Par Moon of Alabama – Le 3 décembre 2024
Je n’ai pas encore compris le « coup d’État » d’aujourd’hui en Corée du Sud. Hier soir, le président élu a déclaré la loi martiale. Les législateurs sont actuellement interdits d’accès au Parlement. Quelqu’un qui connaît bien la Corée du Sud pourrait-il m’expliquer ce qu’il en est ?
Le président de la Corée du Sud est le chef de l’État et le chef du gouvernement. Il est élu directement pour un mandat de cinq ans :
Le président actuel, Yoon Suk Yeol, ancien procureur général et membre du parti conservateur People Power, a pris ses fonctions le 10 mai 2022, après avoir battu le candidat du Parti démocrate Lee Jae-myung avec une faible majorité de 48,5 % lors de l’élection présidentielle sud-coréenne de 2022.
Le président choisit un premier ministre pour gérer les affaires courantes du gouvernement.
L’Assemblée nationale est le corps législatif monocaméral de la Corée du Sud. Depuis 2020, la majorité au parlement est détenue par le Parti démocrate. Lors des élections législatives de cette année, il a obtenu quelque 175 des 300 sièges, tandis que le Parti People Power du président n’en détient que 108.
Pendant la cohabitation, lorsqu’un gouvernement exécutif est dirigé par un parti différent de celui du corps législatif, il y a toujours des conflits sur les priorités. Ceux-ci se manifestent souvent au cours de la procédure budgétaire.
C’est exactement ce qui s’est passé en Corée du Sud :
Le Parti People Power (PPP), au pouvoir, a insisté sur le maintien de la proposition du gouvernement, tandis que le principal parti d’opposition, le Parti démocrate (DP), a demandé une révision afin d’augmenter l’émission de bons en monnaie locale.
Les bons en monnaie locale semblent être une forme de crédit destinée à aider les petits commerçants et les travailleurs indépendants :
Le projet de loi actuel proposé par le DP majoritaire établit le budget de l’année prochaine à 677 400 milliards de wons (485,3 milliards de dollars), soit une baisse de 4 100 milliards de wons par rapport à la proposition initiale du gouvernement, suite à des réductions du fonds de réserve du gouvernement et des dépenses d’activités spéciales du secrétariat du bureau présidentiel et du bureau de la sécurité nationale, ainsi que de celles du ministère public, de l’agence d’audit de l’État et de la police.
« Sans excuses de la part du Parti démocrate et sans le retrait du projet de loi budgétaire adopté unilatéralement, nous n’accepterons aucune forme de discussion », a déclaré à la presse le représentant Choo Kyung-ho, chef de file du PPP.
« Si le Parti démocrate veut parler de l’augmentation du budget (pour émettre plus de bons en monnaie locale), il aurait dû négocier avec nous avant de l’adopter unilatéralement », a-t-il déclaré.
Le Parti démocrate est majoritaire à l’Assemblée nationale. Il a réduit le budget proposé par le gouvernement de 0,6 % parce que le parti au pouvoir a rejeté une augmentation de 0,3 % qui aurait aidé les électeurs du parti majoritaire.
Pour moi, il s’agit là d’une querelle mineure.
Mais si tel est le problème, pourquoi le président, dont la cote de popularité est inférieure à 20 %, a-t-il recours à des pouvoirs extraordinaires pour la résoudre ?
Le président sud-coréen déclare la loi martiale d’urgence – CNN, 3 Dec. 2024
Le président Yoon Suk Yeol a déclaré la loi martiale lors d’une allocution télévisée non annoncée mardi en fin de soirée, accusant le principal parti d’opposition du pays de sympathiser avec la Corée du Nord et de mener des activités anti-étatiques.
Yoon n’a pas précisé quelles mesures spécifiques seraient prises. Il a cité une motion du Parti Démocrate de l’opposition, qui dispose de la majorité au parlement, visant à mettre en accusation les principaux procureurs et à rejeter une proposition de budget du gouvernement.
Yoon a qualifié les actions de l’opposition de « comportement clairement anti-étatique visant à inciter à la rébellion ». Il a également affirmé que ces actes ont « paralysé les affaires de l’État et transformé l’Assemblée nationale en un repaire de criminels ».
Il a décrit la loi martiale comme une mesure nécessaire pour éradiquer ces « forces anti-étatiques pro-Nord éhontées ». Il a justifié cette décision comme étant essentielle pour protéger les libertés et la sécurité du peuple, assurer la durabilité du pays et transmettre une nation stable aux générations futures.
Le président du parlement s’est rendu au parlement et prévoit de convoquer une session, selon la chaîne de télévision locale YTN TV. L’agence de presse Yonhap a cependant rapporté que l’entrée du parlement était bloquée et que les législateurs ne pouvaient pas entrer.
La description du Parti démocrate par le président, qui le qualifie de « forces pro-Nord et anti-étatiques », est tout simplement insensée.
Une majorité à l’Assemblée nationale pourrait lever la loi martiale, mais elle n’est pas en mesure de se réunir actuellement.
L’assemblée peut également mettre le président en accusation, mais elle a besoin de deux tiers des voix pour le faire. Le PD pourrait probablement obtenir ces deux tiers, étant donné qu’au moins une partie du Parti People Power a rejeté la déclaration de loi martiale du président.
La situation actuelle est confuse. Quels sont les objectifs du président et comment pense-t-il pouvoir les atteindre ?
Les États-Unis sont très impliqués, voire contrôlent la politique intérieure sud-coréenne. Le président Yoon est leur homme. On peut se demander dans quelle mesure ils ont influencé, voire causé, le conflit actuel.
Quel est le rôle et la position de l’administration Biden à cet égard ?
Moon of Alabama
Note du Saker Francophone
Depuis il semble que les députés aient forcé le passage pour voter la fin de la loi martiale.
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone