Par Moon of Alabama – Le 6 octobre 2023
Tout d’abord, quelques informations sur l’Ukraine. Nous en viendrons ensuite au véritable enjeu de la guerre.
A la une de Politico :
L’Ukraine « panique » alors que le chaos de l’affaire McCarthy menace l’aide américaine
À Kiev, les responsables ne savent pas ce qui va se passer. Leur plus fidèle allié militaire semble soudain peu fiable, malgré les assurances du président Biden et d’autres, selon lesquelles les États-Unis resteront fermes jusqu’à ce que les envahisseurs de l’Ukraine soient vaincus.
« Nous sommes en train de paniquer. Pour nous, c’est un désastre« , a déclaré Ivanna Klympush-Tsintsadze, une députée ukrainienne de haut rang qui préside la commission sur l’intégration du pays dans l’Union européenne.
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Le gouvernement ukrainien dépend fortement de l’aide financière et militaire étrangère pour faire tourner l’économie et s’attend à recevoir 42,8 milliards de dollars de la part des donateurs internationaux au cours de l’année à venir. Une grande partie de cette somme proviendrait des États-Unis.
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« Malheureusement, certains législateurs [américains] ont trouvé qu’il était possible de chercher des compromis alors que la poursuite de l’aide à l’Ukraine est à l’ordre du jour« , a déclaré Vladyslav Faraponov, président du conseil d’administration de l’Institute of American Studies, à Politico. « Le message clé que Kiev doit faire passer est que nous pouvons gagner ensemble et le faire dès que possible pour sauver beaucoup d’hommes et de femmes.«
Le vrai problème est que Kiev n’a aucune chance de gagner. Voir par exemple The Times qui a parlé avec des équipes de tireurs ukrainiens (archivés) près de Robotyne, où la contre-offensive ukrainienne est bloquée :
Les KAB [bombes planantes], ainsi que les mines, les fortifications souterraines et un déluge de drones suicides, ont cloué au sol les brigades d’assaut ukrainiennes. C’est la raison pour laquelle la pénétration des fortifications russes le mois dernier n’a pas abouti à une rupture totale des défenses.
Sur toute la ligne Robotyne-Verbove, les forces ukrainiennes sont enlisées.
L’opinion publique américaine n’est plus convaincue du bien-fondé des dépenses gargantuesques consacrées à la guerre privée de Joe Biden :
Le sondage de deux jours, qui s’est achevé le 4 octobre, a révélé que seulement 41 % des personnes interrogées étaient d’accord avec l’affirmation selon laquelle Washington « devrait fournir des armes à l’Ukraine« , tandis que 35 % n’étaient pas d’accord et que le reste n’était pas sûr.
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Le soutien aux livraisons d’armes américaines est en baisse par rapport au mois de mai, lorsqu’un sondage Reuters/Ipsos montrait que 46 % des Américains étaient favorables à l’envoi d’armes, tandis que 29 % y étaient opposés et que le reste n’était pas sûr.
Dans quelques mois encore, une majorité rejettera tout nouvel argent ou toute nouvelle livraison d’armes. Mais ne craignez rien. Les membres du Congrès trouveront le moyen d’injecter plus d’argent dans le trou :
Dimanche, le sénateur Lindsey Graham (R-SC) a déclaré qu’il faudrait environ « 60 ou 70 milliards de dollars » pour permettre à l’Ukraine de tenir jusqu’en 2024, et non 24 milliards de dollars.
Le sénateur Jon Tester (D-MT), président de la commission sénatoriale des crédits de défense, a déclaré que le programme envisagé permettrait de financer la guerre pendant 15 mois, soit jusqu’en 2025. Ce programme permettrait à l’administration Biden de continuer à soutenir un conflit sans fin.
David Ignatius, porte-parole officieux de la CIA au Washington Post, fait état de deux opinions à Kiev :
Le conflit saigne le pays. Les Ukrainiens avec lesquels je me suis entretenu au cours d’une visite de quatre jours savent qu’ils ne peuvent pas continuer à se battre indéfiniment pour obtenir une victoire qui pourrait s’avérer inaccessible. Mais ils ne s’arrêteront pas non plus.
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Oleksiy Goncharenko, un membre de l’opposition originaire d’Odessa, sur la mer Noire, presse les membres du parti au pouvoir du président Volodymyr Zelensky. « Je suis très inquiet« , déclare-t-il. « Pourquoi ? Regardez le front. Il ne change pas. Pendant un an, il n’a pas bougé. Mais cela a été payé par un grand nombre de vies. … L’Ukraine ne peut pas se battre ‘aussi longtemps qu’il le faudra’. Ce serait une catastrophe« .
Pour l’Ukraine, c’est déjà une catastrophe.
Mais si l’Ukraine se demande sérieusement si elle peut survivre à un combat qui pourrait durer de nombreuses années, elle doit réfléchir à un moyen de geler ce conflit selon ses propres conditions – avec une garantie de sécurité de la part des États-Unis dans le cadre de cet accord.
L’Ukraine ne peut pas geler le conflit selon ses propres conditions. Les États-Unis ne peuvent pas donner à l’Ukraine une garantie de sécurité raisonnable.
Une garantie de sécurité laisserait les États-Unis à la merci des fous de Kiev. Ils seraient en mesure de lancer, à tout moment, un nouveau conflit contre la Russie. Un conflit auquel les États-Unis, dotés d’armes nucléaires, seraient alors obligés de se joindre. Aucun Sénat n’approuvera jamais un tel traité.
L’Ukraine ne demandera pas la paix. Comme de nombreuses personnes me l’ont dit cette semaine, c’est trop personnel. En tant que superpuissance, les États-Unis peuvent essayer d’orienter ce conflit vers un règlement qui protège l’Ukraine et ne récompense pas l’agression russe. Mais ne demandez pas aux Ukrainiens d’abandonner leur cause. Ils ne le feront pas.
Si les États-Unis cessent de financer l’Ukraine, ses habitants n’auront pas le choix.
Mais la guerre ne se limite pas à l’Ukraine et les États-Unis la financeront parce que leurs dirigeants néoconservateurs croient en cette cause plus large.
La guerre en Ukraine est une action par procuration pour les États-Unis dans le cadre de leur quête d’hégémonie mondiale.
Pour la Russie, la Chine et une grande partie du reste du monde, la guerre vise donc à éliminer cette quête.
Comme l’a expliqué le président Poutine dans son récent discours au club Valdai à Sochi :
La crise ukrainienne n’est pas un conflit territorial, et je tiens à ce que cela soit clair. La Russie est le plus grand pays du monde en termes de superficie, et nous n’avons aucun intérêt à conquérir de nouveaux territoires. Nous avons encore beaucoup à faire pour développer correctement la Sibérie, la Sibérie orientale et l’Extrême-Orient russe. Il ne s’agit pas d’un conflit territorial ni même d’une tentative d’établir un équilibre géopolitique régional. Il s’agit d’une question beaucoup plus large et fondamentale, qui porte sur les principes qui sous-tendent le nouvel ordre international.
Une paix durable ne sera possible que lorsque chacun se sentira en sécurité, comprendra que ses opinions sont respectées et qu’il existera un équilibre dans le monde où personne ne pourra unilatéralement forcer ou contraindre les autres à vivre ou à se comporter comme l’hégémon le souhaite, même si cela contredit la souveraineté, les intérêts véritables, les traditions ou les coutumes des peuples et des pays. Dans un tel arrangement, le concept même de souveraineté est tout simplement nié et, pardon, jeté à la poubelle.
C’est pourquoi cette guerre va durer.
Poutine n’a cependant aucun doute sur l’identité du vainqueur :
La Russie a été, est et sera l’un des fondements de ce nouveau système mondial, prête à une interaction constructive avec tous ceux qui aspirent à la paix et à la prospérité, mais prête à s’opposer fermement à ceux qui professent les principes de la dictature et de la violence. Nous pensons que le pragmatisme et le bon sens l’emporteront et qu’un monde multipolaire verra le jour.
En sera-t-il ainsi ? Je l’espère, mais il n’est pas certain que ce soit le cas pendant les cinq ou dix années qui viennent.
Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.