Par Vladislav B. SOTIROVI − Le 19 avril 2019 − Source Oriental Review
La politique de Tito dans les années 1970, qui consistait prétendument à “encourager et réprimer” pour lutter contre les nationalismes ethniques politiquement indésirables et menaçants, en particulier ceux des croates et des serbes, semblait incohérente. En d’autres termes, si certains nationalismes ethniques et leurs idéologies étaient considérés comme dangereux pour le système et, par conséquent, ont été réprimés et leurs défenseurs emprisonnés ou interdits d’emploi 1 (le cas, par exemple, des professeurs dissidents serbes de l’université de Belgrade), d’autres nationalismes, censés être non dangereux pour le régime ont été encouragés par les élites communistes locales (le nationalisme albanais au Kosovo-et-Métochie). Néanmoins, une tentative titoïste de supprimer les nationalismes croates et serbes et leurs idéologies politiques, en tant que doctrines “réactionnaires” et “contre-révolutionnaires”, n’a pas réussi à les éradiquer2. En substance, une telle politique titoïste a relégué les nationalismes croate et serbe dans le champ de la dissidence politique et des manifestations.
Les intellectuels dissidents qui continuaient à critiquer le régime titoïste dans le cadre des nationalismes ethniques réprimés et de leurs idéologies nationales interprétaient la politique titoïste “encourager et réprimer” comme un complot systématique pour humilier leurs nations respectives et leur refuser leur part légitime de pouvoir et d’influence aux dépens des autres nations plus privilégiées. Dans la pratique, l’encouragement titoïste des idéologies nationales rivales alimenta la méfiance et, plus tard dans les années 1990, la haine des groupes nationaux et ethniques dont l’émancipation culturelle et politique était favorisée par le gouvernement communiste titoïste. Néanmoins alimentées par des griefs historiques et nouveaux, les anciennes idéologies nationales (du XIXe siècle) ne sont pas restées dans le cadre de la dissidence pendant une période plus longue que depuis le milieu des années 1980, pour élargir leur appel et s’assurer par conséquent leur emprise sur le pouvoir. Les dirigeants politiques titoïstes exproprièrent, à travers le pays, la rhétorique des idéologies nationales dissidentes, d’abord en Serbie puis en Slovénie et Croatie et, ultérieurement, les ont introduites dans le discours politique fondamental. Concrètement, ces idéologies nationales et politiques sont devenues des instruments très appropriés pour canaliser les doléances populaires parmi les masses qui acceptaient les discours sur les autres comme oppresseurs étrangers de leurs propres groupes nationaux ou ethniques. 3
Les rivalités ethniques ont certainement continué à empoisonner la Yougoslavie tout au long de l’après-guerre jusqu’à sa destruction finale. Depuis le milieu des années 1980, dans toutes les républiques de l’ex-Yougoslavie, les dirigeants politiques utilisaient une rhétorique nationaliste pour éroder une identité yougoslave commune et alimenter la peur et la méfiance entre les différents groupes ethniques. En 1991, l’éclatement du pays menaçait avec la Slovénie et la Croatie qui blâmaient sans raison la Serbie de dominer le gouvernement, l’armée et les finances de la Yougoslavie. La Serbie, à son tour, accusa ces deux républiques du nord de séparatisme inconstitutionnel. Cependant, en Bosnie-Herzégovine, le conflit allait être le plus meurtrier de tous dans la Fédération yougoslave en désintégration, car cette république était la plus mélangée du point de vue ethnique et confessionnel. La Bosnie-Herzégovine était la seule république yougoslave sans majorité absolue claire de tout groupe ethnique ou confessionnel. Cette république centrale yougoslave avait un gouvernement partagé qui reflétait une composition ethnique très mixte avec une population composée d’environ 44 % de musulmans bosniaques, 32 % de serbes bosniaques, 17 % de croates bosniaques et d’autres nationalités (recensement de 1991). 4 La position géostratégique et sa composition ethnique ont fait de la république un objet de nationalisme serbe et croate qui cherchait à exercer leur domination sur une grande partie de son territoire. À titre d’exemple, les dirigeants de la Croatie (Franjo Tuđman) et de la Serbie (Slobodan Milošević) se sont rencontrés le 16 avril 1991 lors d’une réunion secrète à Karađorđevo5 (dans la province de Vojvodine en Serbie) où ils ont en principe accepté de diviser la Bosnie-Herzégovine entre la Serbie et la Croatie, laissant une petite enclave aux bosniaques6.
La première étape précise pour commencer les changements généraux nécessaires en Yougoslavie après la mort de Tito en ce qui concerne les questions nationales, afin de réformer le pays et pour assurer sa survie fut faite par les intellectuels et académiciens serbes en 1985 lorsque l’Assemblée de l’Académie serbe des sciences et des arts (SANU) décida le 23 mai de réaliser une étude scientifique des questions et problèmes sociaux actuels dans ce pays. Le produit de ce travail est devenu connu sous le nom de Mémorandum de la SANU (publié en 1986 dans les journaux par une police secrète) qui appelait à l’amélioration générale de la position de la nation serbe opprimée en Yougoslavie 7 mais surtout en Croatie et au Kosovo-et-Métochie où les Serbes étaient terrorisés, chassés et tués sans réaction adéquate du gouvernement fédéral yougoslave. Le Mémorandum, en fait, présentait la cruelle réalité d’une solution titoïste aux questions nationales, les Serbes étant continuellement menacés et exploités économiquement et, par conséquent, les signataires de ce document appelaient à la recentralisation du pays ou à la révision de ses frontières intérieures. Ce mémorandum a toutefois été qualifié par l’autorité communiste au pouvoir d’expression claire du nationalisme serbe.
Le fait qu’une question serbe en Yougoslavie était vraiment un problème aigu est devenu clair le 24 avril 1987, quand un groupe de Serbes du Kosovo-et-Métochie a rencontré le chef du parti serbe Slobodan Milošević dans la banlieue de Priština, au Kosovo Polje, alors qu’ils avaient besoin de protection contre la terreur systématique albanaise, les Albanais créant constamment des tensions politiques dans la province, ce qui révéla que la question serbe était vraiment un problème aigu en Yougoslavie. Au cours de la réunion, les forces de police albanaises du Kosovo frappèrent brutalement les civils serbes. Le terrorisme albanais contre la Yougoslavie a été exporté à l’extérieur du Kosovo-et-Métochie le 3 septembre de la même année lorsque, dans la caserne de l’YPA à Paraćin en Serbie, un conscrit albanais du Kosovo-et-Métochie (Keljmendi) a tué quatre autres soldats et fait cinq blessés dans la chambre pendant la nuit. À partir de ce moment, le terrorisme albanais est devenu un problème de sécurité central à résoudre pour le gouvernement serbe qui n’a reçu aucun soutien des autres républiques yougoslaves dans cette affaire. En fait, la Slovénie et la Croatie ont même ouvertement soutenu le terrorisme et le sécessionnisme albanais du Kosovo. 8
Le 28 juin 1989, à l’occasion du 600e anniversaire de la bataille du Kosovo à Gazimestan près de Priština, à laquelle ont participé environ un million de Serbes de toutes les régions de la Yougoslavie, a eu lieu un soutien national commun à l’idée de protéger la nation serbe dans tout le pays. En cette occasion historique, de juin 1988 à juin 1989, le reliquaire du prince serbe Lazar, participant canonisé à la bataille de 1389 contre les Ottomans, était en route du monastère orthodoxe serbe de Ravanica à travers les parties serbes peuplées de la Yougoslavie pour revenir aux véritables racines religieuses et nationales serbes. L’esprit d’unité serbe s’est exprimé le 9 juillet 1988 lorsque plusieurs arrivées massives de Serbes opprimés du Kosovo-et-Métochie ont commencé dans le centre administratif de Novi Sad, en Voïvodine, suivi d’une série de réunions qui ont finalement abouti à la chute du gouvernement provincial sécessionniste et anti-serbe, sous la pression de la volonté du peuple. C’était le premier pas direct vers la réunification de la Serbie, c’est-à-dire l’abolition de l’autonomie politique séparatiste des deux provinces en son sein, mais aussi l’unification politique de tous les Serbes yougoslaves. Pour les Serbes, il était tout à fait clair que ce n’est qu’en réalisant l’unification politique et nationale souhaitée que les Serbes de Yougoslavie pourraient réellement être libérés de “la domination des non-Serbes en Yougoslavie” 9 et être égaux aux autres nations et républiques yougoslaves au sein de la même fédération.
Le peuple monténégrin a exprimé ses sentiments nationaux serbes et son désir de vivre ensemble avec la Serbie et d’autres Serbes yougoslaves le 10 janvier 1989 lorsque, lors d’une série de réunions populaires, culminant à Podgorica (ancien Titograd), auxquelles ont assisté quelque 50 000 personnes, le gouvernement monténégrin anti-serbe et pro-croate/slovène a changé son attitude.
Cependant, indépendamment du fait même que la forme que prendra l’unification politico-nationale serbe n’a pas été définie (une seule unité fédérale ?), cette attitude politique a certainement déclenché et servi de modèle pour des projets et campagnes politiques similaires dans toutes les autres républiques yougoslaves mais surtout en Croatie voisine. Dès l’été 1989, la Slovénie et la Croatie ont formé un front anti-serbe uni, car pour elles, la perspective d’une quelconque unification serbe était une politique de domination serbe sur d’autres groupes nationaux en Yougoslavie, mais, Ljubljana et Zagreb ont voulu en réalité préserver leur domination post-1945 sur le reste de la fédération yougoslave. En d’autres termes, les autorités communistes slovènes et croates ont lancé leurs propres campagnes politiques pour la “libération” de leurs nations respectives de la Yougoslavie (sécessionnisme), car toute position défavorisée de la Slovénie et de la Croatie en Yougoslavie était inacceptable. En conséquence, en janvier 1990, les dirigeants communistes croates se sont joints à leurs homologues slovènes pour se retirer du dernier Congrès du Parti communiste yougoslave (la Ligue des communistes de Yougoslavie) (14e Congrès extraordinaire) qui s’est tenu à Belgrade (20-22 janvier) et, par conséquent, détruire assez efficacement le seul mouvement politique qui avait soutenu une idée d’unification yougoslave.
Néanmoins, l’enthousiasme des dirigeants communistes slovènes et croates pour le nouveau patriotisme de leurs propres républiques et le nationalisme de leurs propres nations ne correspondait pas avec les nouveaux partis politiques nationalistes établis en 1989 par les anciens dissidents nationalistes comme, par exemple, le Dr Franjo Tudjman. En conséquence, lors des élections d’avril-mai de l’année suivante, les nouveaux partis nationalistes et ultranationalistes ont pris le pouvoir en Slovénie et en Croatie au détriment des anciens communistes, même si les partis communistes de Slovénie et de Croatie avaient été réformés et même renommés.
Les élections législatives et présidentielles en Slovénie ont eu lieu les 7 et 8 avril 1990. Le nouveau gouvernement a été formé par une coalition de cinq partis non communistes (l’opposition démocratique DEMOS de Slovénie), avec 50,9 % des voix obtenues et 55,1 % des sièges au Parlement. Milan Kučan (né en Serbie en 1941), dirigeant des communistes slovènes réformés et rebaptisés communistes slovènes, a été élu Président de la République de Slovénie. 10
En Croatie, un parti ultranationaliste nouvellement formé de l’union démocratique croate (le HDZ, créé le 17 juin 1989) sous la direction du Dr Franjo Tudjman (condamné à plusieurs années de prison pour les activités nationalistes dans les années 1970) a commencé à gagner très rapidement le soutien populaire principalement en raison de sa rhétorique anti-serbe et la glorification du régime nazi-fasciste oustashi de la Deuxième Guerre mondiale. Cependant, pour les Serbes croates, il est devenu évident que l’époque du génocide commis par les Oustachis pendant la Seconde Guerre mondiale frappait à la porte de la Croatie et, par conséquent, ils ont décidé de s’auto-organiser afin de lutter contre l’idéologie et le mouvement nazi-fasciste renaissant en Croatie. L’un des premiers rassemblements de masse des Serbes de Croatie contre la nazification du pays par le HDZ a été organisé à Petrova Gora le 4 mars 1990 lors de la campagne électorale pour le Parlement (Sabor) de Croatie alors que l’on savait déjà qui allait gagner les élections.
Le premier tour des élections en Croatie a eu lieu les 22 et 23 avril 1990, suivi du deuxième tour les 6 et 7 mai avec une nette victoire du HDZ, obtenant 41,5 % des voix et 68,8 % des sièges au Parlement. Un transfert d’autorité en Croatie a eu lieu le 30 mai 1990 lorsqu’un nouveau Parlement multipartite a élu Franjo Tudjman à la présidence de la Croatie.
Franjo Tudjman (1922-1999), né dans la région de Zagorje en Croatie tout comme Tito, était au cours des premiers mois de la Seconde Guerre mondiale en uniforme oustashi lorsqu’il a changé de camp pour les partisans de Tito sur invitation de son père. Après la guerre, Tudjman est devenu général et a travaillé au ministère de la défense yougoslave et à l’état-major général de l’YPA jusqu’en 1961, date à laquelle il a été nommé directeur de l’institut pour l’histoire du mouvement ouvrier en Croatie. Il a perdu son poste en 1967 en raison de son nationalisme linguistique et a été emprisonné à deux reprises pour ses activités nationalistes anti-serbes. Lui et son HDZ dans les années 1990 épousaient une plateforme ultranationaliste croate, ayant été soutenus par les démocraties occidentales, en particulier par l’Allemagne, sont restés au pouvoir et ont joué un rôle très important dans le processus de destruction de la Yougoslavie. 11 Tudjman, qui a obtenu en Titoslavie un doctorat en histoire, est l’auteur de nombreux livres 12 (ils sont très problématiques et contestés d’un point de vue universitaire, particulièrement le livre : Wilderness of Historical Reality, Zagreb, 1989).
En tant que président de la Croatie, Tudjman a utilisé le poste présidentiel pour l’édification de la nation, le nettoyage ethnique des Serbes de Croatie de la région de Krayina en août 1995, ce qui a entraîné une controverse majeure et des “crimes contre l’humanité dans la guerre en Bosnie-Herzégovine”. 13 Tudjman était le principal parrain d’une nouvelle Constitution “de Noël” adoptée le 22 décembre 1990 selon laquelle les Serbes en Croatie ont perdu leur position constitutionnelle et sont devenus une simple minorité ethnique avec des droits de minorité très limités. 14
En Bosnie-Herzégovine, le 26 mai 1990, un parti d’action démocratique (le SDA) a été fondé à Sarajevo avec Alija Izetbegović (1925-2000) comme président. Le parti était une organisation politique de musulmans bosniaques-herzegoviniens (bosniaques) dont l’objectif politique final était de transformer cette république en un État islamique à l’instar de l’exemple iranien. Alija Izetbegović lui-même fut emprisonné pour la première fois à la fin des années 1940 pendant trois ans en raison de son plaidoyer en faveur de l’intégrisme islamique alors que dans les années 1970, il a été persécuté pour avoir écrit et signé la Déclaration islamique fondamentaliste. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il était membre d’une tristement célèbre division SS Hanjar, créée par Heinrich Himmler et composée par les fondamentalistes musulmans de Bosnie-Herzégovine. Izetbegović est né à Bosanski Šamac, tout comme le Dr Zoran Djindjić, dans une famille musulmane d’origine slave. Après la Seconde Guerre mondiale, il devint avocat et écrit divers ouvrages sur les musulmans yougoslaves. Izetbegović fut emprisonné pour la deuxième fois en 1983-1988 après avoir publié son livre Islam Between East and West (1982) 15 pour avoir propagé une idéologie du nationalisme religieux islamique. Il est devenu l’un des dirigeants du SDA à orientation musulmane qui a obtenu une majorité parlementaire simple (29,6 %) lors des élections en Bosnie-Herzégovine (novembre et décembre 1990), devenant président de la Bosnie-Herzégovine le 20 décembre 1990.
Après la sécession de la Slovénie et de la Croatie du reste de la Yougoslavie le 25 juin 1991, Izetbegović proclama l’indépendance de la république le 3 mars 1992, rompant un précédent accord politique commun entre les trois principaux partis politiques nationaux en Bosnie-Herzégovine. Son gouvernement s’est toutefois rapidement retrouvé en guerre contre les Serbes de Bosnie-Herzégovine qui ne soutenaient pas un État indépendant dominé par la coalition islamo-croate (la coalition catholique romaine). Néanmoins, les Croates se sont rapidement retrouvés en guerre contre le gouvernement islamique fondamentaliste d’Izetbegović. Pendant la guerre, Izetbegović sillonnait le monde musulman et d’autres pays afin d’obtenir un soutien financier, diplomatique et militaire à son idée de transformer la Bosnie-Herzégovine en État islamique et de lutter contre les Serbes.
En Serbie, l’unification juridique finale du territoire de l’État a eu lieu le 5 juillet 1990 lorsqu’une assemblée du peuple de Serbie à Belgrade, sur décision de l’assemblée provinciale précédente du Kosovo, annula le Gouvernement et l’assemblée du Kosovo-et-Métochie et pris leurs prérogatives politiques. À partir de ce jour, la Serbie en tant que république était légalement égale au reste des cinq autres républiques de la RSFY. Cependant, les membres nationalistes albanais du Kosovo, membres de l’assemblée provinciale destituée, se sont réunis en secret à Kačanik dans le sud du Kosovo-et-Métochie le 7 septembre et ont adopté la Constitution illégale de la République indépendante du Kosovo que personne ne reconnaît dans le monde. Trois jours plus tard, le 10 septembre, les gouvernements slovène et croate ont officiellement proposé une plate-forme politique de fédération yougoslave reconstruite selon le modèle de l’état confédéral de l’union asymétrique dans lequel ils jouiront d’une position économique et financière privilégiée avec un gouvernement confédéral très faible. La proposition fut immédiatement rejetée par la Serbie et le Monténégro, qui l’ont jugée ridicule et injuste. Tout autre pourparler sérieux sur l’avenir de la Yougoslavie fut toutefois impossible après le 8-10 octobre 1990 lorsque la Croatie importa 20 000 mitrailleuses de la Hongrie voisine et lorsque cette opération fut découverte et enregistrée par le service de renseignement militaire de l’YPA (le KOS).
Les élections multipartites en Serbie et Monténégro ont eu lieu les 8 et 9 décembre 1990, au cours desquelles les partisans pro-Milošević ont remporté une large victoire, en réaction aux résultats des élections en Croatie en avril-mai de la même année. Slobodan Milošević (1941-2006), lui-même d’origine monténégrine, a été élu président de la Serbie 16. Il a étudié le droit à l’Université de Belgrade et a occupé divers postes au sein du parti communiste et de l’administration municipale de Belgrade. Milošević est devenu chef de la Ligue serbe des communistes en 1987, puis chef du gouvernement serbe. Sa popularité auprès des Serbes était fondée sur sa politique de réunification de la Serbie démembrée après la Seconde Guerre mondiale et sur son succès politique dans la réintégration de la Voïvodine et du Kosovo-et-Métochie en Serbie avant les élections. Il a attiré beaucoup d’attention sur les craintes et les ambitions réelles des Serbes vivant en dehors de la Serbie sans le Kosovo-et-Métochie 17 et a joué avec elles, tout en contribuant à fomenter des revendications populaires pour l’unification des Serbes en Yougoslavie, ou ses restes 18.
Traduit par Fabio pour le Saker Francophone
- Une telle politique de persécution politique n’était pas nouvelle en Titoslavie puisqu’elle n’était que la continuation de la pratique depuis la première décennie après octobre 1944. A propos des méthodes titoïstes pour créer une atmosphère de pouvoir et de peur, voir dans Алекс Н. Драгнић, Титова обећана земља Југославија, Београд: Задужбина Студеница−Чигоја штампа, 2004, 141−158 ↩
- Sur l’idéologie du nationalisme serbe, voir dans Др Војислав Шешељ, Идеологија српског национализма. Научно и публицистичко дело проф. др Лазе М. Костића, Београд: Српска радикална странка, 2003. L’auteur de cette publication (Vojislav Šešelj) est un Croate de Bosnie-Herzégovine. A propos d’un nationalisme croate et des idéologies nationalistes d’avant 1945, voir dans Jere Jareb, Pola stoljeća hrvatske politike, 1895−1945, Zagreb: Institut za suvremenu povijest, 1995. L’auteur était un émigrant oustashi vivant en Argentine après la seconde guerre mondiale. Le livre a été publié à l’origine à Buenos Aires en 1960. ↩
- Aleksandar Pavković, “National Liberations in Former Yugoslavia: When Will They End?”, East European Quarterly, XXXVI, № 2, 2002, 239 ↩
- Sur la composition nationale par districts de la Bosnie-Herzégovine, voir dans Susan L. Woodward, Balkan Tragedy: Chaos and Dissolution after the Cold War, Washington, D. C.: The Brooking Institution, 1995, 226−227 ↩
- Вељко Ђурић Машина (уредник), Република Српска Крајина десет година послије, Београд: Добра воља, 2005, 22 ↩
- Sur l’histoire de la Bosnie-Herzégovine d’un point de vue occidental, voir dans Robert J. Donia, John V.A. Fine, Jr., Bosnia and Hercegovina: A Tradition Betrayed, New York: Columbia University Press, 1994 ↩
- Gregory C. Ference (ed.), Chronology of 20th-century East European History, Detroit‒Washington, D. C.‒London: Gale Research Inc., 420 ↩
- Sur la question du terrorisme en Yougoslavie d’un point de vue historique, voir dans Др Радослав Ђ. Гаћиновић, Насиље у Југославији, Београд: ЕВРО, 2002 ↩
- Aleksandar Pavković, “National Liberations in Former Yugoslavia: When Will They End?”, East European Quarterly, XXXVI, № 2, 2002, 239 ↩
- Branka Magaš, Ivo Žanić (eds.), The War in Croatia and Bosnia-Herzegovina 1991‒1995, London‒Portland, OR: Frank Cass, 2001, 349 ↩
- Vladislav B. Sotirović, „Breaking Cliché on the Killing of Yugoslavia: A Role of Croatia“, Зборник о Србима у Хрватској (Review of the Serbs in Croatia), Vol. 11, Serbian Academy of Sciences and Art, Belgrade, Serbia, 2017, ISSN 0353-5967, 129−150 ↩
- Richard Frucht (ed.), Encyclopedia of Eastern Europe from the Congress of Vienna to the Fall of Communism, New York‒London: Garland Publishing, Inc., 2000, 812. Sur Tudjman, du point de vue officiel croate, voir plus dans Davor Butković, Dubravko Grakalić, Prilozi za političku biografiju Dr. Franje Tudjmana Predsjednika Republike Hrvatske, Zagreb, 1991 ↩
- José M. Magone, Contemporary European Politics: A Comparative Introduction, London‒New York: Routledge Taylor & Francis Group, 2011, 174 ↩
- Sur la Croatie de Tudjman, voir dans Jill A. Irvine, “Ultranationalist Ideology and State-Building in Croatia, 1990−1996”, Problems of Post-Communism, Vol. 44, № 4, July-August 1997, 30−43; Sabrina P. Ramet, “Politics in Croatia since 1989”, Sabrina P. Ramet (ed.), Central and Southeast European Politics since 1989, Cambridge: Cambridge University Press, 2010 ↩
- Alija Ali Izetbegovic, Islam Between East and West, Indianapolis, 1989 ↩
- Sur la politique électorale de la Serbie en 1990, voir dans Robert Thomas, The Politics of Serbia in the 1990s, New York: Columbia University Press, 1999, 69−79 ↩
- Le fait que les craintes serbes étaient réelles fut clairement prouvé par le cas du Serbe Djordje Martinović du Kosovo-et-Métochie qui a été empalé en mai 1985 sur une bouteille cassée par deux albanais. Les autorités yougoslaves ont cependant expliqué qu’il s’était empalé sur une bouteille qui s’était brisée. C’était, en fait, le meilleur exemple de la terreur nationaliste albanaise contre les Serbes qui illustrait clairement les craintes réelles des Serbes du Kosovo-et-Métochie ↩
- Voir plus dans Слободан Милошевић, Године расплета, Београд, 1989; Aleksa Djilas, “A Profile of Slobodan Milošević”, Foreign Affairs, 72, 1993, 81‒96 ↩