Où sont Marx et Lénine au moment où nous avons besoin d’eux ?


Paul Craig Roberts

Paul Craig Roberts

Par Paul Craig Roberts – Le 11 avril 2016 – Source CounterPunch

Marx et Lénine étaient en avance sur leur temps. Marx a écrit avant la délocalisation des emplois et la financiarisation de l’économie. Lénine a présidé à une révolution communiste qui a anticipé en se déroulant dans un pays dans lequel les éléments féodaux prédominaient encore sur le capitalisme. Au XXIe siècle, le capitalisme de l’Amérique a été libéré des régulations qui le démocratisaient et le mettaient au service de la société. Aujourd’hui, le capitalisme est financiarisé, avec comme conséquence que sa puissance productrice est asséchée par les intérêts dûs à l’endettement.

Karl Marx

Lorsque j’étais jeune homme, un individu possédant un million de dollars était riche. Quiconque avait quelques millions de dollars de plus était considéré comme plus riche que riche. Aujourd’hui, il y a des gens qui possèdent des milliers de millions de dollars.

Peu d’entre eux ont gagné leurs milliards en produisant des biens et des services vendus aux consommateurs.

Les économistes néolibéraux qui prescrivent la politique économique, non seulement à l’Ouest mais aussi en Russie et en Chine, affirment à tort que l’argent reçu est de l’argent gagné. Alors, comment les membres du moins-de-un-pour-cent obtiennent-ils leurs milliers de millions ?

Ils l’obtiennent par des liens politiques et des transactions purement financières.

Lorsque l’Union soviétique s’est effondrée comme conséquence de l’arrestation du président Gorbatchev par des communistes purs et durs, des individus bien connectés, en Russie et dans la province soviétique d’Ukraine, en particulier ceux qui avaient des liens solides avec Washington et Israël, ont fini avec des possessions massives, qui étaient auparavant des propriétés d’État.

Aux État-Unis, les milliardaires sont le résultat de prêts bancaires qui leur permettent de racheter des entreprises. Ces acquisitions produisent de la richesse pour la personne qui prend le contrôle de la société, en réduisant les montants des retraites versées par l’entreprise et en utilisant sa trésorerie pour rembourser l’emprunt qui a permis la prise de contrôle. Souvent l’entreprise et ses employés sont ruinés, mais l’artiste qui l’a reprise s’en va avec d’énormes quantités d’argent. Les manipulations des offres publiques d’achat initiales sont une autre source de richesse, tout comme les dérivés titrisés.

Les économistes classiques, et Michael Hudson aujourd’hui, définissent ces profits comme des rentes économiques, dont les revenus n’ont exigé aucune augmentation de la production réelle. En d’autres termes, les gains en richesse de ces milliardaires sont une forme de parasitisme basé sur l’exploitation et non sur la production réelle. Les gains résultent du pompage des revenus de la production pour les affecter au remboursement de la dette.

Les économies capitalistes d’aujourd’hui sont beaucoup plus dysfonctionnelles que Marx ne le supposait. Au cours des deux dernières décennies, les économies occidentales n’ont servi personne sinon les très riches, et les masses exploitées se sont soumises à leur exploitation. Les larges masses occidentales peuvent tout aussi bien faire des esclaves.

Il n’y a aucune raison qu’une personne possède des milliers de milliards de dollars. L’argent augmente le pouvoir politique de certains individus sur celui de l’électorat. En effet, l’argent devient l’électorat. L’argent est utilisé pour acheter le contrôle politique qui détruit le gouvernement représentatif. Des milliardaires, comme Sheldon Adelson, George Soros et les frères Koch, utilisent leur fortune, qui se chiffre en milliards, pour contrôler le gouvernement étasunien dans le sens de leurs intérêts. Une Cour suprême républicaine leur a facilité les choses.

La montée de la puissance financière en Russie et en Chine a créé des centres privés de pouvoir dans ces pays qui, comme ceux existant aux États-Unis, sont indépendants des gouvernements. Ces centres de pouvoir ont le potentiel de capturer les gouvernements et d’utiliser les institutions publiques pour ensuite concentrer la richesse dans un petit nombre de mains. Les privatisations en Russie et en Chine renforceront le pouvoir indépendant d’étroits intérêts privés comme cela se passe en Europe et au Royaume-Uni. L’économie néolibérale garantit que pour finir, l’argent contrôle le gouvernement.

Oxfam, un organisme international de bienfaisance dont le siège est à Oxford, en Angleterre, rapporte que 62 milliardaires possèdent la moitié de la richesse mondiale.

C’est Warren Buffett, l’un des plus riches méga-milliardaires, qui a dit que le taux d’imposition de sa secrétaire était plus élevé que le sien. Si les gouvernements ne corrigent pas cela, il y aura la révolution.

Mais apparemment, les électeurs ne la feront pas, du moins pas aux États-Unis. Hillary représente les 1%, comme l’attestent les $153 000 000 d’honoraires pour les conférences que donnent les Clinton, mais les 99% se détruisent eux-mêmes en votant pour soutenir l’ambition de Hillary de parvenir à la présidence. Apparemment, H. L. Mencken [journaliste, critique, satiriste américain, célèbre aux Etats-Unis dans la première moitié du XXe siècle, Cf. Wikipedia, NDT] avait raison, la grande majorité des Américains sont des crétins.

Paul Craig Roberts

Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Diane pour le Saker Francophone

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