Visite de Trump à Paris : vers la paix avec Poutine et Erdogan ?


Par Andrew Korybko – Le 7 novembre 2018 – Source eurasiafuture.com

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Trump sera à Paris ce week-end, en compagnie de 60 autres dirigeants du monde, pour participer aux commémorations de la fin de la première guerre mondiale, il y a un siècle. On s’attend à ce que le dirigeant américain ait, aux marges de l’événement, des discussions importantes avec ses homologues russe et turc. Le calendrier tombe à pic, au vu du besoin urgent qu’ont les présidents Poutine et Erdogan de converser avec Trump

Sur le sujet des relations entre Amérique et Russie, le Kremlin est très préoccupé par le projet de retrait des USA du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) de 1987, de crainte de voir un déséquilibre de forces nucléaires émerger entre les deux grandes puissances. Les relations entre Turquie et Amérique connaissent un embryon de rapprochement, après la libération du pasteur accusé d’espionnage, et le début de la mise en œuvre de patrouilles militaires conjointes dans la ville de Manbij, au nord de la Syrie.

Dans le même temps, les relations russo-turques n’ont jamais été aussi bonnes, et les deux pays coopèrent de manière très proche en Syrie et sur le gazoduc du Turkish Stream, à destination de l’Europe. Ils ont également des intérêts en commun à faire front ensemble face à la réimposition de sanctions par les USA sur l’Iran, qui les affecte directement au vu du niveau de coopération économique que chacun d’eux a atteint avec la République Islamique. Autre point de convergence entre eux, et significatif pour les USA : leurs rôles clés dans le processus de paix d’Astana, que l’Amérique politise de plus en plus ; cela a commencé par des menaces de sanctions renforcées contre la Syrie en réponse au manque d’avancement considéré par les USA sur ce front. À l’instar de la situation avec l’Iran, des menaces de « sanctions secondaires » planent sur ce dossier.

En l’état, les prochains sujets doivent être abordés : le président Poutine veut comprendre ce qui se passera après l’abandon du FNI, et préparer le terrain pour sa rencontre beaucoup plus étendue avec Trump au cours du G20 ; le président Erdogan veut poursuivre le rapprochement de la Turquie avec les USA ; chacune de ces grandes puissances multipolaires veut présenter un front unifié et cohérent face aux USA en Iran et en Syrie ; alors que Trump continuera probablement de répondre à chacun de manière bipolaire, pour mieux « diviser pour mieux régner » en Eurasie, peut-être en concluant des ententes séparées. Pour difficile que l’ensemble de cet exercice d’« équilibrisme » diplomatique puisse paraître, il est de bon augure que ces discussions se déroulent corrélativement à la commémoration de la première guerre mondiale ; espérons, aux fins de parvenir à des accords pragmatiques, que chacun de ces trois dirigeants abordera ces sujets dans un esprit positif.

Andrew Korybko est le commentateur politique américain qui travaille actuellement pour l’agence Sputnik. Il est en troisième cycle de l’Université MGIMO et auteur de la monographie Guerres hybrides : l’approche adaptative indirecte pour un changement de régime (2015). Le livre est disponible en PDF gratuitement et à télécharger ici.

Traduit par Vincent pour le Saker Francophone

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