Gazprom ferme la porte à l’UE

Hier mercredi, l’UE a négocié avec Gazprom à Moscou.

L’UE se retrouve mal chaussée

Les négociateurs de l’UE avaient trois objectifs:

  1. Mettre la pression sur la Russie pour étendre la tarification spéciale hiver pour les fournitures de gaz à l’Ukraine qui doit prendre fin en Mars.
  2. Forcer la Russie à de nouvelles concessions unilatérales pour permettre tous les achats européens d’énergie au travers d’une nouvelle Union européenne de l’énergie.
  3. Faire pression sur la Russie pour ressusciter le projet de gazoduc South Stream annulé et le construire en conformité avec les règles restrictives du troisième paquet énergie (Third Energy Package). La réponse russe a été une douche froide.Tout d’abord, Gazprom a dit qu’il n’y a pas besoin d’un accord spécial d’été sur les achats de gaz ukrainien, alors qu’un contrat valable existe déjà.

Dans la pratique, cela signifie que toutes les concessions que Kiev a reçues pour la saison d’hiver sont temporaires et il n’y a pas d’espace pour des négociations.

Si l’UE veut s’assurer du transit du gaz par l’Ukraine, alors elle doit faire pression sur Kiev pour se conformer aux accords existants.

Si Kiev a besoin de gaz, et qu’il ne peut pas payer – mettant ainsi en danger les livraisons de transit vers les pays de l’UE – ce n’est pas le problème de la Russie.

La même chose s’applique aux dettes de Kiev sur le gaz; l’UE devra payer à la fois les dettes ukrainiennes sur ce gaz ainsi que tous les futurs achats de gaz.

Deuxièmement, Gazprom a annoncé que le projet de gazoduc South Stream est mort et ne sera pas réalisé. Le projet s’est effondré sous la pression des États-Unis et de l’UE.

Le plus grand obstacle s’est avéré être ce troisième paquet énergie de l’UE. Il impose des restrictions lourdes sur la façon dont Gazprom pourrait utiliser son propre pipeline; Gazprom ne pourrait utiliser que 50% de la capacité de South Stream et serait contraint d’offrir les 50% restants à des tiers.

Bien que tous les accords conclus entre Gazprom et les différents pays de transit et de consommation ont été passés avant l’entrée en vigueur de ce troisième paquet énergie, la Commission européenne exige maintenant qu’il soit appliqué rétroactivement.

La solution de la Russie est la suivante: Gazprom va construire un gazoduc vers la Turquie et l’étendre jusqu’à la frontière turco-grecque. Le pipeline débouchera dans un centre de distribution de gaz près de la frontière de l’UE.

Si l’UE veut acheter du gaz, elle devra construire un gazoduc vers la Turquie à ses propres frais. Elle devra également augmenter la capacité de transport de gaz entre ses pays membres d’Europe du Sud – et le faire sous les contraintes imposées par son propre troisième paquet énergie.

Le coup final à l’arrogance de l’UE a été la déclaration de Gazprom indiquant qu’après l’achèvement du hub gazier et du gazoduc turque, Gazprom terminera tout transit de gaz à travers l’Ukraine. Le gaz russe ne sera disponible que via la Turquie!

Le réseau de gazoducs ukrainien sera utilisé exclusivement pour fournir du gaz à l’Ukraine. Gazprom a fondé sa décision sur l’instabilité de l’Ukraine et les risques de transit élevés.

Maroš Šefčovič, le commissaire européen à l’énergie de l’Union a du passer les pires moments de sa vie. L’arrogance de l’UE s’est écrasée sur un mur de briques.

Un scandale majeur se prépare sur la façon dont l’Allemagne a impitoyablement fixé son propre approvisionnement en gaz à travers le gazoduc Nord Stream et a ensuite utilisé tous les moyens possibles pour saboter le gazoduc South Stream.

Il n’y a pas de moyen plus sûr pour enflammer le conflit Nord-Sud dans l’UE. Les utilisateurs potentiels du gazoduc South Stream sont aussi assurés de se sentir éternellement reconnaissant aux États-Unis pour avoir tuer le projet.

La Turquie, candidat perpétuel à une entrée dans l’UE, va pouvoir jubiler en regardant la situation de l’UE tout en calculant les revenus futurs du transit du gaz. La Turquie se trouve être également le deuxième plus grand client de Gazprom après l’Allemagne. Le grand perdant sera l’Ukraine, plus grand pays siphonneur de gaz et maître-chanteur du monde.

Malgré tous ses discours arrogants, l’UE n’a pas de véritables alternatives au gaz naturel russe. Bruxelles va devoir avaler sa fierté et revenir à la raison.

Maintenant, nous attendons avec impatience la version des médias occidentaux sur cette histoire.

Article d’Aleksei Kettunen pour la Russie Insider.
http://russia-insider.com/en/2015/01/15/2440
Traduction du finnois par Petri Krohn

Traduction : Hervé pour le Saker Francophone

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