Le livre d’histoire américaine le plus important de votre vie


Par Richard Oxman – Le 23 mars 2017 – Source Countercurrents

Dr. Robin D.G. Kelley à propos de l’ouvrage de Roxanne Dunbar-Ortiz : “C’est peut-être le plus important livre d’histoire que vous lirez dans votre vie.”

Selon Harper’s Magazine (avril 2017), il y a au moins vingt-huit universités américaines qui ont des programmes d’études sur l’esclavage aux États-Unis. Mais, en revanche et cela me paraît très instructif, aucun établissement d’enseignement supérieur aux États-Unis ne s’intéresse, sous quelque forme que ce soit, au fait que les peuples autochtones – hommes, femmes et enfants de tous âges – aient été éliminés (avec un objectif génocidaire) pour leur voler les terres sur lesquelles les institutions prestigieuses qui existent maintenant ont été construites.

Il est facile de créer un programme, mais il est pratiquement interdit de mentionner l’éventualité de rendre des terres sur lesquelles les Amérindiens ont un droit légal. Il y a quelques campus où l’on discute formellement des réparations à consentir aux Afro-Américains, mais vous aurez du mal à trouver quelqu’un – même dans les cafés des campus – qui plaide pour la restitution aux Amérindiens de ce qui leur a été volé par les ancêtres de ces présidents d’université grassement rémunérés.

Les Américains de souche sont tout en bas de l’échelle sociale. C’est-à-dire qu’ils sont les moins susceptibles d’être pris en considération dans l’ordre des priorités quand il s’agit de nos problèmes collectifs. En fait, des entreprises comme Peabody Energy (et beaucoup d’autres) – si elles pensaient pouvoir s’en tirer sans dommage – distribueraient des vêtements infestés de germes de maladies mortelles dans les réserves (dans l’intention de parachever la mission génocidaire de nos pères fondateurs). Beaucoup d’intérêts financiers puissants sont fort contrariés par les protestations des Indiens contre la destruction environnementale de leurs terres sacrées.

Et le grand public, y compris les lecteurs de médias alternatifs, regarde ailleurs quand les entreprises se comportent de manière criminelle. Regarder ailleurs, comporte souvent aussi la publication d’articles pro-indiens et la tenue de conférences sur des questions liées aux Indiens. En effet, se joindre au concert des récriminations politiquement correctes (sans aucune intention de faire quoi que ce soit de plus à propos de quoi que ce soit) équivaut à se rendre à un carrefour abandonné pour crier dans le désert qu’il est injuste de ne pas accorder de pardon à Leonard Peltier. Est-ce que cela ne s’appelle pas regarder ailleurs quand c’est là tout ce qu’on fait pour libérer LP ? Marcher en cercles avec des pancartes et participer à des veillées aux chandelles n’a pas plus d’impact, si ce n’est de procurer aux participants un sentiment d’auto-satisfaction et / ou le plaisir de la socialisation. C’est ce que j’appelle du militantisme pour le moins équivoque. Et en tout cas… sans consistance.

Mais au niveau global, celles et ceux que je critique ici sont de peu d’importance. Au plan macroscopique, nous devons tout d’abord reconnaître que les États-Unis sont pourris jusqu’à l’os quand il s’agit des Indiens (et de désigner des « indésirables »). Et cela n’est pas le cas lorsqu’un établissement d’enseignement met en place un programme (similaire aux programmes pour les Afro-Américains cités ci-dessus), mais qu’il ne modifie en rien ses politiques d’aide financière ou d’admission en signe de réparation. Une seule des vingt-huit universités mentionnées ci-dessus l’a fait.

En réponse aux Haudenosaunee (les six Nations iroquoises) qui hésitaient entre soutenir les Anglais ou les séparatistes au milieu des années 1770, le Général George Washington a envoyé des instructions écrites au Général de division John Sullivan pour qu’il prenne des mesures contre elles. Voilà ses ordres :

« … détruire tous les campements de la région […] que le pays ne soit pas simplement occupé mais détruit […] vous refuserez absolument d’écouter toute les demandes de paix avant d’avoir mené à bien la destruction totale de leurs campements […]. Notre sécurité future réside dans leur incapacité à nous nuire […] et dans la terreur que leur inspirera la sévérité du châtiment qu’ils recevront. »

Cela vous rappelle quelque chose ?

Les ordres de Washington sont clairement l’écho de ce que les États-Unis font dans le monde entier depuis leur création. Et ce que les Écossais-Irlandais – employés par Washington pendant la Révolution – avaient fait à la demande de ses précurseurs contre d’autres âmes de seconde classe en Europe… avant de migrer vers le soi-disant Nouveau Monde (qui n’était pas nouveau du tout, sauf pour les Blancs voleurs et génocidaires).

Rien de tout cela n’est réellement enseigné dans nos écoles. Mais je soutiens que si un professeur lisait seulement les 77 premières pages de l’Histoire des peuples indigènes des États-Unis de Roxanne Dunbar-Ortiz, cela l’inciterait à proposer un programme pour l’enseigner. Cela permettrait de voir que pratiquement tous les problèmes actuels – de la violence domestique due aux armes jusqu’aux abominations que nous perpétrons à l’étranger (et plus) – ont leurs racines solidement ancrées dans le traitement des Amérindiens par les Européens (de leurs premiers contacts à nos jours).

Mais, bien sûr, cela pourrait détourner un enseignant ou un militant de participer aux veillées aux chandelles… Ou de marcher en cercle.

Richard Martin Oxman est enseignant et activiste depuis plus de 50 ans. Il serait heureux de donner des conférences gratuites dans tous les établissements éducatifs qui le souhaitent. On peut le joindre à invisibleparadecall@gmail.com.

Traduction : Aliocha Kazoff

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