Par Tom Luongo – Le 24 Juillet 2021 – Source Gold Goats’n Guns
Depuis plus de six ans, tous ceux qui occupent une position politiquement sensible en Europe et aux États-Unis se tordent les mains au sujet du gazoduc Nordstream 2. Dès son annonce, les hurlements de douleur ont été entendus dans le monde entier.
Ces cris étaient ceux de personnes qui s’étaient enrichies grâce au statu quo et qui réalisaient que leur train de vie était terminé.
Maintenant que le projet est pratiquement achevé et que la saga touche à sa fin, nous avons un faible accord entre tous les grands partis pour maintenir une partie de ce train de gratification. La chancelière allemande Angela Merkel et Joe Biden ont finalement enterré la hache de guerre concernant Nordstream 2.
Mais la réalité était que Nordstream 2 allait de toute façon être achevé. Je n’ai jamais changé d’avis à ce sujet.
Les raisons étaient innombrables.
Les Allemands ont besoin de gaz.
Les Allemands voulaient une autre matraque politique à utiliser sur la Pologne et les pays baltes récalcitrants.
Les Allemands ont besoin du gaz.
L’ancien chancelier allemand Gerhard Schroeder est membre du conseil d’administration du consortium Nordstream 2 qui a conclu l’accord.
Oh, et les Allemands ont besoin du gaz.
Ce n’était pas une série d’équations difficiles à résoudre ici. Les principaux acteurs sont la Russie, l’Ukraine, l’Allemagne, les États-Unis. Quels besoins sont satisfaits par Nordstream 2 ? Ceux de l’Allemagne. Qui contrôle l’UE ? Le forum de Davos, par l’intermédiaire de l’Allemagne. Qui a besoin d’une énergie relativement bon marché pour empêcher les révoltes populaires de renverser les grands gouvernements ? Le Davos.
En fin de compte, l’économie et la réalité des incitations positives contraignent toujours les personnes déterminées à retenir la marée par la réglementation et les clés de bras créant des incitations perverses. Croyez-moi, il y a là une leçon plus globale que Nordstream 2 pour toutes les parties concernées.
En ce qui concerne le gazoduc lui-même, le principal point d’achoppement pour de nombreuses personnes aux États-Unis était une combinaison de la politique de la guerre froide consistant à refuser à la Russie tout nouveau gazoduc vers l’Europe et d’un enrichissement personnel dû au transit du gaz ukrainien.
Mais les événements de la dernière décennie et l’existence de Nordstream 1 ont vu la dynamique de cette relation changer radicalement.
Il est clair que les États-Unis ne contrôlent pas les rênes de la politique énergétique européenne, et ce depuis longtemps.
Le forum du Davos contrôle la politique américaine concernant l’Europe et presque tout le reste à ce stade, en particulier avec Biden qui se sporifie à la Maison Blanche et Obama qui tire toutes les ficelles en coulisse.
Cette politique anti-pipeline était puissante lorsque les États-Unis étaient maîtres de leurs relations avec l’Europe. Trump a tenté de réaffirmer la domination des États-Unis sur l’Europe et a commencé à y parvenir. Mais Merkel et d’autres ont simplement attendu la fin de son mandat, espérant que leur ingérence incessante dans sa présidence l’affaiblirait.
Compte tenu de l’époque, de l’excellent instinct médiatique de Trump et de son refus d’être publiquement humilié, il n’a fait que se renforcer. Ils ont donc dû le déposer de la manière la plus brutale qu’on puisse imaginer. Cependant, son opposition à Nordstream 2 a forcé beaucoup de gens à se révéler au sujet de leur corruption en Ukraine. Le Davos a fait appel à presque tous les experts qu’ils avaient pour enterrer la corruption de Hunter Biden.
En même temps, Hunter n’était rien d’autre qu’une distraction pour empêcher les gens de regarder plus attentivement du côté de Mitt Romney, la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi et Adam Schiff, qui ont tous intérêt à ce que l’Ukraine continue à faire transiter du gaz par les vieux pipelines soviétiques qui fuient.
La raison pour laquelle Nordstream 2 a été achevé est que le Davos a finalement accepté le fait qu’il ait perdu en Ukraine. C’est l’objet du sommet Biden/Poutine (entre autres choses).
Par le passé, lorsque le Davos avait les yeux rivés sur l’Ukraine pour l’arracher à la Russie par une terrible offre d’adhésion à l’UE en 2013, les nouveaux pipelines vers l’Europe étaient activement bloqués, par exemple Southstream. La politique américaine de la guerre froide et leurs objectifs convergeaient.
Dans le cas de SouthStream, les États-Unis ont été présentés comme le méchant, exerçant la pression finale sur la Bulgarie pour qu’elle arrête le projet. En réalité, l’UE n’a cessé de modifier les règles applicables à Gazprom pour garder constamment la main sur la réglementation et l’utiliser pour dicter les prix une fois qu’elle aurait mis en place son monopsone.
C’était du moins le plan.
Lorsque ce plan a échoué et que Poutine a annulé Southstream, refusé l’entrée de l’Ukraine dans l’UE – ce que l’ancien président Viktor Ianoukovytch n’a jamais voulu faire – et bloqué la prise de contrôle totale du pays en soutenant l’indépendance du Donbass et de la Crimée, Nordstream 2 a été mis en vente.
C’était un geste désespéré. Purement et simplement.
Gazprom avait désormais tous les atouts en main dans les nouvelles négociations sur le transit du gaz en Ukraine. Poutine a gelé le conflit en Ukraine. L’accord actuel sur le transit du gaz est entièrement en faveur de Gazprom. Il le sera à nouveau en 2024, lorsqu’il prendra fin.
Cette réalité a forcé le Davos à soutenir l’Allemagne sur le gazoduc, sinon l’Allemagne ne serait plus en mesure de gérer son économie et de s’en servir comme levier pour régner sur le reste de l’Europe. Le contrôle du Davos sur l’Europe repose sur la force économique et politique de l’Allemagne au sein du bloc. C’est un fait. Sans cela, l’UE se diviserait rapidement.
C’est pourquoi Trump était un réel problème. Une fois qu’il a été écarté et que l’ordre a été rétabli de leur point de vue, ils ont fait une dernière tentative pour tester la détermination de la Russie en Ukraine. Ils ont obtenu un « Nyet » russe ferme, voire sévère, et ont ensuite envoyé Biden à Genève pour demander la paix après avoir donné l’impression qu’il n’allait pas céder.
Et cette paix était un moyen de sauver la face en sortant de la pagaille en Ukraine ; l’« accord » de sauvetage qui permet aux États-Unis de faire croire qu’ils ont forcé l’Allemagne à dédommager l’Ukraine pour d’éventuelles futures pertes de revenus, accord conclu par Merkel, le canard boiteux, et Biden, cette semaine.
L’accord est une blague. Les gars de The Duran l’ont magnifiquement couvert hier soir. Ce n’est rien d’autre qu’une caisse noire pour s’assurer que quelques milliards de dollars continuent à circuler entre les mains des bonnes personnes, tout en ayant le vernis politique d’un investissement dans l’énergie « verte » en Ukraine pour apaiser la population locale.
Il s’agit d’un accord typiquement cynique de la part de Mme Merkel, qui jette encore plus l’Ukraine sous le bus, tente de menacer la Russie de quelque chose que l’Allemagne ne fera jamais – ne pas lui acheter de gaz – et s’assure que les politiciens américains qui ont le plus à perdre sont à l’abri de toute investigation supplémentaire.
En réalité, comme l’a dit le vice-président de Gazprom, Alexander Medvedev, en 2018, toutes les querelles autour de Nordstream 2 sont stupides. L’Allemagne et l’Europe vont avoir besoin de Nordstream 3. Il y a beaucoup de demande de gaz en Europe pour tout le monde.
Et au cas où quelqu’un n’aurait pas regardé, les prix du gaz naturel signalent que nous sommes dans une situation qui va bien au-delà d’une simple hausse transitoire des prix de l’énergie.
Le gaz naturel devrait terminer le mois de juillet à plus de 4,00 $ par milliers de pieds cube (mcf) pour la première fois depuis le pic de froid de l’hiver 2018, qui a vu même les Britanniques, odieusement belliqueux, acheter des camions-citernes de gaz russe pour empêcher les gens de geler.
Les prix du gaz naturel n’ont pas été durablement au-dessus de 4,00 $ / mcf depuis 2014. Et cette flambée des prix se produit pendant l’été, et non en hiver, lorsque la demande de gaz est la plus forte. C’est encore une autre raison pour laquelle l’Allemagne ne pouvait tout simplement pas se permettre de perdre Nordstream 2.
Elle aura non seulement besoin de Nordstream 2 et probablement du 3, mais aussi de ces terminaux GNL que Merkel a promis à Trump pour l’inciter à renoncer au gazoduc. Trump, malgré tous ses défauts, comprenait assez bien Merkel pour savoir qu’elle ne lui offrait rien qu’elle ne soit déjà prête à faire.
La pression de Trump sur le projet posait un problème existentiel à l’Europe, étant donné la décision désastreuse de Merkel (et du Davos) d’arrêter toute énergie nucléaire en Allemagne. À l’avenir, l’UE sera un importateur massif d’énergie. Les gisements de gaz offshore des Pays-Bas et de la Norvège s’assèchent plus rapidement que quiconque voulait l’admettre jusqu’à récemment.
Et au cœur du Grand Reset du Davos se trouve l’imposition de leur nouveau communisme plus éclairé que celui des Slaves brutaux et des Chinois sous-humains. C’est cette arrogance eurocentrique et, franchement, ce racisme qui les anime.
Le fait est que la plupart des pays d’Europe vont devoir faire face à la réalité : leurs grands systèmes de protection sociale, dont on a fait croire à tant de jeunes Américains qu’ils étaient durables, sont en fait sous perfusion. Ils ont toujours été sous respirateur.
Et ce respirateur a été le pétrole et le gaz bon marché, produits localement, qui est en train de disparaître.
Pourquoi pensez-vous que le Davos est si hostile au pétrole et au gaz ? Cela n’a absolument rien à voir avec le changement climatique et le fait de sauver l’humanité d’elle-même. Ils détestent ce qu’ils n’ont plus. La leçon difficile à retenir pour beaucoup de Millennials et de Verts franchement stupides qui ne peuvent pas penser au-delà des effets de premier ordre est la même que celle à laquelle l’Union soviétique a dû faire face.
Le communisme ne fonctionne pas, même si on le subventionne à tour de bras par le biais des exportations d’énergie et que l’on distribue à tout le monde des « trucs gratuits » issus des bénéfices pour masquer les coûts. En bref, les incitations sont importantes. Les incitations perverses ne font qu’évider la classe productive, en termes marxistes, la bourgeoisie, et assurent l’effondrement de l’économie par l’incapacité de calculer rationnellement les coûts. Un type nommé Mises a découvert cela en 1922, et nous voilà un siècle plus tard à devoir expliquer les bases de l’action humaine encore et encore.
Et le Davos ne peut pas diriger sa nouvelle dystopie technocratique s’il n’a pas le contrôle du prix de l’énergie sur son territoire, l’Europe. L’Union soviétique a duré aussi longtemps grâce aux vastes réserves de pétrole et de gaz de la Russie. L’Europe tente de mettre en place une Union soviétique plus parfaite tout en faisant grimper en flèche les coûts réels de l’énergie.
Nous sommes dans la situation où des personnes se croient tellement intelligentes qu’elles se vendent les idées les plus stupides que l’on puisse imaginer.
Nordstream 2 permettra probablement à Gazprom d’abaisser le prix mondial du gaz, ce qui contribuera à compenser le système réglementaire désastreux de l’UE qui crée un désavantage structurel pour les entreprises allemandes. De plus, étant donné qu’elles sont piégées par des rendements nominaux négatifs et qu’elles cherchent désespérément à maintenir la façade d’un euro fort pour que les rendements de la dette souveraine restent bas, il n’y a aucun espoir ni aucune aide provenant de ce qui devrait être le flux et le reflux naturel des taux de change.
Donc, nous sommes entre le marteau et l’enclume. Quelque chose devait céder et, dans ce cas, les États-Unis ont renoncé à Nordstream 2 et le Davos va découvrir très bientôt que, peu importe le nombre de pattes que vous graissez, la quantité de Kompromat que vous générez sur des personnes importantes, les incitations perverses sont la cause première de tout échec organisationnel humain.
C’est probablement la leçon la plus difficile ici. Le Davos a fait exploser l’économie mondiale en vandalisant les classes moyennes du premier (et du deuxième) monde, en déréglant le cycle d’investissement en énergie, ce qui revient maintenant les hanter avec la hausse des prix et l’agitation publique.
Tom Luongo
Traduit par Zineb, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
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