Il n’y a aucune volonté de lutter contre le changement climatique


Par Moon of Alabama – Le 12 août 2021

Le récent rapport récemment publié par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies, intitulé “Climate Change 2021 : The Physical Science Basis” est pessimiste :

B.1.3. Le réchauffement planétaire de 1,5°C par rapport à 1850-1900 serait dépassé au cours du 21e siècle selon les scénarios intermédiaire, élevé et très élevé envisagés dans ce rapport. Dans les cinq scénarios illustratifs, à court terme (2021-2040), il est très probable que le niveau de réchauffement planétaire de 1,5°C soit dépassé dans le scénario d'émissions de GES [Gaz à Effet de Serre] très élevées, probable qu'il soit dépassé dans les scénarios d'émissions de GES intermédiaires et élevées, plus probable qu'improbable dans le scénario d'émissions de GES faibles et plus probable qu'improbable dans le scénario d'émissions de GES très faibles.

Il est peu probable que les politiques actuelles permettent d’atteindre les réductions globales de gaz à effet de serre (GES) requises, même le niveau intermédiaire :

Le temps est venu d'exprimer nos craintes et d'être honnête avec la société au sens large. Les politiques actuelles de réduction nette des émissions ne permettront pas de limiter le réchauffement à 1,5 °C, car elles n'ont jamais été conçues à cet effet. Elles étaient et sont toujours motivées par la nécessité de protéger les activités habituelles, et non le climat. Si nous voulons assurer la sécurité des personnes, il faut dès à présent procéder à des réductions importantes et durables des émissions de carbone. C'est le critère très simple qui doit être appliqué à toutes les politiques climatiques. Le temps des vœux pieux est terminé.

Les raisons sont bien sûr politiques. Il y a beaucoup de lobbying en faveur de politiques qui poursuivent la production de GES alors qu’il y a peu d’intérêt immédiat à les réduire. Il y a dix ans, Peter Lee avait déjà fait le calcul. En examinant ce qui s’est passé depuis, il dresse une liste des échecs :

Les États-Unis, sous la direction de Joe Biden, ont insisté avec le récit absurde disant que les États-Unis ont la capacité nationale et la stature morale pour diriger la réponse du monde au changement climatique.

Permettez-moi de rejeter cette affirmation en quelques mots.

Premièrement, l'échec de la régulation du climat a été scellé lorsque les États-Unis ont refusé de ratifier le protocole de Kyoto en 1998.

Elle a été doublement condamnée lorsque les États-Unis, sous la direction de Barack Obama, ont imposé un régime successeur qui a éliminé les plafonds juridiquement contraignants pour tous.

Elle a été triplement condamnée lorsque Donald Trump s'est retiré de l'accord de Paris.

Cela a été quadruplée lorsque les États-Unis, sous la direction de Joe Biden, ont décidé que leur plus haute priorité et le principe d'organisation de leur politique étaient de traiter la République populaire de Chine comme le principal adversaire géopolitique des États-Unis.

Vous voyez le triste tableau.

Les États-Unis ne sont pas les seuls coupables ici. Tous les systèmes politiques semblent préférer les récompenses à court terme plutôt que d’éviter la douleur future, surtout lorsque d’autres peuvent être blâmés de manière plausible pour le résultat. Les États-Unis sont juste l’acteur le plus hypocrite.

Le fait que Joe Biden continue de jouer gentiment avec l’industrie des combustibles fossiles démontre le mécanisme :

L'administration Biden est en passe d'approuver plus de forages pétroliers et gaziers sur les terres publiques - activité qui représente un quart des émissions de gaz à effet de serre aux États-Unis - que toute autre administration depuis George W. Bush. L'envoyé spécial pour le climat, John Kerry, s'est montré réticent à l'idée d'engager les États-Unis dans une élimination progressive du charbon. Les politiciens qui se qualifient de faucons du climat s'efforcent toujours de faire comprendre qu'un avenir radieux attend les entreprises qui ont financé le déni climatique et dont le modèle économique reste fondé sur la combustion et l'extraction d'autant de combustibles fossiles que possible. Les responsables de l'administration, quant à eux, n'ont cessé de parler de la nécessité de limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius.

C’est du déni climatique.

Il suffit de regarder le récent projet de loi sur les infrastructures :

De nombreuses dispositions de ce projet de loi figurent sur la liste de souhaits de l'industrie pétrolière. Le projet de loi prévoit plus de 10 milliards de dollars pour le captage, le transport et le stockage du carbone - une série de technologies dont les entreprises de combustibles fossiles espèrent qu'elles leur permettront de prolonger leur permis d'exploitation pendant des années, voire des décennies. Il y a également 8 milliards de dollars pour l'hydrogène, sans qu'il soit stipulé que l'énergie utilisée pour le produire provienne de sources propres. Une nouvelle usine de gaz naturel liquide en Alaska a obtenu des milliards de dollars de garanties de prêt, tandis que d'autres dérogations prévues par le projet de loi affaibliront les règles environnementales auxquelles seront soumis les nouveaux projets de construction, selon les experts.

"Cette proposition d'infrastructure n'est pas le reflet d’une véritable action en faveur du climat", a déclaré Mitch Jones, directeur de Food & Water Watch Policy, une organisation de responsabilisation de Washington. "C'est un très fort soutien aux pollueurs climatiques".

Hier encore, Joe Biden a confirmé sa position favorable aux combustibles fossiles en demandant une pollution moins chère :

Mercredi après-midi, le président Joe Biden a accentué la pression sur l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, après qu'un de ses principaux conseillers ait déclaré plus tôt dans la journée que l'OPEP et ses alliés "doivent faire plus" pour soutenir la reprise économique. ...

Les contrats à terme sur le pétrole se sont récemment négociés à la hausse, mais ils avaient reculé plus tôt mercredi après que le conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, Jake Sullivan, ait pressé l'OPEP et ses alliés d'augmenter davantage la production et ait décrit un récent accord d'augmentation de la production comme "tout simplement insuffisant."

Ce qui me permet d’être d’accord avec l’effrayante conclusion de Peter Lee :

En l'absence d'une machine à remonter le temps qui nous ramènerait en 1998, lorsque nous avions encore une chance d'inverser le cours des choses - ou d'une bonne grosse guerre catastrophique qui anéantirait suffisamment l'humanité et la capacité industrielle et aboutirait au même résultat - il se pourrait que la planète doive s'occuper elle-même du problème : en provoquant suffisamment d'élévation du niveau de la mer, de calamités météorologiques, de sécheresse, de famine et de maladies pour réduire sa charge humaine par les moyens les plus laids que l'on puisse imaginer.

C'est tout l'optimisme dont je peux faire preuve en matière de changement climatique, voila tout !

Ce n’est pas un point de vue pessimiste, mais réaliste. Cela ne signifie pas que nous devions abandonner. Nous devrions tous, personnellement et politiquement, essayer de réduire notre empreinte écologique autant que possible.

Malheureusement, ce n’est ni facile ni confortable à faire.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

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