Par Patrick J. Buchanan – Le 3 juillet 2017 – Source son blog
Dans la première ligne de la Déclaration d’indépendance du 4 juillet 1776, Thomas Jefferson parle d’« un peuple ». La Constitution, convenue par les Pères fondateurs à Philadelphie en 1789, commence ainsi : « Nous, le peuple… »
Et qu’était ce « peuple » ?
Dans Federalist n°2, John Jay en parle comme d’« un peuple uni … descendant des mêmes ancêtres, parlant la même langue, pratiquant la même religion, descendants attachés aux mêmes principes de gouvernement, très semblables dans leurs mœurs et leurs coutumes … »
Si tels sont les éléments nécessaires pour former une nation et un peuple, pouvons nous encore considérer que les Américains constituent une nation et un peuple ?
Nous n’avons plus les mêmes ancêtres. Ils sont de toutes les couleurs et viennent de tous les pays. Nous ne parlons pas une langue, mais plutôt l’anglais, l’espagnol et une foule d’autres. Nous avons depuis longtemps cessé de pratiquer la même religion. Nous sommes chrétiens évangéliques, protestants, catholiques, juifs, mormons, musulmans, hindous et bouddhistes, agnostiques et athées.
Federalist n°2 célébrait notre unité. Les élites d’aujourd’hui proclament que notre diversité fait notre force. Mais est-ce vrai ou est-ce simplement un principe idéologique à la mode ?
Après la tentative de massacre de députés républicains à Alexandrie, Fareed Zakaria a écrit : « La polarisation politique qui déchire ce pays concerne l’identité … genre, race, ethnicité, orientation sexuelle (et) classe sociale ». Il aurait pu ajouter : la religion, la moralité, la culture et l’histoire.
Zakaria semble attribuer la désintégration de notre société à cette même diversité que les élites proclament comme étant son plus grand atout : « Si les questions centrales concernent l’identité, la culture et la religion … alors le compromis semble immoral. La politique américaine ressemble de plus en plus à la politique au Moyen-Orient, où il n’y a pas de position intermédiaire entre être sunnite ou chiite. »
Les problèmes sur lesquels les Américains sont en guerre les uns contre les autres sont – l’avortement, l’homosexualité, le mariage homosexuel, les flics blancs, les crimes des Noirs, les monuments confédérés, les droits LGBT, la revendication active.
La découverte de l’Amérique et la conquête de ce continent entre 1492 et le XXe siècle fait-elle partie des chapitres les plus glorieux de l’histoire de l’humanité ? Ou fut-ce un demi-millénaire marqué par les plus graves péchés de l’humanité : le génocide des peuples autochtones, l’esclavage des Africains, l’anéantissement des cultures indigènes, la spoliation d’une terre vierge ?
L’Amérique est-elle vraiment « le pays de Dieu » ? Ou le pasteur de Barack Obama, le révérend Jérémie Wright, avait-il raison quand, après le 11 septembre, il a remplacé le slogan « Que Dieu bénissse l’Amérique ! » par le maléfique « Que Dieu damne l’Amérique ! » ?
Par son silence, la congrégation a paru être d’accord.
En 1954, le Serment d’allégeance que beaucoup d’entre nous récitaient quotidiennement, après la pause de midi dans la cour de l’école, a été modifiée pour devenir « une nation, entre les mains de Dieu, indivisible ».
Sommes-nous encore une nation entre les mains de Dieu ? Lors de la Convention démocrate de Charlotte qui visait à renommer Barack Obama, une motion visant à remettre « Dieu » dans le texte a été huée par la moitié de l’assemblée.
Pendant ce long week-end du 4 juillet, de nombreux auteurs ont déploré l’animosité des Américains les uns envers les autres et ont appelé à de nouveaux efforts pour nous rassembler. Pourtant, rappelons-nous les premiers mots de Jefferson en 1776 :
« Lorsque, dans le cours des événements humains, il devient nécessaire pour un peuple de dissoudre les liens politiques qui les ont assemblés… »
Nous approchons-nous d’un tel moment ? La Constitution, telle qu’elle est actuellement interprétée, pourrait-elle gagner l’approbation des deux tiers de nos citoyens et des trois quarts de nos États, si ce n’était pas déjà la loi suprême du pays ? Que donnerait un référendum national sur la Constitution alors que de nombreux Américains recherchent déjà une nouvelle convention constitutionnelle ?
Tout cela suscite la question : sommes-nous encore une nation ? Et qu’est-ce qu’une nation ? L’écrivain français Ernest Renan nous a donné la réponse, au XIXe siècle : Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis.
« Le culte des ancêtres est de tous le plus légitime ; les ancêtres nous ont faits ce que nous sommes. Un passé héroïque, des grands hommes, de la gloire (j’entends de la véritble), voilà le capital social sur lequel on assied une idée nationale. Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple. »
Est-ce que cela nous ressemble de nos jours ?
En regardant nos Lilliputiens démolir des statues et des monuments, renommer des bâtiments et des rues, réécrire les livres d’histoire pour remplacer les héros et les vérités historiques par les actes de nullités, déstructurons-nous la nation que nous étions autrefois ?
« On aime en proportion des sacrifices qu’on a consentis, des maux qu’on a soufferts, écrit Renan. On aime la maison qu’on a bâtie et qu’on transmet. »
Transmettons-nous la maison dont nous avons hérité – ou observons-nous sa démolition ?
Bon 4 juillet. Et que Dieu bénisse les États-Unis.
Patrick J. Buchanan
Traduit par Wayan, relu par Catherine pour le Saker Francophone.
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