Le « Bouche – trou »


Par James Howard Kunstler – Le 2O avril 2020 – Source kunstler.com

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Ce sont des jours étranges, en effet. Mais dans quel univers alternatif peut-on imaginer que Joe Biden puisse réellement faire bonne figure dans une campagne électorale présidentielle ? Le parti qu’il est censé diriger l’a enfermé dans un placard à balais la semaine dernière après qu’il a bafouillé lors d’une émission animée par une vedette de CNN, Anderson Cooper. Ils ne peuvent quand même pas tout simplement cacher le pauvre gars jusqu’au 3 novembre.


Interrogé sur la réouverture de la vie quotidienne en Amérique, après le confinement, M. Biden a dit : « Vous savez, il y a un… euh, pendant la Seconde Guerre mondiale, euh… vous savez, où Roosevelt a inventé… une chose, euh, qui, euh… vous savez, était totalement différente d’un… que le… le, ça s’appelle… il l’a appelé le… vous savez, la Seconde Guerre mondiale… il a avait la guerre… le War Production Board… »

Tout le monde sait qu’il est moins éclairé qu’une veilleuse, et tout le monde fait comme si de rien n’était. Il n’y a pas d’analogie dans l’histoire d’un parti politique qui aurait misé sur une coquille aussi vide pour la fonction suprême. Il est vrai que le Parti Démocrate a traficoté dans l’irréel pendant des années, depuis l’opération Crossfire Hurricane [enquête du FBI sur les liens de Trump avec la Russie] jusqu’à l’UkraineGate – avec un petit détour du côté des transsexuels dans les sports féminins – mais toutes ces  cabrioles n’étaient que des arnaques à l’ancienne. Joe Biden pour Président est une supercherie du calibre « Le Roi n’est plus nu », qui exige des partisans ayant tellement mariné dans la fiction qu’ils ne pourraient même pas faire la différence entre un feu rouge et un feu vert.

Il faut donc se demander : à quoi jouent-ils ? Dans les semaines qui ont précédé l’éclosion de la Covid-19, le jeu consistait apparemment à se débarrasser de Bernie Sanders pour satisfaire les multinationales qui sponsorisent le parti, celles-ci n’étant pas trop motivées pour soutenir quelqu’un qui promettait de confisquer leurs sacs de billes. Ironiquement, la Covid-19 n’a fait que renforcer l’argument de Bernie selon lequel le système de santé national, vicié au delà de tout, exige une réforme radicale. En ce moment, vous pourriez facilement imaginer un scénario dans lequel le vieux Bernie surferait vers la victoire en novembre sur la base combinée de la pandémie et des chiffres du chômage, qui font passer la Grande Dépression pour une bonne affaire.

Choisir Joe Biden comme instrument pour bloquer Bernie semblait particulièrement stupide quelques semaines seulement après que le stratagème des Démocrates pour destituer Trump leur a explosé au visage, en jetant une lumière férocement révélatrice sur les aventures de Joe, et son fils Hunter, dans une escroquerie internationale. On peut facilement discerner la raison pour laquelle M. Biden est resté dans la course après cela, car le fait de s’être mis à l’abri en tant que candidat semblait le soustraire à toute enquête criminelle. Mais, pourquoi tout le parti a-t-il accepté de s’engager dans cette voie ?

Peut-être, parce que les « exploits » en Ukraine vers 2014 comprenaient un grand nombre de personnages du département d’État de Barack Obama – notamment le secrétaire d’État John Kerry – ainsi que l’ensemble du réseau international de George Soros, le tireur de ficelles agissant en coulisses, avec des liens vers les opérations malveillantes de Jeffrey Epstein – en bref, une boîte de Pandore si glissante et dégoûtante qu’elle fait passer le Parti Démocrate pour un égout originel dans lequel  Mère Nature se débarrasse des espèces spontanément avortées pour vice de fabrication. Note : rien de tout cela n’a encore été jugé et ne supposez pas qu’ils s’en tireront à si bon compte.

Ensuite, il y a l’accusation d’abus sexuel portée contre M. Biden par l’ex-membre de l’équipe dirigeante Tara Reade, qui prétend que le sénateur de l’époque l’a violée « manuellement » en 1993. Les rédacteurs du New York Times ont regardé ailleurs pendant deux semaines – trop occupés qu’il étaient à pousser leurs chansonnettes à endormir le public – avant de jeter un coup d’œil distrait sur  l’accusation, pour la rejeter immédiatement parce que, eh bien, euh, c’était comme… vous savez, là … juste au moment où, euh … où Roosevelt est arrivé avec… une chose, euh, qui, euh… vous savez, qui était totalement différente d’un…

Il n’y a vraiment que deux tactiques plausibles pour les Démocrates avec Joe Biden. La première est qu’il ne soit qu’un simple bouche-trou jusqu’à la convention – en supposant qu’elle puisse avoir lieu – où les gros bonnets du parti seront obligés de réparer leur erreur avec Joe Biden en bidouillant les règles de nomination, et devront trouver en urgence un remplaçant de dernière minute. La salvatrice présumée ne serait autre que Celle-dont-c’était-le-tour-en-2016 [Hillary Clinton], au motif qu’elle sait au moins comment figurer dans une campagne présidentielle, même si elle n’est pas très douée pour cela. Ils pourraient tout aussi bien donner à chaque délégué une tasse de kool-aid enrichi au cyanure lors de ce vote fatidique.

L’autre tactique assez évidente, apparemment en cours, consiste à associer M. Biden à un colistier qui pourra prendre ses fonctions vingt-trois minutes après la cérémonie d’investiture. Stacey Abrams, la « vraie gouverneure de la Géorgie » autoproclamée, qui a en fait perdu l’élection, mais qui a joliment dissipé ses illusions, mène une campagne acharnée pour la nomination de vice-présidente. N’est-ce pas là une belle carte de visite ?

Apparemment, voici un autre mémo que le Parti Démocrate n’a pas reçu : l’Amérique n’a plus de temps à perdre avec la politique sur l’identité de genre. Il y a des choses plus importantes dont il faut s’occuper, par exemple le fait qu’un grand nombre de personnes se couchent le ventre vide, sont chassées de chez elles, puis vivent … ou meurent. Des petites choses comme ça, vous voyez ? Pour l’instant, les États-Unis n’ont plus une économie viable. Comme une grande partie du reste du monde. Croyez-moi, c’est un problème. Et contrairement à la démence de M. Biden, il n’est pas question de ne pas s’en apercevoir.

Too much magic : L'Amérique désenchantéeJames Howard Kunstler

Pour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.

Traduit par Hervé, relu par jj, pour le Saker Francophone

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