Par James Petras – Le 28 août 2016 – Source The Unz Review
La une du Financial Times porte un logo qui proclame : «Sans crainte et sans complaisance». En effet, les rédacteurs ne manifestent aucune crainte quand il s’agit de… fabriquer des mensonges, promouvoir des guerres impériales décimant des pays et appauvrissant des millions de gens, que ce soit en Libye, en Syrie, en Irak, en Afghanistan, au Yémen et maintenant au Venezuela. Les courageux de Lies of Our Times 1 ont été à l’avant-garde pour forger des prétextes visant à inciter les armées impériales à écraser des gouvernements indépendants.
Malgré ses plumitifs prétentieux et ses revendications prestigieuses, le FT est vu par la classe financière anglo-américaine, comme un pourvoyeur belliqueux de politiques militaristes conçues pour les secteurs les plus rétrogrades de l’élite dirigeante.
Ce qui est le plus frappant, dans les inventions courageuses du FT au nom du militarisme impérial, est le nombre de fois où leurs pronostics politiques et économiques ont été incompétents et totalement faux.
Ces dix dernières années, les pages éditoriales du FT ont décrit la Chine en crise économique et courant à sa perte, alors qu’en réalité, l’économie chinoise a connu une croissance de 6% à 8% par an. [Il semble que la croissance soit quand même bien surévaluée depuis un bon moment, NdT]
Depuis plus de quinze ans, les rédacteurs du FT ont affirmé que la Russie, sous le président Vladimir Poutine, constituait une menace existentielle internationale pour «l’Occident». En fait, ce sont les armées occidentales de l’OTAN, qui ont déployé des opérations militaires aux frontières de la Russie, les États-Unis qui ont financé un groupe néo-fasciste à Kiev, et les États-Unis et l’Union européenne qui ont encouragé un soulèvement islamiste en Syrie, destiné à ruiner totalement l’influence et les relations de la Russie au Proche-Orient.
Les gourous économiques du FT et ses principaux chroniqueurs ont prescrit les formules dérégulatrices catastrophiques qui ont précipité la crise financière de 2008-2009, après quoi ils ont joué le rôle clownesque de Mickey the Dunce [bouffon, NdT] – blâmant les autres pour les politiques ratées.
Les intrépides scribes du FT mènent actuellement une virulente campagne de propagande, pour promouvoir le renversement violent du gouvernement démocratiquement élu du président Nicolas Maduro.
Cet article identifiera le dernier paquet de mensonges et d’inventions audacieux du FT, puis se conclura par l’analyse des conséquences politiques pour le Venezuela et d’autres régimes indépendants.
Le Financial Times et le Venezuela : de la guerre dans les salons à la terreur dans les rues
Dans sa couverture de la crise au Venezuela, le FT a systématiquement ignoré la compagne en cours, d’agressions et d’assassinats contre des responsables élus, des agents de sécurité, militaires et policiers qui ont été assassinés par «l’opposition» que le FT privilégie.
Le FT n’a pas couvert les meurtres épouvantables d’une membre chaviste élue au Congrès et de ses deux jeunes enfants, qui ont été exécutés (d’une balle dans la tête), en plein jour, par des tueurs payés par l’opposition.
Ces campagnes de terreur de l’opposition contre le gouvernement élu et le grand public sont systématiquement ignorées dans les «rapports» du FT et dans ses pages éditoriales, qui se concentrent davantage sur la pénurie de biens de consommation.
La dissimulation par le FT de la terreur de droite a été jusqu’à inventer un «possible» plan de l’armée ou de la Garde nationale pour ouvrir le feu sur les manifestants de l’opposition. Dans ce cas, le FT a anticipé la violence de droite en rejetant par avance le blâme sur le gouvernement.
Le FT dissimule la campagne de l’opposition de l’élite d’affaires, qui thésaurise les biens de première nécessité pour provoquer des pénuries artificielles et les achats de panique. Ils nient les prix abusifs et pointent exclusivement la «mauvaise gestion du régime» pour les pénuries et les longues queues devant les magasins.
Le FT omet commodément de mentionner que la baisse des prix mondiaux du pétrole a affecté non seulement l’économie du Venezuela, mais de tous les pays qui dépendent des exportations des produits de base, y compris les régimes néolibéraux favoris du Financial Times au Brésil et en Argentine.
Le Financial Times cite des sondages d’«opinion» bidon, qui exagèrent dramatiquement la baisse de popularité du gouvernement : lors des dernières élections, les partisans de Maduro ont obtenu 40% du vote populaire, alors que le FT affirme que le soutien était de 7% !
Les régimes clients des États-Unis (le Mexique, le Pérou et la Colombie) sont les plus grands producteurs de drogues illégales et les banques sont les plus grands blanchisseurs de l’argent de la drogue. Pourtant le FT parle du «rôle du Venezuela comme canal pour la contrebande de drogues illégales, au nord vers les États-Unis et à l’est par le Brésil, l’Afrique et de là vers l’Europe». Les experts de la lutte contre la drogue sont tous d’accord pour dire que la Colombie, qui héberge sept bases militaires américaines et qui est dotée d’un régime étroitement lié aux narco-gangs paramilitaires, est la source des drogues passées en contrebande au Venezuela. Le fait que le Venezuela soit devenu une victime du violent commerce de drogue colombien n’est jamais reconnu par les élégants prostitués de la plume de la City de Londres.
Le FT accuse le gouvernement de gauche de Maduro pour la réapparition de «la malaria et d’autres maladies possibles». En fait, la récente «épidémie de paludisme» (également citée par les propagandistes du New York Times) se fonde sur une seule mine d’or illégale.
Le FT ignore comment les régimes néolibéraux soutenus par les États-Unis, en Argentine et au Brésil, ont réduit les programmes publics de santé, ouvrant la voie à beaucoup plus de crises sanitaires pour la population.
Le Financial Times : de gros mensonges pour l’assassinat de masse
Le Financial Times mène une guerre de propagande tous azimuts avec un but : inciter à la prise du pouvoir violente au Venezuela, par les clients politiques des États-Unis.
En accord avec la politique «changement de régime par tous les moyens» des Obama-Clinton, le FT dépeint de manière trompeuse le Venezuela affrontant «des crises multiples», représentant une menace «déstabilisante» pour l’hémisphère, et au bord d’une «crise humanitaire» globale.
Armées de ces clichés mortels, les pages éditoriales du FT demandent «un nouveau gouvernement bientôt et certainement avant les élections de 2018».
Récemment, le FT a proposé un gadget juridique bidon – un référendum révocatoire. Cependant, comme l’opposition ne peut pas convoquer le vote à temps pour éjecter le président Maduro, le FT appelle à «des événements qui précipitent les changements plus tôt» – un coup d’État violent !
Les scénarios du FT visent à précipiter une «marche» violente de l’extrême-droite, provoquant finalement une effusion de sang parmi la population civile, au début de septembre de cette année.
Le FT escompte que «le sang à Caracas exige une réponse latino-américaine active» [sic]. Autrement dit, le FT espère qu’une invasion militaire soutenue par les États-Unis via la Colombie voisine contribuera à éliminer les chavistes et à installer un régime de droite.
Le Financial Times, qui a activement soutenu la destruction du gouvernement en Libye conduite par l’OTAN, appelle maintenant à une invasion du Venezuela dirigée par les États-Unis. Sans jamais remettre en cause sa promotion du changement de régime, le FT appelle maintenant à un coup d’État violent au Venezuela, qui dépassera celui provoqué en Libye en termes de perte de milliers de vies vénézuéliennes et de renversement brutal d’une décennie d’importants progrès économiques et sociaux.
«Sans crainte et sans complaisance», le FT parle en faveur des guerres impériales dans le monde entier.
Conclusion
Les élections présidentielles américaines ont lieu au moment où le régime Obama-Clinton se prépare à intervenir au Venezuela. Recourant à des rapports humanitaires bidon sur la famine généralisée, les maladies, la violence et l’instabilité, le plan d’Obama aura pourtant besoin de voyous vénézuéliens pour provoquer suffisamment de violence de rue et inciter à une «invitation» à Washington, de la part de ses partenaires militaires latino-américains, pour intervenir sous les auspices de l’ONU ou de l’OAS (Organization of American States).
S’il «réussit», un renversement rapide du gouvernement élu de Caracas pourrait être présenté comme une victoire pour la campagne d’Hillary Clinton et un exemple de sa politique d’ «interventions militaires humanitaires» dans le monde entier.
Cependant, si l’invasion alliée d’Obama ne débouche pas sur une victoire rapide et facile, si le peuple vénézuélien et son armée organisent une défense prolongée et courageuse de leur gouvernement et si des vies étasuniennes sont perdues dans ce qui pourrait se transformer en une guerre de résistance populaire, alors l’intervention de Washington pourrait finalement discréditer la campagne de Clinton et sa politique étrangère musclée. L’électorat américain pourrait finalement décider de voter contre quatre ans de plus de guerres perdues et de vies perdues. Ce ne sera pas grâce au courageux Financial Times.
Article original paru sur The James Petras Website, reproduit avec l’autorisation de l’auteur ou de ses représentants.
Traduit par Diane, vérifié par Ludovic, relu par nadine pour le Saker francophone
- Magazine politique publié au début des années 1990, voué à l’analyse critique du discours public et à la surveillance du New York Times. ↩
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