US, affaire Mueller : fatal dépassement des limites de la décence publique


Par James Howard Kunstler – Le 17 décembre 2018 – Source kunstler.com

James Howard KunstlerVendredi matin dernier, nous avons ajourné le blog en prévision de la remise par l’avocat spécial Robert Mueller de certains documents du FBI, dans l’affaire du général Flynn, exigés par le juge fédéral de district Emmett G. Sullivan au plus tard à 15 h le même jour. Devinez quoi. Les garçons de courses de M. Mueller n’ont pas remis les documents requis – le rapport d’interrogatoire 302 du FBI, les originaux.

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Au lieu de cela, ils ont proposé un « entretien » à moitié foireux avec l’un des deux agents qui ont mené l’interrogatoire de Flynn, Peter Strzok, en essayant de se souvenir de cet entretien 302, six mois après qu’il a été écrit. Bien sûr, M. Strzok a été notoirement congédié du Bureau en août pour des accès de zèle politique au travail en tant que chef du contre-espionnage du FBI pendant et après les élections de 2016. (C’était la deuxième fois qu’il était congédié ; la première fois, c’était lorsque Robert Mueller l’avait écarté, en 2017, de son poste de responsable juridique de l’équipe du bureau spécial).

Donc, 15 h, vendredi 14 décembre, l’heure est passée. Il semblerait que les documents 302 du FBI soient venus et repartis eux aussi. En fait, nous avons des raisons de croire que rien de ce qui a été créé sur un ordinateur connecté à Internet ne peut disparaître complètement. Les données sont plutôt aspirées dans le puits sans fond de la ferme de serveurs de la NSA dans l’Utah. Très probablement, les originaux de ces interviews existent et M. Mueller fait semblant de ne pas les trouver. En effet, il semble que M. Mueller ait répondu en chuchotant doucement « allez vous faire foutre » au juge Sullivan.

Fait intéressant, le New York Times n’a même pas rapporté l’histoire (ni The Washington Post, ni CNN, ni MSNBC). Comme leur récit de la « Collusion Russe » s’effondre, ils ne peuvent tolérer l’idée que leur Ange vengeur de la destitution, M. Mueller, soit moins vertueux que le dealer sanctifié qu’il affecte d’être. Le juge Sullivan a tenu son propre conseil tout le week-end. Le prochain chapitre de l’histoire est celui de la sentence du général Flynn ce mardi. Il serait surprenant que le juge ne constate pas que M. Mueller a commis un outrage au tribunal. Idem si l’accusation contre le général Flynn n’est pas rejetée. Après tout, les principaux éléments de preuve contre lui n’existent apparemment pas.

Et s’il s’avère que M. Mueller et son équipe sont déshonorés par leur comportement apparent de mauvaise foi dans l’affaire Flynn, qu’en est-il de toutes les autres affaires liées à Mueller d’une manière ou d’une autre : Manafort, Cohen, Papadopoulos ? Et les autres questions encore en suspens, comme la rencontre à la Trump Tower entre l’avocat russe « Magnitsky » et Golden Golem Junior, la star du porno rémunérée… vraiment tout ce qu’il a touché. Et si tout s’écroule ?

En théorie, ce pays, groggy suite aux coups reçus, pourrait revenir à la véritable règle de droit plutôt qu’aux pratiques médiévales de la justice bolcheviques de type « Deep State ». Cela impliquerait la poursuite des procureurs eux-mêmes. Loin d’être une aberration historique, c’est souvent le cas lorsque les autorités dépassent les limites de la décence commune. C’est ce qui s’est passé lors de la création de l’affaire du général Flynn.

Les lecteurs peuvent se demander : pourquoi suis-je si préoccupé par ces manigances entre le FBI, le DOJ et la communauté des services secrets alors qu’il y a cet autre éléphant dans la pièce, à savoir M. Trump, le Golem d’or de la grandeur, maladroit, gênant, embarrassant, infantile qui déshonore le Bureau ovale ? Parce que les actions de ses antagonistes sont beaucoup plus dangereuses pour l’intérêt public que celles d’un président lourdaud. Les élus vont et viennent, mais quand l’Amérique bazarde l’État de droit dans la vieille benne à ordures, elle cesse d’être la terre de la liberté et la patrie des braves. Ce sera un pays de couards, qui attendront dans la terreur la main de fer qui les écrasera comme des punaises.

Demain, mardi 18 décembre, nous répondrons à certaines des questions soulevées ici, et j’ajouterai une mise à jour par la suite. Mais il y a beaucoup d’autres forces en jeu en ce moment, sur une scène mondiale qui devient chaque jour plus chargée de signes annonçant le bouleversement de l’ordre actuel des choses. L’Occident est en proie à des paroxysmes durables de tumulte politique et de désenchantement. La Chine est plus opaque politiquement, mais son désordre financier est évident. Enfin, il y a la question des marchés et du système bancaire, dont les destins entrelacés vont dans la mauvaise direction. Parmi ses nombreuses bévues, la pire pour sa propre survie politique a été de voir M. Trump s’approprier la « plus grande économie de tous les temps ». Les actions, les obligations et les matières premières vacillent toutes en même temps et s’approchent du moment où il n’y aura plus de plancher pour le prix de quoi que ce soit. Cela ne rendra pas l’Amérique Grande au sens trumpien du terme, mais ce sera une nouvelle opportunité pour le retour tant attendu de la réalité dans une société où, depuis longtemps, maintenant, tout arrive et rien ne compte.

Mise à jour Mardi, 13 h 30

Une scène mystifiante rapportée aujourd’hui par le juge Emmet G. Sullivan dans la salle d’audience de DC où le général Michael Flynn a comparu ce matin pour purger sa peine pour le chef d’accusation de mensonge au FBI. Le juge Sullivan a donné au général Flynn, et à ses avocats, l’occasion de modifier son plaidoyer de culpabilité. Ils ont refusé. Le juge a insisté sur la « gravité » de l’accusation et a laissé entendre de façon désinvolte qu’une accusation de trahison aurait pu être plus appropriée, laissant entendre que le général Flynn pourrait être condamné à une peine d’emprisonnement au lieu de la recommandation de M. Mueller dans son mémoire sur la sentence. Le juge a alors demandé une suspension d’audience pour que M. Flynn et ses avocats puissent s’entretenir avec lui. Lorsque le juge Sullivan est revenu, il s’est excusé auprès de Flynn d’avoir laissé entendre que ce dernier était passible d’une accusation de trahison. Le juge a indiqué qu’il avait peut-être mal compris quelque chose au sujet des faits en question. Hier, des accusations ont été portées devant un tribunal fédéral de Virginie contre deux personnages qui ont travaillé avec le général Flynn comme consultants en Turquie en 2016. Ils avaient omis de s’enregistrer en tant qu’agents étrangers. Apparemment, la sentence d’aujourd’hui a été utilisée par l’équipe de l’accusation de M. Mueller pour obtenir plus d’informations de M. Flynn dans cette affaire en instance en Turquie. Enfin, le juge Sullivan a reporté la détermination de la peine en attendant que le général Flynn coopère davantage avec les procureurs du gouvernement. Les avocats de Mueller et de Flynn ont reçu l’ordre de déposer un « rapport de situation » avant le 13 mars 2019.

Je ne prétendrai pas savoir où tout ça va aller. L’explication la plus simple est que le juge Sullivan était persuadé que le général Flynn avait besoin de plus de pression pour mieux témoigner devant le gouvernement. J’ai deux conclusions provisoires : 1) le pays est en cours de destruction par les avocats. C’est une proposition générale ; et 2) cette poursuite manifestement politique fait partie d’un scandale plus vaste si colossal qu’il fait passer le Watergate pour une infraction au stationnement. Le général Flynn est-il le Dreyfus de l’Amérique ?

Too much magic : L'Amérique désenchantéeJames Howard Kunstler

Pour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.

Traduit par Hervé, relu par jj pour le Saker Francophone

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