Arabie saoudite – La nuit des longs couteaux


Moon of Alabama

Moon of Alabama

Par Moon of Alabama – Le 5 novembre 2017

Hier, le clan Salman au pouvoir en Arabie saoudite s’est livré à une purge digne de la Nuit des longs couteaux pour se débarrasser de tous ses éventuels concurrents. Le roi saoudien Salman et son fils, le prince clown Mohammad bin Salman, ont lancé une vaste vague d’arrestations de princes et de hauts fonctionnaires. Un des intérêts de ce coup d’État interne est la confiscation d’énormes domaines financiers au profit du clan Salman.

La démission forcée du Premier ministre libanais Saad al-Hariri était probablement liée aux événements de la nuit dernière. Le Premier ministre israélien Netanyahou a approuvé cette démission. Du fait du soutien d’Israël, Hariri ne pourra plus jamais jouer un rôle de premier plan au Liban.

En Arabie saoudite, onze princes, dont des fils du défunt roi Abdallah, plus de trente anciens ministres et hauts responsables, ainsi que les directeurs de trois grandes chaînes de télévision, ont été placés en détention ou assignés à résidence. Le commandant de la garde nationale, le prince Mitieb Bin Abdullah, a été démis de ses fonctions et remplacé par le prince Khalid Bin Abdulaziz al Muqrin. La Garde nationale était le dernier centre de renseignement et de sécurité détenu par la branche Abdullah de la famille Al-Saoud.

Une autre purge, en juillet dernier, avait détrôné l’ancien prince héritier Nayaf et l’avait remplacé par le jeune Mohammad Bin-Salman. Ensuite, la branche Nayef de la famille al-Saoud a été chassée de tous les centres de pouvoir. Hier, ça a été le tour de la branche Abdullah. Les fonctionnaires exclus ont été remplacés par des laquais du clan Salman au pouvoir.

La branche Salman à laquelle appartiennent le roi actuel et le prince clown a maintenant éliminé toute la concurrence interne potentielle. Cela va à l’encontre du consensus sur lequel était basée la domination de la famille saoudienne au siècle dernier. Des dizaines de milliers de clans et d’individus dépendaient du patronage des princes et des fonctionnaires limogés. Ils ne resteront pas les bras croisés pendant que leur fortune s’évapore.

Un des effets de la purge sera la concentration de la richesse saoudienne entre les mains des Salman.

Une des personnes arrêtées est le prince Al-Waleed Bin Talal (vidéo) qui détient dit-on, la sixième fortune mondiale. Il possède (possédait ?) entre 18 et 32 ​​milliards de dollars nets. Al-Waleed s’était publiquement opposé au président américain Donald Trump. (Al-Waleed est (était ?) le plus grand actionnaire de Citygroup qui avait choisi le cabinet de Barack Obama avant de recevoir une énorme aide financière du gouvernement). Une autre personnalité qui a fait les frais de la purge est Bakr Ben Laden, frère d’Oussama Ben Laden, président du Saudi Binladin Group et cinquième plus grosse fortune du pays.

Les prétextes officiels de la purge sont des allégations de corruption remontant à 2009. Cet artifice financier permettra aux Salman de confisquer les biens des accusés. Le total de ce raid s’élèvera à des dizaines de milliards de dollars. Un nouveau comité anti-corruption a été installé sous le prince clown Mohammad bin Salman. Il a des pouvoirs dictatoriaux et peut geler et confisquer tous les actifs financiers qui lui paraissent dignes d’intérêt :

Il peut prendre toutes les mesures qu’il juge nécessaires pour traiter les affaires de corruption publique et prendre ce qu’il considère être le droit des personnes, des entités, des fonds, des biens meubles et immeubles, dans le pays et à l’étranger, rendre des fonds au Trésor public. enregistrer les biens et les actifs comme propriété de l’état.

Les événements au Liban et à Riyad n’auraient pas pu se produire sans le consentement et le soutien des États-Unis. Fin octobre, Jared Kushner le gendre en même temps que le principal conseiller de Trump, a effectué une visite surprise en Arabie saoudite. Dans un tweet hier Donald Trump, qui a prêté serment sur le globe wahhabite, a indiqué le prix de son accord et de sa coopération :

Donald J. Trump @realDonaldTrump – 12:49 PM – 4 nov. 2017

« J’apprécierais beaucoup que l’Arabie saoudite fasse l’introduction en bourse d’Aramco au New York Stock Exchange. Important pour les États-Unis ! »

Une introduction du conglomérat pétrolier Aramco à la Bourse de New York donnera au gouvernement des États-Unis l’autorité réglementaire et juridique sur la société la plus profitable du monde.

La nuit dernière également, les forces yéménites ont tiré un missile à moyenne portée depuis le nord du Yémen vers l’aéroport de Riyad. Le tir bien ciblé de 1 000 kilomètres (660 milles) est impressionnant et sans précédent. La défense antiaérienne saoudienne près de l’aéroport, le système américain Patriot piloté par une entreprise privée, a lancé quatre missiles pour intercepter le missile yéménite (vidéo). Les Saoudiens affirment que l’un de leurs missiles a touché la cible. On a vu une colonne de fumée sur l’aéroport (vidéo). Il n’est pas possible de dire si la fumée a été causée par le missile original ou par son interception.

C’est un choc pour beaucoup de  Saoudiens de s’apercevoir que la capitale saoudienne peut être touchée. Cela décourage aussi l’investissement en Arabie saoudite.

Les missiles yéménites, lancés par l’ancienne armée du Yémen dirigée par l’ancien président Saleh, pourraient venir d’Iran. Mais ils pourraient aussi être de vieux missiles que le Yémen a achetés il y a des décennies. Les Saoudiens vont certainement accuser l’Iran sans expliquer comment de pareils missiles pourraient être passés en contrebande malgré le blocus serré qu’ils maintiennent autour du pays tenu par la résistance.

Le lancement des missiles n’a sans doute  pas de lien avec la démission de Hariri, ni la purge à Riyad. Il faut des jours aux Yéménites pour préparer un tel missile et son lancement. Il a été lancé probablement en représailles à l’attaque aérienne saoudienne dévastatrice de mercredi sur un marché ouvert dans la province du Yémen, au nord de Saada. Selon des sources yéménites, plus de 60 personnes ont été tuées. Après le lancement du missile sur Riyad, les avions saoudiens ont de nouveau bombardé la capitale yéménite Sanaa.

Depuis que l’incapable roi Salman est sur le trône de Riyad, son fils sans foi ni loi de 32 ans, Mohammad bin Salman, a pris le contrôle de toutes les institutions d’Arabie saoudite. Les Saoudiens ont lancé une guerre contre le Yémen sans défense et ont soutenu Al-Qaïda, l’EI et d’autres « rebelles » contre les gouvernements irakien et syrien. Il a divisé le Conseil de coopération du Golfe en attaquant le Qatar. Maintenant qu’il est dans une impasse au Yémen et au Qatar et qu’il a été vaincu en Irak et en Syrie, il s’attaque au Hezbollah libanais. Aucune de ces initiatives meurtrières n’a atteint son objectif, à savoir diminuer l’influence de l’Iran qu’il considère comme son pire ennemi. Au contraire, tout ce qu’il a fait a aidé l’Iran à consolider sa position.

La situation financière de l’État saoudien est catastrophique. Sous les applaudissements de la claque occidentale Bin Salman a annoncé la libération économique, sociale et religieuse de l’Arabie saoudite. Mais peu pour ne pas dire aucune de ces grandes promesses n’ont été tenues.

On peut attribuer la purge d’hier à la panique. Tous les efforts de Bin Salman ont échoué. Le tir yéménite réussi sur l’aéroport de Riyad ne fait que souligner ses échecs. Il est sous pression mais incapable d’obtenir le moindre résultat positif. La résistance interne contre lui grandit.

Quand Hitler a lancé la Nuit des Longs Couteaux contre les socialistes de son parti, son pouvoir politique était sur la courbe ascendante. Le pays était en paix, sa position internationale s’affirmait, l’économie était en plein essor et la majorité du peuple le soutenait. Le remake de Bin Salman de cette nuit se produit alors que ses initiatives échouent l’une après l’autre. Il est peu probable que sa dernière initiative pour consolider son pouvoir soit davantage couronnée de succès.

Traduction : Dominique Muselet

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