La pénurie alimentaire approche à grand pas


Par William Engdahl – Le 26 avril 2022 – New Eastern Outlook

Il commence à être visible que certaines personnes mal intentionnées prennent délibérément des mesures pour garantir qu’une crise alimentaire mondiale se produise. Chaque mesure prise par les stratèges de l’administration Biden pour « contrôler l’inflation de l’énergie » nuit à l’approvisionnement ou gonfle le prix du gaz naturel, du pétrole et du charbon pour l’économie mondiale. Cela a un impact énorme sur les prix des engrais et la production alimentaire. Et cela a commencé bien avant l’Ukraine. Aujourd’hui, des informations circulent selon lesquelles les hommes de Biden sont intervenus pour bloquer le transport ferroviaire d’engrais au moment le plus critique pour les plantations de printemps. Dès cet automne, les effets seront explosifs.

Alors que les semis de printemps aux États-Unis sont dans leur phase critique, CF Industries de Deerfield, dans l’Illinois, le plus grand fournisseur américain d’engrais azotés ainsi que d’un additif vital pour les moteurs diesel, a publié un communiqué de presse indiquant que « Ce vendredi 8 avril 2022, l’Union Pacific a informé sans préavis CF Industries qu’il demandait à certains expéditeurs de réduire le volume de wagons privés sur chemin de fer avec effet immédiat. » Union Pacific est l’une des quatre grandes compagnies ferroviaires qui transportent ensemble environ 80 % de tout le fret ferroviaire agricole américain. Le PDG de la société CF, Tony Will, a déclaré : « Cette action de l’Union Pacific ne pouvait pas tomber à un pire moment pour les agriculteurs. Non seulement les engrais seront retardés par ces restrictions d’expédition, mais les engrais supplémentaires nécessaires pour effectuer les applications de printemps risquent de ne pas pouvoir être acheminés du tout aux agriculteurs. En imposant cette restriction arbitraire à une poignée d’expéditeurs seulement, l’Union Pacific met en péril les récoltes des agriculteurs, ce qui augmentera le coût des aliments pour les consommateurs. » CF a lancé des appels urgents à l’administration Biden pour qu’elle remédie à la situation, sans qu’aucune action positive n’ait été entreprise jusqu’à présent.

Sabotage direct

CF Industries a fait remarquer qu’elle était l’une des trente entreprises soumises à cette mesure sévère, qui n’est pas limitée dans le temps. Elle expédie ses produits via les lignes ferroviaires de l’Union Pacific, principalement à partir de son complexe de Donaldsonville en Louisiane et de son complexe de Port Neal en Iowa, pour desservir les principaux États agricoles, notamment l’Iowa, l’Illinois, le Kansas, le Nebraska, le Texas et la Californie. L’interdiction touchera les engrais azotés tels que l’urée et le nitrate d’ammonium uréique (UAN), ainsi qu’un additif diesel, le DEF (appelé AdBlue en Europe). Le DEF est un produit de contrôle des émissions exigé aujourd’hui pour les camions diesel. Sans lui, les moteurs ne peuvent pas fonctionner. Il est fabriqué à partir d’urée. CF Industries est le plus grand producteur d’urée, d’UAN et de DEF en Amérique du Nord, et son complexe de Donaldsonville est la plus grande installation de production de ces produits en Amérique du Nord.

Dans le même temps, la bande à Biden a annoncé un faux remède aux prix record de l’essence à la pompe. Washington a annoncé que l’EPA autoriserait une augmentation de 50 % du mélange de carburant à base de biodiesel et d’éthanol de maïs pour l’été. Le 12 avril, le secrétaire à l’agriculture a annoncé une initiative « audacieuse » de l’administration américaine visant à accroître l’utilisation des biocarburants à base de maïs et d’éthanol produits dans le pays. Le secrétaire d’État Tom Vilsack a affirmé que cette mesure permettrait de « réduire les prix de l’énergie et de lutter contre la hausse des prix à la consommation causée par la hausse des prix de Poutine (sic) en exploitant l’avenir solide et brillant de l’industrie des biocarburants, dans les voitures et les camions ainsi que dans les secteurs ferroviaire, maritime et aérien, et en soutenant l’utilisation du carburant E15 cet été ».

Seulement la « hausse des prix de Poutine » n’est pas le résultat d’actions russes, mais des décisions politiques de Washington pour une énergie verte impliquant l’abandon progressif du pétrole et du gaz. L’inflation des prix de l’énergie est également sur le point d’augmenter considérablement dans les mois à venir en raison des sanctions économiques américaines et européennes contre l’exportation du pétrole et du gaz russe. Cependant, le point central est que chaque acre de terre agricole américaine consacrée à la culture du maïs pour les biocarburants retire cette production de la chaîne alimentaire, pour la brûler comme carburant. Depuis l’adoption, en 2007, de la loi américaine sur les normes en matière de carburants renouvelables (Renewable Fuel Standards Act), qui imposait des objectifs de production de maïs destinés à la fabrication de mélanges d’éthanol augmentant chaque année, les biocarburants ont accaparé une part considérable de la superficie totale consacrée au maïs, soit plus de 40 % en 2015. Cette évolution, imposée par la loi, vers la combustion du maïs comme carburant a entraîné une inflation majeure des prix des denrées alimentaires bien avant le début de la crise inflationniste. Les États-Unis sont de loin le plus grand producteur et exportateur de maïs au monde. Le fait de rendre obligatoire une augmentation significative de l’éthanol de maïs comme carburant à un moment où les prix des engrais sont astronomiques et où les transports ferroviaires d’engrais sont bloqués, semble-t-il, par des ordres de la Maison Blanche, va faire exploser les prix du maïs. Washington le sait très bien. C’est délibéré.

Il n’est pas étonnant que le prix du maïs américain ait atteint son plus haut niveau depuis 10 ans à la mi-avril, alors que les exportations de la Russie et de l’Ukraine, sources majeures, sont désormais bloquées par les sanctions et la guerre. Outre l’utilisation inefficace du maïs américain pour l’approvisionnement en biodiesel, la dernière initiative de Biden sur l’éthanol ne fera qu’aggraver la crise alimentaire croissante tout en ne faisant pas baisser les prix de l’essence aux États-Unis. Le maïs fourrager américain est principalement utilisé pour l’alimentation du bétail, des porcs et de la volaille, ainsi que pour l’alimentation humaine. Cette commande cynique de biocarburants n’a rien à voir avec l’« indépendance énergétique » des États-Unis. Biden y a mis fin dès les premiers jours de son mandat par une série d’interdictions de forages pétroliers et gaziers et de pipelines dans le cadre de son programme « zéro carbone ».

Dans ce qui est clairement en train de devenir une guerre de l’administration américaine contre l’alimentation, la situation est aggravée de façon dramatique par les demandes de l’USDA aux éleveurs de poulets de tuer des millions de poulets dans maintenant 27 États, prétendument pour des signes d’infection par la grippe aviaire. Le « virus » H5N1 de la grippe aviaire a été révélé en 2015 comme étant un canular complet. Les tests utilisés par les inspecteurs du gouvernement américain pour déterminer la grippe aviaire sont maintenant les mêmes tests PCR non fiables utilisés pour le COVID chez les humains. Le test n’a aucune valeur à cet égard. Les responsables du gouvernement américain estiment que depuis que les premiers cas ont été « testés » positifs en février, au moins 23 millions de poulets et de dindes ont été abattus pour soi-disant contenir la propagation d’une maladie dont la cause pourrait être le confinement en cage incroyablement insalubre des poulets industriels de masse. Il en résulte une forte augmentation du prix des œufs de quelque 300 % depuis novembre et une grave perte de sources de protéines de poulet pour les consommateurs américains, à un moment où l’inflation du coût de la vie global n’a jamais été aussi élevée depuis 40 ans.

Pour aggraver la situation, la Californie et l’Oregon déclarent à nouveau l’urgence en matière d’eau dans le cadre d’une sécheresse pluriannuelle et réduisent fortement l’eau d’irrigation des agriculteurs californiens, qui produisent la majeure partie des fruits et légumes frais américains. Cette sécheresse s’est depuis étendue à la plupart des terres agricoles situées à l’ouest du fleuve Mississippi, c’est-à-dire à une grande partie des terres agricoles américaines.

La sécurité alimentaire des États-Unis n’a jamais été aussi menacée depuis le Dust Bowl des années 1930, et le « programme vert » de l’administration Biden fait tout pour aggraver l’impact sur ses citoyens.

Dans des commentaires récents, le président américain Biden a fait remarquer, sans élaborer, que les pénuries alimentaires aux États-Unis « vont être réelles ». Son administration reste également sourde aux appels des organisations d’agriculteurs à autoriser la mise en culture de quelque 4 millions d’acres de terres agricoles dont on a ordonné l’abandon pour des « raisons environnementales ». Cependant, ce n’est pas la seule région du monde où la crise alimentaire se développe.

Un désastre mondial

Ces actions délibérées de Washington se déroulent à un moment où une série de catastrophes alimentaires à l’échelle mondiale crée la pire situation en matière d’approvisionnement alimentaire depuis des décennies, voire depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Dans l’UE, qui dépend fortement de la Russie, du Belarus et de l’Ukraine pour ses céréales fourragères, ses engrais et son énergie, les sanctions aggravent considérablement les pénuries alimentaires provoquées par le Covid. L’UE utilise son stupide programme vert comme excuse pour interdire au gouvernement italien d’ignorer les règles européennes limitant les aides d’État aux agriculteurs. En Allemagne, le nouveau ministre de l’agriculture du parti vert, Cem Özdemir, qui veut éliminer progressivement l’agriculture traditionnelle, prétendument pour ses émissions de « gaz à effet de serre », a répondu froidement aux agriculteurs qui veulent cultiver davantage. L’UE est confrontée aux mêmes menaces désastreuses pour la sécurité alimentaire que les États-Unis et à une dépendance encore plus grande vis-à-vis de l’énergie russe, qui est sur le point d’être de manière suicidaire sanctionnée par l’UE.

Les principaux pays producteurs de denrées alimentaires d’Amérique du Sud, en particulier l’Argentine et le Paraguay, sont en proie à une grave sécheresse attribuée à une anomalie périodique, La Niña, dans le Pacifique, qui a paralysé les cultures dans cette région. Les sanctions contre les engrais du Belarus et de la Russie menacent les cultures du Brésil, aggravées par les goulets d’étranglement dans le transport maritime.

La Chine vient d’annoncer qu’en raison de fortes pluies en 2021, la récolte de blé d’hiver de cette année pourrait être la pire de son histoire. Le PCC a également institué des mesures sévères pour inciter les agriculteurs à étendre leurs cultures à des terres non agricoles, sans grand effet. Selon un rapport d’Erik Mertz, observateur de la Chine, « dans les provinces chinoises de Jilin, Heilongjiang et Liaoning, les autorités ont signalé qu’un agriculteur sur trois ne dispose pas de suffisamment de semences et d’engrais pour commencer à planter pour la période optimale du printemps… Selon des sources dans ces régions, ils sont bloqués dans l’attente de semences et d’engrais qui ont été importés en Chine depuis l’étranger – et qui sont bloqués dans les cargos au large de Shanghai ». Shanghai, le plus grand port à conteneurs du monde, est soumis à une étrange quarantaine totale « Zéro Covid » depuis plus de quatre semaines, sans que l’on puisse en voir la fin. Dans une tentative désespérée du PCC d’« ordonner » une augmentation de la production alimentaire, les responsables locaux du PCC dans toute la Chine ont commencé à transformer des terrains de basket et même des routes en terres cultivables. La situation alimentaire en Chine oblige le pays à importer beaucoup plus à une époque de pénurie mondiale, ce qui fait grimper encore plus les prix mondiaux des céréales et des aliments.

L’Afrique est également gravement touchée par les sanctions imposées par les États-Unis et par la guerre qui met fin aux exportations de nourriture et d’engrais venant de Russie et d’Ukraine. Trente-cinq pays africains s’approvisionnent en nourriture en Russie et en Ukraine. Vingt-deux pays africains importent des engrais de ces pays. Les alternatives font cruellement défaut alors que les prix s’envolent et que l’offre s’effondre. La famine est annoncée.

David M. Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial des Nations unies, a déclaré récemment à propos des perspectives alimentaires mondiales : « Il n’y a pas eu de précédent, même proche, depuis la Seconde Guerre mondiale. »

Notamment, c’est le département du Trésor de Biden qui a dressé une liste des sanctions économiques les plus complètes contre la Russie et la Biélorussie, faisant pression sur une UE complaisante pour qu’elle suive consciencieusement, sanctions dont l’impact sur l’approvisionnement et les prix mondiaux des céréales, des engrais et de l’énergie était entièrement prévisible. Il s’agissait en fait d’une sanction contre les États-Unis et l’économie mondiale.

Ce ne sont là que les derniers exemples du sabotage délibéré de la chaîne alimentaire par le gouvernement américain dans le cadre du programme vert de Biden, du WEF de Davos, de Bill Gates et de la Fondation Rockefeller, dans le cadre de leur programme eugénique dystopique de Grande Réinitialisation. L’agriculture traditionnelle doit être remplacée par un régime synthétique cultivé en laboratoire, composé de fausses viandes et de protéines provenant de sauterelles et de vers, dans le monde entier. Tout cela pour la gloire supposée de contrôler le climat mondial. C’est complètement dingue.

William Engdahl

Note du Saker Francophone

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Traduit par Wayan pour le Saker Francophone

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