Par Batiushka − Le 8 Août 2023 − Source Global South
Avant-propos
Mon père a combattu les nazis. En 1942, il a perdu ses deux meilleurs amis à cause d’un de leurs obus. Pour une raison mystérieuse, l’obus les a tués, mais ne l’a que blessé, même s’il a dû passer six semaines à l’hôpital. Soixante ans plus tard, alors qu’il se mourait de vieillesse, il se souvenait, les larmes aux yeux, de ses amis disparus, des hommes qui n’avaient pas vécu, tués alors qu’ils n’avaient qu’une vingtaine d’années.
Malheureusement, après 1945, les Américains, soi-disant antinazis, ont placé certains des « anciens » officiers nazis qui avaient tiré ces obus à des postes de commandement au sein de l’OTAN et ont formé l’establishment ouest-allemand. Il est étrange de constater que les mots « OTAN » et « nazi » se ressemblent [NATO/NAZI en anglais, NdT]. Aujourd’hui, nos anciens alliés soutiennent, entraînent et arment ouvertement des nazis. Pas au nom de mon père. Et pas en mon nom.
Deux guerres mondiales
Il est étrange que les deux grandes guerres européennes du siècle dernier aient été appelées « guerres mondiales ». La première concernait ostensiblement la Serbie et la Belgique, la seconde la Pologne. Cependant, bien qu’il s’agisse de pays européens, l’Europe a impliqué ses colonies et ses imitateurs du monde entier dans ses guerres, qui sont donc devenues des « guerres mondiales ». Ainsi, lors des deux guerres, les Français ont utilisé leurs troupes nord-africaines et les Britanniques se sont largement appuyés sur les troupes indiennes en Extrême-Orient et en Égypte.
L’un des imitateurs des pays occidentaux, le Japon, qui avait été financé et armé jusqu’aux dents par la Grande-Bretagne, a commencé sa guerre de 1904-1905 contre la Russie, orchestrée par les Britanniques et les Américains, en détruisant sans avertissement la flotte russe du Pacifique qui se trouvait au port. Ils ont répété cette infamie en 1941, mais cette fois contre la flotte américaine du Pacifique et, trois jours plus tard, ils ont humilié la Royal Navy britannique en coulant ses deux plus prestigieux cuirassés. Deux mois plus tard, le Japon contraignait la Grande-Bretagne à se rendre à Singapour, dans la défaite la plus humiliante de son histoire. Comme on dit : On récolte ce que l’on sème.
La guerre de l’OTAN en Europe
Aujourd’hui, nous sommes à nouveau confrontés à un conflit en Europe, cette fois-ci en Ukraine. Lorsque l’opération de libération russe très limitée visant à mettre fin au génocide des Russes dans l’est de l’Ukraine a débuté en février 2022, après huit années de massacres organisés par l’OTAN à Kiev, la Russie a fait preuve de patience et de diplomatie, et tout aurait pu se terminer avec relativement peu de dégâts en quelques semaines seulement. Cependant, Washington a interdit la paix et a procédé à une escalade, ordonnant à ses vassaux de l’OTAN au Royaume-Uni et dans l’UE de procéder à une escalade, en armant le régime de Kiev jusqu’aux dents et en entraînant ses forces – tout comme il l’avait fait à un niveau inférieur depuis 2014.
Puis l’Occident a procédé à une nouvelle escalade. Et encore. Et encore. Le plan A de la Russie, qui consistait à vaincre les fascistes de Kiev dans le Donbass, a dû être modifié en raison de l’agression de l’OTAN et de Kiev contre la Crimée. Ils ont également dû libérer Zaporozhie et Kherson et former ainsi un pont terrestre vers la Crimée. Mais même ce plan A ajusté n’était pas suffisant. Le plan A a dû être remplacé par le plan B. Il s’agira probablement de libérer progressivement toute la moitié orientale de l’Ukraine jusqu’au fleuve Dniepr, de sorte que les armes de l’OTAN ne puissent plus être utilisées pour attaquer les civils russes à partir de cette région. Mais même le plan B pourrait ne pas suffire. Il est temps de passer au plan C.
Le plan C
Avec les attaques terroristes de drones et de missiles lancées par les marionnettes de l’OTAN à Kiev contre des cibles purement civiles en Russie, à Belgorod, Koursk, Donetsk, en Crimée, sur le pont de Kertch et même contre Moscou (sans compter l’attaque terroriste contre les pipelines Nordstream vers l’Allemagne au large des côtes danoises), il semble maintenant que le plan C soit nécessaire. Le plan C consistera à prendre Nikolaev, Odessa et tout le sud, bloquant ainsi l’Ukraine et occupant probablement temporairement le reste de l’Ukraine, afin d’atteindre les objectifs russes de démilitarisation et de dénazification.
Le plan C n’était pas celui que voulaient les Russes, mais l’Occident l’a imposé à la Russie par ses escalades militaires constantes et ses attaques depuis l’ouest de l’Ukraine. Cependant, même le plan C pourrait ne pas suffire. Il existe un plan D, qui consiste à résister à la prochaine escalade de l’OTAN. Ce plan sera mis en œuvre si l’alliance offensive de l’OTAN, contrôlée par les États-Unis, transforme ce conflit purement local en une nouvelle guerre mondiale, étendant son agression à l’Asie, à l’Afrique et peut-être même à l’Amérique latine, en utilisant autant que possible ses mandataires et ses marionnettes comme chair à canon.
L’escalade de l’OTAN
Outre les sanctions économiques illégales et les confiscations illégales d’actifs russes, après février 2022, l’Occident a d’abord tenté d’étendre son agression à l’enclave russe de Kaliningrad en la coupant illégalement via la Lituanie. Cette tentative a échoué. Il a ensuite menacé de relancer la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Ensuite, les gouvernements fantoches occidentaux des États baltes ont intimidé les populations russes locales, par exemple en rendant illégale la commémoration de leurs morts. Jusqu’à présent, la Russie a été très prudente et n’a attaqué aucun de ces pays de l’OTAN, bien que les bases occidentales en Europe de l’Est, telles que l’aéroport de Rzeszow en Pologne ou les bases américaines en Roumanie et à Rammstein en Allemagne, doivent être des cibles très attrayantes. Cependant, l’Occident s’est ensuite tourné vers l’international. Il a menacé l’allié chinois de la Russie en amenant l’OTAN en Asie, en essayant de former une « Alliance indo-pacifique » en plus de son absurde AUKUS, que la Nouvelle-Zélande dénucléarisée a rejeté, et en menaçant l’île chinoise Taïwan. L’Occident a ensuite menacé et intimidé d’autres alliés de la Russie, le Brésil et l’Afrique du Sud, et a essayé de flatter son allié indien. Enfin, les États-Unis continuent de faire la guerre à l’allié syrien de la Russie, dont ils volent le pétrole.
Face à ces échecs, l’Occident est retourné en Europe, menaçant le Belarus et la Russie d’une attaque par la Pologne, les pays baltes, la Moldavie ou la Roumanie. Aujourd’hui, l’Occident menace les alliés de la Russie en Afrique, et plus particulièrement en Afrique de l’Ouest. Le plan D n’est pas ce que l’on pourrait appeler le plan Z, l’option nucléaire, le scénario ultime du cauchemar de l’Armageddon. Il est vrai qu’à maintes reprises au cours des dix-huit derniers mois, des voix extrémistes au sein de l’OTAN ont menacé d’utiliser des armes nucléaires contre la Russie, ce qui signifierait la destruction du monde occidental, ainsi que de nombreux autres pays. Ces voix n’ont été réduites au silence que par les voix russes qui ont répondu qu’en cas d’attaque, elles utiliseraient leurs armes nucléaires. Celles-ci seraient acheminées par des missiles hypersoniques et la Russie pourrait donc être en mesure de se protéger des frappes occidentales grâce à cette technologie, que l’Occident ne possède pas. Non, il s’agit du plan D.
L’Afrique
Le plan D commence en Afrique. Encouragées par le courage russe qui a tenu tête à l’Occident en Syrie et maintenant en Ukraine, des voix se sont élevées ici, criant : « Vive Poutine » et « Dieu merci pour la Russie » et des slogans anti-français : « À bas les Français », « À bas la France et ses alliés », « France Go Home » et « Nous ne serons pas une autre Libye ». En effet, la puissance coloniale y est détestée, comme dans toutes les anciennes et moins anciennes colonies de la France, où les espions français ont, au cours des soixante dernières années, assassiné de nombreux dirigeants africains patriotes et mis en place des régimes fantoches. Au Mali, pays voisin riche en or, le français n’est plus la langue officielle. Le Burkina Faso et le Tchad, voisins riches en or, partagent les mêmes sentiments que le Niger à l’égard de l’ancienne puissance coloniale. En Guinée et au Sénégal, des voix se sont également élevées pour soutenir le Niger.
Comme l’a dit le président Erdogan, l’Afrique dans son ensemble, et pas seulement le Sahel, en a assez de l’exploitation impitoyable par l’Occident de ses immenses ressources naturelles et de ses richesses minérales. L’Afrique en a assez de l’asservissement économique des Africains par l’Occident et des brimades condescendantes, que ce soit de la part de la France, du Royaume-Uni ou des États-Unis. La France, avec son « Notre Afrique », est inquiète. Notamment parce que le Niger est une importante source d’uranium (et possède également de l’or). Environ un tiers de la France, largement alimentée par l’énergie nucléaire, est chauffée avec de l’électricité provenant de l’uranium nigérien. La France va-t-elle commencer à payer le prix du marché pour cet uranium ? Le Niger veut le savoir. L’empire économique français, qui existe toujours, pourrait-il organiser une guerre ici aussi, en utilisant sa Légion étrangère ou les forces des gouvernements fantoches ouest-africains de la CEDEAO (Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest) pour envahir le Niger nouvellement indépendant ? Ou bien la France, soutenue par les États-Unis, pourrait-elle utiliser des sanctions illégales pour couper les voies d’approvisionnement ou l’oléoduc vers le Niger et créer ainsi une extension mondiale de la guerre occidentale en Ukraine ? Après tout, la spécialité occidentale est la « globalisation ».
Vieilles injustices en Afrique
On craint une véritable guerre occidentale par procuration en Afrique de l’Ouest. Les États-Unis et la France pourraient se cacher derrière des forces africaines armées par l’Occident, peut-être celles du Nigeria, et organiser une invasion du Niger. L’excuse serait de remettre en place le président fantoche corrompu du Niger sous le prétexte de « restaurer la démocratie » ! (Toute tentative de remettre en place Yanukovich à Kiev en 2014, corrompu mais démocratiquement élu, aurait été accueillie par une vigoureuse opposition occidentale – il n’était pas leur marionnette). Mais surtout, la France dispose d’une base de 1 500 soldats et les États-Unis d’une base de drones et d’un quartier général de commandement pour l’Afrique de 1 000 soldats au Niger, d’où ils risquent d’être totalement expulsés. D’où la « visite » de Victoria Nuland.
Il est intéressant de noter que de nombreuses frontières de l’ancienne (et de la moins ancienne) Afrique de l’Ouest française (et pas seulement celle du Niger, riche en uranium) sont étrangement rectilignes. C’est parce qu’elles ont été tracées sur des cartes par des bureaucrates parisiens qui n’ont pas tenu compte des différents peuples (dans le langage raciste occidental, les « tribus ») d’Afrique. Imaginez que les frontières de la France avec la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la Suisse, l’Italie, l’Espagne et l’Andorre, qui ont fait l’objet d’une lutte acharnée, soient des lignes droites. Ce n’est pas le cas. Pour de bonnes raisons, les « tribus » d’Europe sont très différentes et parlent des langues différentes. Le fait que les tribus européennes aient la peau blanche et souvent des cheveux plutôt raides et des yeux, clairs ou bruns, un petit nez et des lèvres minces ne signifie rien. L’Afrique est également composée de nombreuses nations différentes, qui parlent de nombreuses langues différentes. Et le Premier ministre italien soutient les Africains contre les colons français.
Le nazisme en Afrique
Rappelons que les États d’Europe occidentale ont affiné leur nazisme en Afrique, mais aussi en Amérique latine et en Asie. Le nazisme n’est que la ferme croyance en la supériorité raciale de l’Occident et en son droit « donné par Dieu », ou « destinée manifeste », de massacrer les races inférieures et de voler leurs terres et leurs ressources. Quels ont été les massacres perpétrés par les Espagnols et les Portugais en Amérique latine et par les Britanniques en Amérique du Nord et en Australie, si ce n’est du nazisme ? Quels ont été les massacres perpétrés par les Britanniques en Inde (la « mutinerie indienne ») et en Chine (les « guerres de l’opium »), si ce n’est du nazisme ? Que fut le massacre perpétré par les Belges au Congo (jusqu’à dix millions de morts, sans compter les atroces mutilés), si ce n’est du nazisme ? Il n’est pas étonnant que la Première Guerre mondiale ait commencé en Belgique et en ait ravagé une grande partie. On récolte ce que l’on sème.
Que furent les massacres perpétrés par les Allemands d’avant la Première Guerre mondiale en Afrique du Sud-Ouest et en Afrique de l’Est, si ce n’est du nazisme ? La seule erreur des Allemands nazis a été de massacrer plus de cinq millions de Juifs à la peau blanche en Europe. Le fait qu’ils aient massacré 30 millions de Slaves en Europe (les « Peaux-Rouges » de l’Europe pour Hitler) ne compte pas pour l’Occident financé par les sionistes. Seul le massacre des juifs était un « no-no », le tabou ultime. Si les Allemands nazis avaient massacré des Asiatiques ou des Africains, cela n’aurait rien changé. Après tout, les Britanniques ont laissé mourir de faim quelque cinq millions de Bengalis au Bengale en 1943, et cela n’a pas posé de problème. Non, c’est le nazisme qui est en cause, ce qui a commencé avec les « croisades » au XIe siècle est le marqueur de la « civilisation » occidentale et qui est en train de la détruire. Tout ce qui tourne autour, tourne autour.
Plan D
Le plan D commence en Afrique et en Russie, le plan D est prêt. La Fédération de Russie a eu neuf ans pour se préparer à l’agression ultime de l’Occident qu’est une guerre mondiale et pour élaborer le Plan D afin d’y résister. La Russie n’a pas voulu et ne veut pas d’une guerre mondiale, mais elle a prévu les méthodes agressives de l’Occident et sa capacité à organiser la violence. Le plan D signifie que la Russie s’attaque à l’Occident dans le monde entier. Comme l’a si bien dit le président de l’Érythrée : « La guerre de l’OTAN contre la Russie est une tentative de dominer le monde entier ». La Russie est déjà intervenue en Syrie, à la demande du gouvernement syrien. Elle a déjà participé à des exercices militaires avec la Chine. Et comme elle a déjà envoyé des troupes Wagner pour libérer l’Afrique de l’Ouest, elle les enverra à nouveau, si nécessaire.
Le plan D, toujours possible compte tenu des menaces de violence occidentales, consistait pour la Russie à réarmer et à réformer sa marine, son armée de l’air et son armée de terre, en les dotant d’armes aussi performantes, voire plus, que les armes occidentales. Et c’est ce que la Russie a fait. Si l’Occident veut une guerre mondiale, il peut l’avoir. Il s’attaquera à ce qui est, selon la Banque mondiale, la plus grande économie d’Europe, la Russie. Car cette dernière a enfin dépassé l’Allemagne (sans l’orchestration britannique de 1917, la Russie l’aurait dépassée il y a 100 ans) et est en passe de dépasser le Japon, pour devenir la quatrième économie mondiale. L’Occident serait fou d’imposer le plan D à la Russie. Ce serait son troisième et ultime acte de suicide. Car, avec la Russie, 87,5 % du monde est prêt à affronter l’Occident, désormais isolé et discrédité.
Après la lettre d’intention
L’ancienne Russie protégeait les chrétiens de la tyrannie de l’Empire ottoman. Contrairement aux gouvernements français et britannique qui, entre 1853 et 1856, se sont alliés aux Ottomans, ont envahi la Russie et ont ensuite refusé d’intervenir lorsque les Ottomans ont commencé à massacrer les chrétiens bulgares. Lors de la Première Guerre mondiale, ce sont les Allemands qui se sont alliés aux Ottomans et ont soutenu leur génocide des chrétiens arméniens et grecs.
Français, Britanniques, Allemands, tous les mêmes, tous antichrétiens. En 1917, c’est l’élite britannique « alliée » qui a renversé le gouvernement chrétien de la vieille Russie, qualifiant la monarchie de son peuple d’« autocratique », alors que seul l’Occident était autocratique au sens occidental du terme. Dans la vieille Russie, le tsar nous protégeait, nous les chrétiens, de la tyrannie de l’empire ottoman. Qui nous protégera aujourd’hui de la tyrannie de l’empire américain anti-chrétien ?
Batiushka
Recteur orthodoxe russe d’une très grande paroisse en Europe, il a servi dans de nombreux pays d’Europe occidentale et j’ai vécu en Russie et en Ukraine. Il a également travaillé comme conférencier en histoire et en politique russes et européennes.
Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone