Le 13 avril 2021 – Source Paul Craig Roberts
C’est une des ironies de l’Histoire que le Mémorial de Lincoln soit l’espace sacré du Mouvement des Droits civiques et le lieu où Martin Luther King délivra son discours : » I have a dream… ». Lincoln ne pensait pas que les Noirs fussent les égaux des Blancs. Son plan de renvoyer en Afrique les Noirs américains, et s’il n’avait pas été assassiné, le retour des Noirs en Afrique aurait probablement été sa politique d’après-guerre.
Comme Thomas Di Lorenzo et plusieurs historiens indépendants (à la différence des historiens de Cour) l’ont établi, Lincoln n’a pas fait envahir la Confédération dans le but de libérer les esclaves. La Proclamation de l’Émancipation n’eut lieu qu’en 1863, alors que l’opposition à la guerre grandissait dans le Nord en dépit des mesures, dignes d’un État policier, prises par Lincoln pour réduire au silence les opposants et les journaux. La Proclamation de l’Émancipation était une mesure de guerre prise par Lincoln de par ses pouvoirs de chef de guerre. Elle visait à enrôler les esclaves émancipés pour combler les pertes de l’armée de l’Union. On espérait aussi que cette proclamation déclencherait des révoltes d’esclaves dans le Sud et inciterait les soldats du front à le quitter pour protéger leurs femmes et leurs enfants. Le but était donc de hâter la défaite du Sud avant que l’opposition politique à Lincoln ne se renforce dans le Nord.
Le Mémorial Lincoln fut bâti non parce que Lincoln « libéra les esclaves » mais parce qu’il sauva l’Empire. Lincoln n’eût-il pas été assassiné, en tant que Sauveur de l’Empire, il serait devenu empereur à vie.
Comme l’écrit le professeur Thomas Di Lorenzo : »Lincoln passa toute sa carrière politique à mettre les pouvoirs de l’État au service de l’élite fortunée des grandes entreprises (les 1% de l’époque), d’abord dans l’Illinois, et ensuite dans le Nord en général, grâce à des tarifs protectionnistes, des sociétés parasites de construction de routes, de canaux et de chemins de fer, et une banque nationale contrôlée par des politiciens comme lui pour financer le tout. »
Lincoln était l’homme de l’Empire. Dès que le Sud fut conquis, ravagé et pillé, son équipe de généraux criminels de guerre, comme Sherman et Sheridan, se mit à exterminer les Indiens des Plaines, dans l’un des pires génocides de l’histoire. Même aujourd’hui, les sionistes israéliens voient l’extermination par Washington des Indiens des Plaines comme un modèle pour le vol de la Palestine par Israël.
La guerre d’agression nordiste avait pour enjeu les tarifs douaniers et l’impérialisme économique du Nord. Le Nord était protectionniste. Le Sud était libre-échangiste. Le Nord voulait financer son développement économique en forçant le Sud à payer plus cher les produits manufacturés. Le Nord édicta le tarif Morrill qui faisait plus que doubler les droits de douane en les portant à 32,6% et envisageait une hausse future jusqu’à 47%. Ce tarif détournait les profits que le Sud retirait de ses exportations agricoles vers les coffres des industriels et des manufacturiers du Nord. Le tarif douanier avait pour but de rediriger les dépenses du Sud en biens manufacturés britanniques vers ceux, plus chers, produits dans le Nord.
C’est pourquoi le Sud quitta l’Union, un droit d’autodétermination inscrit dans la constitution.
Le but de guerre de Lincoln était de sauver l’Empire, non pas d’abolir l’esclavage. Dans son premier discours d’investiture Lincoln « fit une défense en béton de l’esclavage ». Son but était de maintenir le Sud dans l’Empire en dépit du tarif Morrill. Quant à l’esclavage, Lincoln déclara : « Je n’ai pas l’intention d’interférer directement ou indirectement avec l’institution de l’esclavage dans les États où elle existe. Je crois que je n’ai pas le droit de le faire et je n’ai pas non plus d’inclination à le faire. » Cette position, comme Lincoln le rappela à son auditoire, faisait partie du programme de1860 du Parti Républicain. Lincoln offrit également son soutien pour renforcer encore la loi sur les esclaves fugitifs qui exigeait du Nord de poursuivre et de reconduire ces derniers, et il accorda son soutien à l’amendement Corwin qui avait déjà été voté par le Nord à la Chambre et au Sénat, et qui interdisait toute interférence fédérale avec l’institution de l’esclavage. Pour Lincoln et ses alliés, l’Empire était beaucoup plus important que les esclaves.
Di Lorenzo explique ainsi le marché que Lincoln proposa au Sud. Cependant, de même que l’empire était pour le Nord beaucoup plus important que l’esclavage, de même pour le Sud éviter des taxes élevées sur les produits manufacturés, en réalité une taxe sur les profits agricoles du Sud, était beaucoup plus important que les garanties offertes par le Nord en faveur de l’esclavage.
Si vous voulez vous libérer de l’endoctrinement à propos de la guerre d’agression du Nord, lisez les livres de Di Lorenzo, « Le vrai Lincoln », et « Lincoln sans masque ».
La soi-disant guerre civile n’en fut pas une. Dans une guerre civile, les deux parties se battent pour le contrôle du gouvernement. Le Sud ne se battait pas pour contrôler le gouvernement fédéral. Le Sud fit sécession et le Nord refusa de laisser le Sud partir.
La raison pour laquelle j’écris tout cela, c’est pour illustrer combien l’histoire est falsifiée au service d’agendas. Je suis entièrement favorable aux droits civiques et j’ai participé à ce mouvement lorsque j’étais étudiant. Ce qui me met mal à l’aise c’est la transformation de Lincoln, un tyran qui était au service des 1% et qui était prêt à tout détruire pour le salut de l’Empire, en un héros des droits civiques. Qui sera le prochain ? Hitler ? Staline ? Mao ? George W. Bush ? Obama ? John Yoo1 ? Si Lincoln peut être un héros des droits civiques, pourquoi pas les tortionnaires ? Ceux qui tuent des femmes et des enfants dans les guerres de Washington peuvent être transformés en défenseurs des droits de femmes et avocats de l’enfance. Et ils le seront probablement.
Tel est le monde pervers et tordu dans lequel nous vivons. Vladimir Poutine, président de la Russie, est confronté au renversement par Washington du gouvernement légal de l’Ukraine2, un allié de la Russie et qui fit partie de la Russie pendant des siècles, alors que c’est Poutine qui est faussement accusé d’envahir l’Ukraine. La Chine est accusée par Washington de violer les droits de l’homme, alors que Washington a tué plus de civils au XXIème siècle que tous les autres pays mis ensemble.
Partout en Occident des mensonges monstrueux demeurent incontestés. Les mensonges sont inscrits dans les livres d’histoire, les programmes de cours, les déclarations, mouvements et causes politiques, et dans la mémoire historique.
L’Amérique aura du mal à survivre aux mensonges dans lesquels elle vit.
Paul Craig Roberts
Traduit par J.A., relu par Hervé pour le Saker Francophone
Notes
- John Yoo est un juriste américain d’origine coréenne. Il faisait partie du « Bureau du conseil juridique » (Office of Legal Counsel) dépendant du Ministère de la Justice sous la Présidence de George W. Bush. Il se fit connaître à l’époque par son soutien à l’emploi de la torture ( euphémisée en « techniques d’interrogatoire poussé », « enhanced interrogation techniques ») dans le cadre de « la guerre contre la terreur ». NdT ↩
- L’article de Paul Roberts date de 2015, peu de temps après le coup d’État de Maïdan ↩
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