Le référendum hollandais. Une fissure dans le barrage russophobe européen.


Est ce que le sens commun va finalement l’emporter sur l’illogisme, l’hubris et l’entêtement de ceux qui contrôlent les institutions de l’Union européenne à Bruxelles, mais aussi à Berlin et Washington ?

Par Gilbert Doctorow – Le 7 avril 2016 – Source Une parole franche.

Par ce jeudi matin de ciel couvert à Bruxelles, la capitale de l’Europe, les rayons de soleil arrivent de l’Est alors que les derniers résultats du dépouillement aux Pays-Bas voisins donnent à penser que le référendum d’hier sur l’accord d’association de l’UE avec l’Ukraine a atteint l’exigence de quorum de 30% des électeurs, et que ceux qui ont voté l’emportent à deux contre un pour rejeter l’accord avec l’Ukraine. 

Si c’est confirmé lorsque les résultats officiels seront donnés le 12 avril, cela marque une défaite retentissante pour la politique de Bruxelles qui consiste à poursuivre une politique agressive contre la Russie par l’intermédiaire de sanctions économiques et d’une guerre médiatique, tout ceci sans jamais consulter l’opinion publique européenne. Pour utiliser des termes du folklore néerlandais, c’est la fissure dans le barrage que beaucoup d’entre nous ont attendue, la possibilité que le bon sens l’emporte sur l’illogisme, l’orgueil et l’entêtement de ceux qui contrôlent les institutions de l’UE à Bruxelles, mais aussi à Berlin et Washington.

Alors que le référendum n’était que consultatif, les déclarations publiques des parlementaires, tout comme les remerciements du gouvernement néerlandais avant le vote, ont indiqué que celui-ci va forcer un nouveau vote au Parlement sur la ratification, et que le Premier ministre Rutte va sûrement se rendre à Bruxelles pour demander une renégociation de l’accord d’association. En tant que tel, il peut amener le mécanisme de politique étrangère de l’UE à l’arrêt, et mettre à nu l’illogisme de toutes les politiques de l’Union, ces dernières années, envers ses frontières orientales, pour le soumettre à l’examen public et, espérons-le, à la révision.

Toutefois, que ce soit le moment décisif où l’UE retrouve ses esprits, ou tout simplement la première d’une série de coups visant le politiquement correct et le pensée moutonnière qui ont été le moteur de sa politique depuis le coup d’État en Ukraine, le 22 février 2014, son importance ne peut être surestimée.

Cela fait plus d’un an que les politiques de dénigrement de la Russie, les sanctions en particulier, sont contestées par une minorité croissante des États membres de l’UE. Parmi les dissidents nommés à un moment ou un autre, on trouve l’Italie, la Hongrie, la Slovaquie. Puis vint la Bavière, en Allemagne, dont le ministre-président Seehofer critiquait, il y a quelques mois, les politiques de la chancelière Merkel et faisait la cour à Vladimir Poutine à Moscou. Hier le président de l’Autriche a fait la même chose. Et pourtant, malgré toutes les belles paroles aux journalistes sur la façon dont les sanctions sont contraires aux intérêts économiques de base de leur pays et de l’Europe dans son ensemble, aucun de ces hommes d’État n’a rompu les rangs lorsque les sanctions ont été renouvelées. L’importance de l’événement d’hier aux Pays-Bas était que cette fois-ci, ce sont les gens qui parlaient, et non leurs représentants élus ou nommés. C’est donc une consultation à retenir.

En effet, le référendum a joué à deux niveaux. Au niveau national, il a été une lutte de pouvoir entre les partis centristes traditionnels aux Pays-Bas, qui se suivent pour aller dans le sens du courant sur les décisions de l’UE, contre les extrêmes eurosceptiques, de gauche mais surtout de droite (Geert Wilders et son Parti de la liberté), qui veulent mettre un bâton dans les roues de l’UE et mettre un terme au mouvement, lent mais inébranlable, vers une plus grande union, et même vers un fédéralisme, mouvement qui a pris de l’ampleur depuis le début de la crise financière de 2008. En un sens, cela donne un avant-goût de la campagne pour les élections législatives qui auront lieu aux Pays-Bas en 2017.

En même temps, le référendum avait une dimension allant au-delà des bureaux de vote, comme une sorte de bataille par procuration entre pro-américains, pro-OTAN, par rapport aux idées des pro-Moscou aux Pays-Bas.

Dans les deux cas, les détails de l’accord d’association de l’UE avec l’Ukraine inscrits sur plusieurs centaines de pages ne sont pas la vraie question du vote. Mais qu’est ce que le Premier ministre Rutte va finalement demander à la Commission européenne de renégocier ?

Les signes se multiplient, montrant que le consensus de l’UE sur la politique étrangère conduite par Angela Merkel est en voie d’effondrement. En Allemagne même, ses détracteurs sont de plus en plus audacieux. Cette semaine, les journaux allemands parlaient en première page de l’invitation de l’ancien chancelier Helmut Kohl au Premier ministre hongrois Viktor Orban à son domicile la semaine prochaine. Ceci est considéré comme un reproche direct à Merkel et à sa politique des bras ouverts aux réfugiés de la Syrie et du Moyen-Orient, une politique à laquelle Orban et un certain nombre de nouveaux États membres s’opposent.

Le prochain grand test pour l’Union européenne, et la prochaine occasion de porter un coup sévère à son leadership complaisant à Bruxelles, sera le référendum pour le Brexit au Royaume Uni à la fin de juin. A surveiller de près.

Gilbert Doctorow

Traduit par Wayan, relu par Diane pour le Saker Francophone.

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