Par Pierre Audabram − Le 17 Avril 2020 − Source Solutions pour Demain
Bien avant le livre L’effondrement des sociétés complexes de Joseph A. Tainter, sorti en 2013, et qui a eu un succès planétaire auprès d’un public préoccupé par les incertitudes du lendemain, l’ouvrage de Roberto Vacca, datant de 1973, Demain le Moyen Âge a marqué les esprits de l’époque et le mien. L’histoire est basée sur un enchaînement de faits qui, en seulement quelques jours, font retourner les États-Unis au Moyen-Âge. Si je me souviens bien, Roberto Vacca était un haut responsable des services informatiques chargés de la distribution de l’énergie électrique. Et il était particulièrement angoissé par l’éventualité d’un accident pouvant survenir sur les lignes à très haute tension qui parcouraient la côte est du pays et dont il avait la charge. Ces lignes, véhiculant une énergie colossale, ne devaient en aucun cas être interrompues brusquement car, si cela arrivait, un système informatique excessivement complexe, se serait automatiquement mis en route pour assurer le déroutement de l’électricité vers d’autres réseaux aptes à la recevoir et la transmettre vers d’autres utilisateurs.
Selon l’auteur, ce système, une fois déclenché, nécessitait au moins une semaine de travail intense pour retrouver les sorties vers lesquelles l’énergie colossale aurait été distribuée. Donc, la fiction écrite par Roberto Vacca débute ainsi : nous sommes en hiver, un hiver très rude, et un avion de ligne vient s’écraser en pleine nuit sur la ligne de très haute tension qui dessert toute la côte est et, d’une seconde à l’autre, des régions immenses et très peuplées sont privées d’électricité. Les gens attendent patiemment tant que les immeubles et les gratte-ciels redistribuent la chaleur accumulée ; il se passe alors deux ou trois jours. Pendant ce temps, la distribution des stations-services étant paralysée, ce sont des milliers de voitures qui sont abandonnées au milieu des rues et des routes, en panne d’essence. Mais le froid intense finit par arriver dans les habitations. N’y tenant plus, les plus imprudents ramassent ce qu’ils peuvent, cartons, vieux meubles, etc. et allument des feux au milieu de leur salon, et ce qui doit arriver arrive : des immenses incendies d’immeubles jaillissent un peu partout sur un très large territoire. Les sapeurs-pompiers, bloqués par les véhicules en panne, mais également à court de carburant, ne peuvent intervenir. Les victimes sont innombrables, les gens descendent dans les rues à la recherche de secours et n’en trouvent pas. Les circuits de distribution de nourriture sont également interrompus et, devant la famine qui menace, tout cela en moins d’une semaine, des bandes de malfaiteurs attaquent tout ce qui peut être attaqué et c’est la panique totale ; je vous laisse imaginer la suite : au dixième jour, le pays le plus puissant de la planète se retrouve dans une situation qui ressemble beaucoup aux pires heures du Moyen-Âge. Tout cela à cause d’un seul avion tombé sur une ligne électrique ! Il ne s’agissait, dans ce cas, que de la présence d’un seul facteur de risque.
Qu’en est-il aujourd’hui, pour nous ? Combien de facteurs de risques devons-nous affronter simultanément ? Vous aurez compris que notre situation est loin d’être brillante, tellement loin qu’elle est tout simplement calamiteuse et catastrophique. Laissez-moi énumérer : d‘abord l’élément déclencheur, le fameux coronavirus dont peu de gens sur la planète soupçonnaient la grande dangerosité ; puis une économie globale déjà à genoux avant la pandémie, à cause des manœuvres toujours plus tordues du monde accapareur de la finance et de la politique. Des dizaines de milliers d’entreprises obligées de fermer leur porte temporairement, mais dont bon nombre d’entre elles ne rouvriront pas, incapables de faire face aux charges accumulées et confrontées à des marchés encore désertés pour longtemps. Mais ce n’est pas tout, loin de là ! A cause de la paralysie où se trouve encore plongée la Chine, l’usine du monde, les circuits de distribution ne pourront retrouver une certaine efficacité qu’au bout d’une assez longue période. Ajoutez à cela un nombre bien trop important de personnes n’ayant plus de revenus et qu’il faudra assister, en plus de celles qui dépendent depuis trop longtemps des largesses infinies de l’État, et la banqueroute n’est vraiment pas loin. La suite, pas inévitable certes, mais néanmoins très probable, pourrait fort bien ressembler à ce qui est décrit à la fin du roman de fiction de Roberto Vacca : le Moyen-Âge, ou quelque chose qui y ressemble. Préparez-vous !
Tour d’horizon économique
A aucune période de l’histoire, même au cours des pires guerres, le monde ne s’était arrêté de tourner. C’est vraiment une première dont nous ne sommes pas encore en mesure de juger de la gravité puisque nous ne disposons d’aucun élément de comparaison. Il faut donc s’attendre à tout, mais même si le pire est vraisemblable, rappelons-nous qu’il n’est jamais sûr. Encore quelques jours ou semaines de confinement et nous y verrons plus clair ; espérons seulement que ce ne soit pas une vision plus claire des étagères vides des supermarchés…
Les mesures d’aides aux ménages et aux entreprises promettent d’être colossales à un point tel, que l’émission de monnaie, de la part des banques centrales, va provoquer une chute de la valeur de l’argent, et l’arrivée de l’hyperinflation de très sinistre mémoire pour les pays qui y ont été confrontés. La vraie misère sera partout. J’ai pu lire, ces jours-ci, je crois dans Les Echos, que 226 milliardaires avaient déjà disparu en Europe ; loin de moi l’idée de m’apitoyer sur leur sort, mais cela me rappelle le proverbe chinois : Quand les riches maigrissent, les pauvres meurent, et cette perspective m’attriste infiniment.
Autre menace qui se murmure de plus en plus : devant l’ampleur de la crise monétaire qui se profile, nous serons peut-être confrontés à une dévaluation de l’euro, certains la prédisent pour le mois prochain. Ceux qui ont la chance de disposer d’économie sur leurs comptes bancaires, seraient très inspirés d’acheter de l’or physique, seule assurance face à une dévaluation ou à l’hyperinflation. Le seul ennui, parait-il, c’est qu’il n’en reste plus de disponible, d’autant plus que les livraisons sont interrompues à tous les niveaux. Soyez très prudents dans ce contexte car ce marché, bien spécifique, regorge d’un nombre incalculable d’escrocs.
Le climat social
Déjà très tendu à cause des mesures de confinement obligatoires qu’une partie non négligeable d’habitants de notre pays n’entendent pas respecter, sachant qu’elle bénéficie, de la part des autorités, de la plus grande mansuétude, contrairement au régime appliqué au reste de la population, se pose la question cruciale : comment vont réagir, les uns et les autres, si, d’aventure, les frigos ne pouvaient plus être remplis ? Rien n’est sûr, mais nous devons donc craindre des émeutes autrement plus dévastatrices que celles que nous avons connues par le passé. Dans ce cas, comment réagiront les autorités ? Viendront-elles au secours d’une population menacée ? Les effectifs des forces de l’ordre seront-ils suffisants pour rétablir la sécurité de tous ? Notre armée sera-t-elle déployée sur le territoire national ? Rien n’est moins sûr ! Là encore, il convient de se préparer au pire.
Qui sera prêt pour le monde d’après ?
Telles que les choses sont en train de se passer, là, sous nos yeux, du moins pour ceux qui voient réellement, on peut affirmer, sans trop de risques de se tromper, qu’il y aura un avant et un après le Coronavirus. Peut-être l’histoire, telle qu’on l’écrira dans le futur, sera obligée de préciser : « C’était en l’an 2022 après Jésus-Christ, et en l’an 2 après le Covid-19 ». On me rétorquera, qu’à part la venue de notre Sauveur, les pandémies du passé, pourtant bien tragiques en nombre de victimes, n’ont pas réussi ce tour de force de s’incruster avec autant de force dans le déroulement de l’histoire. Oui, certes, mais je me dois de faire remarquer au lecteur que le monde qui a succédé à la Peste noire qui a ravagé le Moyen-Âge, n’était pas sensiblement différent de celui qui existait avant. Tout comme celui qui a succédé à la Grippe espagnole, ressemblait à celui qui l’a précédée. Pourquoi donc ? Il sera intéressant de se poser la question.
Pourquoi assisterons-nous à un changement radical de nos modes de vie ?
Tout simplement parce que les hommes qui peuplent aujourd’hui nos nations occidentales, ne ressemblent plus du tout à ceux qui vivaient en ces temps-là. D’ailleurs, selon les critères de la Tradition, ce ne sont plus des hommes déchus qui progressent vers leur perfection spirituelle, mais, au contraire, des hommes déchus qui régressent désormais vers l’état de barbarie. Au temps de la Peste noire, et même à celui de la Grippe espagnole, les peuples d’Europe bénéficiaient de l’armure de la Foi, d’une pratique religieuse vigoureuse sans aucune concession doctrinale, ce qui était suffisant pour assainir les contenus du psychisme, tant individuel que collectif. Aujourd’hui, par contre, la religiosité, totalement corrompue à la modernité, succombe au moindre caprice de celle-ci, si bien qu’une part non négligeable des catholiques pratiquants pensent sincèrement que les idéologies marxistes et socialistes sont un prolongement naturel de la Charité chrétienne et de la Doctrine sociale de l’Église. Ils n’ont rien compris ! Bien entendu, peu de prêtres seraient actuellement capables de leur dire pourquoi ils font fausse route. Il s’en est suivi que nos psychés individuelle et collective, que nous avons été de plus en plus incapables d’alimenter en images du sacré, ont été abandonnées à leur triste sort. La nature, dit-on, a horreur du vide, et ce périmètre astral, vidé de ses contenus spirituels et sacrés, n’a pas manqué d’être accaparé par toutes sortes d’images, de musiques, de pratiques culturelles et religieuses n’ayant plus aucun rapport avec notre histoire et nos cultures.
C’est ainsi que l’homme occidental d’aujourd’hui, privé du marchepied qui lui permettrait d’accéder au monde de la véritable spiritualité, ne peut plus prétendre bénéficier de la pure intellection d’origine Divine, devant se contenter de sa seule intelligence et de l’exercice de sa raison ce qui n’est pas du tout la même chose. On en a d’ailleurs pour preuve, que notre monde actuel ne nous donne plus ni de héros, ni de génies ou de saints, dont on aurait tant besoin pourtant. Je préciserais, car sous ce rapport, c’est nécessaire, qu’à part quelques exceptions rarissimes, les héros, les génies et les saints que l’on propose aujourd’hui à notre adoration, sont ni plus ni moins que de purs produits médiatiques dont l’objet vise à faire croire à nos peuples que l’essentiel a été préservé ; mais c’est totalement faux, ceux que l’on nous présente, ne se risqueraient pas, par exemple, à combattre au corps à corps dans les tranchées de la Grande guerre – on préfère envoyer des drones -, ne se lanceraient pas sans appui ni argent à construire des dizaines de monastères ou d’hôpitaux pour les pauvres, ni à réaliser des chefs d’œuvres sublimes du niveau de la Piéta de Michel-Ange.
Pour en arriver là, il faut bien plus que de la simple Foi, mais une armure accordée par une fréquentation assidue, même modeste, du plan Divin, qui brille, de nos jours par son absence. C’est pourquoi nous en sommes là, et que ce monde moderne, dans lequel nous vivons, et qui s’est caractérisé par des excès de toutes sortes nous éloignant toujours davantage de ce qui était prévu pour nos destinées humaines, ne saurait s’avérer capable de restaurer une situation globale dont il est responsable. Rappelons-nous d’ailleurs cette parole peu comprise des Écritures : « Malheur au monde à cause des scandales ! Car il est nécessaire qu’il arrive des scandales ; mais malheur à l’homme par qui le scandale arrive !» (Matthieu 18 :7) ; nous sommes, avec ce cycle qui s’achève, dans le temps de l’accomplissement ; individuellement nous n’y pouvons rien, mieux vaut abandonner ce monde à son sort et construire, dès maintenant, le monde d’après, avec ceux et celles qui sont qualifiés pour cela.
Analyse lucide et éclairée de Carl Gustav Jung
Afin de bien fixer les idées sur l’inéluctabilité de notre destin, nous allons encore recourir à l’immense profondeur de vue du célèbre médecin psychiatre, qui fut bien plus, d’ailleurs, que ne le laisse entendre cette étiquette. Dans son Essai d’exploration de l’inconscient Jung est parfaitement clair :
Il n’y a plus de dieux que nous pourrions invoquer pour nous aider. Les grandes religions du monde souffrent d’une anémie croissante, parce que les divinités secourables ont déserté les bois, les rivières, les montagnes, les animaux, et que les hommes-dieux se sont terrés dans notre inconscient. Nous nous berçons de l’illusion qu’ils y mènent une vie ignominieuse parmi les reliques de notre passé. Notre vie présente est dominée par la déesse Raison, qui est notre illusion la plus grande et la plus tragique.
C’est grâce à elle que nous avons « vaincu la nature ».
Mais ceci n’est qu’un slogan, car cette prétendue victoire remportée sur la nature fait que nous sommes accablés par le phénomène naturel de la surpopulation, et ajoute à nos malheurs l’incapacité psychologique où nous sommes de prendre les accords politiques qui s’imposeraient. Nous considérons encore qu’il est naturel que les hommes se querellent, et luttent pour affirmer chacun sa supériorité sur l’autre. Comment peut-on parler de « victoire sur la nature » ?
Comme tout changement doit commencer quelque part, c’est l’individu isolé qui en aura l’intuition et le réalisera. Ce changement ne peut germer que dans l’individu, et ce peut être dans n’importe lequel d’entre nous. Personne ne peut se permettre d’attendre, en regardant autour de soi, que quelqu’un d’autre vienne accomplir ce qu’il ne veut pas faire. Malheureusement, il semble qu’aucun d’entre nous ne sache quoi faire ; peut-être vaudrait-il la peine que chacun s’interroge, en se demandant si son inconscient ne saurait pas quelque chose qui pourrait nous être utile à tous. La conscience semble assurément incapable de nous venir en aide. L’homme, aujourd’hui, se rend douloureusement compte que ni ses grandes religions, ni ses diverses philosophies, ne paraissent lui fournir ces idées fortes et dynamiques qui lui rendraient l’assurance nécessaire pour faire face à l’état actuel du monde.
Ce livre fut terminé dix jours avant la mort de Jung en juin 1961. Le lecteur comprendra que son interprétation de la nature des problèmes du monde de son époque, s’est vue confirmée dans les années qui ont suivi, et jusqu’à nos jours, où leur extrême amplification ne peut, en aucune manière, être stoppée ou réversible. Le temps de l’accomplissement est donc bien proche, et il serait parfaitement inutile d’essayer de s’y opposer. Mieux vaut se préparer pour le monde d’après en partant des observations de C.G. Jung, et des éléments de connaissance doctrinale que nos grandes religions se sont obstinées à écarter de leurs enseignements. Ceux qui sont qualifiés les trouveront dans ce blog.
L’effondrement global nous sera salutaire
C’est effectivement une loi bien connue de la nature. L’approfondissement de celle-ci aide considérablement à comprendre la marche du monde ; certains, par contre, par leur devise « Ordo Ab Chao » s’en prévalent frauduleusement pour imposer aux nations modernes un gouvernement mondial dont le contenu se trouve bien éloigné des besoins de nos peuples ; mais d’une autre manière, ils précipitent les choses qui doivent s’accomplir ; nous assistons, un peu impuissants, à la dernière lutte entre les forces que nous appelons, à notre niveau, celles de la mort, contre celles de la vie. On peut d’ores et déjà affirmer que les deux seront victorieuses, en ce sens que le chaos qui affecte tous les plans de nos sociétés, mènera, puisqu’il le faut, à leur effondrement et leur pourrissement interne. Sur ce fumier social, jaillissent déjà les fleurs nouvelles ; elles seront de plus en plus nombreuses, car telle est la loi ; elles seront aussi connaissance, puissance, beauté et justice, et leur accession à tous les pouvoirs s’imposera d’elle-même, comme une loi aussi incontestable que celle qui fait lever le soleil chaque matin, et à laquelle personne ne songerait à s’opposer.
Similitude entre le destin de l’homme et celui de la société
Dans son développement global, l’homme est soumis à la même loi que celle décrite au paragraphe précédent. Pour être effectif, le chemin qu’il devra parcourir passe nécessairement par un effondrement moral et psychologique massif. Lorsque cela se produit, il ne se présente que deux alternatives : soit l’individu s’effondre et ne se relève plus, c’est le cas le plus fréquent ; soit il arrive à se relever et, à ce moment-là, s’il résiste à la tentation de revenir à ses anciennes illusions, il prendra alors la résolution de repartir de zéro, de s’appuyer sur des bases nouvelles qui sont celles qui le mèneront vers la vraie vie. Faut-il encore que sa motivation soit suffisante pour accepter d’accomplir le travail colossal qui l’attend, lui permettant de franchir les différentes étapes d’une existence toute nouvelle. Généralement, par les effets de la Grâce, la Providence veille et facilite les choses. Il en est de même pour la société toute entière ; elle se dirige, elle aussi, vers un effondrement massif ; peu nombreux sont ceux qui réchapperont aux terribles tribulations qu’ils auront à subir ; ceux qui y arriveront formeront le groupe qui aura abandonné les illusions anciennes pour ne s’attacher qu’au réel, et la seule réalité que nous pouvons tenir pour certaine, se résume dans l’existence de Dieu vers lequel nous devons progresser. Ceux-là, sans révolution et sans armes, formeront l’embryon de la société nouvelle qui se bâtit en ce moment-même.
Pierre Audabram