Par Andrew Korybko – Le 2 mars 2018 – Source Oriental Review
Les Houthis et l’ancien président du Yémen du Sud ont présenté des propositions de paix quelque peu similaires pour mettre fin à la guerre au Yémen.
Le premier pas dans cette direction a été fait lors de la conférence de Valdaï sur le rôle de la Russie au Moyen-Orient. Ali Naser Mohamad, qui présidait la République démocratique populaire du Yémen de 1980 à 1986, a publié un plan en huit points pour résoudre le conflit. Sa suggestion la plus originale a été d’« engager un dialogue entre toutes les forces politiques sur la création d’un État fédéral à deux régions ». Il s’agissait clairement d’une référence à la capture d’Aden, leur ancienne capitale, par le Conseil de transition du Sud (CST), au dépend de l’ancien gouvernement de Hadi, fin janvier, après que le leader internationalement reconnu ait refusé de changer son cabinet et aurait ordonné l’utilisation de la force contre les protestants sudistes.
La fédéralisation a longtemps été considérée comme un « compromis » entre l’Arabie saoudite et les EAU. Les premiers ont commencé la guerre afin de réinstaller Hadi en tant que président du Yémen alors que les EAU sont considérés comme favorables aux séparatistes du Sud.
Quant à la proposition des Houthis, elle reflète de manière intéressante largement ce que l’ancien chef du Yémen du Sud a proposé, bien qu’avec ses propres nuances. Les deux parties veulent la fin de la guerre, de nouvelles élections et le soutien du Conseil de sécurité des Nations unies, même si elles semblent différer sur certaines questions techniques. Alors que le Sud veut une solution fédérale, les Houthis suggèrent fortement que toutes les questions contestées soient décidées par un référendum. Cela impliquerait un référendum à l’échelle nationale où le Nord, plus peuplé, aurait le pouvoir électoral de rejeter toute proposition régionale mise en avant par le Sud. Les questions de l’autonomie du Sud-Yémen et de la réforme constitutionnelle correspondante du pays pour légaliser ce statut souhaité semblent être la principale différence entre les propositions de paix de chaque parti.
Dans la situation militaire bloquée actuelle, aucune des deux parties ne peut imposer sa volonté à l’autre, mais l’observation la plus importante est que la volonté politique de paix existe invariablement dans les territoires qui comprenaient les pays indépendants du Nord et du Sud-Yémen.
En extrapolant, on peut en déduire que chacune des deux populations est vraiment exaspérée par cette guerre, en particulier la majorité du pays qui réside dans le Nord et qui a été contrainte de supporter les terribles conséquences humanitaires de la guerre de la coalition contre les Houthis depuis plus de trois ans maintenant. De même, présumant que l’ancien président du Sud-Yémen parlait à titre officieux et « tâtait le terrain » à Valdaï, on peut conclure que le CST « modère » ses aspirations d’indépendance et veut se contenter de la fédéralisation, au moins à ce stade, et qui, bien sûr, fait appel aux Saoudiens et aux Houthis pour différentes raisons et facilite le dialogue pour mettre fin à cette guerre.
Dans un avenir proche, toutes les parties réajusteront probablement leurs positions en jonglant politiquement pour préparer les inévitables pourparlers de paix, et c’est ici que la Russie pourrait jouer un rôle stratégique en facilitant cette médiation ou même en organisant ce dialogue si finalement il se met en place.
Andrew Korybko est le commentateur politique américain qui travaille actuellement pour l’agence Sputnik. Il est en troisième cycle de l’Université MGIMO et auteur de la monographie Guerres hybrides : l’approche adaptative indirecte pour un changement de régime (2015). Ce texte sera inclus dans son prochain livre sur la théorie de la guerre hybride. Le livre est disponible en PDF gratuitement et à télécharger ici.
Traduit par Hervé pour le Saker Francophone
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