Snowden et le contrôle électronique du parc humain


Par Nicolas Bonnal – Juin 2019 – Source nicolasbonnal.wordpress.com

Nicolas BonnalL’expression parc humain vient de l’incertain Sloterdjik, néo-penseur allemand des nullissimes nineties, aujourd’hui bien oublié. Elle me paraît pourtant bonne. Pour savoir comment nous avons été domestiqués par le marché et par l’étatisme moderne, on relira les classiques que je n’ai cessé d’étudier ici-même : Debord, Mattelart, Marx, Heidegger, Tocqueville et bien sûr Platon (le chant VIII j’allais dire, de la République, qui précise comment on ferme les âmes, pour retourner l’expression du bon maître Allan Bloom). Parfois un contemporain comme l’historien américain Stanley Payne résume très bien notre situation de résignés, d’anesthésiés et de petits retraités de l’humanité. Comme dit l’impayable Barbier, les retraités ont pardonné à Macron. Alors…

J’ai écrit trois livres, tous différents, sur Tolkien en insistant sur le point essentiel de son grand-œuvre populaire dont je pensais qu’il ouvrirait nos âmes (mais quelle forfanterie, mais quelle erreur encore…) : ne pas utiliser les armes du système. Or en utilisant sa matrice électronique et son medium-message, nous n’avons fait que le renforcer. À preuve la lâcheté et l’indifférence dont nous avons fait preuve le jour où ce bon système est venu, avec ses loups et ses agents, arrêter le plus célèbre des nôtres, le malheureux (et pas même martyr, parce que pas très courageux non plus) Assange. En prétendant lutter contre le système en cliquant nous l’avons renforcé, utilisant son terrain, alors que Sun Tze nous recommande de ne pas le faire.

Mettez-vous au faite du terrain et choisissez ce qu’il y aura de plus avantageux pour vous…

Or en se mettant dans l’espace virtuel où nous sommes contrôlés vingt-quatre heures sur vingt-quatre… Mais passons. J’ai eu assez de clics contre moi (« mais pour qui ce méprisant se prend, je suis rebelle moi, mais le système s’écroule quoi ») pour savoir où j’en suis.

Un qui semble avoir compris cette réalité de nos royaumes peu combattants est le réfugié Snowden, rongé par le calvaire juridique que subissent, du fait de leur aide, plusieurs de ses anciens amis. Snowden ne voit pas du tout le système en crise, et il a bien raison Snowden. Le système devenu tout-puissant dans les années 2010 (migrants, Libye, Syrie, théorie du genre, Facebook-Twitter, métastase du contrôle fiscal, intellectuel, facial…) triomphe aussi avec ses adversaires chinois ou russes (merde, depuis quand ces deux puissances incarneraient la liberté ?). Le système triomphe et nous dévore exsangues. Il laissera la chair comme ces pumas qui ne se repaissent que du sang des brebis dans mes pampas. Et on consommera sans sourciller cette chair quand on nous interdira la consommation de viande.

On l’écoute alors, Snowden, repris par ZeroHedge.com, le blog du gloom and doom qui ne s’est jamais fait trop d’illusion sur notre résistance néostalinienne ou identitaire.

Le lanceur d’alerte de la NSA, Edward Snowden, a déclaré jeudi que les personnes dans les systèmes de pouvoir avaient exploité le désir humain de se connecter afin de créer des systèmes de surveillance de masse. Snowden  est apparu à l’Université Dalhousie de Halifax, en Nouvelle-Écosse, via une vidéo en direct de Moscou, pour prononcer un discours liminaire sur la série de dialogues ouverts de l’université canadienne.

La suite n’avait rien de rassurant. On imagine le décor du Ghost Writer de Polanski ou d’un championnat mondial et glacial d’échecs (le film de Zwick sur Bobby Fisher était aussi très bon) :

Pour le moment, a-t-il dit, l’humanité est dans une sorte de “moment atomique” dans le domaine de l’informatique. “Nous sommes en train de procéder à la plus grande redistribution du pouvoir depuis la révolution industrielle, et cela est dû au fait que la technologie offre une nouvelle capacité”, a déclaré Snowden.

Le techno-servage que j’évoquais dans mon livre sur Internet, nouvelle voie initiatique, est en place :

“C’est une influence qui touche tout le monde à tout endroit”, a-t-il déclaré. “Elle n’a aucun respect pour les frontières. Sa portée est illimitée, si vous voulez, mais ses garanties ne le sont pas.”  Sans de telles défenses, la technologie peut affecter le comportement humain.

Le grand triomphateur est le pouvoir bancaire-institutionnel qui peut nous priver à tout moment de notre liberté ou même… de notre argent (mot plus éclairant que liberté) :

Les institutions peuvent “surveiller et enregistrer les activités privées des personnes sur une échelle suffisamment large pour que nous puissions dire que cela est proche de la toute-puissance”, a déclaré Snowden. Ils le font via “de nouvelles plateformes et de nouveaux algorithmes”, grâce auxquels “ils peuvent changer notre comportement. Dans certains cas, ils sont capables de prédire nos décisions – et aussi de les pousser – à des résultats différents. Et ils le font en exploitant le besoin humain d’appartenir.

Les gens se sont jetés sur Facebook. Et pourtant…

“Nous ne nous inscrivons pas pour cela”, a-t-il ajouté, écartant ainsi l’idée que les gens sachent exactement à quoi s’en tenir avec les plateformes de médias sociaux comme Facebook.

“Combien d’entre vous qui ont un compte Facebook lisent réellement les conditions d’utilisation?” demanda Snowden. “Elles consistent en des centaines et des centaines de pages de jargon juridique que nous ne sommes pas qualifiés pour lire et évaluer – et pourtant, elles sont considérés comme contraignantes pour nous.”

Le contrôle par les algorithmes. On se souvient de ces cathos extatiques qui partaient se faire casser la gueule dans les rues pour défendre « la famille », et qui une fois leurs cathédrales incendiées ou occupées par les islamistes, se sont empressés d’aller voter LREM à Paris ou ailleurs. Dix ans de dressage face de bouc par les algorithmes-système cela vous reformate un cerveau. De toute manière, voter pour le reste des partis… Lisez le dernier texte de Dimitri Orlov, très bon là-dessus.

Puis Snowden résume le piège. Comme toujours, l’enfer était pavé de bonnes intentions « (vous serez comme des dieux …) » :

“C’est grâce à ce type de connexion technologique impie et à une sorte d’interprétation inhabituelle du droit des contrats “, a-t- il poursuivi, “que ces institutions ont été en mesure de transformer cette plus grande vertu de l’humanité, à savoir le désir d’interagir et de connecter coopérer et partager – transformer tout cela en une faiblesse “.

“Et maintenant”, a-t-il ajouté, “ces institutions, à la fois commerciales et gouvernementales, s’en sont inspirées et … l’ont structuré et l’ont ancré là où elles sont devenues le moyen de contrôle social le plus efficace de l’histoire de notre espèce. ”

“Peut-être que vous en avez entendu parler”, a déclaré Snowden. “C’est une surveillance de masse.”

Quand je vois ces ados ou ces vieux  le nez piqué dans leur smartphone (smart désigne la douleur en saxon, la mort en russe) je me dis que nous avons du souci à nous faire ou à botter en touche.

Une solution ? Celle qu’indiquait Carl Schmitt dans son maître-opus sur le Partisan : le tellurisme. C’était celle aussi du cosmonaute dans 2001 : éteindre l’ordinateur-système pour repasser en contrôle manuel.

Nicolas Bonnal sur Amazon.fr

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Sources

  • ZeroHedge.com
  • Nicolas Bonnal – Internet nouvelle voie initiatique (Les Belles Lettres) ; Les mystères de Stanley Kubrick (éditions Dualpha).
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2 réflexions sur « Snowden et le contrôle électronique du parc humain »

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  2. Ping : Lunaison du 03 juin au 01 juillet 2019 – Astropopote

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