La bonne nouvelle de la présidence Trump : les imbéciles peuvent être bons !


2015-09-15_13h17_31-150x112Par le Saker – Le 11 janvier 2018 – Source The Saker

Dans quelques jours, une année aura passé depuis l’investiture de Donald Trump à la présidence des États-Unis. À cette occasion, je crois qu’on peut dire raisonnablement que presque tout le monde, à l’exception des néocons et de quelques partisans inconditionnels, est totalement consterné par ce que l’année dernière a apporté aux États-Unis et à la planète. Ceux qui haïssaient Trump ne le haïssent pas moins, tandis que ceux qui avaient quelques espoirs dans Trump, comme moi, doivent accepter que ces espoirs ne se sont jamais concrétisés. Je pense que si nous imaginons une présidence Hillary, le mot « diabolique» serait une bonne manière de décrire ce à quoi une telle présidence aurait probablement ressemblé. De même, si je devais choisir un seul mot pour décrire la présidence de Trump, au moins jusqu’à présent, je pense que ce serait « stupide ». Je ne me donnerai même pas la peine, comme je l’avais prévu d’abord, d’énumérer toutes les choses stupides que Trump a dites et faites depuis son investiture (ceux qui pensent autrement devraient interrompre leur lecture ici).

Je dirai que cela ne me fait aucun plaisir d’écrire ceci parce que j’ai aussi eu l’espoir que Trump tiendrait au moins quelques-unes de ses promesses électorales (même si la plus grande partie de mon soutien à son égard était basée sur le fait qu’il n’était pas Hillary qui, je le crois encore, aurait amené les États-Unis et la Russie à se faire la guerre). En plus, chaque fois que je me rappelle le discours d’investiture de Trump, j’éprouve ce douloureux sentiment d’une occasion très importante et totalement manquée : enfin restaurer la souveraineté des États-Unis en faveur du peuple étasunien et revenir a une politique internationale civilisée et rationnelle. Hélas, cela ne s’est pas produit et c’est une réalité que nous devons accepter et affronter.

Je tiens également à préciser que lorsque je dis que le mot qui résume le mieux la présidence Trump est « stupide », je ne parle pas seulement de The Donald. Je veux parler de toute l’administration (je ne mentionne pas le Congrès, puisque celui-ci a été stupide depuis aussi loin que je peux m’en souvenir). Si vous vous demandez comment je peux traiter une administration entière de « stupide » même si elle est composée de fonctionnaires, juristes, universitaires, techniciens, etc., souvent brillants, je répondrai simplement que je ne juge pas une administration sur les CV de ceux qui travaillent pour elle, mais sur ses résultats, sur ce qu’elle fait réellement. Si ce que produit cette administration est un tas de choses stupides, c’est une administration stupide.

Stupide peut signifier beaucoup de choses différentes. Par exemple, je peux appeler stupides les menaces contre la Corée du Nord. C’est une sorte de stupidité très effrayante. Mais il y a aussi une très bonne façon d’être stupide. Par exemple, je pense que la décision de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël est une forme merveilleuse de stupidité que je salue chaleureusement.

Pourquoi ?

Parce que c’est le genre de stupidité qui affaiblit énormément l’Empire anglosioniste !

Pensez aux dégâts que cette décision vraiment stupide a causés non seulement à la réputation internationale des États-Unis (qui était en effet déjà proche de zéro même avant) mais également à leur capacité de faire quoi que ce soit au Moyen-Orient. La défaite militaire des États-Unis en Irak et en Afghanistan et leur défaite politique en Syrie n’avait besoin que d’un petit quelque chose pour être vraiment à côté de la plaque au Moyen-Orient, et maintenant, grâce à Donald Trump, c’est chose faite ! En plus, il y avait un vilain petit secret que tout le monde connaissait mais qui est maintenant devenu un fait public :

USA = ISRAËL & ISRAËL = USA

Encore une fois, tout ça est très bien. Mieux encore, le Honduras, le Guatemala, Palau, les îles Marshall, Kiribati, le Togo, Nauru et le Sud-Soudan et, bien sûr, Israël seraient les seuls à ne pas être d’accord.

La politique étrangère américaine est devenue si incroyablement stupide que même les régimes fantoches les plus asservis aux Américains (disons le Royaume-Uni, la Norvège, la Corée du Sud ou le Japon) sont maintenant contraints de la condamner, du moins en public. Tout le mérite revient ici à Nikki Haley qui, après ce vote catastrophique, a décidé d’aggraver encore la situation en faisant chanter l’ONU et tous ses États-membres. Enfin, le président Trump lui-même a scellé le tout en approuvant publiquement le discours de Nikki Haley.

Aussi stupide que cela ait pu être, et aussi stupide que cela a été, en l’occurrence les résultats de cette stupidité ont été vraiment une bénédiction pour le Moyen-Orient : même le Hamas a recommencé à discuter avec le Hezbollah et l’Iran !

Tout comme nous pouvons sincèrement remercier le président Obama d’avoir poussé la Russie et la Chine dans les bras l’une de l’autre, nous pouvons aujourd’hui tous remercier Nikki Haley et Trump d’unifier la résistance à l’État d’Israël et à l’Empire anglosioniste. Je peux à peine imaginer la jubilation à Téhéran lorsque les Iraniens ont entendu la bonne nouvelle !

Mais le bon imbécile ne s’arrête pas là. Que les élites étasuniennes soient impliquées dans une gigantesque fusillade les unes contre les autres au moyen d’enquêtes, de scandales, d’accusations, de discussions sur la destitution, etc. est également une bénédiction parce qu’étant occupées à se combattre, elles sont moins capables de se concentrer sur leurs véritables adversaires et ennemis. Depuis des mois, le président Trump a gouverné principalement au moyen de « tweets » qui, évidemment et par définition, ne riment à absolument rien et il n’y a rien qui pourrait sérieusement s’appeler une « politique étrangère des États-Unis » (à l’exception du flot incessant d’accusations, de menaces et de démagogie inqualifiables). Cette situation provoque des risques et des chances.

  1. Les risques : quand personne n’est vraiment responsable, chaque service fait à peu près ce qu’il veut. Nous l’avons vu pendant la seconde moitié de la présidence Obama, lorsque l’État disait quelque chose, le Pentagone une autre et la CIA encore une autre. Il en est résulté une situation complètement ridicule, où les alliés des États-Unis s’attaquaient les uns les autres en Syrie et en Irak parce qu’ils rapportaient tous à des agences différentes. Le risque ici est évident : par exemple, lorsque les diplomates américains ont conclu un accord avec la Russie en Syrie, le Pentagone l’a torpillé le lendemain même en attaquant les forces syriennes. Les récentes attaques contre la base des forces aérospatiales russes à Khmeimim (et la dernière attaque de drones contre la même base) correspondraient exactement à ce schéma. Les Russes se sont plaints depuis des mois que les États-Unis « ne sont pas capables de passer un accord » et cela peut clairement être un problème et un risque.
  2. Les chances : lorsque personne n’est responsable, l’Empire anglosioniste ne peut pas vraiment mettre toute sa force contre une cible spécifique. C’est comme une voiture ou un autobus dans lequel tous les passagers se battent entre eux pour tenir le volant. C’est mauvais pour eux, mais bon pour tous les autres, car le seul endroit vers lequel se dirige cette voiture ou ce bus est le fossé. En plus, comme les États-Unis menacent actuellement, à divers degrés, au moins 9 pays (Afghanistan, Syrie, Russie, Iran, Corée du Nord, Venezuela, Turquie, Pakistan, Chine), ces menaces semblent assez creuses. Non seulement cela, mais si les États-Unis devaient s’engager sérieusement dans un conflit avec l’un ou l’autre de ces pays, cela ouvrirait de grandes possibilités pour les autres. À voir la façon dont les élites étasuniennes sont occupées à s’affronter et à menacer tous les autres, il y a très peu de changements sur lesquels les États-Unis pourraient se concentrer pour menacer sérieusement leurs adversaires. Mais cela va bien au-delà des pays mentionnés ici. Une expression française dit : « Quand le chat n’est pas là, les souris dansent » et c’est ce que nous pourrions voir bientôt : plus de pays suivant l’exemple des Philippines, qui étaient une colonie américaine et qui sont aujourd’hui dirigées par un homme qui n’a aucun problème à insulter publiquement le président américain, au moins quand c’était Obama qui l’était (Duterte semble préférer Trump à Obama). Il y a déjà eu des signes que les Coréens du Sud font leurs premiers pas timides en vue de dire « non » à Oncle Sam.

Je n’essaie pas de brosser un tableau optimiste de la situation, qui est mauvaise, sans aucun doute. Avoir des imbéciles ignorants chargés des armes nucléaires n’est pas bon, par définition. Mais j’aimerais suggérer deux choses : premièrement que peu importe combien Trump est stupide, Hillary aurait été infiniment pire et, deuxièmement, qu’il y a quelques bons côtés à l’actuel vide de pouvoir à Washington.DC.

Si nous sommes d’accord pour dire que tout ce qui affaiblit l’Empire anglosioniste est une bonne chose (y compris pour le peuple américain !), s’il y a quelque chose qui le rapproche de sa chute finale, alors il y a beaucoup de choses de l’année écoulée pour lesquelles être reconnaissant. L’Empire a vraiment commencé à se déliter sous George W. Bush (merci les néocons !), et ce processus s’est clairement poursuivi sous Obama. Donald Trump est cependant celui qui a vraiment donné à ce processus une accélération extraordinaire qui l’a, je pense, amenée à un niveau qualitativement nouveau. Les risques qui nous attendent sont toujours terribles, mais jusqu’à présent l’Empire est en train de perdre et la résistance gagne toujours. Et c’est une très bonne chose.

The Saker

Cet article a été écrit pour Unz Review

Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Cat pour le Saker francophone

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