Par The Saker – Le 29 juillet 2016 – Source thesaker.is
Lorsque je pense aux récents développements aux États-Unis (tir de Dallas, fusillade d’Orlando) et en Europe (Nice, le prêtre assassiné, les tirs en Allemagne), j’éprouve ce sentiment déplaisant que quelque chose ne va pas. Pour une raison, leurs auteurs sont totalement ridicules : des pseudo-musulmans qui se révèlent être des ivrognes homosexuels, d’anciens patients d’institutions psychiatriques – la sorte de gens que j’appelle des musulmans du jour au lendemain : ils font tout pour dire Allah Akbar un grand nombre de fois, mais à part ça, ils ne montrent aucun signe de l’islam. En fait, loin d’être des combattants aguerris de Daech, ce sont tous des perdants aux personnalités faibles. Exactement le genre de gens dont les services spéciaux (et les sectes religieuses) aiment à faire des proies parce qu’ils sont faibles et faciles à manipuler. Oh oui, je sais, les bonnes gens de Daech ne cessent d’affirmer que l’auteur est l’un d’entre eux, mais cela ne prouve rien (à part, peut-être que Daech désespère d’accroître sa notoriété).
Je n’en ai aucune preuve, évidemment, mais j’éprouve le sentiment très fort que quelqu’un fait beaucoup d’efforts pour effrayer la foule des téléspectateurs. Mais pourquoi ? Pourquoi quelqu’un s’efforcerait-il de créer une menace totalement fictive ?
Devrions-nous vraiment rejeter tous les témoins innombrables qui parlent de « plus d’un tireur » ? Qu’en est-il de la surenchère absolument ridicule lorsque des centaines de policiers sont envoyés pour affronter un seul tireur ? Cela ne vous semble-t-il pas bizarre ? Suis-je le seul à penser que ce qui nous est montré est un spectacle soigneusement chorégraphié ?
Et puis il y a la fausse rumeur sur la menace islamique. OK, c’est vrai que tous ces islamo-terroristes ont dit aux flics, et à quiconque voulait les écouter, qu’ils tuent les infidèles pour la plus grande gloire de Dieu. Cela me rappelle les passeports utilement retrouvés à New York le 9/11 (et lors des attaques de Charlie Hebdo) ou comment les prétendus terroristes du 9/11 ont laissé des copies du Coran dans les bars où ils s’offraient des lap dances [danse érotique proposée dans certaines boîtes de nuit, NdT]. Le problème avec tout ce non-sens est qu’il y a exactement zéro preuve qu’aucun de ces terroristes avait une quelconque formation ou croyance musulmane réelle. D’ailleurs, si chacun d’entre eux s’était transformé en un musulman profondément religieux et pieux, cela ne prouverait encore rien. L’IRA était catholique romaine et pourtant personne ne parlait de menace catholique. C’est vrai, il y a une menace très réelle sur tout le Moyen-Orient de la part des cinglés de Daech (oui, ceux-là dont les États-Unis veulent que les Russes cessent de les bombarder), mais il n’y a aucune preuve d’aucune sorte d’une quelconque véritable subordination / coordination entre les takfiris au Moyen-Orient et les auteurs des récents meurtres de masse aux États-Unis et en Europe.
Le cui bono, bien sûr, pointe immédiatement les intérêts qui veulent désespérément renforcer le mythe fragile de la menace islamique : les sionistes, évidemment, mais aussi les élites néocons aux États-Unis et dans l’Union européenne.
Pensez-y : leur grand espoir était que la Russie envahisse le Donbass (ou, même mieux, l’Ukraine tout entière) et la libère des fous nazis que les néocons ont mis au pouvoir à Kiev. Un tel geste aurait été utilisé comme une preuve que les méchants Russes revanchards sont en train de reconstruire l’Union soviétique, d’envahir l’Europe de l’Est et peut-être même d’amener leurs chars jusqu’à la Manche. Et s’il y avait suffisamment de gens pour gober la théorie de la menace russe, ils devraient aussi accepter des budgets militaires plus importants (pour engraisser encore plus le complexe militaro-industriel US) et le déploiement de plus de troupes américaines en Europe de l’Est (où elles fourniraient une source de revenus très utile, et parfois unique). Ensuite tous les problèmes internes de l’Europe auraient pu être imputés à la menace russe, ou du moins éclipsés par elle (dans le style « Poutine veut un Brexit »). Mais cet irritant Poutine n’a pas mordu à l’hameçon et maintenant l’Europe est coincée sans menace crédible pour terroriser les gens. L’OTAN, bien sûr, et ses colonies prostituées que sont les pays baltes et la Pologne, aiment à prétendre qu’une invasion russe est imminente, mais personne ne les croit vraiment. Selon certains sondages d’opinion, même les populations des pays baltes doutent de la réalité d’une menace russe (oubliez la Pologne : un pays avec un héros national comme Pilsudski est un cas désespéré).
Mais alors, presque au même moment où les néocons ont réalisé que les Russes ne mordaient pas à l’hameçon, le flux constant de réfugiés en provenance du Moyen-Orient et d’Afrique a subitement fortement augmenté, résultat de la destruction et du chaos créés par la politique néocon au Moyen-Orient. À votre avis, combien cela a-t-il pris de temps aux dirigeants de l’Empire pour réaliser l’occasion fantastique que ce flux de réfugiés venait de créer pour eux ?
Premièrement, cette vague de réfugiés provoque une série de problèmes sociaux importants qui peuvent tous être utilisés pour offrir des distractions à la crise de crédibilité massive et aux difficultés économiques de l’UE. Peu importe à quel point les indicateurs économiques sont mauvais, vous pouvez toujours les cacher derrière un gros titre du genre Refugee rapes 79yo woman at German cemetery [Un réfugié viole une femme de 79 ans dans un cimetière allemand] (un cas véridique, cliquez sur le lien pour vérifier vous-mêmes).
Deuxièmement, exactement au moment où les élites compradores qui dirigent l’Union européenne sont menacées par le mécontentement populaire, la crise des réfugiés crée le prétexte parfait pour adopter des lois d’urgence et, si possible, introduire la loi martiale.
Troisièmement, plus la crise en Europe empire, mieux c’est pour le dollars US, qui devient la devise (plus) sûre où se réfugier.
Quatrièmement, plus il y a d’unités militaires, par opposition aux forces de police régulières, déployées en Europe, plus les Européens s’habitueront à l’idée que « seule l’armée peut nous protéger ».
Cinquièmement, si, pour finir, des chars et des émeutes, des soulèvements et des révoltes se répandent dans l’Union européenne – devinez qui se présentera pour « sauver encore une fois l’Europe » ? Exactement : Oncle Sam et l’OTAN. Une assez bonne mission pour un vestige, illégitime autrement, de la Guerre froide, non ?
Idéalement, la population européenne devrait se polariser entre, d’une part, ceux qui prétendent que les réfugiés ne sont pas du tout un problème et ceux qui les accusent de tout. Plus la société se polarise, plus il sera nécessaire de maintenir la loi et l’ordre.
Est-ce que tout cela vous semble familier ?
Oui, bien sûr, c’est aussi exactement ce qui se passe aux États-Unis avec le mouvement Black Lives Matter (BLM).
Bien qu’il y ait énormément d’immigrants aux États-Unis, ceux-ci sont principalement des Hispaniques et des Asiatiques, qui s’adaptent plutôt bien à la société américaine. La bonne nouvelle pour l’État profond étasunien est que les Noirs aux États-Unis peuvent tout à fait assumer la même fonction que les réfugiés en Europe : ils sont une minorité bruyante, profondément aliénée, animée d’une grande colère refoulée contre le reste de la société, et qui peut très facilement être mise en branle pour provoquer des émeutes et commettre des crimes. Il est aussi assez facile de trouver quelques cinglés parmi ces Noirs pour commencer à assassiner des policiers (le symbole idéal de l’establishment blanc oppresseur) et provoquer un sentiment de crise suffisamment aigu pour justifier le recours à la police, à la Garde nationale et, potentiellement, aux forces armées pour restaurer et maintenir la loi et l’ordre.
Est-ce vraiment une coïncidence si les élections présidentielles américaines présentent des figures extrêmement polarisantes comme Hillary et Trump et que de la violence, à un niveau assez faible, ait déjà été attisée par la propagande anti-Trump hystérique des médias commerciaux américains ? Imaginez seulement pendant une seconde ce qui pourrait se passer aux États-Unis si un tireur solitaire tuait Hillary ou Trump ? La société exploserait littéralement et la loi et l’ordre devraient être restaurés.
Les modalités peuvent différer, mais tant dans l’Union européenne qu’aux États-Unis nous voyons aujourd’hui des forces lourdement armées et généralement militarisées dans les rues pour nous protéger de quelque menace exotique et effrayante.
Cela aurait-il à voir avec le fait que les élites dirigeantes sont absolument haïes par l’immense majorité des Européens et des Américains ? Évidemment !
Je suis convaincu que ce qui se passe est la suppression progressive de la société civile sous prétexte de la protéger – nous – d’une menace épouvantable. Je suis aussi convaincu qu’une partie de ce plan est de polariser autant que possible notre société pour créer des troubles civils et pour dissimuler les véritables problèmes systémiques et structurels de notre société totalement dysfonctionnelle et l’ordre politique discrédité et illégitime.
La méthode du panem et circenses (du pain et des jeux) ne fonctionne que dans une société capable de fournir suffisamment de richesse à sa population pour qu’elle en jouisse. Mais lorsqu’un Empire agonise, lorsque son armée ne peut plus gagner de guerre, lorsque son chef est ridiculisé, lorsque sa monnaie est graduellement affaiblie et même remplacée et lorsque sa puissance n’est plus crainte, alors l’Empire devient incapable d’assurer les conditions minimales nécessaires pour maintenir ses sujets tranquilles et obéissants. À ce stade, le choix devient simple : trouver un ennemi extérieur ou, au moins, en identifier un à l’intérieur. Cette fois, les Anglosionistes ont trouvé ce qu’ils pensent être la combinaison parfaite : une menace externe diffuse et vague (l’islam) et un porteur de menace interne facilement identifiable (les réfugiés en Europe, les Noirs aux États-Unis). Le fait que le gouvernement étasunien ait planifié diverses situations d’état d’urgence ou de loi martiale depuis des années n’est plus vraiment un secret (voir National Security Presidential Directive 51 et National Continuity Policy Implementation Plan ou Rex84), mais maintenant il y a la preuve que les Allemands l’envisagent aussi. En fait, nous pouvons leur faire confiance, ils le planifient. Ils sont à l’œuvre au moment même où nous en parlons.
La dernière fois que l’Empire a ressenti le besoin de reprendre le contrôle sur l’Europe et d’empêcher l’élection au pouvoir de partis politiques anti-américains, il s’est engagé dans la célèbre campagne de coups sous fausse bannière de l’Opération Gladio pour neutraliser la menace communiste (voir le documentaire complet ici). Il semble que les mêmes gens fassent de nouveau la même chose, mais cette fois contre la supposée menace islamique. Et juste pour s’assurer que les gens ordinaires paniquent vraiment, il semble que les Anglosionistes ont établi un plan assez contre-intuitif :
1) Pour les politiciens : condamner officiellement toute rhétorique anti-musulmane
2) Pour les médias, les personnalités publiques : mettre officieusement et constamment en garde contre l’extrémisme islamique
3) Prendre quelques mesures très visibles mais totalement inutiles (mesures de sécurité des transports [TSA], formation anti-terroriste) pour se défendre contre une attaque islamiste
4) Soutenir secrètement, mais activement, le takfirisme du genre Daech au Moyen-Orient et s’opposer, en sabotant leurs actions, à ceux qui, comme les Russes, les Iraniens et les Syriens, le combattent réellement au quotidien.
Que vise un plan aussi illogique et apparemment voué à l’échec ? Simple ! Il fait croître la peur et polarise la société.
Ce genre de polarisation artificielle n’est rien de nouveau. C’est pourquoi, par exemple, ceux qui haïssent Obama le traitent de socialiste (ou même de communiste) tandis que ceux qui haïssent Trump le traitent de fasciste (en réalité, tant Obama que Trump ne sont que les hommes de paille des différentes factions capitalistes de la même élite des 1%).
Ce que nos seigneurs impériaux veulent réellement est que nous nous battions les uns contre les autres ou, au moins, que nous combattions des moulins à vent. Regardez le public américain – il est totalement obsédé par des non-questions comme le mariage homosexuel, pour le contrôle des armes versus contre les tireurs actifs, pour Black Lives Matter versus pour les flics, et les sempiternelles manifestations pour les pro/anti avortement. Ces questions importent à une minorité d’Américains, je suppose, mais pour l’immense majorité d’entre eux, ce sont des non-problèmes absolus, des conneries dénuées de sens qui ne les touchent en aucune manière sinon à travers les médias commerciaux. Cela me rappelle vraiment l’orchestre du Titanic jouant pendant que le navire sombrait : l’Empire craque sous toutes ses coutures, il y a un risque très réel de guerre nucléaire avec la Russie et nous discutons sérieusement de savoir si les trans devraient faire pipi dans les toilettes des messieurs ou des dames lorsqu’ils/elles sont dans leur supermarché favori. C’est fou, bien sûr, mais c’est difficilement une coïncidence. C’est comme ça que nos dirigeants nous veulent : terrifiés, confus et, par dessus tout, distraits.
Franchement, je suis pessimiste pour l’avenir à court et moyen terme. Lorsque je vois avec quelle facilité la fausse rumeur de la menace islamique a été gobée non seulement par les propagandistes officiels mais même par des gens tout à fait rationnels et instruits par ailleurs, je vois que le 9/11 nous a très peu appris. Exactement comme un taureau dans une corrida, nous sommes prêts à foncer sur n’importe quel chiffon rouge brandi sous notre nez, indépendamment de celui qui agite ce chiffon et nous saigne.
La bonne nouvelle est qu’indépendamment de notre passivité crédule, l’Empire s’effondre, peut-être pas aussi vite que certains de nous le souhaitent, mais assez rapidement pour inquiéter vraiment nos dirigeants. Regardez les Israéliens – ils ont déjà lu l’inscription sur le mur et sont maintenant dans un processus de changement de patrons, d’où leur grande amitié retrouvée avec la Russie – un mariage de convenance pour les deux côtés, entrés chacun en se pinçant le nez. Idem pour Erdogan qui a apparemment décidé que ni l’Union européenne ni les États-Unis ne pouvaient être considérés comme des protecteurs fiables. Même les Saoudiens ont tenté, quoique maladroitement et grossièrement, d’avoir les Russes de leur côté.
Pour le moment, le spectacle de la menace islamique va se poursuivre, comme celui des tireurs actifs, de Black Lives Matter et de tout le reste du programme que nous a apporté l’Empire. Les fausses bannières continueront à flotter en grand nombre sur les foutaises de l’Empire.
The Saker
Article original paru sur The Unz Review
Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Catherine pour le Saker francophone
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