La Russie a perdu sa dynamique politique en Syrie


Le 22 juin 2018 − Source Katehon

Peut-être que l’histoire se souviendra de la pause en cours sur les sujets militaires et militaro-politiques en Syrie sous le nom de « trêve du football ». L’opération, qui avait commencé, et visait à libérer une autre zone territoriale syrienne de son occupation par les terroristes – dans la province de Deraa – est suspendue.

Pour des raisons non précisées, Moscou a demandé aux sympathisants du Hezbollah et aux détachements de combattants iraniens et pro-iraniens soutenant Damas de se retirer. Ce qui a irrité l’Iran et provoqué un refroidissement perceptible entre Téhéran et Moscou. On a, au demeurant, retrouvé certains de ces combattants intégrés aux troupes gouvernementales syriennes.

Dans le même temps, les Américains, qui, d’une manière générale, sont constamment et énergiquement à l’offensive contre Moscou et Damas sur le sujet syrien, ont cessé d’exiger la fin de l’offensive à Deraa. Ce pendant, ils ont sécurisé leurs positions dans les territoires occupés de Syrie de l’Euphrate, autour d’Al-Tanf, et au nord-est, où ils se sont trouvés confrontés à la Turquie aux dépens des Kurdes, ce qui est venu porter un nouveau coup à l’alliance déjà boiteuse entre Russie, Iran et Turquie.

Grande trêve footballistique

C’est là qu’ils changent les choses, tout en démembrant la Syrie de manière évidente. Quant à la Russie, nombre d’observateurs ont à présent le sentiment qu’elle a perdu sa dynamique dans le complexe jeu politique syrien, qu’elle essaye de nouveau de construire de meilleures relations avec les USA et Israël aux dépens de ses intérêts propres.

Et certains observateurs n’hésitent pas à ajouter que cette tendance fait suite à la visite à Moscou du premier ministre israélien Benjamin Netanyahou le 9 mai dernier. Si on les croit, un accord a alors été conclu : la Russie devrait convaincre l’Iran de retirer ses troupes des zones frontalières d’Israël – en échange de quoi Israël n’emploierait pas la force en cas de montée en puissance du conflit. Tel Aviv menace d’entamer une vraie guerre avec Bachar al-Assad, à laquelle les États-Unis se rallieront, et face à laquelle le pays ne tiendrait pas une semaine sans intervention russe. Et l’intervention russe amènerait Moscou à déclarer la guerre pas seulement à Israël et aux USA, mais plus généralement – au réseau de banquiers mondiaux, ou État profond. La Russie n’est pas encore prête pour une telle guerre.

Et donc, le dirigeant russe s’est vu offrir comme « récompense »la garantie d’une tenue pacifique de la coupe du monde.

Il est peu probable que les développements à suivre soient au bénéfice de la Russie, de la Syrie et de l’Iran. Le plus probable est l’émergence d’un conflit gelé. C’est le meilleur scénario. Et le pire – ce serait des tentatives de la coalition américaine d’étendre les zones sous leur contrôle. On pourra assister à des provocations. Dans le district de Deraa, par exemple, une tentative de provocation par armes chimiques de la part de « Djebhat an Nusra ». Et en réponse, les Américains frapperont l’armée gouvernementale syrienne.

Ce type d’occurrence peut se reproduire à l’avenir. On a peu de prévisions positives sur cette situation. Tant que les groupes armés les plus actifs et les plus aptes au combat n’auront pas été supprimés, un processus politique est impossible. C’est évident. Et ces conditions ne sont pas encore réunies.

Les décideurs politiques russe semblent vouloir s’asseoir entre deux chaises sur le dossier syrien – d’un côté, ils essaient de protéger leurs intérêts nationaux en Syrie, et de l’autre – de faire ami ami avec l’occident. Mais on peut douter que cela va fonctionner.

Traduit par Vincent, relu par Cat, vérifié par Diane pour le Saker Francophone

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