Par Elena Vorochilova – Le 12 août 2015 – Source : South Front
Mes compatriotes et moi-même avons passé l’année dernière à poser ces questions : «Que voulez-vous vraiment? Que veut le Donbass?», écrit l’historien et journaliste Oleg Izmailov, vivant à Donetsk, dans son article paru sur PolitNavigator. Nous essayons tous de répondre à ces questions, bien que nous ne soyons pas dans le meilleur état d’esprit pour le faire.
Elles sont évidentes, mais au lieu d’y cogiter et de revenir avec leurs propres réponses, les gens tentent d’obtenir de ceux qui les posent (souvent des journalistes, mais pas seulement) le maximum d’informations possible. De notre côté, en suivant le principe de prudence «les murs ont des oreilles, une indiscrétion peut couler un navire», nous tentons de leur donner matière à réflexion et vérité. C’est peut-être un peu fou, mais c’est ainsi. Le temps de se parler est venu. Et même si toute vérité n’est pas bonne à dire, nous devons néanmoins tenter de répondre à cette question «pourquoi le Donbass se bat-il?», en évitant toutes ces simplifications excessives, qui sont pires que le mensonge.
Tout d’abord, la politique. Tout ce qui est arrivé, la série entière des événements va dans une même direction : la nation de Donetsk-Lougansk veut quitter l’Ukraine, une fois pour toutes, et, avec ses gens et ses terres, rejoindre la Russie. En d’autres termes, devenir la Région fédérale de Donetsk, avec tout ce que cela implique.
Et là, certains esprits échauffés vont commencer à crier parce qu’il y a des gens qui ne veulent pas rejoindre la Russie. Ceux qui le veulent sont 75% à 80%, sans aucun doute. Avec une aussi forte majorité, il est difficile de prendre en compte ceux qui restent attachés à une forme d’Ukraine fédérale, où le Donbass aurait sa place. Une fois encore, pour que tout le monde comprenne : les travailleurs, ceux qui aujourd’hui créent le PIB, ceux qui se battent contre les parasites nazis, les mineurs, les métallos, les ouvriers de la chimie, ceux de l’industrie mécanique, les travailleurs du rail, les ouvriers du bâtiment, etc, tous se voient comme des citoyens de la grande Russie, même dans leur sommeil. Oh oui, ils réfléchissent, ils comprennent, peut-être, cela prendra des années de compromis, mais cela n’entame en rien leur détermination : nous voulons la Russie, et rien d’autre !
Il y a un consensus total et inconditionnel sur cette question, aussi bien dans la partie libérée du Donbass que dans celle occupée par les troupes ukrainiennes. Et personne n’a besoin de clarifier les choses. Le souhait des gens du Donbass est de se débarrasser de l’Ukraine – ce n’est pas une idée en l’air, c’est quelque chose qui ne se discute même plus. Et nous l’avons très bien vu lors du seul référendum, celui de mai 2014. Depuis, la haine ne cesse de monter envers ceux qui ont un faible pour le chiffon bleu et jaune [le drapeau de l’Ukraine, NdT], dans les villes occupées par l’armée ukrainienne. Bien sûr, les gens sont obligés de le cacher – c’est dangereux – mais quand les troupes des Républiques populaires de Lougansk et de Donetsk rentreront dans les villes qu’elles ont dû abandonner en juillet 2014, elles seront accueillies avec des fleurs et de grandes fêtes.
La sincérité et l’authenticité de ce désir de toute une nation ont bien été vues par les journalistes courageux, tant qu’ils ne sont pas sous la coupe de l’Ukraine. Bien plus, le caractère ethnique ne compte pas vraiment (rappelez-vous, la moitié des gens du Donbass sont des Ukrainiens). La nation choisit l’Empire, peu importe ce que chacun met derrière ce mot.
Voyons maintenant les questions économiques et sociales.
On peut dire avec certitude que le Donbass refuse catégoriquement le retour des oligarques. Une fois encore, il peut y avoir des gens qui rêvent du retour d’Akhmetov, mais pour la majorité des travailleurs et des professions intellectuelles, ce serait comme leur cracher au visage, et jeter aux orties la mémoire de tous ceux qui sont tombés durant la guerre. Pour être franc – inutile de parler autrement – les gens du Donbass préfèreraient avoir une forme de capitalisme d’État, avec la possibilité pour tous de gravir les échelons et une protection sociale. Ce ne serait pas le socialisme à la soviétique, mais cela y ressemblerait sur bien des points. Ce serait l’État qui dirigerait l’industrie lourde, ainsi que les transports et le monopole de l’alcool, le secteur tertiaire restant privé.
Quant aux nationalités, les choses sont claires également. Il y a une politique à ce sujet qui existe dans notre pays depuis longtemps, elle est juste et équilibrée, il n’y a donc pas lieu de la changer. Des douzaines de nationalités ont coexisté dans le Donbass depuis un siècle et demi, les gens y sont jugés sur leurs talents, leurs savoir-faire, leur sens professionnel, et non sur leur origine. En même temps, la langue et la culture russes ont toujours été placées au-dessus des autres. Cela facilite la coexistence, tout simplement.
On pose aussi souvent cette question : pourrions-nous, peuple du Donbass, vivre dans le même pays que les habitants des autres régions d’Ukraine? Nous disons que cela n’aurait posé aucun problème du temps de l’Union soviétique, et que personne n’y aurait trouvé à redire, l’Union soviétique étant pour nous simplement une image nationale pour l’idéal communiste. C’était ainsi. Mais aujourd’hui, cela fait 25 ans que les nazis ukrainiens tentent de créer un État nationaliste et nous obligent, nous les défenseurs de la grande culture russe et de l’épopée industrielle soviétique, de la civilisation des mines et de la métallurgie, à accepter leur vision du monde, rurale et improvisée. Nous ne pouvons dire qu’une seule chose : «Oui, nous le pourrions, mais seulement après que les anciennes régions soviétiques soient retournées au sein de la Fédération de Russie (la Galicie, quant à elle, peut retourner à la Pologne).»
Je pense que cette belle et prometteuse Malorussia (ci-contre) pourrait bénéficier d’un statut à part et de droits spécifiques – nous ne sommes pas des nationalistes, nous sommes un peuple impérial, nous ne convoitons rien et nous sommes prêts à donner à l’Ukraine ce qu’elle ne peut donner au Donbass, même en pensée, à cause de son étroitesse d’esprit.
… et nous ne voulons rien d’autre, nous voulons simplement revenir à notre patrie – notre Union, à nous, russe et indivisible.
Nous nous rappelons l’hymne, aussi…
Article original en russe, publié sur Novorosinform.org
Traduit du russe par J. Hawk
Traduit par Ludovic, relu par jj et Diane pour le Saker Francophone