Par Paul Craig Roberts – Le 23 décembre 2015 – Source paulcraigroberts.com
Chers donateurs, merci pour votre soutien en 2015. Bien que vous m’ayez fait travailler encore une autre année, je trouve encourageant qu’il y ait quelques Américains qui peuvent penser de manière indépendante et qui veulent savoir. Comme a dit Margaret Mead, il suffit de quelques personnes déterminées pour changer le monde. Peut-être certains d’entre vous seront-ils ces gens.
Ma traditionnelle rubrique de Noël date des années 1990 où j’étais chroniqueur de presse. Elle a été largement réimprimée ici et à l’étranger. Chaque année deux ou trois lecteurs écrivent pour m’instruire que la religion est source de guerres et de persécutions. Ces lecteurs confondent la religion avec l’abus humain des institutions, religieuses ou autres. Les États-Unis ont des institutions démocratiques et légales pour protéger les libertés civiques. Néanmoins, nous avons maintenant un État policier. Soutiendrai-je que la démocratie et la liberté civique sont à l’origine d’États policiers?
Des lecteurs sont aussi embarrassés par l’hypocrisie. Il y a une différence énorme entre la proclamation de principes moraux à la hauteur desquels on peut ne pas réussir à s’élever et la proclamation de principes immoraux qui sont bien trop faciles à conserver. La liberté est un accomplissement humain. Nous l’avons, ou l’avions, parce que ceux qui y ont cru se sont battus pour l’obtenir. Comme je l’explique dans ma rubrique de Noël, les gens ont pu se battre pour la liberté parce que le christianisme a donné du pouvoir à l’individu.
L’autre pierre angulaire de notre culture est la Constitution. En effet, les États-Unis sont la Constitution. Sans la Constitution, les États-Unis seraient un pays différent et les Américains un peuple différent. C’est pourquoi les attaques contre la Constitution par Bush et le régime d’Obama sont des attaques contre l’Amérique bien pires que n’importe quelles attaques par des terroristes. On ne peut pas faire grand-chose contre ces attaques, mais nous ne devrions pas, par ignorance, les autoriser ou croire le gouvernement quand il prétend que la sécurité exige la réduction des libertés.
Le meilleur cadeau pour tout le monde
Noël est un moment de tradition. Si vous avez trouvé le temps, dans la ruée, de décorer un sapin, vous partagez une tradition relativement récente. Même si le sapin de Noël a des racines anciennes, au début du XXe siècle seule une famille américaine sur cinq en dressait un. C’est à partir de 1920 que l’arbre de Noël est devenu la marque de la saison. Calvin Coolidge a été le premier président à allumer un arbre de Noël national sur la pelouse de la Maison Blanche.
Les cadeaux sont une autre coutume partagée. Cette tradition vient des rois mages, ces trois rois qui ont apporté des cadeaux au petit Jésus. Quand j’étais un enfant, les cadeaux étaient plus modestes qu’ils ne le sont aujourd’hui, mais même alors les gens se plaignaient de la marchandisation autour de Noël. Nous nous sommes habitués à cette marchandisation. Les ventes de Noël sont la base incontournable de beaucoup d’activités. Le don d’un cadeau nous fait nous souvenir des autres et prendre du temps, dans nos vies tourmentées, pour penser à eux. Les décorations et les cadeaux de Noël sont une de nos connexions à une culture chrétienne qui a soudé la civilisation occidentale pendant 2 000 ans. Dans notre culture, l’individu compte. Cela permet à une personne individuelle de taper du poing sur la table, de prendre position, de devenir un réformateur et d’assumer l’injustice.
Cette responsabilisation de l’individu est spécifique de la civilisation occidentale. Cela a fait de l’individu un citoyen égal en droits à tous les autres citoyens, protégé d’un gouvernement tyrannique par l’État de droit et la liberté d’expression. Ces accomplissements sont le produit de siècles de lutte, mais ils découlent tous de l’enseignement de Dieu, qui donne tant de valeur à l’âme de l’individu qu’il a envoyé son fils mourir afin que nous puissions vivre. En élevant ainsi l’individu, le christianisme lui a donné la parole. Autrefois, seulement les puissants l’avaient. Mais dans la civilisation occidentale, les gens intègres ont la parole. Tout comme les gens d’honneur, ceux qui ont le sens de la justice, du devoir et ceux qui jouent franc-jeu. Les réformateurs peuvent réformer, les investisseurs peuvent investir et les entrepreneurs peuvent créer des entreprises commerciales, de nouveaux produits et de nouvelles occupations.
Le résultat a donné naissance à une terre d’opportunités. Les États-Unis ont attiré des immigrants qui ont partagé nos valeurs et les ont reflétées dans leurs propres vies. Notre culture a été absorbée par divers peuples qui en sont devenus un seul. Au cours des récentes décennies, nous avons perdu de vue l’accomplissement historique qui a permis qu’existe l’individu. On n’enseigne plus respectueusement les racines religieuses, légales et politiques de ce grand accomplissement dans des lycées, des collèges et des universités, et elles ne sont plus respectées par notre gouvernement. Les voix qui nous atteignent par delà les millénaires et nous connectent à notre culture sont étouffées par le politiquement correct et la guerre contre le terrorisme.
La prière a été chassée des écoles et les symboles religieux chrétiens chassés de la vie publique. Les protections constitutionnelles ont été réduites par les ambitions politiques hégémoniques. La détention indéfinie, la torture et le meurtre sont maintenant des pratiques reconnues du gouvernement des États-Unis. L’accomplissement historique d’un processus mérité est reparti en arrière. La tyrannie est réapparue. La diversité au pays et son hégémonie à l’étranger font se consumer les valeurs et démantèlent la culture et l’État de droit. Il y a beaucoup de place pour la diversité culturelle dans le monde, mais pas au sein d’un seul pays.
Une Tour de Babel n’a aucune culture. Une personne ne peut pas être un jour chrétienne, païenne le suivant et musulmane le jour d’après. Un méli-mélo de valeurs culturelles et religieuses ne fournit aucune base pour la loi – sauf le pouvoir brut du passé pré-chrétien. Tous les Américains ont un intérêt énorme dans le christianisme. Que nous croyions ou non individuellement au Christ, nous sommes les bénéficiaires de la doctrine morale qui a contenu le pouvoir et protégé le faible. Le pouvoir est un cheval monté par le mal. Au XXe siècle, le cheval a été monté allégrement et le XXIe montre une augmentation de l’allure. Des millions de gens ont été exterminés au XXe siècle par des nationaux-socialistes en Allemagne et par des communistes soviétiques et chinois, simplement parce qu’ils étaient les membres d’une race ou d’une classe qui avait été diabolisée par des intellectuels et par l’autorité politique.
Dans les premières années du XXIe siècle, des centaines de milliers de musulmans, dans sept pays, ont déjà été assassinés et des millions déplacés pour étendre l’hégémonie de Washington. Le pouvoir, qui est laïcisé et coupé des traditions civilisatrices, n’est pas limité par des scrupules moraux ou religieux. Vladimir Illich Lénine a fait clairement comprendre cela quand il a défini la signification de sa dictature comme un «pouvoir illimité, s’appuyant directement sur la force, non limité par quoi que ce soit». La course de Washington pour l’hégémonie sur les citoyens américains et le reste du monde est basée entièrement sur l’exercice de la force et ressuscite un pouvoir qui n’a pas à répondre de ses actes.
L’accent que met le christianisme sur la valeur de l’individu fait de ce pouvoir, comme l’a prétendu Lénine et comme le prétend maintenant Washington, un pouvoir impensable. Que nous soyons religieux ou non, notre célébration de l’anniversaire du Christ glorifie une religion qui nous a fait les maîtres de nos âmes et de notre vie politique sur la Terre. Une telle religion vaut la peine de s’y accrocher, même pour des athées.
Alors que nous entrons dans 2016, la civilisation occidentale, produit de milliers d’années d’effort, est en jeu. La dégénérescence est partout sous nos yeux. Alors que l’Ouest s’enfonce dans la tyrannie, les peuples occidentaux défendront-ils leur liberté et leurs âmes, ou sombreront-ils dans la tyrannie, qui a de nouveau révélé son horrible et cruel visage ?
Paul Craig Roberts
Traduit par Poolan Devi, vérifié par Wayan, édité par Hervé et, enfin, relu par Diane pour le Saker Francophone