Une candidate de l’opposition au Japon impliquée dans un scandale sur sa citoyenneté taïwanaise


Par Asian Nikkei Review – Le 14 septembre 2016 – Source Asian Nikkei Review

TOKYO  Une candidate de premier plan à la présidence du principal parti d’opposition au Japon est en pleine gestion de crise, pour mettre fin à la controverse au sujet de sa double-nationalité, en promettant d’agir dans les plus brefs délais pour abandonner sa citoyenneté taïwanaise.


Renho, présidente intérimaire du Parti démocrate progressiste (Minshin), qui se fait publiquement appeler seulement par son prénom, avait préalablement déclaré qu’elle avait abandonné sa citoyenneté taïwanaise lorsqu’elle a pris la citoyenneté japonaise en 1985. Mais elle a dû admettre mardi que cela n’était pas le cas.

«Mes souvenirs de ce qui s’est passé lorsque j’avais 17 ans étaient erronés et ont semé la confusion dans les esprits. Je m’en excuse», a-t-elle déclaré.

La candidate a expliqué que les autorités taïwanaises lui ont notifié lundi qu’elle était en fait citoyenne taïwanaise, répondant à sa propre demande de clarification. Née d’un père taïwanais et d’une mère japonaise, Renho a acquis la citoyenneté japonaise suite à un amendement de la Constitution qui rendait éligible à la citoyenneté japonaise les enfants de mère japonaise.

Selon la loi taïwanaise, la citoyenneté n’est pas automatiquement abandonnée suite à une naturalisation dans un autre pays, et les citoyens de moins de 20 ans ne peuvent renoncer à leur citoyenneté taïwanaise. La rumeur courait avant le scandale, que Renho, qui prétendait avoir abandonné sa citoyenneté taïwanaise à l’âge de 17 ans, détenait en fait la double-nationalité.

Parallèlement, la loi japonaise stipule qu’un étranger acquérant la nationalité japonaise doit entreprendre les démarches pour renoncer à sa citoyenneté dans un autre pays. S’il est établi que seuls les citoyens japonais peuvent être élus à la Diète (Parlement japonais rassemblant chambre basse et chambre haute du pouvoir législatif), il n’existe pas d’interdiction sur une éventuelle double-nationalité des membres du Parlement [mais cette interdiction est inutile, puisque la double-citoyenneté n’est pas autorisée. Ainsi, seul un étranger qui a acquis la nationalité japonaise et renoncé à sa nationalité antérieure peut se présenter à des élections, NdT].

«Je suis devenue japonaise à 17 ans, et jusqu’à présent j’avais l’impression que j’avais abandonné ma citoyenneté taïwanaise, donc je ne crois pas avoir fait quoi que ce soit d’illégal», a-t-elle déclaré, ajoutant qu’elle se maintenait dans la course à la présidence du Parti démocrate progressiste.

Renho espère bientôt pouvoir mettre derrière elle cette controverse, en renonçant immédiatement à sa citoyenneté taïwanaise. Même si elle n’a enfreint aucune loi, certains ont déjà commencé à exprimer leur inquiétude sur sa capacité à gérer des crises, après qu’elle a changé sa version de l’histoire à plusieurs reprises, sans prendre la peine de vérifier la véracité de ses affirmations.

Ses adversaires dans la course à la présidence du Parti démocrate progressiste, Seiji Maehara et Yuichiro Tamaki, ne souhaitent pas alimenter la controverse. Mais d’autres membres au sein du Parti s’inquiètent que cette controverse n’apporte de l’eau au moulin des partis adverses, si Renho venait à remporter l’élection interne.

Article original paru sur Asian Nikkei Review.

Traduit par Laurent Schiaparelli, édité par Wayan, relu par Cat pour Le Saker Francophone


Note du traducteur 

Il apparaît que dans ces deux États asiatiques fortement sous contrôle de l’Empire (la Constitution du Japon a été rédigée et imposée par les États-Unis en 1945, et Taïwan est entièrement sous protection militaire et domination économique américaine depuis la même époque), le réflexe ethnocentriste et la tradition patriote aient quand même réussi à assurer le fait que la binationalité interdise de facto (malheureusement pas de jure) l’accès aux mandats électoraux.

Malgré cela, dans leur tentative d’accéder au pouvoir, quelques candidats mentent toujours effrontément à leurs administrés et violent consciemment la Constitution du pays qu’ils ont la prétention de servir.

L’histoire de cette élue japonaise est révélatrice de cette déviance politicienne, tout comme l’a été le refus de l’ancien président taïwanais Ma Yingjiu, de se prononcer sur sa détention de carte verte, voire de passeport américain, avec la complicité de l’administration américaine, qui a refusé de clarifier sa situation d’état-civil auprès du Parlement taïwanais.

Cet article est un complément de celui de Laurent Schiaparelli publié en janvier 2016 sur Le Saker Francophone, au sujet du dilemme posé par la bi-nationalité des élus en France.
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