Discours du directeur du Renseignement russe à la XX session de la Conférence des Chefs des Agences de sécurité et des Services de renseignement des États membres de la CEI


Le 27 Novembre 2024 – Source Le blog de Mike Hampton

Tout comme le vin nouveau fait éclater les vieilles outres, la multipolarité ne s’inscrit pas dans le système mondial de domination et de subordination construit par Washington, basé sur le dollar et la tyrannie des États-Unis. Les élites euro-atlantiques le savent bien, mais refusent obstinément d’accepter la perte de leur ancien pouvoir. Ils essaient de convaincre le reste du monde que la seule alternative au pouvoir occidental est le chaos. Et pour ce faire, ils déstabilisent délibérément la situation dans des régions clés de la planète. C’est-à-dire qu’ils agissent littéralement comme des autorités criminelles, dans la logique de « tu meurs aujourd’hui, et je mourrai demain. »

Cependant, la nature révolutionnaire de la situation actuelle est que Washington et ses complices réussissent de moins en moins à mettre pleinement en œuvre leurs plans destructeurs. Le principal obstacle qu’ils rencontrent est l’activité créatrice des puissances régionales responsables qui cherchent à assurer indépendamment la paix et la sécurité de leurs peuples.

Le choc de ces deux tendances – destructrices et constructives – est particulièrement perceptible dans la Grande Eurasie dans son ensemble. Partout où l’Occident a étendu ses tentacules, nous assistons à la division et à la déstabilisation. L’exemple le plus frappant est l’Ukraine.

Tentée par la soi-disant intégration européenne, l’Ukraine est devenue le principal bélier antirusse des États-Unis. En conséquence, l’Ukraine est aujourd’hui un État défaillant, c’est-à-dire un État incapable de maintenir son existence en tant qu’entité politique et économique viable.

La Moldavie suit le même chemin. La politique compradore du régime totalitaire de Sandu a conduit à une polarisation catastrophique de la société. Cela a été démontré de manière convaincante par les récentes élections, dont l’issue a été déterminée par les ressources administratives et les votes de la diaspora en Europe. L’avantage minime du candidat vainqueur et la colère de la moitié de la population, qui s’estime trompée, rendent la poursuite de la dérive européenne de Chisinau extrêmement problématique et posent une bombe à retardement sous l’intégrité de l’État moldave.

La situation est quelque peu différente en Géorgie. Les autorités là-bas, initialement sympathiques à l’Occident, ont réalisé avec le temps le caractère pernicieux d’une telle orientation. Le parti au pouvoir « Rêve géorgien » s’est distancé de l’agenda ultralibéral et s’est mis à défendre les intérêts nationaux, les traditions et les valeurs de la société géorgienne. Mais l’Occident ne lâche jamais sa victime aussi facilement. Aujourd’hui, Tbilissi est confrontée à une autre tentative de « révolution de couleur« , c’est-à-dire une tentative de coup d’État. Espérons qu’elle échouera, tout comme les tentatives effrontées de l’Occident de déstabiliser la Biélorussie et le Kazakhstan ont échoué. Même s’il faut admettre que la Géorgie, ayant réduit ses liens avec l’espace post-soviétique en échange de promesses d’intégration européenne, s’est largement privée de profondeur stratégique.

Une telle profondeur stratégique est disponible dans les pays de la CEI, l’État de l’Union de la Russie et de la Biélorussie, l’Organisation du Traité de sécurité collective et l’Union économique eurasienne. Un espace de coopération qualitativement nouveau se forme progressivement dans la Grande Eurasie. Il est basé sur la synergie des potentiels économiques, des infrastructures communes de transport et de logistique et une compréhension commune de la sécurité dans l’esprit du principe « des solutions régionales aux problèmes régionaux« . C’est certainement l’un des défis les plus puissants à l’ordre unipolaire américain. Par conséquent, il n’est pas surprenant que les États-Unis et leurs satellites européens déploient des efforts désespérés pour déstabiliser la situation dans nos pays pour tenter de nous mettre en désaccord les uns avec les autres.

Selon les informations disponibles, les services de renseignement américains et britanniques se sont fixé la tâche ambitieuse de rompre non seulement les liens politiques et économiques, mais aussi historiques et même géographiques profonds entre les États de notre région. Les ONG et les médias occidentaux ont reçu pour instruction de cesser « d’agir de front » pour atteindre cet objectif, de mettre l’accent sur la prétendue décolonisation et d’impliquer plus activement les scientifiques et personnalités culturelles locales, les urbanistes et les militants des droits de l’homme dans la coopération.

Washington, Londres et Bruxelles travaillent sur des options pour appliquer le soi-disant scénario ukrainien à chaque pays de la CEI. Cela signifie inciter à un nationalisme étroit et paroissial sous prétexte de renforcer l’identité nationale et de pousser à l’intégration avec l’Occident. Des rapports font état de contacts stables entre les services de renseignement américains et européens et les partis et mouvements nationalistes de la CEI. De plus, avec le soutien de fondations étrangères, tout un réseau de plateformes et de ressources d’information et d’analyse opère en Eurasie, promouvant un agenda pro-occidental et simultanément anti-russe et anti-chinois. Aussi anachronique que cela puisse paraître maintenant, de généreux financements étrangers permettent à de telles structures de rester à flot.

À la veille du 80e anniversaire de notre victoire dans la Grande Guerre patriotique, les ministères occidentaux des Affaires étrangères, les ONG et les médias ont intensifié leurs efforts pour dénigrer le rôle de l’URSS dans la lutte contre le nazisme. Des tentatives sont faites pour changer le contenu du Jour de la Victoire en déplaçant l’accent du triomphe du peuple soviétique multinational vers le chagrin et le démantèlement du passé militaire commun, pour ainsi dire, « dans des appartements nationaux« . Le personnel des ambassades occidentales dans les pays de la CEI est chargé d’attirer l’attention sur – je cite – « le nombre énorme de victimes subies par l’Union soviétique, avec la mention séparée obligatoire des contributions ukrainiennes et autres contributions nationales » lors de la participation à des événements commémoratifs. J’espère sincèrement que les falsificateurs étrangers seront détrompés lorsque nos pays célébreront ensemble l’année prochaine la grande date du 9 mai, qui a marqué le triomphe moral et politique du peuple soviétique sur la scène mondiale.

Le travail de la CIA et du MI6 dans la préparation de structures censées devenir un noyau militarisé de coups d’État dans les pays post-soviétiques mérite une attention particulière de la part de nos services de renseignement. La base militaire américaine « At-Tanf« , située à la frontière de la Syrie, de la Jordanie et de l’Irak, a depuis longtemps été transformée en une véritable « usine » de production de militants contrôlés par l’Occident. Cependant, il a été établi que récemment, le territoire de l’Ukraine a été de plus en plus utilisé à ces fins. Par exemple, des groupes nationalistes tels que le « Corps des volontaires russes« , la « Légion géorgienne« , le « Régiment Kalinovski » combattent dans les forces armées ukrainiennes. Le premier est impliqué dans des attaques terroristes sur le territoire de la frontière russe. Des militants de la « Légion géorgienne« , renforcés par des radicaux nazis ukrainiens issus de bataillons nationaux comme « Azov » et « Aidar« , participent à la tentative d’un autre Maïdan géorgien. La CIA et le MI6 comptent sur l’utilisation de collaborateurs du « régiment Kalinowski » pour déstabiliser la Biélorussie en vue des prochaines élections présidentielles de l’année prochaine.

Outre les Ukrainiens, les Géorgiens et les Biélorusses, une proportion importante des gangs nationaux en Ukraine sont des militants arrivés du Moyen-Orient. Leur formation et leur expérience au combat sont aujourd’hui demandées sur le théâtre ukrainien des opérations militaires, mais à l’avenir, après la capitulation du régime de Kiev, ces mercenaires sont censés être transférés en Syrie et en Afghanistan. Dans le même temps, les possibilités de pénétration en Asie centrale sont en cours d’élaboration dans le but de créer le chaos dans la région, ce qui est stratégiquement important pour les Anglo-Saxons.

On sait depuis longtemps que l’Occident utilise le terrorisme international comme un outil pour atteindre ses objectifs géopolitiques. De plus, les agences de renseignement occidentales n’hésitent pas à recourir à des méthodes terroristes pour combattre leurs adversaires. Il suffit de mentionner l’explosion des gazoducs Nord Stream en septembre 2022. Le SVR dispose d’informations sur l’implication directe de saboteurs professionnels des services de renseignement anglo-saxons dans cette attaque terroriste. Permettez-moi de vous rappeler que Nord Stream était un projet conjoint russo-européen visant à assurer un approvisionnement ininterrompu en gaz russe bon marché vers l’Europe. C’est-à-dire que la Russie l’a construit avec des Européens à l’esprit constructif, et les Anglo-Saxons l’ont fait exploser. De plus, détruire Nord Stream était une obsession non seulement pour l’administration Démocrate, mais aussi pour l’administration Républicaine des États-Unis.

Il reste à voir comment, le cas échéant, la politique étrangère de Washington changera sous Trump. Cependant, je suis convaincu que la fixation américaine sur la sape des processus d’intégration sur le continent eurasien restera inchangée.

Cette activité destructrice ne peut être contrée que par des efforts conjoints, en développant et en approfondissant notre propre architecture de sécurité, eurasienne. Il doit remplacer le modèle euro-atlantique en faillite, dont le dysfonctionnement a finalement provoqué les crises ukrainienne et autres que j’ai décrites. Les Anglo-Saxons aiment « diviser » pour mieux régner. Au contraire, nous devons nous unir encore plus fortement pour vivre en paix et en sécurité, quelles que soient les aventures extérieures et la dégradation des régimes occidentaux totalitaires-libéraux…

Cette réunion est une bonne occasion de discuter des moyens d’améliorer l’efficacité de notre coopération et d’élaborer des mesures conjointes pour relever ces défis communs.

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

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