’immobilier qui hérite d’une fortune.

M. Trump est un homme d’affaires milliardaire et membre du 1 % dont les politiques économiques et les réductions d’impôt ont toujours favorisé les sociétés et les marchés boursiers plutôt que la classe moyenne. Warren prétend qu’elle est “capitaliste”, mais veut des restrictions sur les rachats en bourse et sur Wall Street en général, l’accusant de n’être rien de plus qu’un générateur d’argent pour les super riches.

M. Trump a fait face à la faillite à de nombreuses reprises et son administration approche les plus hauts niveaux d’endettement nationaux, des consommateurs et des entreprises de l’histoire américaine. Warren a de l’expérience et une formation en droit de la faillite.

M. Trump s’attribue tout le mérite de la bulle économique et se vante régulièrement de son influence sur les marchés tout en ignorant complètement l’effondrement des fondamentaux ainsi que ses propres mises en garde en 2016. Warren est le seul candidat Démocrate à ce jour à prédire un effondrement économique à court terme.

Les différences d’image sont importantes ici, mais il y a aussi quelques similitudes entre Trump et Warren en termes de politique.

Les politiques économiques de Trump exigent des taux d’intérêt de plus en plus bas et des niveaux plus élevés de stimulation de la banque centrale afin de fonctionner – planche à billets, NdT. Il n’obtiendra pas exactement ce qu’il veut, mais il exige tout de même une intervention sans fin de la banque centrale. Elizabeth Warren est une partisane de l’économie néoclassique, qui est étroitement liée à l’économie keynésienne. Mme Warren siégeait également au comité de surveillance du renflouement avec le TARP et peut affirmer qu’elle connaît très bien les mesures de stimulation monétaire. Le QE4 réel et les taux d’intérêt proches de zéro (et pas seulement les achats sur le marché Repo) seraient plus probables sous Warren, après l’“effondrement de Trump”.  En fait, il est probable que Warren demanderait et ferait adopter des politiques de type TMM (théorie monétaire moderne).

Trump a institué des mesures tarifaires agressives contre la Chine et la guerre commerciale se poursuit sans relâche jusqu’à présent. Warren veut aussi continuer les politiques d’une ligne dure contre la Chine, tout en blâmant Trump pour avoir déclenché le conflit en premier lieu.

Enfin, comme Trump, Warren a longtemps été un faucon en faveur d’Israël et il est probable que les troupes américaines resteront au Moyen-Orient pendant de nombreuses années encore si elle est élue. Elle critiquera certains aspects de la politique palestinienne d’Israël pour faire appel à la base Démocrate. Mais, comme Trump, ses actions ne correspondront pas à sa rhétorique.

Le montage de cette histoire est presque trop parfait. Une fille de la classe moyenne du Midwest, une professionnelle qui s’est construit seule sa propre carrière affronte un milliardaire arrogant et orgueilleux et le 1 %. Les électeurs Démocrates adorent ce genre de film. Mais cela ne s’arrête pas là….

Les attaques de Warren contre les milliardaires attirent de plus en plus l’attention des médias, et les médias adorent ça. Sa dernière campagne publicitaire a critiqué quatre hommes riches par leur nom, dont Leon Cooperman, Joe Ricketts, l’ancien PDG d’Ameritrade, Lloyd Blankfein, l’ancien PDG de Goldman Sachs et l’investisseur Peter Thiel. Certains de ces hommes ont réagi publiquement et avec colère, et c’est ainsi qu’une autre grande farce de lutte des classes commence et propulse un autre candidat prétendument anti-establishment vers la célébrité.

Mais le problème, c’est que l’impôt sur la fortune de Warren n’est pas si anti-étatique. Des élites comme Warren Buffet et Bill Gates réclament ouvertement des impôts plus élevés pour les super riches. Parallèlement à l’impôt sur la fortune, sa position en matière de changement climatique est perçue comme un coup de pouce aux compagnies pétrolières et à la structure du pouvoir financier. Pourtant, ses politiques sont presque exactement conformes au New Deal Vert et à l’Agenda 2030 de l’ONU, que les globalistes souhaitent vivement.

L’image de Warren en tant qu’anti-establishment ? C’est aussi faux que l’image de Trump.

Warren a été présenté à plusieurs reprises dans le magazine Foreign Affairs, le magazine officiel du Council On Foreign Relations. En outre, ils ont publié son article “Une politique étrangère pour tous : renforcer la démocratie – au pays et à l’étranger”. Pour ceux qui ne le savent pas, le CFR est la première organisation globaliste et sa liste de membres est saturée de nombreuses élites milliardaires contre lesquelles Warren prétend se dresser. Pourtant, elle a courtisé Foreign Affairs à de nombreuses reprises et ils ont écrit à son sujet favorablement.

Un autre petit fait intéressant est que le CFR ne publie pas souvent des articles de candidats à la présidence. En fait, les candidats qui font publier leurs articles par Foreign Affairs ont tendance à devenir présidents, ou à obtenir une augmentation massive de leur nombre de votes et de leur soutien financier. Un exemple de cela serait Richard Nixon, qui a subi un flot d’échecs de campagne jusqu’à ce que son article “Asia after Vietnam” soit publié dans Foreign Affairs en octobre 1967. Un peu plus d’un an plus tard, il est entré à la Maison-Blanche. Un autre exemple est celui de Barack Obama, qui a publié des articles dans Foreign Affairs au début de sa campagne de 2008. L’acceptation d’un article par le CFR semble être un signal que le candidat en question est prêt à être utile à l’establishment.

La forte poussée de Warren dans les sondages par rapport à des candidats comme Joe Biden a commencé quelques mois après la publication de son article dans le magazine du CFR. Jusqu’à présent, elle est la seule candidate à avoir eu l’honneur d’écrire un article dans ce magazine.

Cela signifie-t-il que les élites veulent que Warren prenne le dessus sur Donald Trump en 2020 ? Pas nécessairement. Il est encore trop tôt pour identifier la tendance et les signaux pour les prochaines élections. Je crois que le printemps prochain apportera des éclaircissements à ce sujet. Toutefois, il n’en demeure pas moins que presque tous les candidats auxquels le système accorde une attention sérieuse sont contrôlés ou cherchent à obtenir la faveur des élites. Le processus électoral est très contrôlé. Les bonnes gens n’ont pas le droit de passer à travers les mailles du filet. Ceux qui s’en approchent sont ridiculisés, puis sont ignorés jusqu’à ce que leurs campagnes s’évanouissent dans l’obscurité.

Les candidats qui servent les intérêts des élites reçoivent une attention sans fin dans les médias, tantôt positive, tantôt négative, mais ils ne sont jamais ignorés. Et, surtout, les candidats les plus susceptibles d’être élus à la présidence sont ceux qui prétendent être anti-étatiques. C’est ce qui se vend auprès du public américain, et les globalistes le savent. Warren suit ce modèle, tout comme Trump.

Brandon Smith

Traduit par Hervé, relu par jj pour le Saker Francophone

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