Par Fred Deion − Janvier 2017
Chaque fin d’année, il est de coutume pour les médias de passer en revue les principaux événements qui ont jalonné les douze derniers mois. Ces derniers jours n’ont pas échappé à la tradition de ces rétrospectives, et pour 2016, cela a donné à peu près ceci.
1) Fraudes et malversations en tout genre, des Panama papers à la FIFA, jusqu’aux football leaks. Pour rester sur le thème du sport, mentionnons encore les dérapages du hooliganisme (pendant l’Euro) et du dopage (JO). Cette liste est malheureusement loin d’être exhaustive : scandales de corruption au Brésil, en Afrique du Sud et ailleurs, financements de partis politiques, évasion fiscale, etc.
2) Élections et votations qualifiées de “populistes” : Brexit, Trump, référendum italien… Pas besoin de chercher bien loin les raisons de cette colère citoyenne : le point 1 ci-dessus devrait fournir un début de réponse, mais pas seulement. Les “élites” ne doivent donc pas s’étonner de leur perte de crédibilité auprès d’électeurs qui n’ont plus confiance dans le système, auprès de contribuables qui attendent de l’État qu’ils financent par leurs impôts, qu’il soit à leur service et agisse dans leur intérêt. On en est loin : on a plutôt d’un côté des citoyens laissés pour compte, et d’un autre côté des élites qui font le choix de l’enrichissement personnel, y compris par des moyens illégaux, plutôt que de l’exemplarité, eu égard aux avantages licites dont ils bénéficient déjà. Le verdict des urnes en devient donc d’une haute prévisibilité et la sanction se traduit enfin par des votes de défiance.
3) Guerres en Syrie, Irak, Afghanistan, Libye, pour ne citer que les conflits les plus médiatisés; des dizaines d’autres n’ont en effet pas l’honneur des titres. Au sujet du Proche et Moyen-Orient, on ne rappellera jamais assez que le vide sécuritaire laissé après les interventions militaires illégales occidentales (sous le faux prétexte de trouver des armes de destructions massives inexistantes) ont fait dans ces pays le lit du chaos et de l’anarchie, du djihadisme et de la barbarie, puis de l’immigration massive et incontrôlée vers l’Europe (qui reçoit plus d’un million d’immigré en 2015), et enfin du terrorisme international (les villes les plus régulièrement touchées étant Bagdad, Kaboul, Istanbul, alors que les attentats qui ont eu le plus d’échos en 2016 sont ceux de Bruxelles, Orlando, Nice et Berlin).
Abordons maintenant les sujets qui ne figurent pas à la une des rétrospectives de l’année, alors qu’ils constituent des tendances lourdes qui ne devraient en aucun cas être ignorés :
1) Fragilité du système financier :
- Les politiques monétaires non conventionnelles (assouplissement quantitatif /QE/rachat de dettes, taux zéros ou négatifs) menées par les banques centrales depuis 2008 sont inefficaces et n’ont relancé ni la consommation, ni la croissance. Leur seul effet a été d’injecter de l’argent dans les circuits financiers et ainsi de doper les cours boursiers, créant la plus grande bulle financière de l’histoire.
- À l’inverse, ces taux zéro ou négatifs ont des effets déflationnistes et encouragent l’emprunt.
- L’augmentation des transactions sans cash pose de nombreuses questions. La suppression du cash permettra-t-elle d’imposer des taux négatifs à toute la population (ce qui reviendrait à introduire un impôt sur l’épargne) ? Qu’adviendra-t-il des dépôts en cas de problème informatique ou électrique ? Au vu du manque de confiance cité plus haut, les citoyens accepteront-ils de céder à leurs gouvernants le pouvoir de contrôler, de manipuler, de confisquer leur épargne ?
- Le surendettement croissant et massif de tous les acteurs économiques (États, entreprises, ménages). Pour prendre l’exemple américain, la dette US sur les cartes de crédit s’élève à $ 1000 milliards, celle sur les prêts automobiles à $ 1100 milliards, celle sur sur les prêts étudiants à $ 1200 milliards, l’endettement total des ménages se monte à $ 12 290 milliards, la dette US corporate (entreprises) à $ 6 600 milliards, celle de l’État fédéral américain à $ 19 000 milliards… À quand la crise des subprimes, bis ?
- La problématique des banques trop grosses pour faire faillite toujours pas résolue : voir le récent sauvetage public des banques italiennes, qui coûtera 20 milliards d’euros au contribuable cisalpin.
- Le développement de la finance de l’ombre (shadow banking), qui n’est solvable que si les taux d’intérêts restent à zéro. S’ils remontent, le krach obligataire est garanti, et les faillites d’entreprises en cascade assurées.
- Les bulles boursières, spéculatives, de crédit (dette pourrie d’entreprises peu solvables, avec risque élevé de défaut). Si la bulle éclate, on risque un krach avec une menace de contagion à tout le système financier : les craintes de faillites poussent les banques à ne plus se prêter de l’argent entre elles, donc tout le système de crédit se bloque; or l’économie réelle a aussi besoin d’avoir accès au crédit pour commercer, acheter, vivre; donc sans crédit, plus de commerce, et sans commerce, tout s’arrête.
2) Évolutions démographiques, contradictoires en apparence : surpopulation mondiale (qui pèse sur les ressources) et vieillissement des populations dans les pays développés (qui pèse sur les pensions). Mais certains continuent toujours à espérer une baisse de l’âge de le retraite…
3) Corollaire du point précédent, la raréfaction des ressources, couplée à la fragilité de nos systèmes d’approvisionnement qui nous fournissent en eau, alimentation, énergie, soins, l’ensemble étant menacé de pénuries. D’où l’importance de produire et consommer local, de décentraliser nos infrastructures pour qu’elles soient résistantes, durables et résilientes.
Alors, à quand la fin du buzz médiatique qui fait sensation, et la prise de mesures concrètes pour faire face aux vrais enjeux de notre temps ?
Fred Deion
http://actufreddeion.blogspot.ch/
Fred Deion est un auteur suisse. Son livre, Ruptures Millénaires, jette un coup de projecteur sur quelques événements historiques qui ont marqué la vie des hommes. Ces périodes chaotiques ont eu un impact considérable sur les populations qui ont vu leurs destins basculer. Gardons à l’esprit leurs tragiques épreuves, pour mieux faire face aux défis d’aujourd’hui et de demain.
Si l’histoire se répète, le passé indique le futur. Que peut nous dire le passé sur notre XXIe siècle ?
Ping : Revue de presse inter. | Pearltrees