Par Andre Vltchek – Le 25 avril 2016 – Source Le Saker océanien
Ils se sont réunis à Hiroshima, au Japon, dans la première ville sur terre qui ait été soumise au génocide nucléaire. Ils représentaient quelques-uns des pays les plus puissants de la terre : le Canada, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis – ce qu’on appelle le Groupe des Sept (G7). Et à la fin de leur rencontre, ils ont appelé à «un monde sans armes nucléaires».
Je parle des ministres des Affaires étrangères des sept pays dont les économies sont les plus puissantes sur la terre.
Lisez attentivement les noms de ces pays, un par un ! Pendant des décennies et des siècles, le monde a tremblé en imaginant leurs armées et leurs entreprises. Les fouets maniés par leurs dirigeants coloniaux ont laissé des cicatrices à des continents entiers, des dizaines de millions de gens ont été réduits en esclavage, des centaines de millions ont été tués, et des milliards ont été volés.
Même aujourd’hui, si nous écoutons attentivement, nous pouvons entendre clairement les hurlements des victimes à l’agonie : les peuples premiers du Canada et des États-Unis, les peuples colonisés d’Afrique, d’Asie et du Moyen-Orient. Pendant des siècles, le monde entier a été enchaîné, à genoux, humilié, pillé et détruit.
G7 ! Combien de milliards de victimes de tous les endroits du monde ont rendu ces pays si grands ?
Pour s’assurer que le pillage puisse continuer sans interruption, l’Occident, avec ses Blancs d’honneur (un terme inventé par le régime d’apartheid d’Afrique du Sud, exclusivement pour les Japonais), a créé plusieurs pactes agressifs et belliqueux, y compris l’Otan, les nommant, évidemment, des alliances défensives. Ce n’est guère surprenant : souvenez-vous que dans le vocabulaire de l’Empire des mensonges, la guerre s’appelle paix, tandis que l’agression est toujours définie comme défense. Mais j’ai déjà décrit ceci en détail dans mon livre de 820 pages, Exposing Lies of the Empire [Exposer les mensonges de l’Empire].
Maintenant, les tsars de la politique étrangère du G7 se tenaient, épaule contre épaule, à Hiroshima, parmi tous les endroits possibles, et seulement quelques jours après le 71e anniversaire de l’explosion nucléaire. Faisant des déclarations prévisibles et tenant des discours à leur propre gloire.
Le temps était beau, légèrement ensoleillé, avec une visibilité excellente. Mais le monde était-il vraiment capable de percer le brouillard épais de cynisme et de mensonges machiavéliques répandu sur toute la planète par ces souriants dirigeants du monde ?
Le 11 avril 2016, les ministres des Affaires étrangères du Groupe des Sept (G7) ont publié une déclaration écrite sur le désarmement nucléaire :
«Nous réaffirmons notre engagement à rechercher un monde plus sûr pour tous et à créer les conditions pour un monde sans armes nucléaires d’une manière qui favorise la stabilité internationale.»
Sérieusement ? Personne de ceux qui entouraient ces ministres ne s’est écroulé ; personne n’a été vu se roulant par terre, secoué par un rire irrépressible. À l’évidence, une blague répétée des milliers de fois perd de son éclat.
Mais ce n’est pas tout. Le texte de la déclaration poursuit :
«Cette tâche est rendue plus complexe par la détérioration de la sécurité dans un grand nombre de régions comme la Syrie ou l’Ukraine et, en particulier, par les provocations répétées de la Corée du Nord.»
De quoi parlions-nous exactement ? Qu’y avait-il entre les lignes ? Nous disait-on que les États-Unis ont besoin de la totalité de leurs 6970 engins nucléaires, pour s’opposer à la Syrie et à la Corée du Nord, tout en soutenant le régime fasciste en Ukraine ?
Seulement pour mettre les choses en perspective : deux pays communistes avec capacité atomique ont des stocks d’armes nucléaires tout à fait négligeables comparées à l’Occident et au G7. La Chine en a 260 et la Corée du Nord (RPDC) approximativement 15. Pour comparer, la France en a 300 et le Royaume-Uni 215.
En 2016, la population de la Chine se monte à 1.382 millions, tandis que celle de la France est de moins de 65 millions. La Chine a 21 fois plus de gens à défendre mais, malgré cela, la France a plus d’armes nucléaires.
La comparaison est encore plus ridicule entre la Corée du Nord et le Royaume-Uni.
Les chiffres cités ci-dessus sont les dernières statistiques officielles, tirées du World Nuclear Weapons Stockpile Report [Rapport sur l’arsenal nucléaire mondial], mis à jour pas plus tard que le 2 mars 2016.
Il serait également opportun de rappeler que la Corée du Nord n’a jamais envahi un pays étranger. La Chine (RPC) non plus ; à part deux brefs affrontements frontaliers, elle n’a jamais été engagée dans un conflit armé à large échelle. Pas une fois elle n’a colonisé ou détruit un pays étranger. Tandis que la France et le Royaume-Uni ont pillé sur tous les continents de la planète, pendant des siècles. Plus tard, au XXe siècle, les États-Unis ont repris les rênes de l’impérialisme des mains des anciens empires coloniaux traditionnels.
Un passage de la déclaration est en effet correct : il y a une détérioration de la sécurité dans un grand nombre de régions, mais seulement due aux agressions, tant secrètes que directes, de l’Otan et des pays du G7.
Mais il serait encore plus honnête de déclarer : «Nous sommes désolés, nous ne pouvons vraiment pas désarmer, parce que si nous le faisions, il deviendrait beaucoup plus difficile de piller et de contrôler le monde.»
Comme Reuters l’a rapporté:
Les ministres des Affaires étrangères du Groupe des Sept (G7) pays économiquement les plus avancés, ont déclaré qu’ils étaient fermement opposés à la provocation en mer de Chine orientale et méridionale, où la Chine est enfermée dans des conflits territoriaux avec plusieurs pays, dont les Philippines, le Vietnam et le Japon… Lundi dernier, les ministres des Affaires étrangères du G7 ont dit, après leur réunion dans la ville japonaise de Hiroshima, qu’ils étaient opposés à «toute action d’intimidation coercitive ou provocatrice unilatérale, qui pourrait modifier le statu quo et accroître les tensions».
Les États-Unis appliquent habituellement cette bonne vieille stratégie britannique du diviser pour régner. En Asie, ils utilisent leurs États clients, particulièrement les Philippines, le Japon et la Corée du Sud, pour isoler et provoquer la Chine et la RPDC. Cette politique est si dangereuse, que beaucoup ici pensent que cela pourrait finalement déclencher la Troisième Guerre mondiale.
Cette fois, la Chine a riposté presque immédiatement. Lors d’une conférence de presse, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Lu Kang, a déclaré :
«Si le G7 veut continuer à jouer un rôle majeur dans le monde, il devrait s’attacher à la recherche de la vérité sur la base des faits, pour traiter les questions qui préoccupent le plus la communauté internationale en ce moment.»
Le renforcement des capacités militaires occidentales dans la région Asie-Pacifique, les manœuvres militaires menées conjointement par les États-Unis et la Corée du Sud, ainsi que la militarisation continuelle du Japon, sont certainement quelques-uns des sujets qui font que la plus grande partie du continent asiatique est à la fois préoccupé et effrayé.
C’était prévisible, la RPDC est restée le principal punching ball du G7. Les ministres n’ont jamais expliqué exactement pourquoi le monde devrait être pétrifié par la Corée du Nord. Une telle peur devrait apparemment être tenue pour acquise, en particulier après les longues décennies d’intense et vicieuse propagande occidentale et sud-coréenne.
Mais revenons à la déclaration des ministres :
«Nous condamnons avec la plus grande fermeté l’essai nucléaire du 7 janvier et le lancement de missiles balistiques les 7 février, 10 mars et 18 mars pratiqués par la Corée du Nord. Il est profondément à déplorer que la Corée du Nord ait procédé à quatre essais nucléaires au XXIe siècle.»
Bien sûr, construire des défenses contre les agressions conjointes de l’Otan et du G7 est un crime absolument déplorable, qui mérite la peine capitale !
Sans vergogne, après avoir répandu ces toxines verbales, les sept ministres se sont rendus sur les lieux du monument et du musée dédiés aux victimes de la bombe A d’Hiroshima.
Le ministre japonais des Affaires étrangères Fumio Kishida emmenait le peloton. Sous la conduite étrange de son gouvernement, le Japon a fait absolument de son mieux pour trahir l’Asie et pour contrarier ses voisins. De la manière la plus servile et honteuse, il a totalement accepté les dictats occidentaux, accru le volume de sa propre propagande hystérique contre la Chine et la RPDC, et a commencé à renforcer son armée.
Pourquoi ? Seulement pour plaire à ses maîtres, ces Occidentaux, si nobles et supérieurs !
En ce moment, le Japon n’est même pas ce que son Premier ministre Shinzō Abe veut que le monde croie qu’il est : un pays conservateur dirigé par un gouvernement nationaliste.
Le Japon n’a pas de colonne vertébrale, exactement comme il n’a pas de politique étrangère. Il prend intégralement ses ordres aux États-Unis. Et comme un des employés de NHK me l’a dit plusieurs fois : «Aucun grand média au Japon n’oserait diffuser quelque chose d’important en relation avec les questions internationales, si ce n’est pas déjà apparu sur au moins une des grandes chaînes de télévision américaines.»
Si on regarde le passé du Japon, des nationalistes conservateurs, par exemple certains des plus grands écrivains comme Yukio Mishima, un homme qui a mis fin à ses jours en 1970 en pratiquant un suicide rituel, avaient coutume de protester contre la soumission sans complexe du Japon à l’égard de l’Occident. Le Premier ministre japonais est indubitablement un conservateur, mais est-il vraiment un nationaliste ? Il défend plus les intérêts de Washington que ceux de son propre pays. Peut-être que «Blanc d’honneur et l’un des dirigeants du G7» serait l’expression la plus appropriée pour le définir.
Maintenant, selon le site officiel de l’Otan : «Le Japon est le plus ancien partenaire de l’Otan dans le monde.»
C’est aussi un des pays qui ont le plus pillé sans vergogne le monde à travers leurs grandes entreprises brutales.
***
Et donc ils étaient là – sept ministres de quelques-uns des pays les plus agressifs sur la terre.
Ils se tenaient sur la pelouse qui a été, il y a plus de 70 ans, réduite en cendres seulement quelques secondes après l’explosion nucléaire.
Ils ont répété encore et encore à quel point ils aimeraient désarmer, combien ils aimeraient voir un monde libéré des armes nucléaires..
Ce qu’ils n’ont pas dit, c’est qu’ils ne désarmeraient jamais, volontairement.
Et ils n’ont jamais clarifié comment ils ont effectivement constitué ce club exclusif du G7 : par leur pillage effréné au cours de leur histoire coloniale, et par le pillage des entreprises mondiales aujourd’hui, ainsi que leurs investissements dans les mines et le pétrole. Et bien sûr grâce à l’ordre mondial imposé par la force et toutes sortes d’armes, nucléaires et conventionnelles, au reste de la planète.
Plutôt que Groupe des Sept, ce paquet devrait simplement s’appeler GH – Groupe de la Honte.
Les ministres sont restés un moment devant la flamme qui brûle devant le monument dédié aux victimes de la bombe A. Ils ont pris la pose devant les caméras. Ensuite ils sont partis, se sont assis à une table et ont rédigé la déclaration officielle sur le désarmement nucléaire, expliquant pourquoi ils ne peuvent pas renoncer à leurs instruments de coercition. Et cette déclaration s’est avérée n’être rien de plus qu’un nouveau tissu de mensonges !
Andre Vltchek
L’article original est paru sur CounterPunch
Traduit par Diane, vérifié par Wayan, relu par Diane pour le Saker francophone
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