Par Valery Kulikov – Le 5 août 2021 – Source New Eastern Outlook
Le 29 juillet, selon les opérations commerciales maritimes du Royaume-Uni (UKMTO, une unité de la marine britannique), une attaque a eu lieu en mer d’Oman contre le pétrolier Mercer Street, associé au milliardaire israélien Eyal Ofer, tuant deux membres d’équipage, un Britannique et un Roumain. L’incident s’est produit au nord-est de l’île de Masirah, à Oman, à environ 300 kilomètres au sud-est de Mascate, la capitale du sultanat. Plusieurs drones ont mené l’attaque.
Le site d’information Al-Alam a cité des sources non officielles selon lesquelles l’attaque du pétrolier Mercer Street dans le golfe d’Oman, dans laquelle deux membres d’équipage ont été tués, pourrait être une vengeance pour la mort de deux « combattants de la résistance » dans l’attaque de l’armée de l’air israélienne contre l’aéroport militaire syrien d’Al-Dabaa et le district d’Al-Qusayr dans la partie occidentale du gouvernorat de Homs, dans la nuit du 22 juillet.
Selon une déclaration faite le 31 juillet par Jalina Porter, principale porte-parole adjointe du Département d’État américain, les États-Unis ne peuvent confirmer l’implication de l’Iran dans l’attaque du pétrolier israélien dans le nord de l’océan Indien. Néanmoins, les médias britanniques relient cet incident à l’accroissement des tensions dans la région entre l’Iran et Israël, qui avait auparavant connu une série d’attaques contre des navires marchands des deux pays.
Il convient de noter que le 6 avril, le navire iranien Saviz a été attaqué par des mines au large des côtes de Djibouti, en mer Rouge. Le navire a subi des dommages mineurs et aucun membre d’équipage n’a été blessé. Le Times of Israel a admis l’implication d’Israël dans l’attaque du navire iranien. Le 25 avril, le major général Mohammad Hossein Bagheri, chef d’état-major iranien, a menacé de riposter contre Israël, après l’attaque d’un pétrolier iranien au large des côtes syriennes, qui a fait trois morts sur le navire marchand : un pétrolier transportant du pétrole vers la Syrie a été attaqué près du port de Banias. Il a été attaqué par un drone lancé depuis les eaux territoriales libanaises.
En mars, le Wall Street Journal présentait son analyse des attaques contre des navires iraniens et israéliens sur la période récente. Ainsi, la publication affirme que, depuis 2019, Israël menait des frappes secrètes contre des navires iraniens et d’autres navires transportant des marchandises de la République islamique. Des exemples sont donnés d’attaques israéliennes utilisant des mines et d’autres armes contre au moins 12 navires iraniens à destination de la Syrie, dont la plupart transportaient du pétrole iranien. Il a également été souligné que certaines des frappes israéliennes présumées en mer Rouge et dans d’autres eaux du Moyen-Orient visaient des cargaisons d’armes prétendument liées à l’Iran. Les navires n’ont pas été coulés à cause des attaques, mais au moins deux d’entre eux ont dû retourner d’urgence en Iran.
En février et mars, des informations faisaient état d’attaques iraniennes contre des navires marchands israéliens dans la mer d’Oman, confirmant l’escalade de la confrontation entre l’Iran et Israël. Ainsi, selon les médias israéliens, le 26 février, dans le golfe d’Oman, une explosion a eu lieu sur le porte-conteneurs MV Helios Ray, battant pavillon des Bahamas mais appartenant à Israël. Les dirigeants militaro-politiques de l’État juif ont immédiatement accusé l’Iran d’avoir attaqué le navire. Téhéran, à son tour, a catégoriquement démenti ces accusations.
Le 25 mars, le porte-conteneurs israélien Lori, battant pavillon libérien et venant de Tanzanie, a été touché par un missile, en mer d’Oman, mais a poursuivi son voyage jusqu’en Inde, les dégâts étant mineurs. Personne à bord du navire n’a été blessé. Le navire appartient à la société XT Management, basée dans le port israélien de Haïfa.
Le 13 avril, un navire israélien appelé Hyperion Ray, battant pavillon des Bahamas mais appartenant à une société israélienne qui fournit des voitures, a été attaqué au large des côtes de l’émirat de Fujairah. Aucune information n’a été communiquée concernant les victimes à bord ou l’étendue des dommages causés au navire. L’incident a eu lieu deux jour après que l’Iran a accusé Israël d’être responsable de l’explosion survenue le 11 avril dans l’une des principales installations nucléaires de la République islamique – le centre de centrifugation de Natanz (province d’Ispahan).
Ces incidents en mer illustrent clairement le conflit larvé en cours entre Israël et l’Iran. Selon plusieurs experts, ces opérations sont coercitives et, en même temps, ambiguës. Leur « auteur » est difficile à déterminer avec un haut degré de précision. Elles sont entreprises par des acteurs qui tentent de changer l’ordre régional tout en restant en dessous du seuil justifiant une réponse militaire de l’autre partie. Les experts estiment que ces opérations larvées deviennent un élément central de la stratégie israélienne et iranienne.
Elles sont récemment devenues plus actives dans le contexte des opérations secrètes et pas anodines de la longue confrontation entre les services de renseignement israéliens et iraniens. Après tout, les opérations militaires non déclarées des services secrets israéliens contre les installations nucléaires iraniennes, et les assassinats de scientifiques, politiciens et chefs militaires iraniens, comme de nombreux sabotages et subversions, sont des opérations militaires non déclarées de ces dernières années. Il suffit de penser à l’assassinat de Qassem Soleimani, général de division iranien et commandant de la Force Quds, ou de Mohsen Fakhrizadeh, physicien nucléaire iranien de premier plan, par les services secrets israéliens en janvier 2020 !
Toutes ces actions des services secrets israéliens ne pouvaient bien sûr pas rester impunies, comme les autorités officielles de la République islamique en avaient averti Israël à plusieurs reprises. Cependant, Téhéran n’a sagement pas mis à exécution la menace antérieure d’une frappe de missiles contre Israël, mais a montré son engagement envers une politique d’« œil pour œil » avec peu d’effusion de sang. Téhéran est contraint d’accepter les règles du jeu qui lui sont imposées par Israël. Du coup le terrorisme et les assassinats de personnalités politiques et publiques importantes deviennent malheureusement la norme dans ses relations avec l’Iran.
Valery Kulikov
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone
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