La diabolisation de la diplomatie va trop loin


Par Sharon Tennison et James W. Carden – Le 3 mai 2021 –  Source ACURA

La semaine dernière, l’administration Biden a annoncé son intention de ne plus traiter les visas d’entrée aux États Unis pour la plupart des citoyens russes qui souhaitent visiter ce pays.  Du coup, l’ambassade à Moscou prévoit de réduire de 75% le personnel des conseillers travaillant à Moscou.

Nous accueillons cette décision avec une profonde consternation.

En déclenchant cette altercation, les États-Unis ont inutilement gâché l’occasion qu’a chaque nouvelle administration d’ouvrir un nouveau chapitre, plus productif, dans les relations américano-russes.

En fermant effectivement notre pays aux citoyens russes, nous choisissons d’être captifs d’une mentalité de guerre froide dépassée et inutile.

Cette hostilité permanente entre les superpuissances nucléaires met l’avenir de notre planète en grand danger.

Les occasions de faire des erreurs de calcul sont nombreuses : les États-Unis et la Russie disposent de milliers de têtes nucléaires dirigées l’un vers l’autre ; les forces militaires américaines et russes sont face à face sur les théâtres d’opérations en Europe de l’Est, en mer Noire, en mer Baltique et en Syrie.

Nous avons eu la chance de survivre à 40 années de guerre froide, au cours desquelles de nombreuses « fausses alertes » nucléaires auraient pu déclencher une dévastation nucléaire à l’échelle nationale, dans les deux pays.

Rappelez-vous que même au plus fort de la crise des missiles de Cuba, l’URSS et les États-Unis ont gardé leurs ambassadeurs en place. C’est une bonne chose qu’ils l’aient fait : le « back channel » que le procureur général Robert F. Kennedy avait établi avec l’ambassadeur soviétique Anatoly Dobrynin a été l’une des clés de la résolution pacifique de la crise.

Aujourd’hui, les ambassades de Washington et de Moscou n’ont plus d’ambassadeur, ce qui est un triste mais juste reflet de la façon dont nous en sommes venus à diaboliser et à déprécier le dur labeur de la diplomatie.

Nous devons faire mieux.

Pour briser la mentalité de guerre froide qui enserre les deux nations, nous demandons instamment :

  • Annuler la décision de réduire les services consulaires à Moscou.
  • La création d’un groupe de travail sur les services consulaires, avec pour objectif la réouverture des consulats russes fermés aux États-Unis (San Francisco, Seattle) et des consulats américains en Russie (Saint-Pétersbourg, Ekaterinbourg, Vladivostok).
  • Que les présidents Biden et Poutine créent une commission de haut niveau dirigée par le vice-président américain et le premier ministre russe afin de renouer et de rétablir les liens diplomatiques entre les États-Unis et la Russie.
  • Que cette commission adopte une approche « pan-gouvernementale », en établissant des groupes de travail au niveau ministériel qui chercheront à rétablir les relations et à ouvrir les échanges entre les peuples.
  • La création de groupes de travail dans les domaines de la santé publique, des sports et de l’éducation, de l’environnement, de la gestion des urgences, de la science, de la technologie et de l’espace.

Dans l’intervalle, les mesures ci-dessus constitueraient des étapes modestes, mais nécessaires, vers un règlement de l’après-guerre froide : Nous devons reconnaître que la crise en Ukraine ainsi que les efforts d’ingérence électorale ne se déroulent pas dans le vide.

Nous devons redoubler d’efforts pour surmonter la mentalité de guerre froide qui afflige les deux gouvernements en commençant par rétablir un minimum de confiance entre les deux superpuissances.

Une fois cette confiance établie, nous devons nous atteler à la tâche difficile d’une diplomatie sérieuse.

Sharon Tennison et James W. Carden

Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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