La zone franche de la province de Hainan donne un aperçu de l’avenir de la Chine


Par Adam Garrie – Le 17 octobre 2018 – Source Eurasia Future

La grande réforme de 1978 en Chine  a été rendue possible par la création de zones économiques spéciales (ZES) dans tout le pays. Au milieu des années 1980, la Chine en a créé 20. Dans chaque zone économique spéciale, diverses réglementations, comme celles de la fiscalité, ont été considérablement réduites tandis que ces zones accueillaient des investissements étrangers directs à des conditions très attractives. Elles ont également été la première incursion de la Chine dans le libre-échange qui définit de plus en plus le mode de pensée chinois pour une approche multilatérale de la mondialisation aux caractéristiques chinoises. Enfin, parce que les zones économiques spéciales étaient et restent les piliers du commerce d’exportation, elles ont contribué à faire de la Chine la puissance industrielle mondiale qu’elle est aujourd’hui.

De même que les ZES de l’ère Deng ont contribué à transformer la Chine en la puissance industrielle et d’innovation qu’elle est aujourd’hui, la création d’une nouvelle zone franche (FTZ) dans la province de Hainan, une île du sud du pays, l’aidera à passer à sa prochaine phase économique : celle d’un pays qui ouvre ses portes nationales à un monde de commerce, d’échange de capitaux et de techniques et d’échanges humains.

Le développement actuel de la zone franche de Hainan vise à faire de l’île une zone pratiquement sans barrières commerciales. Hainan deviendra bientôt un endroit où le monde peut venir et vendre ses marchandises à la Chine tandis que ceux qui s’intéressent aux dernières innovations chinoises pourront profiter d’un système commercial totalement ouvert. Selon un rapport officiel de Xinhua,

« En développant la zone franche de Hainan, une étape importante qui démontre la détermination de la Chine à continuer à s’ouvrir et à promouvoir la mondialisation économique, l’île se verra accorder davantage d’autonomie pour réformer et accélérer la promotion d’un environnement commercial international pratique et fondé sur le droit, ainsi que d’un contexte de marché équitable, ouvert, unifié et efficace, selon le plan publié par le Conseil d’État.

Hainan devrait se positionner comme zone pilote pour l’approfondissement global de la réforme et de l’ouverture, une vitrine de la civilisation écologique du pays, un centre international de tourisme et de consommation et une zone offrant services et soutien aux grandes stratégies du pays, selon le plan.

Des efforts devraient être entrepris pour poursuivre une stratégie plus proactive d’ouverture, accélérer la création de nouvelles institutions de l’économie ouverte, faire avancer l’ouverture sur tous les fronts et faire de Hainan une porte d’entrée essentielle dans les océans Pacifique et Indien.

En cherchant à conclure des accords de libre-échange avec de nombreux pays et, ce faisant, à contribuer à harmoniser la facilité de circulation des marchandises dans de multiples directions dans le contexte des Routes de la soie, la Chine vise non seulement à adopter le libre-échange mais à le promouvoir comme moyen d’accélérer la croissance économique chez ses pays partenaires en leur permettant d’acheter et de vendre leurs marchandises sur les grands marchés mondiaux dans un environnement moins bureaucratique et restrictif. Comme il sera également possible de libéraliser les entrées et les sorties de capitaux dans la nouvelle zone franche de Hainan, la Chine présentera au monde un aperçu des décennies futures où un renminbi forcément flottant sera de plus en plus privilégié comme devise internationale et monnaie privilégiée du commerce international.

Tandis que la Chine ouvre l’ensemble de son espace géographique à la libéralisation des échanges, en appliquant la méthode éprouvée de création de zones spéciales pour tester les attitudes nationales et internationales à l’égard de la prochaine phase de son développement économique, Beijing continue d’adopter une stratégie par étapes. Celle-ci permet en effet que les difficultés croissantes inhérentes à tout nouveau changement économique mûrissent dans un environnement autonome facilement contrôlable et modifiable juridiquement en fonction des défis qui surgissent. C’est cette méthode qui a permis aux zones économiques spéciales des années 1980 de transformer l’ensemble du pays. Ainsi, lorsque la zone franche de Hainan sera totalement opérationnelle en 2020, elle pourra constituer un modèle pour les futures relations commerciales entre la Chine et ses partenaires mondiaux.

Le célèbre adage « montre, ne parle pas » s’applique naturellement à la zone franche de Hainan. Si les arguments théoriques peuvent frapper les esprits, voir la théorie mise en acte peut faire de véritables adeptes. En effet, ceux qui sont attirés pour une nouvelle mentalité géo-économique peuvent mieux appréhender celle-ci lorsqu’ils voient comment un tel système fonctionne au quotidien. En ce sens, tandis que Hainan sera une vitrine des dernières innovations chinoises, son système spécial de libre-échange sera un exemple concret du genre d’avenir que la Chine cherche pour elle-même et qu’elle recommande aimablement à des partenaires qui pourraient être indécis quant à leur propre avenir dans un monde toujours plus interconnecté.

Du coup, Hainan devrait figurer sur la carte pour ceux qui s’intéressent à la façon dont la Chine fonctionnera en tant que société modérément prospère. Car c’est la nouvelle fondation de l’ère d’ouverture dans les relations de la Chine avec ses partenaires.

Adam Garrie

Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Diane pour le Saker francophone

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