Si vous boycottez Israël nous vous boycotterons


Les députés fédéraux ou étatiques donnent la priorité à une puissance étrangère


Par Russia Today – Le 8 janvier 2018

Le Sénat américain entame sa rentrée 2019 avec un projet de loi visant à protéger Israël du boycott, une loi similaire au niveau des États faisant face à une certaine opposition. Ainsi, un journal de l’Arkansas poursuit cet État, qualifiant cette interdiction de boycott d’anticonstitutionnelle.

Étant donné que le gouvernement est encore partiellement fermé en raison du projet du président Trump de construire un mur à la frontière mexicaine, on pourrait imaginer que le premier projet de loi présenté par le Sénat cette année aurait pour priorité de sortir de l’impasse et de mettre fin à la fermeture. Ce n’est pourtant pas le cas.

Au lieu de cela, S.1 est un ensemble de mesures de politique étrangère visant à renforcer la coopération militaire entre les États-Unis et la Jordanie, à réitérer l’opposition au dirigeant syrien Bachar Assad, à affecter des fonds d’aide étrangère à Israël et, plus controversé encore, à donner aux gouvernements locaux le pouvoir de refuser de passer contrat avec des entreprises qui boycottent Israël.

Marco Rubio✔@marcorubio 11h22 – 4 janvier 2019

Le premier article que le Sénat examinera au nouveau congrès sera notre projet de loi pour faire face à la crise en Syrie et soutenir nos alliés au Moyen-Orient.

Vous pouvez lire le texte de notre projet de loi sur le renforcement de la sécurité des États-Unis au Moyen-Orient de 2019 ici

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Ce projet de loi est parrainé par le sénateur républicain de Floride, Marco Rubio, un opposant de longue date au mouvement BDS (boycott, désinvestissement et sanctions) et allié de l’AIPAC, le puissant lobby pro-Israël. À part Rubio, le projet de loi devrait recevoir l’appui bipartite nécessaire pour obtenir une majorité au Sénat. Un projet de loi similaire présenté par Rubio l’année dernière a été coparrainé par plusieurs démocrates, et le leader de la minorité au Sénat Chuck Schumer (D-New York) devrait soutenir ce dernier effort, selon The Intercept.

Même si le projet de loi de Rubio est une version édulcorée d’une loi présentée par le démocrate Ben Cardin (Maryland) en 2017 qui aurait en fait criminalisé le boycott d’Israël, l’American Civil Liberties Union a quand même sonné l’alarme.

« La législation… envoie un message aux Américains qu’ils seront pénalisés s’ils osent ne pas être d’accord avec leur gouvernement », a déclaré Kathleen Ruane, conseillère législative principale de l’ACLU, à The Intercept. « Nous demandons donc aux sénateurs de voter non à cette loi sur la lutte contre le BDS la semaine prochaine. »

Les législations déjà actées au niveau étatique offrent un aperçu de ce à quoi le projet de loi de Rubio pourrait ressembler une fois voté. Une législation anti-BDS a déjà été promulguée dans 26 États, où elle a déjà coûté leur emploi à certains employés, et fait l’objet de contestations judiciaires.

Bahia Amawi, orthophoniste travaillant pour le district scolaire indépendant de Pflugerville au Texas, a perdu son emploi en août dernier lorsqu’elle a refusé de signer un contrat promettant de s’abstenir de toute action « visant à pénaliser, à nuire économiquement ou à limiter les relations commerciales avec Israël, ou avec une personne ou entité faisant affaire en Israël ou dans un territoire contrôlé par Israël ».

Amawi, une citoyenne américaine qui estime qu’Israël occupe illégalement le territoire palestinien et qui boycotte les produits israéliens, a déposé une plainte alléguant une violation de son droit à la liberté d’expression. Le procès est actuellement en cours, mais la législation anti-BDS du Texas a l’appui total du gouverneur Greg Abbott (de droite), qui a déclaré que « toute politique anti-israélienne est une politique anti-Texas ».

Des poursuites similaires ont été intentées en Arizona et au Kansas, envers deux entrepreneurs travaillant avec l’État qui, comme Amawi, ont refusé de signer un serment promettant de ne pas boycotter l’État juif.

La dernière contestation contre ces lois anti-BDS vient de l’Arkansas, où un journal a décidé de combattre cet engagement, par principe. L’Arkansas Times n’a jamais publié d’éditorial critiquant Israël, mais lorsque l’Université de l’Arkansas a refusé de faire de la publicité dans le journal à moins que celui-ci ne signe cet engagement, le personnel du journal a décidé de porter plainte.

Ayman Mohyeldin✔@AymanM – 10 h 30 – 7 janvier 2019

Répondant à @AymanM

« Pourquoi un citoyen américain devrait-il prendre position en faveur de la politique étrangère d’un gouvernement étranger juste pour pouvoir faire des affaires avec son propre gouvernement », a déclaré Jan Everett, éditeur de l’Arkansas Times à MSNBC. « Qu’est-ce que c’est que cette façon de penser ? »

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La première loi anti-BDS au niveau étatique a été adoptée par le Tennessee en 2015. Dans les 26 États qui ont adopté des lois anti-BDS depuis lors, les dispositions de ces lois sont globalement les mêmes et interdisent aux entreprises ou aux individus qui boycottent Israël de faire des affaires avec le gouvernement. Dans certains États, comme la Louisiane, la loi ne vise que les gros entrepreneurs. À part cela, les projets de loi sont presque tous identiques.

Quels que soient les partis auxquels sont affiliés les responsables de la loi, le langage utilisé pour l’appuyer est le même. Le gouverneur démocrate de New York, Andrew Cuomo, s’est fait l’écho du républicain texan, Greg Abbott, lorsqu’il a décrit le BDS comme une « attaque économique » contre Israël et a déclaré : « Si vous boycottez Israël, New York vous boycottera ».

Finalement nuisible à la communauté juive

Alors que les deux partis essayent de se montrer plus pro-Israël l’un que l’autre ces dernières années, même certaines voix pro-israéliennes ont réalisé que forcer les Américains à faire passer le soutien à une puissance étrangère avant leurs propres droits constitutionnels n’est probablement pas un bon point pour Israël au niveau relations publiques.

Alors que la première série d’États a commencé à adopter une législation anti-BDS en 2016, des documents internes de l’Anti-Defamation League révèlent que, malgré son soutien public à de telles lois, le personnel du groupe de pression juif pense que c’est une mauvaise idée.

« Autrement dit, l’ADL ne pense pas que la législation anti-BDS soit un moyen subtil de combattre le mouvement BDS ou de défendre Israël et qu’elle est finalement nuisible à la communauté juive », a déclaré M. Forward dans une note de service.

Ces projets de loi, poursuit-il, font de la publicité au mouvement BDS tout en donnant « l’impression que la communauté juive exerce une influence indue sur le gouvernement », un trope séculaire a la base des théories du complot antisémites.

En outre, le journaliste Max Brantley a écrit, vendredi dernier dans l’Arkansas Times, que s’il n’avait jamais envisagé de boycotter Israël auparavant, il pourrait maintenant avoir un argument pour le faire.

« Je pensais ce matin », écrit-il, « que je devrais peut-être préconiser le boycott d’Israël pour protester contre les législateurs de l’Arkansas qui ne respectent pas le premier amendement. »

Russia Today

Traduit par Wayan, relu par Cat pour le Saker Francophone

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