Dans ses deux rapports au sujet de la « campagne d’influence russe » lors des élections de 2016, le Sénat US n’évoque même pas le seul motif avéré
Par Moon of Alabama – Le 18 décembre 2018
Les médias américains font encore une fois une grosse salade russe sur les prétendues tentatives d’influencer les élections présidentielles de 2016.
En mars, la Commission du renseignement du Sénat américain a commandé deux rapports sur la prétendue « influence russe » via les médias sociaux. Ces rapports (ici et là) ont été publiés hier mais n’ont pas été approuvés par le comité.
Les deux rapports s’appuient sur des données que Facebook, Google et Twitter ont fourni au comité du renseignement. Les données incluent les tweets, les publications Facebook, les vidéos et le nombre de likes, de partages ou de retweets qu’ils ont reçus. Celles-ci proviennent de comptes qui, pour une raison quelconque, seraient liés à l’Internet Research Agency (IRA) de Saint-Petersbourg. La plupart de ces activités ont eu lieu après les élections de 2016.
Les deux rapports examinent les données utilisées et les thèmes de contenu fournis par des pages web de l’IRA. Tous deux affirment que l’intention de l’IRA était d’influencer les élections et de semer la discorde au sein de la population américaine. Mais il n’y a rien, aucune, nada, zéro preuve, dans les données analysées, que l’IRA avait une telle intention. Il ne s’agit pas non plus de témoignages ni de déclarations de personnes impliquées qui le prétendent. Même s’il y avait des données montrant une opération d’influence, il n’y a aucune raison de croire que des mèmes idiots de l’IRA, comme celui de « l’Armée de Jésus » (voir ci-dessous) ont influencé ne serait-ce qu’un seul vote.
En revanche, l’enquête Muller, qui s’est penchée sur l’affaire, a permis de constater que l’IRA avait une intention commerciale. Malheureusement, cela n’est mentionné ni dans les deux rapports ni dans l’actualité les concernant. Le seul motif réellement connu de l’IRA lorsqu’il a créé ces comptes et les a alimentés est tout simplement ignoré.
Dans « Les annonces russes » sur Facebook, nous avons montré que les personnes de l’IRA avaient simplement créé des pages sur Facebook et ailleurs pour attirer le plus grand nombre de « clics » possible. Cet « hameçonnage » a été utilisé pour amener les gens vers des pages web sur lesquelles l’IRA vendait des espaces publicitaires.
Cela a été confirmé lorsque l’enquête Muller a inculpé l’IRA, comme on le voit dans l’acte d’accusation de Mueller : « L’influence russe » est un programme de marketing commercial. Le point 95 de l’acte d’accusation dit à propos des accusations de fraude par internet :
« Les défendeurs et leurs complices ont également utilisé les comptes pour recevoir de l’argent de vrais citoyens américains en échange de l’affichage de promotions et d’annonces sur les pages de médias sociaux contrôlées par l’ORGANISATION. Les accusés et leurs co-conspirateurs ont généralement facturé à certains marchands et sites de médias sociaux américains entre 25 et 50 dollars par publication pour avoir affiché des contenus promotionnels sur leurs faux comptes personnels américains, tels que Being Patriotic, Defend the 2nd et Blacktivist. »
L’IRA cherchait à gagner de l’argent et non à influencer les élections.
Il s’est donc naturellement concentré sur des thèmes nécessitant le minimum d’efforts de création, tout en attirant un maximum de « clics », qui pourraient ensuite être vendus à des annonceurs. C’est pourquoi certaines de ses pages affichaient des mignons petits chiots. Les chiots mignons font toujours vendre. En 2016, en utilisant l’actualité de la campagne électorale, l’IRA a créé des pages pro-Trump et des pages anti-Trump. Les thèmes qui n’attiraient pas assez l’œil ont été écartés, ceux qui ont bien fonctionné ont été promus. Cela maximisait le nombre de clics potentiels et donc les revenus publicitaires.
Les rapports indiquent qu’une proportion relativement élevée des pages de l’IRA traitait de questions qui intéressaient les Afro-Américains.
Le New York Times titre ainsi « L’opération d’influence russe 2016 cible des Afro-Américains sur les médias sociaux » :
« [Un] rapport accorde une attention particulière à la focalisation des Russes sur les Afro-Américains, ce qui est évident pour quiconque examine les mèmes et les messages.
‘Les efforts les plus prolifiques de I.R.A. sur Facebook et Instagram visaient spécifiquement les communautés noires américaines et semblent avoir été concentrés sur le développement d’audiences noires et le recrutement d’actifs américains noirs’, indique le rapport.
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L’Internet Research Agency a également créé une douzaine de sites web déguisés en afro-américains, portant notamment des noms tels que blackmattersus.com, blacktivist.info, blacktolive.org et blacksoul.us. Sur YouTube, la plus grande partie de la documentation russe portait sur le mouvement Black Lives Matter et la brutalité policière, avec des chaînes appelées ‘Don’t Shoot’ et ‘BlackToLive’.
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Le rapport ne cherche pas à expliquer la forte concentration sur les Afro-Américains. Mais la tactique de l’Internet Research Agency fait écho aux efforts de propagande soviétique d’il y a plusieurs décennies qui mettaient souvent en avant le racisme et les conflits raciaux aux États-Unis, ainsi que les récentes opérations d’influence de la Russie dans d’autres pays qui cherchaient à attiser les conflits ethniques. »
« Les cocos viennent voler nos esclaves ! », Le New York Times aurait pu rééditer cette histoire de la page 3 datant de 1930 :
Il n’y a bien sûr aucune preuve que l’IRA ait eu une intention particulière de servir un public noir, si ce n’est pour gagner de l’argent. L’inculpation de Mueller souligne même que le site Blacktivist avait été créé par l’IRA pour des raisons de publicité commerciale. Attirer des personnes appartenant à des groupes marginaux, qui ne sont pas bien servis par les médias grand public, est évidemment plus facile que de s’adresser à une audience grand public qui est déjà inondée d’informations pertinentes. De plus, créer des chaînes Youtube avec des vidéos accessibles au public sur les attaques de la police contre des citoyens noirs nécessite peu d’efforts tout en attirant potentiellement un public important.
Les deux rapports publiés hier n’analysent pas le contenu ni les données disponible en rapport avec sa valeur commerciale. Aucun des rapports n’examine la question sous l’angle du seul motif documenté qu’avait l’Internet Research Agency.
Ces rapports ne sont donc que des prolongements de la piètre excuse inventée par la campagne d’Hillary Clinton après sa défaite : « Blâmez les Russes ! »
Moon of Alabama
Traduit par jj, relu par wayan pour le Saker Francophone