La « diplomatie énergétique » de la Russie va-t-elle aider le Vietnam et la Chine à conclure un accord ?


Par Andrew Korybko – Le 25 mai 2018 – Source Oriental Review

Rosneft logoRosneft effectue des forages pétroliers au large de la côte du Vietnam donnant sur la mer de Chine méridionale dans une zone revendiquée par la Chine.
 
Le géant russe de l’énergie est impliqué dans le champ pétrolifère « Lan Do » qui touche littéralement la limite sud-ouest de la ligne de neuf traits de la Chine, mais qui est apparemment considéré par la compagnie comme étant sous la souveraineté de facto du Vietnam. La Chine a officiellement appelé tous les pays à respecter ses revendications sans mentionner spécifiquement Rosneft, mais en y faisant clairement référence, signe qu’elle se sent mal à l’aise avec ce dernier développement, même si cela pourrait éventuellement s’avérer être un pas dans la bonne direction.

Pour expliquer le contexte, le Vietnam est sous une forte pression des États-Unis, du Japon, de l’Australie et de l’Inde pour rejoindre de facto ce qui est essentiellement une « coalition pour le confinement de la Chine », bien que cette influence perturbatrice soit contrebalancée par les accords de libre-échange de l’Union eurasienne portée par la Russie et aussi des accords militaires avec son partenaire historique qui ont jusqu’ici réussi à permettre à Hanoï de trouver un équilibre entre les mondes unipolaire et multipolaire de la nouvelle guerre froide.

La controverse au sujet de Rosneft a indirectement plongé la Russie dans le différend sur la mer de Chine méridionale, mais cela pourrait être une bonne chose car Moscou est connue pour favoriser le droit international et les négociations au lieu de pousser ses partenaires à faire la guerre comme le Quad, mené par les USA, est enclin à faire. La Chine n’aimera probablement pas cela parce qu’elle préfère traiter bilatéralement tous les problèmes sensibles dans le cadre d’une politique de longue date, mais elle pourrait y voir progressivement quelque chose de positif.

Rosneft in the South China Sea

Un employé de Rosneft Vietnam surveille depuis la plate-forme de gaz de Lan Tay dans la mer de Chine méridionale au large de la côte de Vung Tau, Vietnam 29 avril 2018

Le nouveau rôle de la Russie pourrait compenser les pressions militaristes de la « Quadrilatérale » en obligeant le Vietnam à envisager d’entamer des négociations avec la Chine à ce sujet, les deux parties étant diplomatiquement réunies à cause des efforts de Moscou. Une solution possible qui pourrait en découler, serait que leur partenaire russe partage l’énergie des régions contestées et partage les profits et les ressources avec chacun d’entre eux selon une formule qu’ils acceptent d’avance dans le cadre d’un règlement pour redéfinir officiellement leur frontière maritime.

La Russie a déjà accepté de développer conjointement les ressources énergétiques situées dans la « zone grise » de l’ancien conflit avec la Norvège, membre de l’OTAN, dans la mer de Barents suite à un accord de 2010. Il est concevable que Rosneft puisse jouer le rôle d’une tierce partie avec ce même type de solution entre le Vietnam et la Chine s’ils parviennent à un accord similaire sur la mer de Chine méridionale. C’est pourquoi, même si cela peut sembler peu probable à l’heure actuelle, la Chine pourrait finir par remercier la Russie de s’impliquer indirectement dans ce conflit.

Le post présenté est la transcription partielle du programme radio CONTEXT COUNTDOWN sur Sputnik News, diffusé le vendredi 25 mai 2018.

Andrew Korybko est le commentateur politique américain qui travaille actuellement pour l’agence Sputnik. Il est en troisième cycle de l’Université MGIMO et auteur de la monographie Guerres hybrides : l’approche adaptative indirecte pour un changement de régime (2015). Ce texte sera inclus dans son prochain livre sur la théorie de la guerre hybride. Le livre est disponible en PDF gratuitement et à télécharger ici.

Traduit par Hervém relu par Cat pour le Saker Francophone

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