De la bataille contre le Système épisode X
En finir avec la double conjuration de Washington et de Bruxelles

Contrairement à ce que nous avions précédemment annoncé... juin 2015, la série De la bataille contre le Système a accouché d'un nouvel épisode (inattendu ?)

Nous ne bouderons pas notre plaisir en vous le présentant aujourd'hui, ainsi que la suite de la lignée ! 

Le Saker Francophone

Le 26 juin 2015 – Source entrefilets

«Le seul ennemi du peuple, c’est son gouvernement.» Cette phrase prêtée à Danton* résonne aujourd’hui d’une tragique actualité, dans une Europe aux relents totalitaires 1. Le projet européen a en effet échappé aux nations et à leurs peuples, pour accoucher d’un monstre glacé piloté par des technocrates sans âme 2.

Gangréné par un capitalisme en phase terminale façon Goldman-Sachs, il rançonne désormais la population européenne, poussant des peuples entiers dans la précarité pour satisfaire la voracité de ses parrains. Au plan extérieur, l’Europe est totalement soumise à son souteneur étasunien, qui utilise dès lors librement son sol pour y exporter ses passes d’armes, en attendant d’y régurgiter ses OGM et son hamburger aux hormones, à grand coups de TTIP. Pour reprendre le contrôle de leur destin et échapper à la guerre, les peuples d’Europe vont donc devoir en finir avec cette double conjuration de Washington et de Bruxelles.

Guerre US sur sol européen

S’agissant de l’agressivité de l’Empire US, les dernières nouvelles sont éloquentes. L’OTAN ne cesse ainsi d’engraisser 3 et continue son expansion vers l’Est en bombant le torse 4. Les USA acheminent même en ce moment leurs propres armes lourdes dans sept pays européens 5. Ce à quoi les Russes répondent en annonçant le renforcement de leur arsenal nucléaire 6. Tous les ingrédients de la guerre sont là, il ne manque que l’étincelle.

A l’intérieur du Bloc atlantiste lui-même, le pseudo-scandale des écoutes du portable de Merkel a débouché sur des révélations de collaboration intense entre les Services secrets allemands et la NSA pour espionner… les autres européens 7. Quant au nouveau pseudo-scandale des écoutes des présidents français, Obama a promis pour la dix-septième fois, en se mordant les lèvres pour ne pas rire, de ne plus écouter ses laquais qui, de toute façon, il le sait bien, se coucheront à la fin 8. L’attentat survenu en France vendredi a d’ailleurs balayé tout cela plus vite qu’attendu. Plus besoin d’en rajouter sur la grandguignolesque indignation/mobilisation anti-NSA (de grâce, lisez ce texte flamboyant de Philippe Grasset qui dit tout de l’âme molle de la pègre au pouvoir). 9

Retour donc à l’union sacrée atlantiste anti-terroriste, c’est tellement plus simple de servir.

Donc au final, l’organigramme du Bloc reste limpide. Tout en haut, l’Empire US et tout en bas, l’Europe.

Résultat des courses : pour tenter de persévérer dans son être, l’Empire US peut tranquillement préparer l’Europe à devenir son champ de bataille dans le cas d’une confrontation militaire avec la Russie. Tout le montage ukrainien 10  n’aura d’ailleurs servi qu’à cela.

Occupation de l’Europe

En phase terminale d’effondrement – du fait de sa décomposition systémique couplée à l’agonie du dollar et à la pression des pays du Brics – l’Empire US veut en effet se ménager la possibilité de renverser la table le cas échéant.
Pour l’heure, cette Guerre froide 2.0 lui a permis de créer une stratégie de tension à l’échelle internationale et destinée à perdurer des années contre la Russie. Elle lui permet surtout de fracturer durablement l’Eurasie pour empêcher la constitution d’un Bloc Euro-Brics concurrent. Elle lui assure enfin la pérennité de la soumission européenne, le contrôle militaire du continent, bref, son occupation de fait.

Reste que si la manœuvre échoue à contrer la montée en puissance de la Russie et des Brics, alors les USA pourront toujours se laisser tenter par l’aventure militaire en rêvant de Trente nouvelles Glorieuses, et à la dictature absolue qu’ils pourront y installer grâce à un reload complet du Système, enfin expurgé de l’insoutenable dissidence qu’aura permis la parenthèse de l’Internet libre.

Eurogroupies lobotomisées

Or, si le détonateur de la crise ukrainienne a pu être armé sur le sol de l’Europe ; si cette guerre froide frauduleuse a pu s’y développer, c’est bien grâce à la trahison d’une élite de technocrates européens amoureux de leur servitude, car toujours hypnotisés par les paillettes hollywoodiennes.

Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale en effet, la fascination exercée par les États-Unis ne s’est hélas jamais démentie pour cette génération d’euro-groupies lobotomisées par des décennies de soft power US.

Malgré les massacres de masse en Irak ; malgré le chaos organisé au Moyen-Orient ; malgré les morceaux de cervelles d’enfants qui pendouillent aux parkas de ses GI ; malgré la généralisation de la torture et de l’espionnage ; malgré le mépris affiché de Washington pour ses laquais, les États-Unis restent imperturbablement un grand frère un peu turbulent mais sympathique. Un constat encore plus vrai, désormais, dans des pays d’Europe de l’Est trop fraîchement libérés du traumatisme soviétique.

Toute cette élite se laisse d’autant plus volontiers bercer par l’illusion de la vertu américaine, qu’elle en est surtout totalement prisonnière. Sept décennies de domination US ont en effet conduit à l’imbrication des structures économiques des deux continents, au point que nos technocrates européens, définitivement vaincus aussi bien dans leurs rêves que dans leur ADN, ne réussissent même plus à imaginer de futurs hors la soumission aux USA.

D’où le constat que pour en finir avec Washington, il faut d’abord en finir avec cette élite bruxelloise illégitime.

Bruxelles contre les peuples

S’agissant de l’Europe donc, les dernières nouvelles sont également éloquentes. Sur le front du racket intérieur, on a d’abord l’Eurogroupe contrôlé par la Kaiserin allemande, qui cherche à briser définitivement les reins de la Grèce pour sauver sa monnaie de singe et, accessoirement, son racket en bande organisée sous couvert de plan d’austérité.

Rappelons par exemple que, si les fameux programmes d’aide à la Grèce se sont bien élevés à la somme faramineuse de 310 milliards d’euros, 270 milliards n’ont jamais franchi la frontière grecque, puisqu’ils ont directement été renflouer les caisses de banksters privés. [Chiffres largement sous-estimés, 4.9% seulement ont fini entre les mains des grecs, NdT]

En cinq ans de solidarité européenne, la Grèce a ainsi perdu 1 million d’emplois et 30% de ses entreprises; le PIB a chuté de 25% ; les salaires ont baissé de 38% ; les retraites se sont effondrées de 45% et les seules choses qui ont augmenté, ce sont la mortalité infantile (+43%) ; le taux de chômage (+190%) ; la dette publique (+35%, ce qui prouve au passage que les prêts du FMI étaient illégaux) et le taux de pauvreté (+98%).

En Grèce, deux personnes se suicident désormais tous les jours.
Franchement, on se demande ce qui se serait passé si l’Europe n’avait pas voulu aider mais couler la Grèce.

L’Europe libérée des chaînes de la démocratie

Durant les négociations avec Athènes, l’Eurogroupe n’a ainsi jamais voulu trouver un accord juste et décent, mais punir le Gouvernement Tsipras pour sa résistance. Comme le souligne Jacques Sapir, il est clair que les pays de l’Eurogroupe voulaient à tout prix «sauver leur politique d’austérité» et «maintenir le flux d’argent engendré par les remboursements de la Grèce, car ce flux profite largement aux institutions financières de leurs pays». 11 On en est désormais au point où les technocrates européens en viennent à comploter contre Syriza, en rêvant d’une révolution orange qui renverserait le parti au pouvoir 12
Fameuse leçon de démocratie s’il en est.

Dans le sud de l’Europe, la solidarité de Bruxelles a aussi fait des miracles comme en Espagne, où 600 000 personnes ont déjà perdu leur logement depuis 2008, et où le chômage des jeunes dépasse les 50%. 13. Mais la victoire de Podemos, qui fait écho à celle de Syriza, signe peut-être là aussi un début de résistance dans ce pays.

Mais qu’à cela ne tienne, l’austérité pour les peuples, les gros bonus pour les banksters et le corporate power, la soumission à l’Empire US : tels sont les ingrédients de la formule magique concoctée pour tous par Bruxelles.
Et si cela ne plaît pas, c’est le même prix. En déclarant, entre deux dérapages avinés 14, qu’«il ne peut y avoir de décision démocratique contre les Traités européens», le Président de la Commission européenne et ancien spécialiste de l’évasion fiscale au Luxembourg, Jean-Claude Juncker, a en effet confirmé que l’Europe s’était définitivement libérée des chaînes de la démocratie.

Peut-être le traitement abject réservé au peuple grec et l’ouverture du territoire européen aux aventures militaires américaines serviront-ils  d’électrochoc pour mettre un terme à cette dérive affolante.

En tout état de cause, il est désormais clair que pour éviter la guerre et permettre aux peuples de reprendre leur destin en main, il faut en finir avec la double conjuration de Washington et de Bruxelles.

C’est-à-dire avec le fascisme mou de la technocratie européenne actuelle; refonder une Europe des peuples dans le respect de la souveraineté des nations; et libérer cette nouvelle Europe du joug étasunien.
Vaste programme, certes.

*Une lectrice, merci à elle (site), nous a fait remarquer que cette phrase: «Le peuple n’a qu’un ennemi dangereux, c’est son gouvernement», n’est pas de Danton mais de Saint-Just (Rapport au comité de salut public sur le gouvernement présenté à la Convention nationale le 19 du premier mois, l’an second de la République (10 octobre 1793).

Notes

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