Marché boursier US : l’aveu du 6 mai 2010


Par Stratediplo – Le 31 octobre 2018 – Source Stratediplo

Non, la bourse, temple du capitalisme, n’est pas un lieu de libre établissement des prix à la rencontre de l’offre et de la demande. C’est un lieu de manipulation, de maximisation de la manipulation et de couverture de la manipulation.

Dans un fameux article du 22 décembre 2014, nous avons expliqué comment les États-Unis ont mis fin à la libre cotation des métaux précieux, trois ans après avoir fait fixer – par la manipulation monstre du 6 septembre 2011 – un cours plafond historique pour l’or. Et dans un article du 14 février 2016 nous avons également expliqué comment ils procéderont à un ultime relèvement artificiel du cours international du dollar avant de mettre fin à la libre cotation des monnaies.

Puisqu’on expose dans le Onzième coup de minuit de l’avant-guerre – parution imminente aux éditions le Retour aux Sources – le concept du Grand Reset, ou remise à zéro générale des compteurs, il n’est pas inopportun de rappeler, aux crédules de la liberté des marchés, l’affaire de la manipulation officielle des bourses étasuniennes le 6 mai 2010.

L’effondrement boursier avait commencé au New York Stock Exchange (Wall Street). Peu importent les enchaînements d’événements ou de communiqués qui l’ont déclenché, comme d’habitude insignifiants par rapport aux conséquences qu’ils allaient entraîner, comme une goutte est insignifiante tant qu’elle ne fait pas déborder le vase dont on sait pourtant qu’il débordera effectivement à cause d’une goutte, ou comme pour les anglophones la paille fatale qui brise le dos du chameau.

Concrètement, un courtier a peut-être mis en vente une très grosse quantité d’une valeur boursière, provoquant évidemment une chute brutale de son cours mais aussi une chute de la bourse, par contagion plus psychologique qu’arithmétique dans un marché où de toute façon toutes les valeurs sont irrationnellement hyper-surévaluées. Rétrospectivement toutes les autorités économiques ont avancé des explications, d’apparence logique.

On a évidemment interdit de soupçonner la pratique toujours autorisée de la vente à terme et à découvert, à savoir mettre sur le marché des promesses de vente de grosses quantités d’une valeur que l’on n’a pas, afin de faire baisser artificiellement ses cours pour l’acheter à un prix encore inférieur auquel on a promis de la vendre, pratique à la base de la fortune d’un George Soros qui jouit toujours en totale liberté de sa destruction calculée – et sur ordre – de la livre anglaise et du Système Monétaire Européen.

On a surtout initialement incriminé l’effet multiplicateur du « trading à haute fréquence » qu’autorisent les programmes automatisés, sans expliquer pourquoi ce jour-là et pas tous les jours, ni d’ailleurs les interdire – ils ont été techniquement innocentés depuis lors. À l’opposé de l’explication robotique, on a incriminé l’erreur humaine de quelqu’un qui aurait tapé sur son clavier « milliard » au lieu de « million », sans expliquer l’absence de sécurités automatisées sur de tels marchés et de tels montants alors que le moindre chèque sans provision ou la moindre tentative de retrait ou de paiement supérieure au plafond quotidien autorisé est systématiquement rejeté.

On a désigné à la presse divers produits dérivés financiers ou actions d’entreprises, et divers agents de change ou banques, sans qu’aucune responsabilité ait pu être solidement démontrée. On a envoyé les Grecs se faire voir chez les Turcs – en Grèce occupée. Et, comme d’habitude, on a aussi livré à la presse et à la justice un bouc émissaire, boursicoteur amateur connecté depuis le garage de ses parents sur un autre continent. Bref, peu importe ce qui a déclenché le mouvement, en tout cas on n’a à ce jour trouvé aucune anomalie de fonctionnement du marché.

Quoiqu’il en soit, en quatre minutes trente – de 14h41 à 14h45’28 » – la capitalisation boursière états-unienne a perdu un dixième de sa valeur, et cela aurait continué sans une grosse manipulation, reconnue et assumée, de la part des autorités boursières. Concrètement, cela signifie qu’en moyenne l’ensemble des entreprises étasuniennes cotées en bourse ont perdu un dixième de leur valeur, compte tenu des règles comptables étasuniennes de valorisation ; c’est loin d’être négligeable. C’était peut-être le début de l’inéluctable effondrement du capitalisme étasunien, en tout cas une chute de 10% de l’indice Dow Jones en dix minutes était un événement sans précédent historique, et il faut préciser qu’il ne s’agissait pas d’échanges marginaux sur un marché endormi à minuit d’une veille de congés, mais de volumes particulièrement importants, allant tous dans la même direction à la baisse. Ce début d’effondrement est passé à l’histoire sous le nom de « flash crash ».

Toutefois, ce qui est troublant et révélateur n’est pas la fragilité du système, mais sa flexibilité à la manipulation autoritaire. En effet les autorités boursières sont intervenues pour arbitrairement corriger la chute de certaines valeurs, pourtant arithmétiquement établies par la confrontation automatisée de l’offre et de la demande à un instant donné. Elles ont aussi annulé certains mouvements sur les marchés dont elles étaient chargées d’assurer le libre fonctionnement.

Parallèlement au New York Stock Exchange, le NASDAQ a aussi été manipulé sans complexe par ses autorités de régulation. Finalement tout s’est passé comme si on avait décidé, et eu la capacité, d’annuler tout ce qui s’était passé sur ces marchés entre 14h30 et 15h00. Sur cinq minutes on a artificiellement relevé les cours jusqu’à la récupération des mille milliards de dollars perdus dans la demi-heure précédente. Ultérieurement le monde politique économique a largement approuvé ces manipulations, ainsi devenues officielles.

Il est depuis lors clair aux yeux du monde économique – le quidam de la rue l’ignore – que la bourse étasunienne n’est pas un libre marché, et que les autorités boursières y ont la capacité matérielle et l’autorisation politique d’y brider les mouvements, voire carrément d’interrompre la libre cotation des valeurs quand ce n’est pas, comme ce fut fait ce jour-là, de leur fixer arbitrairement des cours artificiel et de les imposer aux logiciels d’échange.

Ce qui n’est pas clair est le degré de liberté des autres bourses du monde capitaliste, et l’allégeance de leurs autorités de régulation. On peut deviner que lorsque le cours des obligations étasuniennes libellées en dollar s’effondrera à Shanghaï, les autorités boursières locales ne lui fixeront pas arbitrairement un cours artificiel, mais on peut aussi deviner que si ça se passe à New York il y aura encore une intervention « corrective », mais on ignore ce qu’il en sera si c’est à Francfort, Londres ou Milan que le phénomène débute.

Comme le 15 août 1971 et le 6 septembre 2011, le 6 mai 2010 est une date historique.

Stratediplo

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