Par James Howard Kunstler – Le 22 mars 2019 – Source kunstler.com
Tout comme le légendaire zéphyr printanier, on a appris que le Golem d’or de la grandeur (aussi connu sous le nom de Président Trump) avait signé un décret qui empêchait le financement fédéral des collèges et universités qui ne manifestaient pas leur appui à la liberté d’expression. C’est avec stupéfaction que j’ai vu la suppression épouvantable et hypocrite du premier amendement sur les campus de tout le pays, avec ses ignobles codes sur la parole publique, ses espaces de sécurité ridicules, ses sinistres tribunaux populaires et ses croisades racistes contre les blancs.
Le plus incroyable de tous a été l’échec des présidents d’université, des doyens, des administrateurs et des présidents de faculté à affirmer leur autorité et à faire ce qui s’impose – à savoir, prendre position contre la séquestration par des staliniens de campus qui musellent la libre expression. Leur passivité effrénée est un symptôme de ce que les historiens du futur identifieront comme l’effondrement institutionnel épique de l’enseignement supérieur, qui s’est d’abord transformé en une industrie comme toute autre entreprise d’extraction d’argent, puis en une opération titanesque de racket. Et maintenant, il ne reste qu’à pleurer.
Dans les années à venir, vous verrez les collèges fermer leurs portes à un rythme effarant et la contagion s’étendra aux gigantesques systèmes étatiques du pays. Rien que dans ma petite région, plusieurs collèges ont publié leur propre nécrologie au cours des derniers mois : Green Mountain College à Poultney, Vermont ; Southern Vermont College à Bennington ; et Hampshire College à Amherst, MA (qui cherche désespérément à se faire racheter). Ce n’est que le début d’une vague de fermetures qui enverront des dizaines de milliers de hiérophantes universitaires inonder les pôles-emploi locaux et dormir dans leur voiture.
Il n’est pas difficile de voir comment ce fiasco s’est développé et s’est épanoui. Dans les années 1960, alors que j’étais à l’université, le marxisme offrait un modèle soigné et préétabli pour s’opposer à l’odieux establishment qui s’était enlisé dans la guerre du Vietnam. Les étudiants jouaient alors au moins leur peau dans le jeu : la menace d’être enrôlés dans l’armée et envoyés mourir dans la jungle pour un conflit insensé. En fait, de nombreux jeunes hommes inaptes à l’université s’y réfugiaient pour échapper à la conscription. Puis, avec un marché haussier des doctorats de la génération des baby-boomers, les facultés se sont rapidement remplies d’anciens radicaux des années 60.
Nombre d’entre eux étaient des baby-boomeuses, qui ont entrepris d’expliquer et de corriger l’évolution des relations entre les hommes et les femmes dans le milieu du travail de bureau de l’époque. À ce moment-là, la guerre était terminée. La crise économique des années 1970 a mis fin à la capacité des hommes de subvenir aux besoins d’une famille et un plus grand nombre de femmes ont été forcées d’entrer dans le milieu du travail. Entre-temps, le progressisme radical avait besoin d’un nombre sans cesse renouvelé de nouvelles chairs fraîches se sentant lésées pour justifier son agitation contre les vieux bibelots marxistes des valeurs bourgeoises et l’oppression structurelle – et, incidemment, alimenter les carrières universitaires. D’où la multiplication des victimes en catégories intersectionnelles pratiques.
Dans les années 1980, il est également devenu évident que la législation des droits civiques des années 1960 visant à mettre fin aux lois Jim Crow n’avait pas résolu les dilemmes autour de l’idée de race en Amérique, et cette déception a ravivé la croisade progressiste pour guérir le monde de l’injustice et des inégalités. Tous les autres efforts visant à produire des résultats égaux pour différentes catégories de personnes s’étaient également révélés décevants, de sorte que les progressistes recourent maintenant à la coercition pour imposer à tout prix des résultats égaux, et ce comportement n’est nulle part plus manifeste que sur les campus ces dix dernières années.
L’illusion que tout le monde doit avoir fait des études collégiales a finalement transformé le système d’éducation supérieur en racket, lorsque le gouvernement fédéral a décidé de garantir les prêts collégiaux – ce qui a incité les collèges à augmenter leurs frais de scolarité bien au-delà du taux d’inflation officiel et à entreprendre des programmes d’expansion massive dans la compétition pour la base croissante de clients emprunteurs étudiants. Presque tous les collèges ont joué le rôle de facilitateurs dans ce racket des prêts, bien qu’avec des garanties fédérales, ils ne risquaient pas grand chose dans ce jeu. Aujourd’hui, l’encours des prêts étudiants s’élève à 1 500 milliards de dollars, et environ 40 % d’entre eux ne sont pas performants, dans le jargon euphémique des banquiers. Les étudiants emprunteurs ont été floués, beaucoup d’entre eux financièrement détruits à vie, et ils n’ont fait que commencer à s’exprimer politiquement.
L’anxiété et le remords derrière ce comportement financier ignoble, et la perspective d’une ruine institutionnelle, sont probablement un facteur important derrière les hystéries de justice sociale qui, paradoxalement, ont fait des campus universitaires les lieux les moins intellectuellement libres – et intellectuellement peu sûrs ! – dans le pays. Et ils ont transformé tous ces présidents de fac en lâches et en fripouilles. Puisque la coercition est la seule modification de comportement que les administrateurs des collèges comprennent de nos jours, il est raisonnable que M. Trump utilise les largesses des subventions fédérales comme levier pour mettre fin au despotisme structurel de la culture universitaire. L’économie chancelante s’occupera du reste.
Pour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.
Traduit par Hervé pour le Saker Francophone