La résistance en Irak révèle comment les troupes américaines seront renvoyées du pays
Par Moon of Alabama − Le 14 mars 2020
Hier, les États-Unis ont attaqué cinq sites en Irak et tué trois soldats irakiens de la 19e division, deux policiers et un civil. Les frappes ont eu lieu après qu’une dizaine de roquettes, tirées par des inconnus, ont touché la base commune du camp Tali et tué deux soldats américains et un britannique.
Aujourd’hui, les États-Unis ont reçu la monnaie de leur pièce.
Le Commandement central américain avait fait valoir que la “frappe de précision défensive” contre les cinq sites avait créé une dissuasion, c’est-à-dire qu’elle empêcherait d’autres attaques :
Nous pensons que cela aura un effet dissuasif sur les futures frappes de cette nature. Nous avons vu dans le passé ce qui se passe lorsque vous ne répondez pas. Maintenant, les gens savent que nous n'allons pas - nous n'allons pas tolérer ces attaques directes contre des membres des forces armées américaines ou de la coalition, et nous sommes disposés à répondre et capables de le faire.
Même les analystes faucons trouvent que l’argument est absurde.
Les États-Unis affirment que le groupe Kataib Hezbollah, qui fait partie des Forces de mobilisation populaire (PMF), sous commandement du gouvernement irakien, a tiré les missiles. Mais les positions que les États-Unis ont frappées n’étaient pas des positions du Kataib Hezbollah. Les services de renseignement américains en Irak ne sont pas à jour quant à l’emplacement des unités du Kataib Hezbollah ou de celles des vingt, ou plus, autres groupes des PMF.
TØM CΛT - 12:05 UTC · 14 mars 2020 Après avoir interrogé une source militaire de la 19e Division de Commando au sujet de l'installation d'Al-Atheer et la présence de "missiles iraniens", la réponse que j'ai reçue a été que Kataib Hezbollah s'est retiré du site il y a 7 jours et que l'unité a pris sa place. Alors oui, le site de Mussayib était sous contrôle de l'armée irakienne.
Les forces britanniques étaient censées se joindre à la frappe américaine d’hier, mais le Wall Street Journal rapporte que les Britanniques ont été rappelés par leur gouvernement parce que l’attribution de la frappe initiale de roquettes à Kataib Hezbollah n’était pas évidente et qu’il n’y avait aucune justification légale pour ces frappes.
Le gouvernement irakien a annoncé qu’il protesterait aux Nations Unies contre la violation de sa souveraineté par les États-Unis. L’ayatollah Sistani a condamné l’attaque américaine et même le Commandement opérationnel conjoint en Irak, qui inclut des officiers américains, a protesté contre les frappes.
Le parlement et le gouvernement irakiens ont demandé aux États-Unis de quitter l’Irak. L’administration Trump n’est pas disposée à le faire. En conséquence, davantage de soldats américains devront mourir en Irak.
Le fait que les frappes de «dissuasion» n’aient rien découragé a été prouvé aujourd’hui lorsqu’une autre salve de roquettes a été tirée sur le camp Taji, en plein jour :
Une grêle de roquettes a atterri samedi matin sur une base militaire abritant des troupes des États-Unis et d'autres troupes de la coalition au nord de Bagdad, blessant trois soldats de la coalition et deux soldats irakiens. La même base, Camp Taji, a été la cible d'une attaque à la roquette mercredi qui a tué trois militaires, dont deux Américains et un Britannique.
Les États-Unis en Irak ne combattent pas certains groupes “soutenus par l’Iran” mais sont une force d’occupation et donc une cible légitime pour les forces gouvernementales irakiennes :
"Nous ne pouvons pas oublier que les PMF sont une entité reconnue au sein des forces de sécurité irakiennes; ils ne sont pas isolés des forces de sécurité et sont souvent installés sur les mêmes bases ou utilisent les mêmes installations », a déclaré Sajad Jiyad, chercheur et ancien directeur général du Bayan Center, un groupe de réflexion basé à Bagdad. "Maintenant, les groupes (soutenus par l'Iran) qui ont participé à la frappe initiale à Taji, qui étaient les plus francs, se sentent obligés, autorisés, voire même légitimés de répondre, apparemment pour protéger la souveraineté irakienne mais en réalité pour maintenir la pression sur les Américains", a-t-il ajouté.
“Il n’y a plus de lignes rouges”, a expliqué Jiyad.
J’ai parié $10 que le “(soutenu par l’Iran)” dans cette citation ne vient pas de Sajad Jiyad mais a été ajouté par l’auteur ou l’éditeur de NBC / AP. Sajad Jihad souligne souvent que ces groupes ont des motifs et des moyens d’agir par eux-mêmes.
Rajout de dernière minute : Sajad Jihad m’a maintenant confirmé que les mots stigmatisant entre parenthèses ne venaient pas de lui mais avaient été ajoutés par les rédacteurs de NBC / AP.
La police irakienne a trouvé le site de lancement d’où a été tirée la roquette d’aujourd’hui. Ses photos en disent long sur la façon dont ce combat se poursuivra jusqu’à ce que les forces d’occupation américaines quittent l’Irak.
Il s’agit d’une position camouflée fixe sous un toit. Elle a probablement été construite il y a des mois, voire des années. Les tranchées pour les lanceurs ont été creusées dans le sol d’une remise. Les lanceurs ont déjà été ajustés dans la direction prévue de la frappe. Pour lancer les roquettes, il faut simplement soulever le camouflage, soulever le lance-roquettes par l’avant et positionner la crémaillère de réglage de la hauteur. Un homme peut le faire en quelques minutes. La commande de lancement électrique proviendra alors d’une télécommande par fil ou par un téléphone portable.
La configuration de la position rappelle l’une des positions similaires que le Hezbollah libanais a construites au Liban et le Hamas à Gaza. Les personnes qui ont créé ce poste de lancement en Irak semblent avoir reçu une formation par un personnel expérimenté.
S’il y a une position aussi bien préparée au Camp Taji, combien y en a-t-il d’autres ? Dix ? Cent ? Ou même un millier ? Combien en existe-t-il autour d’autres sites en Irak où des troupes américaines sont stationnées ?
Les frappes précédentes provenaient de plates-formes mobiles. Que la résistance en Irak révèle maintenant l’un de ses sites de lancement fixes camouflés est intentionnel. C’est un avertissement aux États-Unis de réfléchir aux questions ci-dessus et aux conséquences potentielles.
Ces sites de lancement secrets sont une véritable dissuasion. En 2006, Israël a attaqué le Hezbollah au Liban dans le but de désarmer le groupe. Mais les défenses du Hezbollah étaient tenaces et des centaines de roquettes ont été tirées chaque jour contre les positions israéliennes. Les bombardiers israéliens ont ensuite tenté de trouver les sites de lancement mais ceux-ci étaient cachés et non détectables depuis les airs. Finalement, c’est Israël qui a dû demander la paix. Depuis lors, ses forces n’ont plus osé entrer à nouveau au Liban.
Les États-Unis en Irak n’ont aucun moyen de protéger leurs troupes contre de telles volées imprévisibles de roquettes. Ils n’ont aucun moyen de décourager ou même de gagner contre les forces qui s’emploient actuellement à les expulser de l’Irak ainsi que d’autres endroits au Moyen-Orient.
Ils devraient enfin reconnaître cela et partir.
Moon of Alabama
Traduit par jj, relu par Wayan pour le Saker Francophone