Ukraine. La falsification des informations n’aidera toujours pas à gagner


Par Moon of Alabama − Le 6 avril 2024

Je trouve amusant de constater à quel point les médias occidentaux n’ont pas tiré de leçons de leurs propres reportages sur la guerre en Ukraine.

Il y a deux ans, un « fantôme de Kiev » mystique aurait abattu des avions russes à droite et à gauche. Ce fantôme s’est avéré être un faux personnage. L’armée de l’air ukrainienne n’avait jamais connu de tels succès.

Deux ans plus tard, c’est toujours la même histoire. Le gouvernement ukrainien affirme quelque chose et les médias occidentaux le publient comme si cela s’était réellement produit.

Lorsque l’affirmation est démentie, souvent plus tôt que prévu, elle disparaît tout simplement des gros titres.

Hier, nous avons eu droit à cette vague médiatique :

La Russie a confirmé les attaques mais a nié avoir subi des dommages importants :

Rybar Force @rybar_force – 9:58 UTC – 5 avr. 2024

Dans la nuit, les FAU ont lancé des drones sur le territoire russe.

🔻La cible principale était l’aérodrome de Morozovsk dans la région de Rostov, où les forces ukrainiennes ont envoyé 44 drones. Le type exact reste inconnu et sera déterminé lors de l’analyse des débris. Toutefois, il est fort probable qu’il s’agisse des mêmes drones que ceux utilisés par l’ennemi ces dernières semaines.

Parmi ces drones, 26 ont été interceptés par des systèmes de missiles de défense aérienne Pantsir-S1, et 18 par des escadrons de fusiliers. D’après les vidéos qui circulent en ligne, il est évident que les drones volaient à une altitude extrêmement basse, pour renforcer leur furtivité.

Les infrastructures n’ont pas subi de dommages importants. Les débris ont touché quelques bâtiments. En outre, la sous-station a été endommagée, ce qui a entraîné une coupure de courant temporaire.

❗️ Grâce à la réaction rapide des équipes de défense aérienne, toute répercussion grave des attaques a été évitée – les affirmations de sources ukrainiennes concernant la destruction présumée de six avions sont des faux provenant de propagandistes ennemis.

L’affirmation de la Russie disant qu’il n’y a pas eu de dommages significatifs a été confirmée par Institute for the Study of War, un média pourtant anti-russe :

L’ISW n’a encore trouvé aucune preuve visuelle que les forces ukrainiennes ont endommagé ou détruit des avions ou des infrastructures dans l’une des quatre bases aériennes russes ciblées par des drones dans la nuit du 4 au 5 avril.

De tels cycles d’information sur de fausses affirmations de prétendus succès ukrainiens expliquent en grande partie pourquoi une partie du public occidental continue de croire que l’Ukraine peut gagner la guerre.

Or, ce n’est pas le cas. La situation exige un changement d’attitude :

Au lieu d’une nouvelle approche, le vieux schéma se poursuit : L’OTAN réfléchit à la manière d’aider l’Ukraine sans provoquer une guerre ouverte contre la Russie et ne parvient pas, en fin de compte, à fournir le type d’aide décisive nécessaire pour inverser le cours de la guerre.

La répétition d’un langage binaire moralisateur est un autre schéma bien établi. L’Occident « ne peut pas laisser la Russie gagner« . L' »ordre fondé sur des règles » pourrait s’effondrer. Il y a aussi la nouvelle théorie des dominos : si l’Ukraine tombe, les hordes russes déferleront plus à l’ouest. La personnalisation du conflit en un seul homme diabolique, Vladimir Poutine, se poursuit avec la mort d’Alexei Navalny. Il s’agit d’une lutte manichéenne entre le bien et le mal, la démocratie et l’autoritarisme, la civilisation et les ténèbres. Il ne peut y avoir de paix tant que le tyran n’est pas tombé. L’alliance occidentale ne doit pas faiblir dans son engagement envers l’Ukraine.

Le manque de réalisme du discours occidental est évident. Il existe en effet un risque sérieux qu’au lieu que l’Occident donne une leçon à la Russie et remette Poutine à sa place, c’est l’inverse qui se produise. La Russie est-elle en train d’enseigner à l’Occident ce que signifie l’utilisation de la puissance dure et la conduite d’un conflit inter-étatique dans les conditions du XXIe siècle ? La Russie fait la publicité de sa version de la souveraineté des grandes puissances, selon laquelle un État uni, résistant et inébranlable peut vaincre la souveraineté commune de l’UE et de l’OTAN.

Nous avons tous entendu l’objection selon laquelle on ne peut tout simplement pas faire confiance à Poutine et qu’il ne veut rien de moins que l’élimination complète de l’Ukraine en tant qu’État indépendant. Pourtant, la poursuite aveugle du plan A dysfonctionnel de l’Occident ne menace-t-elle pas également la destruction physique totale de l’Ukraine ? C’est pour cette raison que le pape François a appelé les dirigeants occidentaux à ne pas avoir « honte de négocier avant que les choses n’empirent« .

Une nouvelle approche de la guerre en Ukraine n’émergera pas de proclamations rhétoriques et moralistes. Les mots ne suffiront pas à empêcher une victoire russe. Ce qu’il faut, c’est une comptabilité claire de ce qui peut être réalisé de manière réaliste avec les moyens disponibles, ainsi que le coût, les risques et les avantages des différents scénarios. Essayer ce qui a déjà échoué et s’attendre à de nouveaux résultats n’est pas, après tout, une recette pour le succès.

Je ne vois aucune volonté de la part des pays occidentaux d’intervenir réellement dans la guerre et de subir la colère des Russes à laquelle toute force d’intervention serait soumise.

Mais la génération actuelle de « dirigeants » occidentaux est trop attachée à la cause de l’Ukraine qu’elle défend depuis plus de deux ans et qui a échoué. Pour l’instant, il est probable qu’ils essaient de s’en sortir tant bien que mal.

Nous devrons attendre un « changement de régime » pour revenir à la raison et au réalisme.

Moon of Alabama

Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.

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