Le conflit entre les États-Unis et l’Iran, en Irak, est mis en pause


Par Moon of Alabama – Le 8 avril 2021

Au cours de leur récent dialogue stratégique, les États-Unis et l’Irak ont convenu de transformer les troupes de combat américaines présentes dans le pays en forces de formation et d’assistance. Une déclaration commune dit :

Sur la base de la capacité croissante de l'ISF [Irakian Security Force], les parties ont confirmé que la mission des forces américaines et de la coalition est maintenant passée à une mission axée sur la formation et les tâches de conseil, permettant ainsi le redéploiement de toutes les forces de combat restantes en Irak, le calendrier devant être établi lors des prochaines discussions techniques. La transition des forces américaines et internationales du statut d’opération de combat à celui de formation, équipement et assistance à l’ISF reflète le succès de leur partenariat stratégique et garantit le soutien aux efforts continus de l’ISF pour s'assurer qu’ISIS ne puisse plus jamais menacer la stabilité de l'Irak.

La date du changement effectif d’étiquette n’est pas encore fixée. Des réunions techniques, qui doivent se tenir à l’avenir, sont censées en décider.

Cette décision ne satisfera toutefois pas le parlement irakien, qui avait décidé que toutes les troupes étrangères devaient quitter l’Irak. Cela ne satisfera pas non plus l’« axe de la résistance » constitué par l’Iran, la Syrie et les milices chiites alliées, en Irak et au Liban. Tant que les troupes américaines seront en Irak, elles poursuivront également leur guerre contre la Syrie. Ces troupes doivent partir :

Avant les pourparlers stratégiques entre les États-Unis et l'Irak, le Comité de coordination des factions de la résistance irakienne, qui comprend toutes les milices soutenues par l'Iran, a publié une déclaration exigeant un calendrier précis pour le départ de toutes les forces américaines d'Irak. Le comité a déclaré qu'il ne soutenait les pourparlers stratégiques que s'ils aboutissaient à la fixation d'un calendrier précis pour le départ des États-Unis, faute de quoi les milices recommenceraient à attaquer les bases et les forces américaines en Irak.

Mustafa Al-Kadhimi, qui est devenu Premier ministre en mai 2020, avait promis de satisfaire la demande du Parlement. Il est toutefois connu pour son penchant pour les États-Unis. Il s’est également efforcé de réduire l’influence des milices soutenues par l’Iran :

Ces dernières années, les factions politiques et armées soutenues par l'Iran et leurs alliés ont occupé des postes de haut rang dans divers services de sécurité sensibles, ce qui leur confère un pouvoir étendu.

Le Service national de renseignement, l'Agence de sécurité nationale, le conseiller à la sécurité nationale, l'Agence de renseignement intérieur, la cellule d'élite des Faucons et le Comité technique suprême pour la sécurité de l'information et des communications figurent parmi les plus importantes agences de sécurité officielles que les factions armées et les forces politiques alliées à Téhéran contrôlaient jusqu'à l'année dernière.

Mais Kadhimi a réussi à toutes les arracher des mains de ces factions sous un prétexte ou un autre, ont déclaré des responsables de la sécurité à MEE.

L'Agence de renseignement intérieur et la Cellule des faucons, les unités de renseignement intérieur les plus importantes en termes de capacités techniques et humaines, qui n'avaient pas auparavant utilisé leurs ressources pour poursuivre les factions soutenues par l'Iran, sont entre les mains du premier ministre depuis janvier.

Malgré cette perte d’influence, les différentes forces alliées à l’Iran restent puissantes. L’Irak dépend également de l’électricité et du gaz que lui fournit l’Iran. Kadhimi doit donc tenir compte des intérêts iraniens :

Al-Kadhimi marche sur une corde raide en négociant avec les Américains tout en subissant la pression croissante des milices locales fidèles à Téhéran.

La semaine dernière, un convoi de miliciens chiites lourdement armés a traversé ouvertement Bagdad, dénonçant la présence américaine et menaçant de couper l'oreille d'Al-Kadhimi, une manifestation qui visait clairement à ébranler le premier ministre.

Furieux, Al-Kadhimi a demandé aux dirigeants iraniens de mettre un frein aux milices soutenues par l'Iran et a laissé entendre qu'il allait affronter ces factions, ont déclaré mercredi deux responsables irakiens. Dans cette note, Al-Kadhimi menaçait d'"annoncer clairement qui soutient ces groupes", ont déclaré les responsables.

On ne sait pas à qui ce message était réellement destiné. Le moment choisi suggère qu'Al-Kadhimi, qui semble impuissant face aux milices, cherchait à apaiser les Américains avant les discussions de mercredi.

Ce message a conduit à une visite de deux jours à Bagdad, cette semaine, du chef de la Force Quds des gardiens de la révolution iranienne, Ismail Qaani, qui a rencontré les milices et les dirigeants politiques chiites et a appelé au calme, selon un haut responsable politique chiite irakien.

Si l’Iran souhaite toujours que les États-Unis quittent le Moyen-Orient, il n’est actuellement pas intéressé par un conflit immédiat. C’est pourquoi Ismail Qaani a demandé aux milices alignées sur l’Iran de calmer le jeu. La priorité pour l’instant est le retour des États-Unis à l’accord nucléaire et la levée des sanctions américaines. Si ce processus échoue, la chasse sera à nouveau ouverte. Kadhimi devra alors partir et les « formateurs » américains en Irak seront à nouveau la cible d’attaques directes.

Tout ceci est un mouvement politique tactique. Au niveau stratégique, l’objectif de l’Iran est toujours d’éliminer les États-Unis du Moyen-Orient. Cela prendra toutefois encore du temps.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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