Le projet pour consolider la domination à l’ONU des États-Unis et d’Israël


Wayne MadsenPar Wayne Madsen – Le 29 janvier 2016 – Source Strategic Culture

Dès 1984, le ministère des Affaires étrangères américain (Département d’État) a, par décret fédéral, collecté et enregistré les habitudes de vote des États membres à l’ONU.

L’administration Reagan, se sentant mise en échec par le vote de certains membres qui ne s’alignaient pas sur la position américaine, la plupart du temps au sujet d’Israël, souhaitait ainsi conserver une liste des pays s’opposant aux États-Unis lors de votes à l’Assemblée générale ou au Conseil de sécurité, dans le but de les punir en suspendant l’aide économique et militaire américaine dont ils bénéficiaient.

Le dernier rapport annuel du Ministère des affaires étrangères américain, intitulé Habitudes de vote aux Nations Unies en 2014, a été rendu public en mars 2015. Celui sur les habitudes de vote de l’année 2015 est attendu en mars de cette année. La Section VI de ce rapport concerne particulièrement les habitudes de vote des États membres sur les résolutions concernant Israël.

S’il est vrai que, traditionnellement, l’ONU considérait la politique étrangère israélienne avec l’hostilité qu’elle mérite vraiment sur la scène internationale, il convient de constater que sous le mandat du Secrétaire général Ban Ki-Moon, l’ONU a eu recours à des tours de passe-passe institutionnels et bureaucratiques pour assurer la primauté des intérêts d’Israël sur ceux de la Palestine.

On relève aussi des cas dans lesquels les États-Unis, chaperonnés par Israël, se sont opposés à l’entrée de nouveaux États à l’ONU, dans le but de restreindre le nombre de membres soutenant la Palestine et s’opposant aux politiques américaines et israéliennes. En effet, Washington considère comme hostile et voyou tout État qui répugne à se soumettre à son effort de monopolisation des débats à l’ONU.

Washington a rempli la mission qui lui avait été confiée de s’assurer qu’aucun nouvel État membre problématique ne rejoigne l’ONU, en menaçant de couper toute aide américaine aux pays qui songeraient à reconnaître l’indépendance d’États tels l’Abkhazie, l’Ossétie du Sud, le Somaliland et le Sahara occidental, leur fermant ainsi les portes des Nations Unies et de ses agences spécialisées.

Les États-Unis apprécient la plupart des États-membres du Groupe des États d’Europe occidentale et autres [bloc régional votant auquel appartient toute l’Europe occidentale et, étrangement, Israël, la Turquie, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, NdT] pour leur soutien sans faille aux États-Unis, en particulier sur les questions concernant Israël et l’Ukraine. La plupart de ces membres ont soutenu, dans 90% des votes, les positions américaines.

Israël est le seul État membre a avoir voté de concert avec les États-Unis dans 100% des cas, même pour s’opposer à la résolution demandant aux États-Unis de cesser leur politique de boycott économique de Cuba, alors même qu’Israël maintient des activités commerciales et touristiques avec cette île depuis des décennies.

A l’autre extrême, nous retrouvons la Syrie et la Corée du Nord, qui n’ont jamais suivi les consignes de vote des États-Unis, même sur les décisions marquées de la menace de mesures de rétorsion économique en cas de désobéissance.

Parmi les membres qui suivent les États-Unis dans plus de 90% des votes à l’ONU, on trouve Andorre, l’Australie, la Belgique, le Canada, l’Autriche, officiellement neutre, la Finlande, la Suède, la Suisse, le Danemark, la France, l’Allemagne, la Grèce, l’Italie, le Liechtenstein, le Luxembourg, Monaco, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Portugal, San Marin, l’Espagne et le Royaume-Uni. Immédiatement derrière suivent l’Irlande, dans 88,9% des votes, et l’Islande, dans 81,8% des votes.

Les États membres d’Europe centrale et orientale qui appartiennent également à l’Otan participent eux aussi à la compétition en servilité envers les désirs des États-Unis. Parmi les États choisissant de soutenir les États-Unis dans plus de 90% des votes, on trouve l’Albanie, la Bulgarie, la République tchèque, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, le Monténégro, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie. Parmi les États non membres de l’Otan, l’Ukraine, la Bosnie-Herzégovine et la Serbie ont également suivi les États-Unis dans 90% des votes, suivies de près par la Moldavie et la Géorgie dans 88,9% des votes, la Macédoine dans 85,7% des votes, et la Croatie dans 77,8% des votes. Les États-Unis et leurs alliés sont impatients de voir le Kosovo rejoindre l’ONU, car ils s’attendent à la même soumission de son vote aux décisions américaines.

Le Japon, comme les pays membres de l’Otan, suit Washington dans 90% de ses votes sur les décisions considérées comme primordiales pour les États-Unis.

Ce que les États-Unis et Israël veulent éviter à tout prix est la formation d’un contingent d’opposants au sein des Nations-Unies. A l’heure actuelle, le pays européen qui vote le plus souvent à l’encontre des décisions américaines est la Russie, dont les votes ne coïncident avec le vote américain que dans 28,6% des cas. Les autres États dont les habitudes de vote ne sont pas calquées sur celles des États-Unis sont l’Arménie, dans 54,5% des votes, l’Azerbaïdjan et la Biélorussie dans 50% des cas. Ce n’est pas un hasard si la Russie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Biélorussie ont connu sur leur territoire l’émergence de révolutions thématiques soutenues par le binôme George Soros / CIA, à l’instar de celles qui ont secoué l’Ukraine, la Moldavie, la Serbie et la Macédoine.

La Chine, de son côté, n’a voté comme les États-Unis que dans 11,1% des cas.

Les États-Unis sont encore plus hostiles à l’émergence de nouveaux États non alignés, car ceux-ci sont les plus enclins à voter à l’encontre des intérêts américains à l’ONU. L’Iran et l’Inde n’ont fait coïncider leur vote à celui des États-Unis que dans 10% des cas, le Pakistan dans 12,5% des cas, Cuba à 18,2%, alors que l’Égypte et le Zimbabwe n’ont voté avec les États-Unis que dans 20% des cas, l’Algérie et le Gabon à 25%. Parmi les États votant avec les États-Unis dans 33% des cas, on trouve la République démocratique du Congo, l’Équateur, la Gambie, le Koweït, le Nicaragua, l’Arabie saoudite, le Soudan, le Venezuela et le Yémen. A 30% se trouvent le Bangladesh, Brunei, l’Indonésie et le Sri Lanka; à 25% se trouve le Laos, à 27,3% se trouvent le sultanat d’Oman et l’Ouzbékistan.

Le sous-secrétaire général aux Affaires politiques de l’ONU, Jeffrey Feltman, est un Américain, néocon dogmatique, dont le nom revient systématiquement dans les révoltes qualifiées de Printemps arabes qui ont renversé les gouvernements de Libye, du Yémen, d’Égypte, et qui ont plongé la Syrie dans une guerre civile sanglante. Il apparait que le prix à payer pour être membre des Nations Unies soit une loyauté sans faille à Washington. Si l’on regarde les derniers États admis aux Nations Unies, on ne peut que constater leur soutien indéfectible au vote américain: le Timor oriental dans 80% des cas, et le Soudan du Sud dans 75% des votes.

Les États-Unis peuvent toujours compter sur le soutien total des trois îles-États du Pacifique qui sont liées aux États-Unis par de soi-disant Conventions de libre-association (de son acronyme anglo-saxon COFA, Compacts of Free Association). Les îles Marshall et la Micronésie votent dans 91,7% des cas avec les États-Unis, et Palau dans 90,9% des cas. Durant la Guerre froide, les républiques socialistes soviétiques d’Ukraine et de Biélorussie n’ont jamais voté différemment de l’URSS lors de votes aux Nations Unies. Les États membres du Pacifique que sont les îles Marshall, la Micronésie et Palau remplissent la même fonction que les anciennes républiques socialistes soviétiques : assurer que les États-Unis ne soient jamais isolés dans leur opposition à quelque résolution que ce soit à l’Assemblée générale de l’ONU.

La seule manière pour les Nations Unies de se sortir du joug de Washington et de ses acolytes conspirateurs de Jérusalem est d’encourager l’accession des États indépendants de facto (dans leur domaine respectif) de la sphère d’influence russe et du mouvement des pays non alignés, au statut d’État membre à l’ONU. Cela pourrait commencer par l’admission des États auto-proclamés d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, qui jouissent déjà de la reconnaissance diplomatique de quatre États membres de l’ONU. Une pression devrait aussi être exercée pour accélérer l’accession à un statut plein d’État membre pour la Palestine et le Saint-Siège, qui n’ont pour le moment pour statut officiel que celui d’État observateur. Pour représenter les intérêts du christianisme orthodoxe, l’ONU devrait accorder le statut d’État membre à la République du Mont Athos, une république monastique semi-autonome en Grèce, ce qui, avec l’accession du Saint-Siège au statut de membre, ferait valoir les intérêts de tous les chrétiens. Les intérêts des chrétiens seraient aussi renforcés par l’accession au statut de membre de l’Ordre de Malte, un ordre militaire souverain qui pour le moment ne jouit que d’un statut d’invité aux Nations-Unies. Il devrait en être de même pour le gouvernement copte d’Égypte en exil et la Principauté de Pontinha dans l’océan Atlantique, un État auto-proclamé se réclamant des chevaliers Templiers.

Les gouvernements en exil auxquels l’ONU devrait ouvrir ses portes sont: le Biafra, la République arabe sahraouie démocratique, la République de Papouasie occidentale, la République de Cabinda, la République serbe de Krajina, la République d’Amazonie, le groupe des communautés du Kurdistan (État kurde de Turquie orientale), la République démocratique populaire du Yémen (Yémen du sud), l’Azawad, la République des Moluques du Sud, les Résidents exilés de Chagos, le Gouvernement transnational d’Îlam tamoul, la Nation des Sioux Lakota, le gouvernement du Royaume d’Hawaii et le Comité de sauvetage de l’Ukraine. Ces gouvernements ont tous des comptes un peu particuliers à régler avec les États-Unis, Israël et leurs alliés au sein des Nations Unies.

A l’heure actuelle, l’ONU ne se fait que la représentante des intérêts particuliers de sociétés multinationales, de quelques groupes de pression particulièrement bruyants comme ceux affiliés à Israël et de la panoplie d’ONG financées par George Soros, à l’instar de Human Rights Watch, Amnesty International et l’Organisation internationale pour les migrations.

L’ONU doit ouvrir ses portes à d’autres membres afin de pouvoir prétendre représenter tous les peuples du Monde de façon légitime. Ouvrir les portes des Nations Unies à de nouveaux membres rétablirait l’équilibre mis à mal par la récente admission des délégations du Monténégro, du Timor oriental et du Soudan du Sud, qui rivalisent de créativité dans leur danse du ventre pour séduire l’Oncle Sam.

Wayne Madsen

Traduit par Laurent, vérifié par jj, relu par Diane pour le Saker Francophone

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